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La commission prend note des observations de la Fédération générale des syndicats de Bahreïn (GFBTU) et de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues respectivement les 30 août et 1er septembre 2018.
Article 1, paragraphe 1 a), de la convention. Discrimination fondée sur des motifs religieux. Précédemment, la commission avait demandé au gouvernement de faire part de ses commentaires sur les allégations formulées par la CSI, l’Internationale de l’éducation (IE) et l’Association des enseignants de Bahreïn (BTA), dans lesquelles il était indiqué que la discrimination sur une base religieuse est la forme majeure de discrimination dans le pays et qu’elle existe à une large échelle tant dans le secteur public que dans le secteur privé. La commission note que, dans ses observations, la GFBTU déclare: i) que la discrimination sur une base religieuse est la forme majeure de discrimination dans le pays; ii) qu’elle existe à une large échelle tant dans le secteur public que dans le secteur privé; iii) qu’il est manifeste que les citoyens appartenant à une communauté religieuse dans le pays sont exclus de l’emploi dans le secteur public et dans neuf des principales entreprises, pour la plupart des entreprises d’Etat, dans lesquelles les conditions de travail sont les meilleures (rémunération, formation, soins de santé, assurance, prêts, bourses, etc.); et iv) que ce groupe faisait l’objet d’une discrimination systémique avant les événements politiques de février 2011 mais que, depuis, la discrimination s’est étendue au domaine du recrutement et aux conditions d’emploi (en particulier dans les domaines de la gestion des ressources humaines, de l’informatique et de la sécurité). Dans ses dernières observations, la CSI renouvelle sa précédente allégation, à savoir que les travailleurs d’obédience chiite (musulmans chiites) sont aujourd’hui victimes de discrimination, en particulier dans le secteur public. La CSI se réfère à l’affaire «1912» – qui est un groupe de diplômés universitaires constitué essentiellement de femmes (95 pour cent), engagées en 2009 en tant que stagiaires avec un contrat de durée déterminée par divers ministères et institutions gouvernementales en attendant une prochaine opportunité de recrutement pour laquelle elles seraient prioritaires. Bien qu’un certain nombre d’entre elles aient pu obtenir un poste permanent, les stagiaires musulmanes chiites, qui avaient participé aux événements de 2011 ainsi qu’à des manifestations dénonçant les discriminations dont elles étaient victimes, ont été licenciées. Selon la CSI, le gouvernement déclare que leur licenciement était de nature économique, alors que, parallèlement, il continue de recruter des travailleurs pour occuper les postes précédemment occupés par ces stagiaires. La CSI en conclut que la discrimination dans le secteur public est aggravée du fait de l’interdiction faite aux travailleurs du secteur public de s’organiser (en vertu de la circulaire no 1/2003) et par conséquent d’exprimer leurs doléances relatives aux actes de discrimination.
Dans son rapport, le gouvernement rappelle que, depuis sa ratification, la convention est considérée comme faisant partie intégrante de la législation nationale en vigueur et que la Constitution et la Charte d’action nationale sont fondées sur l’égalité des citoyens en droits et en devoirs. Le gouvernement déclare aussi que: i) la législation nationale consacre également l’attachement de Bahreïn à la justice dans le cadre de l’application de la législation et du respect de l’indépendance du système judiciaire qui assure la protection de tous les individus (citoyens ou étrangers); ii) le décret-loi no 33/2002 sur les syndicats garantit la liberté syndicale; iii) le lancement récent de la procédure d’amendement du Code du travail no 36/2012 pour y inclure un article qui interdira formellement et érigera en infraction la discrimination relative à tous les droits couverts par le Code du travail; et iv) la loi no 26/2014 porte création de l’Institut national des droits de l’homme, dont le mandat est de promouvoir, développer et protéger les droits de l’homme, ainsi que de s’efforcer de consolider et diffuser ces valeurs à des fins de sensibilisation. Il s’agit d’un organe spécialisé dans le traitement des plaintes relatives aux violations des droits de l’homme. En conséquence, le gouvernement estime que, compte tenu de tous les efforts déployés par le Royaume de Bahreïn pour assurer la justice et l’égalité entre les travailleurs, les allégations communiquées à la commission par les organisations de travailleurs sont inexactes, et il exhorte le BIT à publier uniquement des informations fondées sur des faits ou des documents fiables.
