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417. Par deux communications en date des 15 et 14 mars 1957 respectivement, la Confédération internationale des syndicats libres et la Fédération internationale des journalistes libres de l'Europe centrale et orientale et des pays baltes et balkaniques ont déposé devant l'O.I.T des plaintes alléguant qu'il serait porté atteinte à l'exercice des droits syndicaux en Hongrie.
417. Par deux communications en date des 15 et 14 mars 1957 respectivement, la Confédération internationale des syndicats libres et la Fédération internationale des journalistes libres de l'Europe centrale et orientale et des pays baltes et balkaniques ont déposé devant l'O.I.T des plaintes alléguant qu'il serait porté atteinte à l'exercice des droits syndicaux en Hongrie.- 418. De ces deux plaintes, l'une a trait à la situation générale du syndicalisme en Hongrie, l'autre porte sur des aspects plus limités des droits syndicaux ; d'autre part, le gouvernement a présenté des observations séparées sur chacune des plaintes. Pour ces raisons et dans un souci de clarté, les deux plaintes soumises à l'O.I.T sont analysées ci-dessous séparément.
- Plainte de la Confédération internationale des syndicats libres
- 419. Après avoir rappelé les décisions prises par le Conseil d'administration lors de ses 133ème et 134ème sessions (Genève, novembre 1956 et mars 1957) au sujet des deux cas hongrois qui ont déjà fait l'objet d'un rapport de la part du Comité, le plaignant dit considérer que les autorités hongroises n'ont pas montré qu'elles étaient disposées à prendre en considération les recommandations formulées par le Conseil d'administration en vue d'assurer la liberté et l'indépendance aux syndicats hongrois. C'est pourquoi il dépose une nouvelle plainte devant l'O.I.T afin - dit-il - que le Conseil d'administration puisse l'examiner et prendre toutes les mesures qui sont en son pouvoir aux fins de porter remède aux violations de la liberté syndicale dont le gouvernement hongrois se serait rendu coupable.
- 420. La plainte de la Confédération internationale des syndicats libres contient les allégations suivantes:
- a) Le Comité exécutif provisoire de la Confédération nationale des syndicats libres hongrois, constitué à Budapest le 31 octobre 1956, aurait été dissous par le gouvernement Kadar.
- b) Le gouvernement aurait détruit la « représentation authentique des travailleurs » qu'auraient constituée les « conseils de travailleurs » institués au moment de l'insurrection sur le plan de l'entreprise, sur le plan local et sur le plan national, en promulguant un décret imposant de nouvelles élections et en arrêtant de nombreux dirigeants desdits conseils, parmi lesquels M. Sandor Racz et M. Sandor Bali, respectivement leader et membre du Conseil central des travailleurs.
- c) Un décret-loi du 12 janvier 1957 aurait été promulgué, introduisant une procédure sommaire pour un certain nombre de « crimes », parmi lesquels toute action visant à faire cesser ou à désorganiser le travail dans les entreprises d'utilité publique, c'est-à-dire toutes les entreprises comptant plus de 100 ouvriers. D'après cette nouvelle législation, il n'est plus besoin d'établir d'accusation écrite et il est institué des cours martiales dans l'ensemble du pays. Cette législation, dont le but serait d'intimider les travailleurs afin qu'ils s'abstiennent d'exercer une activité syndicale authentique et indépendante, se serait déjà traduite par des arrestations massives opérées parmi les travailleurs.
- d) Un décret du 20 janvier 1957 investirait le ministre des forces armées d'un pouvoir de contrôle sur les associations culturelles et professionnelles ; en application de ce décret, l'entrée en vigueur d'un autre décret aurait été annoncée ; d'après ce dernier texte, des milices d'usine armées, composées de personnes appointées, seraient bientôt créées et auraient la charge de « défendre le régime » dans les milieux ouvriers. Ces mesures - allègue le plaignant - enlèvent aux travailleurs toute possibilité d'exercer une activité syndicale indépendante.
- 421. Sur le plan juridique, le plaignant fait valoir que les faits rapportés ci-dessus constituent autant d'atteintes aux principes contenus dans la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et notamment aux stipulations selon lesquelles les travailleurs ont le droit de constituer des organisations de leur choix, d'élire librement leurs représentants, etc., et selon lesquelles les autorités publiques doivent s'abstenir de toute intervention de nature à limiter l'exercice des droits syndicaux et ne sauraient dissoudre les organisations syndicales par voie administrative.
- 422. En conclusion, l'organisation plaignante demande au Conseil d'administration : a) de constater que la politique en matière syndicale adoptée par le gouvernement Kadar constitue une violation continuelle des engagements que chaque gouvernement Membre de l'O.I.T est tenu d'observer ; b) de porter à la connaissance publique les faits dénoncés dans sa plainte ; c) de prendre toutes dispositions possibles au pouvoir de l'O.I.T afin qu'en Hongrie : on admette le principe de l'indépendance des syndicats à l'égard du « Parti », ce dernier s'identifiant strictement au gouvernement, et on abroge les mesures contraires à ce principe ; on libère les personnes exerçant des fonctions syndicales qui ont été arrêtées ; on abroge les dispositions de la loi et les mesures qui constituent une intimidation à l'égard des travailleurs en ce qui concerne les activités syndicales ; on supprime le contrôle et la supervision des organisations syndicales de la part du ministre des forces armées et de la sécurité interne ; on supprime les « milices d'usine » exerçant leur activité dans les lieux de travail ; on rétablisse enfin, d'une façon générale, une complète liberté syndicale par l'abrogation de toutes les dispositions législatives et administratives qui entravent cette liberté.
- Plainte de la Fédération internationale des journalistes libres de l'Europe centrale et orientale et des pays baltes et balkaniques
- 423. Après avoir indiqué à son tour que, comme les autres organisations professionnelles, les associations de journalistes ont été placées en Hongrie sous le contrôle direct du ministre des Forces armées et de la Sécurité intérieure, le plaignant allègue plus précisément que l'Union hongroise des journalistes a été dissoute et que plusieurs journalistes ou écrivains ont été arrêtés et sont menacés d'être inculpés en raison des opinions qu'ils ont exprimées. Parmi les personnes qui auraient ainsi été arrêtées, l'organisation plaignante cite les noms de MM. Gyula Hay, Zoltan Zelk, Domobas Varga, Tibor Kardos, Balaza Lengyel, Sandor Novovacky, Pal Loecsei et Gabor Folly.
- ANALYSE DES REPONSES
- 424. Par deux communications en date des 14 et 21 mai 1957, le gouvernement hongrois a présenté ses observations, respectivement, sur la plainte de la Confédération internationale des syndicats libres et sur celle de la Fédération internationale des journalistes libres de l'Europe centrale et orientale et des pays baltes et balkaniques. Ces deux communications sont analysées ci-dessous séparément.
- Observations du gouvernement sur la plainte de la C.I.S.L.
- 425. Dans sa réponse, le gouvernement commence par affirmer que la plainte de la C.I.S.L se fonde exclusivement sur des données erronées et tendancieuses qui visent à donner un tableau inexact de la situation des syndicats en Hongrie et laisse entendre que la C.I.S.L n'a obéi, en déposant sa plainte, qu'à des motifs politiques totalement étrangers à tout souci de défense des droits syndicaux. Si le gouvernement tient à présenter néanmoins des observations - précise-t-il dans sa réponse - c'est, d'une part, pour rétablir la vérité, d'autre part, pour donner une preuve de sa volonté de collaborer le plus pleinement possible avec l'Organisation internationale du Travail et ses différents organes.
