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Indigenous and Tribal Peoples Convention, 1989 (No. 169) - Honduras (RATIFICATION: 1995)

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La commission prend note des informations supplémentaires fournies par le gouvernement à la lumière de la décision adoptée par le Conseil d’administration à sa 338e session (juin 2020). La commission a procédé à l’examen de l’application de la convention sur la base des informations supplémentaires reçues du gouvernement cette année, ainsi que sur la base des informations dont elle disposait en 2019.
La commission prend note des observations formulées par le Conseil hondurien de l’entreprise privée (COHEP), reçues en 2018, en septembre 2019 et le 1er octobre 2020. Elle note que l’Organisation internationale des employeurs (OIE) a appuyé les observations de 2018 du COHEP et a envoyé, en septembre 2019, des observations générales sur l’application de la convention. La commission prend note de la réponse du gouvernement à cet égard. La commission prend note aussi des observations de la Centrale générale des travailleurs (CGT) et de la Centrale des travailleurs du Honduras (CTH), reçues le 5 octobre 2020, ainsi que de la réponse du gouvernement à ce sujet, reçue le 30 octobre 2020.

Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 105e session, mai-juin 2016)

Article 3 de la convention. Droits de l’homme. Dans leurs commentaires précédents, tant cette commission que la Commission de la Conférence, dans ses conclusions de 2016, ont pris note avec une profonde préoccupation des informations faisant état de meurtres, de menaces et de violences dont ont été victimes des représentants et défenseurs des droits des peuples indigènes, ainsi que du climat d’impunité. Elles ont prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour protéger de manière appropriée les membres des communautés indigènes et leurs représentants contre les actes de violence et les menaces, et d’enquêter et de fournir des informations sur les meurtres et les actes de violence signalés.
Dans son rapport, le gouvernement mentionne d’une manière générale les mesures de sécurité et de protection prises par la Direction générale du système de protection (DGSP) en faveur de diverses communautés indigènes et paysannes, par exemple des mesures de police ou des mesures destinées à mettre en place des infrastructures et des technologies pour les défenseurs des droits de l’homme dans leurs communautés. Le gouvernement mentionne également l’adoption de mesures préventives qui revêtent la forme de cours de formation dispensés aux autorités locales, ou d’activités de sensibilisation à l’importance de l’action des défenseurs des peuples indigènes. À ce sujet, la commission note que, parmi les parquets spécialisés, le service du Procureur spécial pour la protection des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes, des communicateurs sociaux et des agents judiciaires a été créé en 2018.
La commission regrette que le gouvernement n’ait pas fourni d’informations plus spécifiques sur les mesures concrètes prises dans le cadre des enquêtes menées et des procédures judiciaires en cours en ce qui concerne les actes de violence, notamment les meurtres, dont les représentants de peuples indigènes et leurs défenseurs ont été victimes. À ce sujet, la commission note à propos de l’assassinat de Berta Cáceres (ancienne présidente du Conseil civique des organisations populaires et indigènes du Honduras – COPINH), auquel elle a fait référence dans son observation précédente, que, d’après des informations officielles du pouvoir judiciaire et du ministère public, le 29 novembre 2018, la première chambre du tribunal de jugement ayant compétence nationale a déclaré coupables sept personnes pour leur participation à ce meurtre. La commission note également que les services du Procureur spécial chargé des crimes contre la vie ont demandé, en décembre 2019, l’ouverture d’un procès contre une personne accusée d’être l’auteur intellectuel du meurtre de Berta Cáceres.
La commission note que, dans son rapport de 2019, le Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs et défenseuses des droits de la personne reconnaît que les personnes qui défendent les droits des peuples autochtones sont l’un des groupes spécifiques de défenseurs des droits de l’homme en situation de risque au Honduras. Il note que les menaces qui pèsent sur les peuples autochtones sont intrinsèquement liées à la défense de leurs terres et de leurs ressources naturelles, à la lutte contre le racisme et la discrimination, ainsi qu’à la revendication de leurs droits économiques, sociaux et culturels et de leur accès à la justice. Il affirme que les défenseurs autochtones des peuples lenca, maya, tolupán, garífuna, nahua, pech tawahka et miskito sont souvent confrontés à la mort, à la criminalisation, à la stigmatisation, au harcèlement judiciaire et à la discrimination en raison de leur lutte pour les droits de leurs peuples, et souligne que la grande majorité des meurtres et agressions contre ces peuples restent impunis, soit parce qu’une enquête n’est pas ouverte, soit parce que l’enquête n’aboutit pas (A/HRC/40/60/Add.2).
