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Observation
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La commission prend note des observations de la Confédération générale du travail (CGT) reçues le 29 août 2023, ainsi que des commentaires correspondants du gouvernement.
Libertés civiles. La commission note que la CGT allègue des atteintes aux libertés civiles, à savoir notamment des entraves graves au droit de manifester, caractérisées par l’usage disproportionné de la force publique et des dérives policières lors de récentes manifestations. Selon l’organisation, le schéma national du maintien de l’ordre (SNMO) du ministère de l’Intérieur porterait atteinte à la liberté de manifester en ce qu’il considère le manifestant comme un potentiel fauteur de troubles à l’ordre public. La CGT dénonce en outre le fichage, par les forces de l’ordre et le renseignement, des données relatives aux opinions politiques, convictions philosophiques, religieuses ou à l’appartenance syndicale, en application des décrets du 4 décembre 2020 modifiant les dispositions du code de la sécurité intérieure. Tout en prenant note des informations fournies par le gouvernement relatives aux principes qui régissent le SNMO, la commission note que le gouvernement souligne que: i) l’usage de la force par la police et la gendarmerie nationales, régi par les principes de nécessité, de proportionnalité et de non-discrimination, est strictement encadré, contrôlé et, en cas de faute, sanctionné; et ii) s’agissant des manifestations contre la réforme des retraites qui ont débuté en janvier 2023, celles-ci ont été encadrées par un dispositif de sécurité visant à assurer la sécurité des manifestants conformément à ce qui est prévu par la loi, dans un contexte particulièrement difficile, marqué par des violences graves commises par certains manifestants ou cas isolés d’individus à l’encontre des forces de l’ordre, des journalistes présents ou d’autres personnes. S’agissant du fichage des données critiquées par la CGT dans ses observations, la commission comprend que les fichiers en question – «enquêtes administratives liées à la sécurité publique» (EASP), «prévention des atteintes à la sécurité publique» (PASP) et «gestion de l’information et prévention des atteintes à la sécurité publique» (GIPASP) – visent des activités susceptibles de porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou de constituer une menace terroriste portant atteinte à ces mêmes intérêts. La commission note que, selon le gouvernement, il ne s’agit en aucun cas pour les autorités françaises de poursuivre une finalité de «fichage» de certaines personnes à raison de leurs opinions politiques, de leurs convictions philosophiques ou religieuses ou de leur appartenance syndicale, et les traitements concernent des personnes sont susceptibles de porter atteinte aux intérêts précités. La commission observe à cet égard que le Conseil d’État a rejeté les requêtes de syndicats et associations qui dénonçaient la dangerosité de ces fichiers, considérant que les décrets contestés ne portaient pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’opinion, de conscience et de religion ou à la liberté syndicale.
La commission rappelle que les droits syndicaux recouvrent celui d’organiser des manifestations publiques, sous réserve que les syndicats respectent les mesures prises par les autorités publiques pour assurer l’ordre public. Simultanément, les autorités doivent s’efforcer de s’entendre avec les organisateurs d’une manifestation afin que celles-ci puissent se dérouler sans perturbation et ne doivent autoriser le recours à la force que dans des situations où la loi et l’ordre sont gravement menacés, l’intervention des forces de l’ordre dans ce contexte devant être proportionnelle à la menace que celles-ci s’efforcent de contenir. La commission prie le gouvernement de faire état des enquêtes administratives et judiciaires ouvertes à la suite des manifestations sur la réforme des retraites au début de l’année 2023. La commission prie en outre le gouvernement de fournir des informations sur l’application des dispositions modifiées du Code de la sécurité intérieure vis-à-vis des membres des organisations syndicales et de signaler toute évolution, y compris des décisions judiciaires ou réglementaires, concernant la question du fichage des données en raison de l’appartenance syndicale.
Article 3 de la convention. Droit des organisations de travailleurs et d’employeurs d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d’élire librement leurs représentants, d’organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d’action. Désignation du délégué syndical. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que, selon la Confédération générale du travail-Force ouvrière (CGT-FO), la loi de ratification no 2018-217 du 29 mars 2018 entravait la liberté du syndicat dans le choix de ses représentants, dans la mesure où, en vertu de l’article L.2143-3 du Code du travail: i) le syndicat qui procède à la désignation du délégué syndical (DS) doit toujours être un syndicat représentatif; et ii) le choix du DS doit toujours se faire en priorité parmi les candidats aux élections professionnelles ayant recueilli 10 pour cent sur leur nom. Ce n’est que s’il ne reste plus aucun candidat ayant obtenu 10 pour cent et que tous les élus ont renoncé par écrit à leur droit d’être désigné comme DS, que le syndicat représentatif pourra choisir son DS parmi les autres candidats. La commission avait notamment relevé à ce sujet que: i) selon le gouvernement, les hypothèses issues prévues à l’article L.2143-3 ne placent jamais l’organisation syndicale représentative dans une situation dans laquelle elle ne pourrait plus choisir son représentant; et ii) la Cour de cassation, par un arrêt du 8 juillet 2020, a confirmé que, lorsque tous les élus ou tous les candidats ayant obtenu au moins 10 pour cent des voix qu’elle a présentés aux dernières élections professionnelles ont renoncé à être désignés délégués syndicaux, l’organisation syndicale peut désigner comme délégué syndical l’un de ses adhérents au sein de l’entreprise ou de l’établissement ou l’un de ses anciens élus ayant atteint la limite de trois mandats successifs au comité social et économique (Cass. soc., 8-7-20, no 19-14605). La commission note que le gouvernement indique, en réponse à sa demande, qu’il n’a pas envisagé à ce stade de modifications législatives. La commission prend note de ces informations.