- 426. Relevant ensuite l'allusion faite par l'organisation plaignante aux décisions prises au sujet de la Hongrie par le Conseil d'administration lors de ses 133ème et 134ème sessions, le gouvernement rappelle, en les résumant, les observations qu'il avait présentées en son temps sur lesdites décisions.
- 427. Passant ensuite aux allégations spécifiques formulées dans la plainte de la C.I.S.L, le gouvernement hongrois fait valoir ce qui suit.
- 428. Les événements contre-révolutionnaires qui se sont déroulés en Hongrie en automne 1956 ont eu une série de répercussions sur le fonctionnement normal des syndicats. Au cours de cette période troublée, des organes directeurs syndicaux, des comités d'entreprise, des responsables syndicaux ont été écartés par la violence. C'est sans doute à ces actes que la C.I.S.L entend faire allusion lorsqu'elle parle de la « liberté qui venait d'être instaurée en Hongrie par la volonté de tout un peuple ». C'est à la même époque qu'un comité directeur provisoire a été désigné arbitrairement au sein du Conseil central des syndicats. N'ayant reçu son mandat ni du Conseil central des syndicats ni de la présidence de celui-ci, et encore moins des membres des syndicats, ce comité directeur provisoire ne saurait avoir pris de décisions valables au nom du mouvement syndical. D'ailleurs, aussitôt que, conformément aux statuts syndicaux, le Conseil central des syndicats a été en mesure de se réunir, il a désavoué le Comité exécutif provisoire (session des 25 et 26 janvier 1957).
- 429. Cependant - précise le gouvernement - il s'agit là d'une affaire strictement interne aux syndicats. Ni le gouvernement hongrois ni les troupes soviétique stationnant en Hongrie aux termes du Traité de Varsovie et appelées à l'aide par le gouvernement pour écraser les forces contre-révolutionnaires n'ont eu quoi que ce soit à faire avec le fonctionnement du Comité exécutif provisoire ou avec l'élection des organes directeurs des syndicats. Contrairement à l'affirmation contenue dans la plainte de la C.I.S.L, rien ne permet de supposer que le gouvernement hongrois ait procédé à la dissolution du Comité exécutif provisoire.
- 430. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle les syndicats hongrois seraient inféodés au Parti communiste ou au gouvernement, ce dernier, dans sa réponse, rappelle qu'il a déjà, à plusieurs reprises, exposé son point de vue à ce sujet. Il souligne cependant à nouveau les faits suivants. Le Parti socialiste ouvrier hongrois est une organisation politique constituée par les travailleurs hongrois sur la base de l'adhésion volontaire ; cette organisation a pour but de former une politique conforme aux intérêts des classes laborieuses. De leur côté, les syndicats hongrois sont des associations volontaires de travailleurs créées pour la protection des intérêts de ces derniers. Ainsi, si les deux organisations visent à créer une situation conforme aux intérêts des travailleurs, leurs caractères distincts font que leurs activités s'exercent dans des domaines différents. En Hongrie, contrairement à ce qui se produit dans de nombreux pays, il n'est pas besoin d'être membre d'un parti politique pour pouvoir remplir des fonctions de direction syndicale. D'ailleurs, la direction suprême des syndicats hongrois comprend des fonctionnaires sans affiliation à un parti politique.
- 431. Le gouvernement signale à cet égard que la déclaration de M. Kadar, que la C.I.S.L a cru bon de citer, a été citée par cette organisation de façon erronée et incomplète. La déclaration de M. Kadar était en réalité conçue en ces termes : « Le Parti doit être le dirigeant idéologique et politique de la classe ouvrière et c'est dans ce sens qu'il doit influencer les syndicats également. Mais c'est justement sur la base du point de départ idéologique commun qu'il va de soi que le syndicat doit vivre sa vie indépendamment. S'il n'en est pas ainsi, le Parti aussi en éprouvera du dommage, car le prestige du Parti ne sera pas augmenté par le fait que l'on intervient autoritairement dans la vie quotidienne du syndicat, dans ses questions de tous les jours. Par indépendance, j'entends également ceci : il n'est pas convenable que tous les organes du Parti prennent des décisions spéciales qui obligent l'organe syndical relevant de leur compétence. Certes, un organe du Parti peut et doit prendre une décision concernant une question dont s'occupe le syndicat également, en y précisant son propre point de vue. Mais ce point de vue ne comporte une obligation que pour les membres du Parti et, si les membres du Parti prennent la parole à la réunion d'un organe syndical, ils doivent soutenir cette position. Ils ont pour armes la conviction et l'argumentation : ils ont à démontrer que cette position est juste. Au lieu d'arguments, on ne peut pas dire : il faut faire telle ou telle chose, parce qu'un comité exécutif quelconque du Parti en a décidé ainsi. »
- 432. Le fait que certains membres du gouvernement sont issus des rangs du Parti, avec lequel les syndicats, pour certaines questions, travaillent en collaboration, loin d'aboutir à ce que ces syndicats dépendent du gouvernement, signifie, au contraire, que les premiers ont sur le second une grande influence. Ainsi, l'allégation de la C.I.S.L selon laquelle « le Parti s'identifiant en Hongrie au gouvernement, il en découle une dépendance complète des syndicats à l'égard du gouvernement » est loin d'être prouvée par la citation erronée contenue dans la plainte. Au contraire, la citation authentique reproduite ci-dessus souligne précisément la nécessité de l'indépendance des syndicats.
- 433. En ce qui concerne la partie de la plainte qui concerne les conseils ouvriers, l'affirmation selon laquelle « les travailleurs hongrois ont constitué des conseils de travailleurs... avec la tâche de défendre les intérêts des travailleurs » n'est pas conforme à la vérité. La constitution des conseils ouvriers d'entreprise a été proposée par la Présidence du Conseil central des syndicats dans un projet publié le 25 octobre 1956. Ce projet ne fixait pas aux conseils ouvriers la tâche de défendre les intérêts des travailleurs et de les représenter, mais bien de participer à la direction économique des entreprises. Le passage du projet concernant les tâches des conseils ouvriers avait la teneur suivante : « Le conseil ouvrier décide de toute affaire concernant la production, l'administration et l'économie du lieu de travail. » Lorsque le plaignant déclare que « les conseils de travailleurs ont été transformés en organes de gestion des entreprises », il semble s'ériger contre le fait que les conseils ouvriers ne sont pas en mesure de déployer une activité de caractère syndical. Or les conseils ouvriers n'ont jamais été constitués pour déployer des activités syndicales ; ils ne sauraient avoir été « transformés » en organes d'administration puisqu'ils ont toujours, et dès le début, revêtu ce caractère. On ne saurait concevoir en effet que l'organe directeur d'une entreprise exerce en même temps des fonctions de défense des intérêts des travailleurs, représente en somme à la fois les travailleurs et les employeurs et protège des intérêts souvent divergents. Les conseils ouvriers n'étant pas des organes ayant un caractère syndical et n'étant pas destinés à la défense des intérêts professionnels, les questions qui se posent relativement à ces conseils ne relèvent pas de la compétence du Comité de la liberté syndicale.