Dans ses informations supplémentaires transmises en 2020, le gouvernement indique que la DGSP a amélioré le modèle d’évaluation des risques collectifs et individuels, ainsi que l’identification des risques grâce à un suivi continu; ce modèle permet de «caractériser» la population et de recourir à des régimes de protection de nature technique. En outre, l’Unité de prévention et d’analyse du contexte (UPAC), qui fait partie intégrante du Mécanisme national de prévention, a conçu quatre plans de prévention qui procèdent au diagnostic du contexte et prévoient des mesures de prévention pour certaines communautés indigènes, dont la communauté lenca dans le département de la Paz, le peuple tolupán de la Montaña de la Flor dans le département de Francisco Morazán et les communautés garífunas dans le département de Cortés. Le gouvernement indique par ailleurs qu’en 2017 et 2018, le ministère public a enregistré 18 plaintes pour atteinte à la vie contre des membres de peuples indigènes et afro-honduriens; six ont fait l’objet de poursuites judiciaires et ont conduit à six condamnations. De la même façon, 45 plaintes pour menaces ont été déposées; deux ont fait l’objet de poursuites judiciaires et ont conduit à deux condamnations. En outre, le gouvernement indique qu’à la suite de la mort violente de plusieurs membres de peuples indigènes et afro-honduriens (un assassinat à Warunta, municipalité d’Ahuas dans le département de Gracias a Dios et des assassinats multiples dans la communauté de Santo Tomás, municipalité de Gualcinse dans le département de Lempira) et de menaces proférées à l’encontre du peuple lenca à La Iguala dans les départements de Lempira et de La Paz, le Procureur spécial chargé des ethnies et du patrimoine culturel a demandé l’application de mesures de protection.
En ce qui concerne les sept personnes reconnues coupables de l’assassinat de Berta Cáceres, le gouvernement indique que quatre ont été condamnées à des peines de 50 ans de prison et trois autres à des peines de 30 ans de prison. Le procès de la personne soupçonnée d’être l’auteur intellectuel du meurtre (l’ancien directeur exécutif de Desarrollos Energéticos S. A. (DESA)) est toujours en cours d’instruction.
La commission prend bonne note de ces informations relatives aux actions adoptées pour protéger les peuples indigènes et afro-honduriens menacés. À cet égard, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures de protection appliquées à la demande du Procureur spécial chargé des ethnies et du patrimoine culturel à la suite des morts violentes et des menaces dont ont été victimes des membres de peuples indigènes et afro-honduriens, en précisant leur nature et les personnes qui en ont bénéficié.
La commission prie instamment le gouvernement de continuer de prendre les mesures nécessaires pour promouvoir un climat exempt de violence, dans lequel l’intégrité physique et psychologique des membres des communautés indigènes et de leurs représentants est dûment protégée et l’exercice plein et effectif de leurs droits fondamentaux et collectifs, ainsi que leur accès à la justice, sont garantis. Tout en notant et saluant la condamnation des auteurs matériels du meurtre de Berta Cáceres, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures appropriées pour déterminer les responsabilités et pour identifier et punir les auteurs intellectuels de ce meurtre. La commission prie le gouvernement de continuer de communiquer des informations détaillées sur les plaintes pour violences et menaces à l’encontre des membres de peuples indigènes et afro-honduriens et de leurs représentants, dans le cadre de la revendication de leurs droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que sur les enquêtes et les poursuites qui ont été engagées.
Articles 6 et 7. Procédures appropriées de consultation et de participation. La commission rappelle que, à l’instar de la Commission de la Conférence en 2016, elle avait prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre en place un mécanisme approprié de consultation et de participation conformément à ce que prévoit la convention, et pour garantir que les peuples couverts par la convention sont consultés et peuvent participer de manière appropriée à l’élaboration de ce mécanisme. La commission a noté que, de mai à octobre 2016, des ateliers avaient été organisés avec les neuf peuples indigènes et afro-honduriens en vue de les consulter au sujet d’un avant-projet de loi sur la consultation préalable, libre et éclairée des peuples indigènes, et que le processus a été marqué par l’absence d’organisations représentatives telles que l’Organisation fraternelle noire du Honduras (OFRANEH) et le COPINH.
