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Article 3 de la convention. Droit des organisations d’organiser librement leur activité et de formuler leur programme d’action. La commission rappelle qu’elle attire depuis des années l’attention du gouvernement sur la nécessité d’abroger l’interdiction du droit de grève prévue à l’article 376 (c) du Code du travail (CT) pour les travailleurs des entreprises ferroviaires, maritimes et aériennes et pour les travailleurs affectés à des tâches de chargement et de déchargement dans les ports. Dans son dernier commentaire, la commission a noté que la loi no 9808 renforçant la sécurité juridique relative à la grève et à ses procédures de 2020 a modifié l’article 376 du CT et a observé que:
  • la version modifiée de l’article 376 du CT inclut la liste des services publics considérés comme essentiels dans lesquels la grève est interdite et que certains de ces services ne constituent pas des services essentiels au sens strict du terme, notamment: les services de transport en général, dont les transports ferroviaires et maritimes, les services de chargement et de déchargement de denrées périssables, les pharmacies, les consultations et soins médicaux programmés, ainsi que la distribution de carburants. La commission note que le gouvernement indique que le dispositif ayant abouti à l’adoption de la loi no 9808 a été analysé par la Chambre Constitutionnelle de la Cour Suprême de Justice et qu’elle a conclu que l’importance particulière des services de transport ferroviaire et maritime, de chargement et déchargement aux quais et à quai de marchandises périssables dans l’économie publique justifiait la qualification de ceux-ci comme services essentiels. Tout en prenant bonne note de ce qui précède, la commission rappelle que, si ce que l’on entend par service essentiel au sens strict du terme dépend largement des conditions spécifiques de chaque pays, le critère qui détermine qu’un service est essentiel au sens strict du terme est l’apparition d’une menace manifeste et immédiate pour la vie, la sécurité ou la santé des individus dans tout ou partie de la population. La commission rappelle en outre que, dans les situations où une limitation importante ou une interdiction totale de la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de grève pour la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des besoins de base des usagers ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations, l’introduction d’un service minimum négocié comme solution de rechange possible à une interdiction totale de la grève pourrait être appropriée (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 136);
  • la version modifiée de l’article 376 ter du CT contient une liste de services qualifiés d’importance primordiale, dans lesquels l’exécution de la grève est subordonnée à la mise en place de services minimaux définis d’un commun accord par les parties; si après une période de dix jours de grève aucun accord n’est en vue, le conflit doit être soumis à un arbitrage obligatoire. A cet égard, la commission estime que le recours à l’arbitrage obligatoire pour mettre fin à un conflit collectif du travail et à une grève n’est acceptable que dans des circonstances déterminées, à savoir: i) lorsque les deux parties au conflit en sont d’accord; ou ii) lorsque la grève peut faire l’objet de restrictions, voire d’une interdiction, à savoir: a) dans le cas d’un conflit concernant des fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’État; b) dans le cas d’un conflit affectant des services essentiels au sens strict du terme; et c) dans des situations de crise nationale ou locale aiguë, mais alors pour une durée limitée et uniquement dans la mesure de ce qui est nécessaire pour faire face à la situation. Ainsi, la seule prolongation des conflits ou l’échec de la conciliation ne constituent pas en soi des éléments qui justifieraient l’imposition d’un arbitrage obligatoire (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 153); et
  • la loi considère le chargement et le déchargement de médicaments, de fournitures ou d’équipements médicaux et de denrées périssables comme des services essentiels, et les services de chargement et de déchargement dans les ports d’autres types de produits comme des services d’importance primordiale. La commission rappelle qu’un service minimal pourrait être établi pour tous les services de chargement et de déchargement dans les ports afin de garantir l’accès de la population aux médicaments et aux équipements médicaux.