- 434. L'allégation selon laquelle, en décrétant la réélection des conseils ouvriers, le gouvernement aurait détruit « la représentation authentique des travailleurs » est également dénuée de tout fondement. L'élection des premiers conseils ouvriers est loin d'avoir été démocratique. Les conseils ouvriers ont été constitués à une époque où des éléments contre-révolutionnaires sévissaient en Hongrie dans l'intention de renverser l'ordre légal de l'Etat hongrois et s'efforçaient de s'infiltrer dans les organes administratifs. A cette époque, la plupart des ouvriers ne se trouvaient pas dans les usines ; les éléments contre-révolutionnaires, en plusieurs endroits, désignèrent tout simplement les membres des conseils ouvriers. C'est ainsi que certains éléments résolument hostiles à la cause de la classe ouvrière réussirent à prendre pied dans les conseils ouvriers. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le gouvernement hongrois a jugé opportun de faire réélire les conseils ouvriers, de manière démocratique cette fois. L'article 2 du décret no 2 du 16 novembre 1956 du gouvernement porte que : « ... étant donné, cependant, que les conseils ouvriers actuellement en fonction n'ont pas été élus partout par la majorité des travailleurs, la réélection des conseils ouvriers doit avoir lieu dans chaque usine et en chaque lieu de travail, avec la participation de tous les travailleurs de l'usine, dans les trois semaines après la reprise du travail. »
- 435. Après avoir rappelé que l'organisation plaignante signalait le fait que des conseils ouvriers avaient également été constitués sur le plan local et national, le gouvernement déclare qu'en dissolvant ces conseils ouvriers, il a procédé conformément à la Constitution hongroise et à l'ordre légal hongrois. En effet, précise le gouvernement dans sa réponse, les conseils ouvriers constitués sur le plan local et national doivent être considérés comme représentant moins encore les intérêts des travailleurs que les conseils ouvriers d'entreprise. Les conseils ouvriers constitués sur le plan local ou national s'étaient fixé des objectifs politiques : ils prétendaient prendre en main ou influencer les organes locaux et centraux du pouvoir d'Etat et de l'administration d'Etat dans le but d'assumer, sur les plans local et national, la direction politique. Or les dispositions de la Constitution de la République populaire hongroise interdisent que ces tâches centrales et locales d'intérêt national soient exécutées par des organes du pouvoir d'Etat et de l'administration d'Etat élus contrairement à la loi. Selon l'article 30 de la Constitution hongroise, les organes locaux du pouvoir d'Etat (conseils locaux) sont élus par les électeurs de la circonscription électorale intéressée sur la base des principes établis pour les élections parlementaires. D'après l'article 62 de la Constitution, ces principes sont : le suffrage universel, égal et direct, et le scrutin secret. La constitution des conseils ouvriers sur le plan local et national ne s'était donc pas déroulée conformément aux principes qui viennent d'être rappelés et aux règles juridiques établies pour les garantir. Par conséquent, c'est précisément en procédant à la dissolution de ces organes que le gouvernement hongrois s'est conformé à la loi.
- 436. Le gouvernement signale en outre qu'en réalité, ni le conseil ouvrier de Budapest, qui s'était constitué d'une manière illégale, ni les conseils ouvriers sous son influence n'élevaient de revendications de caractère syndical et n'exerçaient de fonctions syndicales ; ils élevaient presque exclusivement des revendications de caractère politique, et les grèves organisées par eux revêtaient un caractère exclusivement politique.
- 437. « Lorsque les autorités hongroises - déclare le gouvernement dans sa réponse -, conformément à la procédure criminelle, ont poursuivi en justice certains éléments qui s'étaient infiltrés dans les conseils ouvriers et s'étaient organisés en vue de renverser l'ordre légal, elles n'ont pas poursuivi des personnes remplissant des fonctions syndicales, encore moins pour la raison que ces personnes déployaient des activités syndicales. » Les arrestations opérées l'ont été à la suite de délits dont ceux qui en ont été l'objet s'étaient rendus coupables (incitation à la révolte contre l'ordre étatique, recel d'armes, etc.) ; ces délits, selon la procédure criminelle hongroise, étaient qualifiés, même avant le mois d'octobre 1956, de délits criminels et ils sont qualifiés comme tels par la procédure criminelle de tous les Etats. C'est pour des délits de cet ordre et conformément à la loi pénale en vigueur que MM. Sandor Racz et Sandor Bali, tous deux mentionnés par la C.I.S.L, ont été arrêtés.
- 438. En ce qui concerne l'aspect de la plainte de la C.I.S.L, qui se réfère à la procédure criminelle accélérée, le gouvernement fait valoir ce qui suit la Hongrie a été le théâtre d'une insurrection contre-révolutionnaire qui était soutenue par des forces réactionnaires étrangères et qui avait pour but de renverser l'ordre légal du pays. La sauvegarde de l'ordre étatique constitutionnel a nécessité des mesures extraordinaires conformes à la Constitution hongroise et aux principes juridiques constitutionnels. De telles mesures sont prises par tout Etat dans le cas d'une révolte dirigée contre lui. Parmi ces mesures, figuraient des mesures d'ordre juridique, caractérisées par leur application exceptionnelle et d'ailleurs entièrement conformes aux normes internationales applicables en pareilles circonstances et accompagnées des garanties nécessaires de légalité. « La mise en vigueur de la procédure criminelle accélérée trouve sa justification dans les circonstances qui suivirent la répression des forces armées de la contre-révolution. »
- 439. A la suite des événements de l'automne 1956, la Hongrie connut une période extrêmement critique ; on put craindre que les besoins vitaux de la population ne pourraient être satisfaits. Les forces dispersées de la contre-révolution s'attachèrent à empêcher la normalisation des conditions ; l'attaque ouverte ayant échoué, elles s'efforcèrent, par l'intimidation et la violence, d'entraver la reprise du travail producteur ; des groupes armés occupèrent les mines et les usines et en interdirent l'accès aux travailleurs. Les éléments contre-révolutionnaires ouvrirent les portes des prisons et armèrent les condamnés de droit commun. Il s'ensuivit une situation anarchique où la vie et les biens des citoyens étaient constamment menacés. Dans ces conditions, il était du devoir du gouvernement d'empêcher les mésactions des bandits libérés, d'assurer le cours normal du travail producteur et de protéger la vie et les biens des citoyens. Le décret-loi no 4 de 1957 sur la procédure criminelle accélérée visait à « consolider l'ordre public et la sécurité générale et à rendre plus effective la lutte contre les actes contre-révolutionnaires ». Cette procédure accélérée n'est applicable qu'aux délits les plus graves dirigés contre l'Etat et revêtent le caractère d'un sabotage.