Parité aux élections professionnelles. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que, selon la CGT-FO, l’interprétation par la Cour de cassation des dispositions de la loi du 17 août 2015 (article L.2314.30 du Code du travail) en matière de représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les institutions représentatives du personnel, était incompatible avec la liberté du syndicat de présenter les candidats de son choix, en privant notamment l’organisation syndicale de la possibilité de présenter une candidature unique. Tout en prenant note des informations fournies par le gouvernement, dans le sillage de l’arrêt de la Cour de cassation du 13 février 2019 (no 18-17.042), à savoir que le législateur avait prévu non une parité abstraite, mais une proportionnalité des candidatures au nombre de salariés masculins et féminins présents dans le collège électoral considéré au sein de l’entreprise – la commission avait prié le gouvernement de faire part de ses commentaires en réponse aux observations de la CGT-FO quant à l’impossibilité pour les organisations syndicales de présenter des candidatures uniques. La commission note que le gouvernement, outre la référence précitée à l’arrêt de la Cour de cassation du 3 février 2019, indique que: i) le Conseil Constitutionnel s’est prononcé sur la conformité à la Constitution des règles de représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les instances représentatives du personnel (décision n° 2017-686, question prioritaire de constitutionnalité du 19 janvier 2018); ii) la jurisprudence est constante en la matière et la Cour de cassation confirme que si deux sièges sont à pourvoir dans un collège mixte, l’organisation syndicale ne peut pas s’exempter de ces règles en ne présentant qu’un seul candidat (Cass. soc., 11 décembre 2019, no 1823513); et iii) néanmoins, la Cour de cassation a aménagé cette règle dans le cas particulier de la sous-représentation d’un sexe dans un collège. Ainsi, lorsque l’application de la règle de représentation proportionnée conduit à exclure totalement la représentation de l’un ou l’autre sexe, les listes de candidats pourront comporter un candidat du sexe qui, à défaut, ne serait pas représenté. Ce candidat ne peut être en première position sur la liste (L.2314-30, Cass. soc., 11 décembre 2019, no 1826568; Cass. soc., 11 décembre 2019, no 19-13037; Cass. soc., 11 décembre 2019, no 1910855). La commission prend note de ces informations.
Articles 2, 3, 6, 7 et 10. Intérêt à agir des syndicats et unions syndicales. La commission avait noté que, selon la CGT-FO, dans sa décision (CE, 24-5-17, no 392661), le Conseil d’État avait restreint considérablement l’intérêt à agir d’une union de syndicats en ne reconnaissant pas à cette dernière le droit de contester une décision préfectorale du fait du champ d’application très local de cette dernière, alors même que l’objet du litige posait une question de principe que l’union de syndicats avait pour objet de défendre. La commission avait noté les indications du gouvernement selon lesquelles: i) en vertu de l’article L.2132-3 du code du travail, les syndicats professionnels ont le droit d’agir en justice et peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent; et ii) l’arrêt du Conseil d’État du 24 mai 2017 ne fait que préciser qu’eu égard à leur objet conféré par la loi et par leurs statuts, l’intérêt pour agir d’un syndicat ou d’une union de syndicats en vertu de l’intérêt collectif défendu s’apprécie nécessairement au regard de la portée de la décision contestée. Soulignant l’importance de la reconnaissance du droit d’ester en justice des syndicats dans la défense des intérêts collectifs de leurs membres, la commission avait prié le gouvernement de fournir de plus amples informations sur la manière dont ce droit est encadré par la législation et la jurisprudence. La commission note à cet égard que le gouvernement précise que la capacité à agir des organisations syndicales est très large: contrairement au droit commun, un préjudice indirect à l’intérêt collectif, matériel ou moral de la profession suffit (Cass. soc., 2 juin 1983, no 81-40103 et 81-40489, jurisprudences constamment confirmées depuis). Ainsi, à titre d’exemple, les organisations syndicales ont été habilités à intenter une action civile concernant l’effondrement du terminal 2E de l’aérogare de Roissy Charles de Gaulle, alors qu’il n’y avait que des victimes tierces à l’entreprise «…dès lors que les manquements, constitutifs des infractions poursuivies, ont pu compromettre la sécurité des travailleurs et causer ainsi un préjudice aux intérêts collectifs des professions représentées par les syndicats susvisés…» (Cass. Chambre criminelle, 11 octobre 2005, no 05-82414). La commission prend également note des dispositions du Code du travail énumérées par le gouvernement quant à la compétence donnée aux syndicats pour agir en justice à la place des salariés victimes d’un préjudice (actions en substitution), ainsi qu’aux actions de groupe en matière de discrimination (L.1134-6 et sq.). La commission prend note des informations fournies par le gouvernement relatives à la capacité à agir des syndicats et à la jurisprudence de la Cour de cassation y relative. Rappelant que les observations des organisations syndicales à l’origine de l’examen de cette question par la commission portaient sur l’arrêt du Conseil d’État en date du 24 mai 2017, la commission prie le gouvernement de fournir toute information complémentaire sur la jurisprudence du Conseil d’État en la matière.
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