Le gouvernement indique dans son rapport de 2019 que, après avoir mené les consultations sur l’avant-projet de loi, un atelier national a été organisé avec la participation des organisations des peuples intéressés, lesquelles ont présenté une ébauche de projet auquel avaient contribué huit des neuf peuples indigènes et afro-honduriens, le peuple lenca s’étant retiré du processus. L’OFRANEH et le COPINH n’avaient pas participé non plus à ce dialogue. Le gouvernement indique que, depuis lors, il est resté ouvert aux organisations qui souhaiteraient exprimer leurs vues sur l’ébauche révisée de l’avant-projet de loi de consultation. Il ajoute que, le 14 juillet 2018, il s’est réuni avec la Confédération des peuples indigènes du Honduras (CONPAH), qui regroupe tous les peuples indigènes et afro-honduriens. Lors de cette réunion, le gouvernement a indiqué qu’il avait soumis l’avant-projet de loi au Congrès national, lequel a ensuite institué une commission consultative spéciale sur la loi relative à la consultation. Le gouvernement indique également qu’il a bénéficié des commentaires techniques du BIT.
Dans ses informations supplémentaires de 2020, le gouvernement fait part des actions menées avant la déclaration de l’état d’urgence (adopté le 16 mars 2020) pour faire connaître en détail le contenu du projet de loi aux secteurs concernés, obtenir des avis techniques et inviter à la coopération pour faire connaître le projet, mener des consultations et approuver le projet. Le gouvernement indique travailler à l’établissement d’une liste des institutions indigènes et afro-honduriennes afin qu’elle soit prête lorsque sera initié le processus de consultation pour approuver le projet de loi. Le gouvernement signale encore que l’état d’urgence impose des restrictions à la liberté de circulation et au droit de réunion, ce qui empêche d’entamer un processus de consultation avec tous les peuples indigènes et afro-honduriens. Des réunions virtuelles de prise de contact ont néanmoins été organisées grâce à des plateformes numériques avec plusieurs représentants des peuples indigènes, mais tous n’ont pas pu y participer. En outre, le gouvernement fournit des informations sur deux processus de consultation menés par l’État: l’un avec le Conseil territorial miskito de Diunat sur la mise en œuvre du projet d’énergie photovoltaïque 90 et l’autre avec les Conseils territoriaux de la Moskitia sur le projet d’exploitation pétrolière sur les côtes de la région.
La commission note que, dans ses observations de 2019, le COHEP réitère son soutien à l’adoption d’une loi sur la consultation préalable, libre et éclairée, qui doit être élaborée conformément à la convention et partagée avec tous les acteurs sociaux. Dans ses observations supplémentaires transmises en 2020, le COHEP indique qu’en février 2020, il a participé à une réunion avec la Commission législative du Congrès national de la République au cours de laquelle il a pu faire part de sa position sur le projet de loi, indiquant en particulier que la loi ne devrait réglementer que les questions liées à la convention; que la consultation n’a pas un caractère contraignant puisque la décision finale revient à l’État; que dans le cas où la loi ne serait pas adoptée, il n’y aura aucun investissement étranger ou national dans des projets qui supposent un développement pour les communautés compte tenu de l’insécurité juridique résultant du vide juridique. Le COHEP ajoute qu’il a demandé au gouvernement de consulter les représentants des organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives. Par ailleurs, en réponse aux observations faites en 2020 par la CGT et la CTH indiquant qu’il n’y avait eu aucune discussion sur la convention au sein du Conseil économique et social, le gouvernement signale que dans le cadre de ce même conseil, une commission technique tripartite a été instituée pour discuter du projet de loi sur la consultation préalable libre et informée, mais que seuls les employeurs et le gouvernement ont accrédité leurs représentants. Le gouvernement déclare que des réunions de travail ont eu lieu pour examiner, discuter et rédiger ledit projet de loi avant son renvoi au Congrès national.