- 440. Les garanties légales du Code de procédure sont applicables également dans le cadre de la procédure accélérée. En cas d'arrestation, le procureur doit ordonner, dans les 72 heures, la détention préalable ; la durée maximum de la détention préalable est limitée ; la publicité, la spontanéité, l'appréciation souveraine du juge, la procédure contradictoire prévalent. En outre, le condamné peut se pourvoir en cassation au sujet d'un jugement qu'il considère comme préjudiciable. Des peines autres que la peine capitale peuvent être infligées dans le cadre de la procédure accélérée. En appréciant toutes les circonstances de l'affaire, le tribunal, au lieu de la peine capitale, peut infliger une peine de réclusion à perpétuité ou des peines allant de cinq à quinze ans. « Cette règle permet au tribunal saisi de l'affaire d'appliquer dans une large mesure le principe de l'individualisation de la peine et d'infliger une peine conforme à la gravité réelle du crime commis et au vrai degré du danger social qu'il comporte. »
- 441. L'allégation selon laquelle des arrestations massives auraient été opérées parmi les travailleurs est dénuée de tout fondement. Au cours des deux mois qui suivirent l'introduction de la procédure accélérée, les tribunaux, sur la base du décret-loi no 4 de 1957 mentionné plus haut, ont condamné en premier ressort 54 personnes en tout ; parmi ces 54 personnes, 23 ont été condamnées pour meurtre, brigandage ou pillage, 22 pour recel d'armes et 9 pour avoir organisé un complot contre l'Etat. En ce qui concerne les peines infligées, bien que la loi permette d'infliger la peine de mort pour les délits de cet ordre, les tribunaux n'ont prononcé que trois sentences de mort, dont deux pour meurtre. Plus de la moitié des condamnés étaient des repris de justice. Dans ces conditions, déclare le gouvernement, « la juridiction doit être considérée plutôt comme modérée et indulgente que sévère et impitoyable ».
- 442. La plainte de la C.I.S.L donne l'impression que le décret-loi sur la procédure accélérée prescrit l'infliction d'une peine pour l'organisation de grèves. Aucune règle juridique du Code criminel hongrois - y compris le décret-loi no 4 de 1957 - ne prescrit l'infliction d'une peine pour l'organisation d'une simple grève. Les délits définis par l'article 1, alinéa f), du décret-loi no 4 constituent « des crimes figurant dans la notion de sabotage et autres actes de destruction, et l'effet du décret-loi ne s'étend sur ceux-là que s'ils visent un arrêt massif du travail ou comportent, par ailleurs, un grand danger». Les délits de ce genre, ajoute le gouvernement, sont passibles des peines les plus sévères dans tous les Etats. « Conscient du fait que les masses reconnaissent leurs intérêts véritables, le gouvernement, loin de punir les simples grévistes, a permis de payer les salaires pour la durée de la grève. » La procédure criminelle accélérée n'a donc aucunement pour conséquence de restreindre le droit syndical des travailleurs.
- 443. En évoquant le décret no 3 de 1957 du gouvernement, déférant provisoirement la surveillance, du point de vue de la sécurité de l'Etat, des associations affectées par le décret-loi no 18 de 1955 à la compétence du ministre des Forces armées et de la Sécurité publique, la C.I.S.L aboutit à la conclusion que le gouvernement a rendu impossible l'exercice des activités syndicales libres. Or l'effet du décret-loi no 18 de 1955 et, par suite, du décret no 3 de 1957, ne s'étend pas aux syndicats hongrois.
- 444. Le plaignant prétend d'autre part que la milice ouvrière est « chargée de défendre le régime dans les milieux ouvriers». Le décret no 3 de 1957 stipule que les unités de la milice ouvrière doivent être recrutées parmi les travailleurs sur la base de l'adhésion volontaire ; cette milice a pour tâche d'assurer la paix du peuple des travailleurs et de repousser les tentatives de restauration des éléments contre-révolutionnaires. Il n'existe donc aucun rapport entre les milices ouvrières et les syndicats. Les premières n'interviennent en rien dans l'action des seconds, ni dans les usines ni ailleurs. Les milices ouvrières sont d'ailleurs organisées sur une base territoriale et non sur le plan de l'usine ou de l'entreprise.
- 445. Sur le terrain du droit, le gouvernement, dans sa réponse, fait valoir ce qui suit. Le gouvernement hongrois n'a pas violé l'article 4 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, puisqu'il n'a pas dissous le Comité exécutif provisoire, comité qui avait d'ailleurs été constitué au mépris des règles syndicales et ne saurait donc être considéré comme ayant été une organisation de travailleurs.
- 446. Conformément à l'article 2 de la convention no 87, les travailleurs hongrois ont le droit de constituer des syndicats de leur choix sans aucune discrimination ni autorisation préalable. En Hongrie, les syndicats jouissent d'une autonomie complète ; les organismes d'Etat ne peuvent s'ingérer dans la vie intérieure des syndicats.
- 447. Les conseils ouvriers sont des organes d'administration qui dirigent l'activité des entreprises ; ils ne sont pas et n'ont jamais été chargés de la défense des intérêts des travailleurs et n'entrent pas dans la catégorie des organisations définies à l'article 10 de la convention no 87. Par conséquent, toutes les mesures prises au sujet des conseils ouvriers ne se rapportent en rien à la garantie de la liberté syndicale.
- 448. L'arrestation de M. Sandor Racz, président du Conseil central ouvrier, ainsi que de certains éléments qui s'étaient infiltrés dans les conseils ouvriers, a été opérée à la suite de délits dont ces personnes se sont rendues coupables et non pas en raison des fonctions syndicales qu'elles auraient occupées. La procédure criminelle ouverte contre elle n'a donc constitué d'aucune façon une violation de l'article 3, alinéa 2, de la convention no 87.
- 449. La loi prescrit l'infliction d'une peine non pas pour l'arrêt du travail, mais pour les actes de sabotage et autres actes de destruction. Ici non plus, il n'est pas porté atteinte à l'article 3 de la convention no 87.
- 450. En guise de conclusion, le gouvernement hongrois demande au Conseil d'administration de prendre la position suivante:
- « Le gouvernement hongrois garantit la liberté syndicale. Bien que, par rapport à l'exécution de la convention no 87, aucune obligation internationale formelle n'incombe à la Hongrie, les dispositions comprises dans la convention se font déjà valoir en Hongrie. Le Conseil d'administration prend acte de la notification du gouvernement hongrois lui faisant savoir que la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, seront ratifiées, dans un proche avenir, par le Conseil de la présidence de la République populaire. Sur la base des informations authentiques données par le gouvernement hongrois, les allégations comprises dans la plainte du C.I.S.L se sont révélées contraires aux faits réels. Vu que le gouvernement hongrois garantit la liberté syndicale : a) il n'est pas besoin de prendre des dispositions pour abroger des mesures contraires à la liberté syndicale ; b) personne n'a été arrêté pour avoir déployé des activités syndicales ; aucun fonctionnaire syndical élu ne se trouve en état d'arrestation ; c) il n'y a pas de dispositions qui constituent une intimidation à l'égard des travailleurs en ce qui concerne les activités syndicales ; par contre, les règles juridiques hongroises assurent aux syndicats de vastes pouvoirs dans leurs activités de protection des intérêts des travailleurs ; d) les syndicats jouissent d'une autonomie complète ; le ministre des Forces armées et de la Sécurité publique et les organes policiers n'exercent pas la supervision des organisations syndicales ; e) la milice ouvrière n'a aucune influence sur les activités des syndicats ; f) en Hongrie, il n'y a pas de dispositions légales ou administratives restreignant la liberté syndicale dans une mesure quelconque. »
- Observations du gouvernement sur la plainte de la Fédération internationale des journalistes libres
- 451. Dans sa réponse, le gouvernement déclare tout d'abord estimer que la plainte de la Fédération internationale des journalistes libres fonde son argumentation sur « une présentation tendancieuse des événements, la défiguration des faits réels et sur des calomnies et sert expressément des considérations politiques ».