La commission fait observer que, dans sa réponse aux observations de la GFBTU, le gouvernement décrit le cadre juridique en place mais ne fournit pas d’informations sur la situation dans la pratique. Par conséquent, bien qu’il soit nécessaire que les dispositions du droit national soient conformes aux exigences de la convention, il est également important que le droit soit pleinement et strictement appliqué dans la pratique. La commission note également que, dans ses observations finales concernant le rapport initial de Bahreïn sur l’application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies a dit être préoccupé: i) par les informations selon lesquelles la population chiite aurait été soumise à des restrictions de ses droits à la liberté de religion ou de conviction (CCPR/C/BHR/CO/1, 26 juillet 2018, paragr. 50 et 51); ii) du fait que l’Institut national des droits de l’homme ne jouit pas d’une indépendance suffisante pour s’acquitter de ses fonctions (paragr. 8); et iii) au sujet de rapports indiquant que, dans la pratique, l’appareil judiciaire n’est pas totalement indépendant ni impartial (paragr. 44). Rappelant que la convention prévoit l’obligation d’éliminer la discrimination en matière d’emploi et de profession dans la législation et dans la pratique, la commission demande au gouvernement de prendre des mesures volontaristes pour faire prévaloir dans la société le respect et la tolérance envers toutes les communautés religieuses et pour faire connaître les lois et les mécanismes existants pour les travailleurs qui estiment avoir été victimes de discrimination. Elle lui demande également de fournir des informations sur les efforts qu’il déploie pour que les travailleurs du secteur public ayant des convictions religieuses différentes soient représentés d’une manière équilibrée, y compris au travers de recherches ou d’études qualitatives. Notant que le gouvernement n’a pas fait part de ses commentaires au sujet de l’affaire «1912» mentionnée dans les observations de la CSI, la commission lui demande de le faire.
Article 2. Politique nationale d’égalité visant à éliminer la discrimination fondée sur la race, la couleur, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale et l’origine sociale. En réponse à la demande d’informations de la commission sur les mesures prises pour adopter une politique nationale visant à promouvoir l’égalité de chances et de traitement, en vue d’éliminer la discrimination fondée sur tous les motifs interdits par la convention, le gouvernement indique qu’il a pris de nombreuses mesures pour protéger les travailleurs de tous types contre les pratiques discriminatoires. Toutefois, le gouvernement confirme qu’il serait disposé à bénéficier de l’assistance technique du BIT pour l’élaboration d’une politique nationale, notamment en fournissant des exemples de politiques adoptées dans ce domaine par d’autres Etats Membres à titre indicatif. La commission rappelle qu’en vertu de la convention les Etats sont tenus de formuler et d’appliquer une politique nationale d’égalité et qu’ils ont une importante marge de manœuvre s’agissant d’adopter les politiques les plus appropriées. Cependant, la mise en œuvre d’une politique nationale suppose l’adoption d’un éventail de mesures spécifiques qui combine généralement mesures législatives et administratives, conventions collectives, politiques publiques, mesures positives, mécanismes de règlement des différends, mécanismes de contrôle, organismes spécialisés, programmes pratiques et activités de sensibilisation. En outre, la politique d’égalité doit être ajustée régulièrement pour tenir compte de nouvelles formes de discrimination pour lesquelles il convient de trouver des solutions (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 734, 735 et 841 à 849). Voulant croire que le BIT fournira l’assistance technique demandée par le gouvernement, la commission le prie de fournir des informations sur les mesures actives qu’il prend pour formuler et appliquer une politique nationale de l’égalité conçue à tout le moins pour lutter contre la discrimination fondée sur les sept motifs énumérés dans la convention et promouvoir l’égalité au sein de la population en général.