La commission prend dument note des informations fournies et encourage le gouvernement à continuer de prendre toutes les mesures nécessaires en vue d’établir un mécanisme approprié de consultation des peuples couverts par la convention pour toutes les mesures législatives ou administratives susceptibles de les toucher, conformément à la convention. À cet égard, la commission considère qu’il est de la plus haute importance que la loi qui sera adoptée résulte d’un processus de consultation complète, libre et éclairée avec tous les peuples indigènes et afro-honduriens. Par conséquent, elle prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les peuples indigènes et afro-honduriens soient consultés et puissent participer de manière appropriée au processus, par le biais de leurs entités représentatives, afin qu’ils puissent exprimer leurs vues et influer sur le résultat final du processus. En attendant l’adoption de la loi, la commission prie le gouvernement de continuer de communiquer des informations sur les consultations menées au sujet des mesures susceptibles de toucher directement les peuples indigènes.
Articles 20, 24 et 25. Protection des droits du peuple miskito. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de continuer à fournir des informations sur l’impact des mesures prises pour améliorer la protection et les conditions de travail des plongeurs de la communauté miskito et sur une éventuelle réglementation de la pêche sous-marine. Le gouvernement indique qu’il mène des activités à des fins de réparation intégrale qui vont au-delà de la réparation ponctuelle des personnes affectées par la pêche sous-marine et qui ont pour objectif de bénéficier à l’ensemble de la communauté miskito. Ces processus de réparation sont élaborés avec les victimes (plongeurs handicapés) et les organisations qui représentent le peuple miskito du Honduras, afin d’orienter l’État dans la mise en œuvre de projets qui répondent réellement à leurs besoins. En ce qui concerne les mesures prises dans le domaine de la santé, le gouvernement mentionne: une convention de coopération visant à fournir des services de santé complets à la population engagée dans des activités de pêche sous-marine, la priorité étant donnée aux plongeurs touchés par le syndrome de décompression; un projet de création d’un centre de médecine hyperbare et sous-marine pour fournir des soins médicaux préventifs, thérapeutiques et de réadaptation aux plongeurs qui ont gardé des séquelles; et la mise en service d’un bateau ambulance. Le gouvernement indique également que des bourses d’études ont été accordées à des enfants de plongeurs handicapés ou décédés (de 2016 à 2019, 148 bourses ont été octroyées à des enfants et à des adolescents, et 500 bourses à des jeunes pour mener des études supérieures); qu’un projet de construction de logements sociaux est en cours dans diverses municipalités du département de Gracias a Dios; qu’un fonds a été créé pour la réalisation de différents projets productifs, en consultation avec la population miskito; et que 177 inspections du travail ont été effectuées sur des bateaux de plongée sous-marine qui ont donné lieu à une diminution des risques professionnels et une amélioration de la productivité.
La commission note que le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale des Nations Unies, dans ses observations finales de 2019, s’est déclaré préoccupé par la situation des plongeurs miskitos qui continuent de travailler dans des conditions précaires et ne bénéficient pas de mesures adéquates pour assurer leur sécurité au travail, ainsi que par le nombre croissant de plongeurs qui sont victimes d’accidents liés à la pratique de la pêche sous-marine (CERD/C/HND/CO/6-8). La commission note également qu’au cours de sa visite dans la région de la Moskitia, la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) a observé une situation préoccupante de pauvreté, de chômage, d’absence de services sanitaires et d’énergie, et de manque d’eau et d’assainissement.
La commission salue l’approche intégrée suivie par le gouvernement en ce qui concerne la situation des plongeurs miskitos, qui vise non seulement à offrir une réparation complète aux victimes de la pêche sous-marine et à leurs familles, mais aussi à améliorer les conditions de vie et de travail des membres de la communauté miskito. La commission encourage le gouvernement à continuer de prendre des mesures spécifiques à cet égard, en indiquant les résultats obtenus et les difficultés qui continuent d’exister en ce qui concerne l’inspection et l’amélioration des conditions de travail des plongeurs miskitos, ainsi que les conditions de vie du peuple miskito. Prière d’indiquer comment les membres du peuple miskito participent à l’élaboration, l’application et l’évaluation de ces mesures.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement, qui reprend le contenu de sa demande précédente adoptée en 2019.
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