- 452. Le gouvernement indique ensuite que l'Union nationale des journalistes hongrois - mentionnée par le plaignant - n'est pas l'organe de représentation syndicale des intérêts des journalistes. L'organe de représentation syndicale des journalistes est le Syndicat des travailleurs de l'imprimerie et de l'industrie du papier. Le gouvernement précise ici qu'il est question de créer un groupe syndical indépendant de journalistes au sein de ce syndicat. L'Union nationale des journalistes hongrois n'étant pas un organe de représentation syndicale, il s'ensuit - poursuit le gouvernement - que les questions relatives à cette union ne sont pas du ressort du Comité de la liberté syndicale.
- 453. L'allégation selon laquelle l'Union nationale des journalistes hongrois aurait été dissoute par le gouvernement est dénuée de fondement. Au cours des événements d'octobre et novembre 1956, des éléments contre-révolutionnaires se sont emparés de la direction de l'Union nationale des journalistes hongrois. Le club de l'Union est resté un foyer contre-révolutionnaire même après l'écrasement de la tentative armée visant au renversement de l'ordre étatique et social de la République populaire hongroise. Le gouvernement hongrois, lorsqu'il a poursuivi en justice les forces contre-révolutionnaires qui existaient encore et développaient des activités visant au renversement de l'ordre étatique et social, a pris également les mesures nécessaires en ce qui concerne le fonctionnement, contraire aux règles juridiques, de l'Union nationale des journalistes hongrois. Ces mesures ont été prises en pleine conformité avec les règles juridiques en vigueur, instituées d'ailleurs avant les événements de l'automne 1956.
- 454. L'article 55, alinéa 1, et l'article 56, alinéa 2, de la Constitution hongroise garantissent, conformément aux intérêts des travailleurs, la liberté de parole, la liberté de la presse, la liberté de réunion et d'association. Les mesures prises par le gouvernement avaient précisément pour but de défendre ces libertés contre tous ceux dont l'activité est dirigée contre l'Etat et l'ordre légal, donc contre les intérêts des travailleurs.
- 455. En vertu du décret-loi no 18 de 1955, les associations sont enregistrées, aux fins de contrôle, par l'organe de supervision. Les associations nationales sont soumises à la supervision et au contrôle du ministre compétent. En vertu de l'article 13, alinéa 2, du décret-loi, si la direction d'une association met en danger le fonctionnement de l'association, l'organe de supervision suspend l'autonomie de l'association et désigne un commissaire de surveillance (commissaire du gouvernement) à la direction de l'association. Si le fonctionnement de l'association viole ou compromet l'ordre étatique ou social de la République, donc les intérêts de citoyens, l'organe de supervision dissout l'association. C'est sur la base de ces dispositions que le gouvernement a non pas dissous l'Union nationale des journalistes hongrois ainsi que l'allègue le plaignant, mais suspendu temporairement son autonomie en attendant que l'assemblée générale des journalistes élise une nouvelle direction, et a désigné à la tête de l'Union un commissaire du gouvernement chargé d'en assurer le contrôle. D'ailleurs - précise le gouvernement - la suspension de l'autonomie n'entraîne pas l'arrêt du fonctionnement de l'association ; sous la direction du commissaire du gouvernement désigné, le personnel de l'Union continue à accomplir toutes ses tâches comme auparavant.
- 456. L'Union des écrivains hongrois - un groupe actif des membres de cette union s'étant servi d'elle comme d'un moyen d'attaque contre l'ordre social de la République - a été dissoute par le ministère de l'Intérieur en vertu de l'article 13 du décret-loi mentionné ci-dessus.
- 457. Il est exact que les associations sont soumises - sur la base du décret no 3 du 20 janvier 1957 - à la supervision et au contrôle du ministre des Forces armées et de la Sécurité publique ; toutefois, en vertu de l'article 2 de ce décret, c'est le ministère de l'Intérieur qui est chargé en fait d'exercer la surveillance.
- 458. Les syndicats ne sont pas considérés comme des « associations » et jouissent en Hongrie d'une autonomie complète. Le décret-loi no 18 de 1955 ne leur est pas applicable.
- 459. En ce qui concerne l'arrestation de certains journalistes et écrivains hongrois, le gouvernement présente les observations suivantes. Il découle du principe de l'égalité des citoyens devant la loi (article 49 1) de la Constitution hongroise) que toute personne - sans égard à sa profession - qui commet un délit constituant une infraction aux règles juridiques en vigueur doit être poursuivie en justice selon les règles ordinaires de la procédure. Il n'est pas fait d'exception pour les journalistes et les écrivains ; parmi ceux-ci, ceux qui ont été poursuivis l'ont été non pas « pour avoir usé du droit de liberté d'expression », comme l'affirme le plaignant, mais pour avoir commis des crimes et déployé une activité aboutissant à des meurtres et à des actes de terrorisme. A la suite des actes de subversion dont ils se sont rendus coupables, ils ont été condamnés en vertu du Code pénal déjà en vigueur avant le mois d'octobre 1956.
- 460. Le gouvernement hongrois estime à cet égard que tout Etat a le droit incontestable de poursuivre en justice, dans le cadre de l'exercice de sa souveraineté, tous ceux qui commettent des délits visant au renversement de l'ordre étatique légal. Il soutient donc fermement la position que la question de l'arrestation de certains journalistes et écrivains hongrois constitue une affaire intérieure de la République populaire hongroise et estime que la question n'entre donc pas dans les attributions d'organisations internationales.
- 461. Les droits de l'homme et les libertés fondamentales sont pleinement garantis par la Constitution nationale. Celle-ci garantit également la liberté de réunion et d'association. Provisoirement, l'exercice de ces droits est soumis à une autorisation gouvernementale ; la raison de cette restriction réside dans le fait que, pendant les événements contre-révolutionnaires, l'abus de la liberté de réunion et d'association avait abouti à des délits de droit commun et à des actes de terrorisme. La mesure prise par le gouvernement hongrois a pour but d'instituer une liberté de réunion et d'association au service des objectifs pacifiques énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme.
- 462. En résumé - déclare le gouvernement - on peut constater que les mesures prises par le gouvernement hongrois concernant l'Union nationale des journalistes hongrois et l'Union des écrivains hongrois ainsi que certains journalistes et écrivains hongrois, ne constituent pas - contrairement à ce qu'allègue le plaignant - des violations de la Charte des Nations Unies ou de la Déclaration universelle des droits de l'homme.
- 463. En conclusion, le gouvernement exprime l'espoir « que les organes compétents de l'Organisation internationale du Travail, après avoir procédé, sur la base des renseignements fournis par le gouvernement hongrois et après une étude objective de la plainte de la Fédération internationale des journalistes libres, seront amenés à constater que la discussion de la plainte - qui est d'ailleurs dépourvue de tout fondement - n'entre pas dans les attributions de l'Organisation internationale du Travail et qu'elle relève d'autant moins de la compétence du Comité de la liberté syndicale ».