D’autre part, la commission exprime à nouveau ses préoccupations en relation avec les modifications apportées par la loi no 9808 aux dispositions suivantes du CT:
  • l’article 371, qui impose une durée maximale de 48 heures pour les grèves dont le but est de protester contre les politiques publiques, à condition que ces politiques affectent directement les intérêts économiques et sociaux des travailleurs;
  • l’article 378, selon lequel une grève ne peut en aucun cas se reproduire pour les mêmes raisons qu’une grève précédente; et
  • l’article 661 bis, qui dispose que, lorsque la grève a eu lieu dans des services publics non essentiels et qu’elle a été déclarée légale, que huit jours civils se sont écoulés depuis la signature de la déclaration sans que les parties n’aient trouvé de solution au conflit, ou au moins un accord tendant à ce qu’elle cesse, le temps de poursuivre les négociations, l’employeur peut demander au juge de suspendre la grève s’il démontre dûment que la grève entraîne pour la population de graves préjudices, difficiles ou impossibles à réparer. À ce sujet, la commission rappelle que la suspension de la grève devrait être limitée aux situations dans lesquelles un service non essentiel peut devenir essentiel dans la mesure où sa durée ou sa portée met en danger la vie, la sécurité ou la santé de l’ensemble ou d’une partie de la population (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 131).
La commission note que le gouvernement et l’Union costaricienne des chambres et associations d’entreprises privées soulignent que l’approbation de la loi no. 9808 a été précédée d’un vaste débat public et politique, qui a également fait l’objet d’une consultation des secteurs travailleurs et employeurs et qui a dépassé les contrôles de constitutionnalité préalables respectifs. Nonobstant ce qui précède, le gouvernement indique qu’une fois la loi entrée en vigueur, différents syndicats ont déposé plusieurs recours en inconstitutionnalité devant la Chambre constitutionnelle, en attente d’une décision. Le gouvernement déclare également qu’il prend note et apprécie la possibilité de compter sur l’assistance technique du bureau afin de contribuer à la pleine conformité de la législation avec la convention. La Commission prend dûment note de ces indications. La commission observe également que la Confédération des travailleurs «Rerum Novarum»; la Confédération des travailleurs démocratiques du Costa Rica; la Centrale du mouvement des travailleurs costariciens; la Confédération générale des travailleurs; la Confédération unitaire des travailleurs, et l’Unité dans l’action syndicale réaffirment que concernant le droit de grève, la loi no 9808 est hautement régressive et viole la Convention. La commission réitère sa demande au gouvernement, à la lumière des commentaires qui précèdent, de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux, toutes les mesures nécessaires pour assurer la conformité des articles mentionnées avec la convention. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’évolution de la situation. La commission espère que le gouvernement recevra l’assistance technique du Bureau et elle prie le gouvernement de fournir des informations sur la décision de la Cour Constitutionnelle concernant les recours en inconstitutionnalité susmentionnées.
Application de la convention dans la pratique. Ayant pris note des allégations formulées par les confédérations syndicales concernant la violation des droits syndicaux dans le secteur de l’ananas et de la banane, la commission a encouragé le gouvernement afin que l’Inspection du travail continue à effectuer des inspections dans ces secteurs pour y garantir le respect des droits syndicaux. La commission prend note des informations statistiques fournies par le gouvernement, d’où il ressort que, sur les 71 visites d’inspection dans le secteur de l’ananas et 82 dans le secteur de la banane effectuées en 2022-2023, 50 pour cent ou plus des visites ont abouti à la détection de violations. Tout en prenant note de ces informations, la commission observe que les centrales syndicales réitèrent leurs vives préoccupations et soulignent que: i) il est pratiquement impossible pour un syndicat d’assurer la représentation des travailleurs dans une exploitation de bananes ou d’ananas; ii) des inspections du travail sont peu fréquentes ou sont effectuées après que l’entreprise a été informée, le tout avec l’accord du ministère du travail et de la sécurité sociale; et iii) en termes de liberté syndicale, l’inspection du travail ne fait aucun travail de prévention. La commission prend bonne note des préoccupations exprimées et prie le gouvernement de s’assurer que l’Inspection du travail continue à procéder à des inspections dans le secteur de l’ananas et de la banane afin de garantir le respect des droits syndicaux. Constatant en outre que les informations fournies ne permettent pas de savoir clairement si les inspections ont été effectuées d’office ou à la demande d’une partie, ni ce qui a motivé les inspections ou la nature des violations constatées, la commission prie le gouvernement d’inclure ces informations lors de la transmission d’informations détaillées sur les inspections effectuées, et d’indiquer leurs résultats, en y incluant le nombre et la nature des violations éventuellement identifiées ainsi que les sanctions imposées. La Commission prie également le gouvernement de répondre aux préoccupations exprimées par les confédérations syndicales.
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