Article 3 a). Collaboration avec les organisations d’employeurs et de travailleurs. La commission avait précédemment demandé au gouvernement de fournir des informations sur toutes consultations engagées, ainsi que sur la collaboration avec les organisations d’employeurs et de travailleurs en vue de promouvoir la non-discrimination et l’égalité dans l’emploi et la profession, dans la pratique. Dans sa réponse, le gouvernement souligne sa volonté de collaborer avec les partenaires sociaux et de promouvoir le dialogue social à différents niveaux et de poursuivre ses réunions bilatérales et tripartites avec les représentants du ministère du Travail et du Développement social, de la chambre de commerce et d’industrie de Bahreïn (BCCI), de la GFBTU et de la Fédération des syndicats libres de Bahreïn (FSBL) afin de discuter de tout phénomène négatif et de renforcer la collaboration pour assurer la stabilité du marché du travail au niveau local, notamment pour lutter contre la discrimination sur le marché du travail et dans d’autres domaines. A cet égard, la commission prend note des observations de la GFBTU, qui rappelle que tous les partenaires sociaux à Bahreïn ont leur rôle à jouer pour parvenir à la mise en œuvre effective de la convention et, par conséquent, qui demande la création d’un mécanisme national où toutes les parties concernées seront représentées, en vue de mettre en œuvre et de revoir dans la pratique la politique en matière d’emploi et de traitement aux fins de l’égalité de chances. Elle note également que, lors de ses réunions avec la mission de contacts directs en septembre 2018, la GFBTU a regretté qu’il n’y ait pas d’organe tripartite opérationnel pour que les partenaires sociaux participent aux discussions sur les aspects de la législation qui sont essentiels pour ses membres, avant la présentation des modifications proposées à l’Assemblée nationale. La commission note que la BCCI a également indiqué, lors de sa réunion avec la mission de contacts directs, qu’elle n’avait pas été consultée avant le lancement du projet pilote de permis de travail flexible, ce qui aurait pu nuire au secteur des affaires. Cependant, la commission se félicite des conclusions de la mission de contacts directs selon lesquelles, bien que les mandants tripartites aient déclaré que le dialogue social dans le pays est entravé par les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des accords tripartites de 2012 et 2014 adoptés sous les auspices de l’OIT, tous ont souhaité engager un dialogue social constructif pour aborder les questions les plus pressantes. A cet égard, la commission tient à rappeler que, lorsqu’il n’existe pas de véritable dialogue social, l’application de la convention se heurte à de graves difficultés. En conséquence, la commission demande au gouvernement de la tenir informée des progrès réalisés pour instaurer un dialogue social constructif, notamment grâce à la mise en œuvre des accords tripartites. Parallèlement, rappelant que la convention reconnaît que les organisations d’employeurs et de travailleurs jouent un rôle clef dans la promotion de l’acceptation et du respect des politiques et plans nationaux, y compris d’une politique nationale sur l’égalité de chances et de traitement en matière d’emploi et de profession, la commission demande au gouvernement de faire connaître le rôle de ces organisations dans la mise en œuvre de la convention, ainsi que dans les réformes suggérées avant leur promulgation.
Contrôle de l’application de la législation. Notant que le gouvernement a déclaré à plusieurs reprises qu’aucun cas de discrimination n’avait été signalé dans le pays, la commission lui avait demandé de poursuivre ses activités de sensibilisation à la législation pertinente, de renforcer les capacités des autorités compétentes (juges, inspecteurs du travail et autres fonctionnaires), dans l’identification et le traitement des cas de discrimination, ainsi que d’examiner si les dispositions de fond et les procédures applicables permettent dans la pratique aux plaintes d’aboutir. Le gouvernement confirme qu’il continue de prêter attention à la formation des inspecteurs du travail et d’accroître leurs capacités à s’acquitter de leurs tâches. En ce qui concerne plus particulièrement la discrimination en matière d’emploi et de profession, la commission se félicite de l’information fournie selon laquelle le ministère du Travail et du Développement social envisage la création d’une unité spéciale au sein de la Division des plaintes en matière de travail du ministère, qui recevra les plaintes des travailleurs concernant la discrimination et mettra en place des procédures spéciales pour les examiner et prendre les mesures qui s’imposent. A cet égard, la commission note que la CSI fait référence à l’absence de mécanismes de contrôle de l’application de la législation, qui empêche dans une large mesure la mise en œuvre effective de la législation du travail. En outre, elle fait observer que, dans les conclusions de son rapport (paragr. 102), la mission de contacts directs indique notamment que les procédures pour faire respecter l’interdiction de la discrimination et les recours dont disposent les victimes de discrimination sont peu connus. La commission demande au gouvernement de prendre des mesures pour mieux faire connaître les principes d’égalité et de non-discrimination en matière d’emploi et de profession ainsi que les procédures disponibles et de la tenir informée de tout progrès dans la création de l’unité spéciale qui sera chargée de recevoir et traiter les plaintes des travailleurs concernant la discrimination. Parallèlement, notant que le gouvernement est disposé à collaborer avec le BIT pour dispenser une formation supplémentaire sur la discrimination en matière d’emploi et de profession aux fonctionnaires chargés des mécanismes de contrôle, elle lui demande de fournir des informations sur toute mesure prise pour améliorer la capacité des fonctionnaires à repérer et à combattre ces pratiques discriminatoires.
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