- 464. Le Comité a également noté que le Comité spécial des Nations Unies pour la question de Hongrie a présenté (aux pages 101-102 et 105 de son rapport'), les observations suivantes sur la situation syndicale et sur la position des conseils ouvriers
- 539. Depuis 1947, les syndicats hongrois étaient devenus les instruments du gouvernement et finalement les agents du Parti des travailleurs hongrois (communiste). Depuis lors, ils ont été exclusivement utilisés pour établir les normes de production, fixer les conditions de travail et les salaires de façon à servir les intérêts de l'Etat. Leurs dirigeants étaient nommés par le gouvernement, sous les ordres du Parti, et le président du comité d'entreprise de chaque usine choisissait les membres du comité parmi les travailleurs en qui le Parti avait toute confiance. Un seul candidat a été choisi par voie d'élection, et il a été élu par un vote à main levée. Dans ces conditions, comme l'ont déclaré des témoins, les travailleurs cessèrent de considérer les syndicats comme des organismes qui les représentaient réellement et envisagèrent la création d'authentiques organisations de travailleurs, dont les membres ne reste raient pas indifférents devant leurs réclamations et revendications. Cette attitude critique à l'égard des syndicats s'était déjà largement répandue avant le soulèvement, et Népszava, organe central du Conseil national des syndicats, déclarait, le 9 septembre 1956, dans un éditorial : « En Hongrie, l'activité des syndicats a été détournée de ses objectifs propres et a suivi pendant des années une ligne fausse. Le moment est venu pour le mouvement syndical de redevenir de nouveau un véritable mouvement de travailleurs. »
- ......................................................................................................................................................
- 560. Le Comité conclut de son étude que les conseils révolutionnaires ont été créés à la suite d'un mouvement national et spontané des Hongrois qui voulaient diriger leurs affaires et leur vie. Ce mouvement, comme l'insurrection elle-même, a pris naissance sur le plan local, et il n'y a guère eu de contacts, au début, entre les différents groupes. Cependant, comme dans le cas des étudiants et des intellectuels, les revendications et les méthodes s'inspiraient de préoccupations très sensiblement identiques. Il est évident que la création de ces conseils répondait à un besoin qu'un grand nombre de Hongrois ressentaient.
- 561. Il en est de même des conseils d'ouvriers. Tous les témoins ont confirmé que le mécontentement à l'égard des syndicats du régime était l'un des plus sérieux griefs des travailleurs hongrois. En outre, les travailleurs réclamaient une participation effective à la direction de leurs entreprises respectives et c'est à cette fin qu'ils ont élu des conseils selon les principes démocratiques. Ces conseils ont aussitôt assumé de lourdes responsabilités dans les usines, les mines et les autres entreprises ; et ils ont exercé une influence considérable sur le gouvernement, avec lequel les délégations de plusieurs conseils étaient en contact direct. L'appui sans réserve que les Hongrois ont accordé aux conseils d'ouvriers confirme l'impression que ces organes étaient l'un des plus importants résultats obtenus par le peuple hongrois pendant ses quelques jours de liberté.
- Le 14 septembre 1957, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté par 60 voix contre 10, avec 10 abstentions, la résolution suivante:
- L'Assemblée générale,
- Rappelant la résolution 1132 (XI) du 10 janvier 1957, par laquelle elle a créé un Comité spécial, composé de représentants de l'Australie, de Ceylan, du Danemark, de la Tunisie et de l'Uruguay, chargé d'enquêter ainsi que d'établir et de maintenir un système d'observation directe en Hongrie et ailleurs, et, à cette fin, de recueillir des témoignages, de réunir des preuves et d'obtenir des renseignements, selon qu'il serait besoin,
- Ayant maintenant reçu le rapport unanime du Comité spécial pour la question de Hongrie,
- Regrettant que l'Union des Républiques socialistes soviétiques et les autorités hongroises actuelles n'aient coopéré en aucune manière avec le Comité,
- 1. Remercie le Comité spécial pour la question de Hongrie de ses travaux;
- 2. Fait sien le rapport du Comité ;
- 3. Note la conclusion du Comité selon laquelle ce qui s'est produit en Hongrie en octobre et novembre 1956 a été une insurrection nationale spontanée ;
- 4. Constate que les conclusions auxquelles le Comité a abouti après examen de tous les éléments de preuve disponibles confirment que:
- a) L'Union des Républiques socialistes soviétiques, en violation de la Charte des Nations Unies, a privé la Hongrie de sa liberté et de son indépendance politique et le peuple hongrois de l'exercice des droits fondamentaux de l'homme ;
- b) Le régime hongrois actuel a été imposé au peuple hongrois par l'intervention armée de l'Union des Républiques socialistes soviétiques ;
- c) L'Union des Républiques socialistes soviétiques a procédé à des déportations en masse de citoyens hongrois vers l'Union des Républiques socialistes soviétiques;
- d) L'Union des Républiques socialistes soviétiques a violé les obligations que lui imposent les Conventions de Genève de 1919 ;
- e) Les autorités hongroises actuelles ont violé les droits et libertés de l'homme garantis par le Traité de paix avec la Hongrie ;
- 5. Condamne ces actes et le mépris persistant des résolutions de l'Assemblée générale ;
- 6. Exprime de nouveau la préoccupation que lui inspire le sort qui continue d'être fait au peuple hongrois ;
- 7. Considère qu'il convient de déployer de nouveaux efforts pour réaliser les objectifs des Nations Unies en ce qui concerne la Hongrie, conformément aux buts et principes de la Charte et aux résolutions pertinentes de l'Assemblée générale ;
- 8. Fait appel à l'Union des Républiques socialistes soviétiques et aux autorités hongroises actuelles, étant donné les preuves consignées dans le rapport, pour qu'elles mettent fin aux mesures de répression prises contre le peuple hongrois, respectent la liberté et l'indépendance politique de la Hongrie et la jouissance par le peuple hongrois des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et assurent le retour en Hongrie des citoyens hongrois qui ont été déportés vers l'Union des Républiques socialistes soviétiques ;
- 9. Prie S.A.R le prince Wan Waithayakon, président de l'Assemblée générale à sa onzième session, agissant en tant que représentant spécial de l'Assemblée générale pour la question de Hongrie, de prendre les mesures qu'il jugera appropriées, étant donné les conclusions du Comité, pour réaliser les objectifs des Nations Unies conformément aux résolutions 1004 (ES-II), 1005 (ES-II), 1127 (XI), 1131 (XI) et 1132 (XI) de l'Assemblée générale, en date des 4 novembre 1956, 9 novembre 1956, 21 novembre 1956, 12 décembre 1956 et 10 janvier 1957, de consulter le Comité dans l'accomplissement de sa tâche s'il l'estime nécessaire, de faire rapport à l'Assemblée générale, et de formuler les recommandations qu'il jugera utiles ;
- 10. Décide d'inscrire la question de Hongrie à l'ordre du jour provisoire de la douzième session de l'Assemblée générale.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- Question préalable relative à la compétence du Comité
- 465 Dans ses réponses, le gouvernement hongrois soutient que les questions soulevées dans la plainte de la Fédération internationale des journalistes libres ainsi que certains aspects de la plainte de la Confédération internationale des syndicats libres échappent à la compétence du Comité de la liberté syndicale. A l'appui de ce point de vue, le gouvernement fait valoir que ni les conseils ouvriers, mentionnés dans la plainte de la C.I.S.L, ni l'Union nationale des journalistes hongrois, mentionnée par la Fédération internationale des journalistes libres, ne sont des organisations syndicales au sens de l'article 10 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
- 466 En ce qui concerne les conseils ouvriers, le Comité, dans le cadre du cas no 158 également relatif à la Hongrie, a déjà eu l'occasion de se prononcer. A ce propos, le Comité rappelait que, dans son premier rapport, il avait eu l'occasion d'étudier la signification des termes « organisations de travailleurs » pour déterminer quelles organisations étaient habilitées à présenter des plaintes au Comité. Il avait adopté alors à cette fin un critère inspiré des conclusions adoptées à l'unanimité par le Conseil d'administration en 1937, au sujet d'une réclamation du Parti travailliste de l'île Maurice présentée conformément à l'article 23 de la Constitution (actuellement article 24). Dans cette affaire, le Conseil avait affirmé que ce qu'il lui appartenait de rechercher, dans chaque cas d'espèce, c'était la qualité que possédait en fait une organisation, quelle que soit la dénomination qui lui est attachée et qui peut être commandée par des circonstances locales sans rapport avec son caractère réel. Dans le rapport qu'il avait approuvé, on peut lire notamment : « Dans un pays où l'organisation professionnelle des travailleurs et des employeurs ne serait pas entièrement libre, de véritables syndicats peuvent exister sous un nom dissimulant leur exacte identité. Dans un autre pays, une organisation professionnelle peut porter un nom qui paraîtrait l'apparenter à un parti politique. Le rôle du Conseil est, dans chaque cas, de rechercher, derrière l'apparence terminologique, si, quel que soit le nom que lui imposent les circonstances ou qu'elle a choisi, l'organisation dont émane la réclamation est une « organisation professionnelle ouvrière ou patronale » d'après le sens naturel de ces mots. En particulier, le Conseil ne saurait se laisser arrêter, en considérant le caractère professionnelle d'une organisation, par aucune définition nationale du terme « organisation professionnelle ». Dans le cas de l'île Maurice, le Conseil d'administration avait déclaré que si, pour décider du caractère professionnel ou non professionnel d'une organisation auteur d'une réclamation, le Conseil d'administration possède, dans les limites de la Constitution, une entière liberté d'appréciation et n'est pas lié par la terminologie législative ou coutumière de l'Etat intéressé, il n'en doit pas moins, avant de considérer éventuellement une réclamation comme recevable, avoir la conviction que l'organisation qui en est l'auteur est effectivement une organisation professionnelle ». Le Comité a réaffirmé également ces principes dans le cas no 137 mettant en cause le Brésil.
- 467 Lors de son examen du cas no 158 cité plus haut et relatif à la Hongrie, le Comité a considéré que les principes qui sont applicables en vue de déterminer si une organisation est habilitée à présenter une plainte au Comité étaient également applicables aux fins de déterminer si une organisation dont l'indépendance constitue l'objet d'une plainte soumise au Comité est une organisation à laquelle devrait s'appliquer la procédure pour l'examen des plaintes de violation de la liberté syndicale. Dans le cas des conseils ouvriers, le Comité avait jugé que les liens qui unissent ces derniers et les syndicats sont à ce point étroits que des mesures qui restreignent la liberté des uns restreignent également la liberté des autres. Il avait constaté, au vu du texte du décret-loi no 25 du 24 novembre 1956 communiqué en son temps par le gouvernement hongrois, que ce texte prévoyait une intervention importante des syndicats dans les conseils ouvriers ; ainsi, les élections des conseils ouvriers sont organisées par le syndicat de l'entreprise (article 3 1)), les représentants du comité du syndicat participent aux réunions du conseil ouvrier (article 5 2)) ainsi qu'aux réunions du présidium des conseils ouvriers (article 7 2)), le présidium du conseil ouvrier doit consulter le comité du syndicat avant de prendre une décision (article 9 5)), enfin il appartient aux conseils ouvriers de veiller à l'application des conventions collectives élaborées avec la participation des syndicats (article 8, 4)).
- 468 Dans le cas no 158, le Comité avait en conséquence considéré qu'il était compétent pour présenter un rapport au Conseil d'administration en ce qui concerne les allégations relatives aux conseils ouvriers.
- 469 En ce qui concerne l'Union nationale des journalistes hongrois, le gouvernement fait valoir que cette organisation n'est pas « l'organe de représentation syndicale des intérêts des journalistes », ces intérêts étant représentés par le Syndicat des travailleurs de l'imprimerie et de l'industrie du papier. Il s'ensuit - conclut le gouvernement - que l'étude des questions concernant l'Union nationale des journalistes hongrois - cette union n'étant pas un organe de représentation syndicale - n'entre pas dans les attributions du Comité de la liberté syndicale.
- 470 Il semble ressortir des déclarations du gouvernement que l'Union nationale des journalistes hongrois n'est pas reconnue comme représentant les intérêts des journalistes et qu'une autre organisation représenterait en réalité ces intérêts. Le fait qu'une organisation n'ait pas, aux yeux du gouvernement, un caractère représentatif n'ôte pas nécessairement à cette organisation sa qualité d'organisation professionnelle. En l'occurrence, s'il existe une autre organisation que le gouvernement considère comme représentative des intérêts des journalistes, rien ne laisse supposer que l'Union nationale des journalistes hongrois ne soit pas une « organisation professionnelle d'après le sens naturel de ces mots ». Etant donné que le Comité, en considérant le caractère professionnel d'une organisation, ne doit se laisser arrêter par aucune définition nationale du terme « organisation professionnelle » et, en particulier, par la terminologie législative ou coutumière d'un Etat donné, il considère qu'il est compétent pour présenter un rapport au Conseil d'administration en ce qui concerne les allégations relatives à la dissolution de l'Union nationale des journalistes hongrois et à l'arrestation de plusieurs journalistes et a examiné quant au fond la plainte de la Fédération internationale des journalistes libres, d'autant plus que le gouvernement lui-même a présenté sur cette plainte des observations quant au fond.
- 471 Au cours de l'examen du présent cas, il y a lieu de tenir compte du fait que la Hongrie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949. Ces instruments entreront en vigueur pour la Hongrie le 6 juin 1958. A ce propos, le Comité a noté que bien que les premiers rapports du gouvernement sur ces conventions au titre de l'article 22 de la Constitution de l'O.I.T ne soient dus normalement qu'au 15 octobre 1959, la Conférence a exprimé l'espoir que, pour la période 1956-57, un rapport volontaire sur l'état de la législation et de la pratique en matière de liberté syndicale en Hongrie serait communiqué à temps pour pouvoir être examiné par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations à sa prochaine session.
- Allégations relatives à la dissolution du Comité exécutif provisoire de la Confédération nationale des syndicats libres hongrois
- 472 Les plaignants déclarent que, le 31 octobre 1956, un Comité exécutif provisoire de la Confédération nationale des syndicats libres hongrois a été constitué à Budapest, comité dont le programme d'action comprenait notamment le rétablissement de la liberté d'association et de l'indépendance des organisations ouvrières ainsi que le retrait de l'organisation syndicale réorganisée de la Fédération syndicale mondiale. Ce comité, déclarent les plaignants, n'a plus donné signe de vie depuis le renversement de la situation en Hongrie, et ils ajoutent avoir « les plus fortes raisons de supposer que le gouvernement Kadar a procédé à la dissolution de ce comité ».
- 473 De son côté, le gouvernement déclare que ce comité, désigné arbitrairement au sein du Conseil central des syndicats, n'avait reçu son mandat ni dudit Conseil ni de la présidence de celui-ci et moins encore directement des membres des syndicats ; par conséquent, il n'aurait eu aucune existence valable D'ailleurs, aussitôt que le Conseil central des syndicats a été en mesure de se réunir conformément aux statuts syndicaux, il a immédiatement désavoué le comité provisoire. Cette décision, qui est intervenue à la session des 25 et 26 janvier 1957 du Conseil central, a été prise par cet organisme, et par cet organisme seul, sans intervention aucune de la part du gouvernement.
- 474 Il ressort de ces informations qu'il s'est créé en Hongrie, en octobre 1956, un « Comité exécutif provisoire de la Confédération nationale des syndicats libres hongrois », comité qui fut dissous dans des circonstances qu'il apparaît difficile de préciser avec exactitude, mais qui sont décrites dans le rapport du Comité spécial des Nations Unies pour la question de Hongrie, mentionné au paragraphe 464 ci-dessus.
- Allégations relatives à la subordination des syndicats au gouvernement et au Parti communiste
- 475 Les plaignants allèguent que les syndicats hongrois se trouvent dans un état de dépendance par rapport au Parti communiste et, par suite, celui-ci s'identifiant en Hongrie au gouvernement, par rapport au gouvernement lui même. A l'appui de cette allégation, la C.I.S.L cite une déclaration de M. Kadar selon laquelle celui-ci aurait dit : « Il est inconcevable que les syndicats soient indépendants du Parti. »
- 476 Dans sa réponse, le gouvernement déclare que la citation mentionnée par la C.I.S.L l'a été de façon erronée et il fournit le texte complet de la déclaration qui aurait été faite. Dans la version citée par le gouvernement, M. Kadar expose en quoi il estime que les syndicats doivent être indépendants le Parti ne doit pas intervenir dans la vie quotidienne des syndicats ; toutefois, il lui appartient de prendre position sur les questions dont s'occupent les syndicats et, au sein de ceux-ci, les membres du Parti doivent défendre cette position. Et M. Kadar définit ainsi le rôle du Parti à l'égard des syndicats : « Le Parti doit être le dirigeant idéologique et politique de la classe ouvrière et c'est dans ce sens qu'il doit influencer les syndicats. »
- 477 S'il peut être exact que le Parti communiste n'intervienne pas autoritairement et directement dans le fonctionnement des syndicats, il n'en ressort pas moins clairement de la déclaration rapportée par le gouvernement que le Parti exerce tout au moins sur les syndicats une forte pression morale, tant par ses propres prises de position sur les questions dont s'occupent les syndicats que par l'intermédiaire de ses membres au sein des syndicats. Il y a lieu de rappeler à cet égard que, dans le cas d'allégations analogues examinées par lui dans le cadre du cas no 19 relatif, lui aussi, à la Hongrie, le Comité a tenu à confirmer le principe énoncé par la Conférence internationale du Travail dans sa résolution sur l'indépendance du mouvement syndical, aux termes de laquelle « les gouvernements ne devraient pas chercher à transformer le mouvement syndical en un instrument politique qu'ils utiliseraient pour atteindre leurs objectifs et ne devraient pas, non plus, essayer de s'immiscer dans les fonctions normales d'un syndicat, en prenant prétexte de ses rapports librement établis avec un parti politique ».
- Allégations relatives au remplacement, des conseils ouvriers et à l'arrestation de certains membres de ces conseils
- 478 Les plaignants allèguent qu'en imposant de nouvelles élections au sein des conseils ouvriers, le gouvernement aurait détruit « la représentation authentique des travailleurs ». Ils allèguent en outre que plusieurs dirigeants desdits conseils auraient été arrêtés, parmi lesquels M. Sandor Racz et M. Sandor Bali, respectivement leader et membre du Conseil central des travailleurs.
- 479 Le gouvernement déclare que les premiers conseils ouvriers, constitués à une époque où les « éléments contre-révolutionnaires » avaient le dessus, ne sauraient être considérés comme ayant été constitués régulièrement et démocratiquement. Loin de viser à la défense des intérêts professionnels des travailleurs, ces conseils auraient poursuivi des buts exclusivement politiques, en opposition avec les voeux des populations laborieuses. Dans ces conditions, le gouvernement estime que c'est à bon droit qu'il a décrété l'organisation de nouvelles élections.
- 480 Sans se prononcer sur la question de savoir lesquels, entre les anciens et les nouveaux conseils, représentaient ou représentent « authentiquement » les travailleurs, on doit constater cependant que, contrairement à ce qui semble s'être produit dans le cas du Comité exécutif provisoire des syndicats (voir paragraphe 473 ci-dessus) où, d'après la déclaration du gouvernement, la décision adoptée aurait été prise par le Conseil central des syndicats lui-même, c'est ici le gouvernement lui-même qui, par décret, a imposé des élections et non pas les conseils ouvriers qui ont pris l'initiative d'en tenir.
- 481 Il y a lieu de rappeler à cet égard qu'aux termes de l'article 3 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, d'une part, les organisations de travailleurs ont le droit d'élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d'élire librement leurs représentants, d'organiser leur gestion et leur activité et, d'autre part, les autorités publiques doivent s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice.
- 482 En ce qui concerne les conseils ouvriers constitués sur le plan local et national, mentionnés par les plaignants, le gouvernement indique que ces conseils, ayant été constitués en violation des règles législatives et constitutionnelles, il a procédé à leur dissolution. Les plaignants affirment que ces conseils exerçaient des fonctions syndicales ; de son côté, le gouvernement soutient que les conseils dont les plaignants allèguent la dissolution revêtaient un caractère politique. Avec les données dont il dispose, il serait difficile au Comité de se prononcer sur ce point en pleine connaissance de cause. Toutefois, même si l'on admet le caractère politique des activités des conseils ouvriers et que l'on considère que ce caractère ait pu justifier une mesure de dissolution, il ne paraît pas ressortir de la réponse gouvernementale que cette dissolution ait été opérée par voie judiciaire, ainsi que le prévoit l'article 4 de la convention no 87, qui dispose que les organisations de travailleurs ne sont pas sujettes à dissolution ou à suspension par voie administrative.
- 483 La question de l'arrestation de certains membres des conseils ouvriers a déjà été examinée par le Comité dans le cadre du cas no 158 (Hongrie) sur lequel il a présenté un rapport au Conseil d'administration, adopté par ce dernier à sa 134ème session (Genève, mars 1957). Mise à part la mention nominative de MM. Racz et Bali - dont le gouvernement ne conteste pas l'arrestation - cet aspect de la plainte de la C.I.S.L n'apporte aucun élément nouveau par rapport à la plainte qui constituait le cas no 158. Dans ces conditions, il y a lieu de se référer aux conclusions auxquelles le Comité avait abouti à la suite de son examen du cas en question et qui figurent aux paragraphes 330 à 333 de son vingt-cinquième rapport, qui sont ainsi conçus
- 330 La Fédération internationale des syndicats chrétiens allègue que certains membres des conseils ouvriers auraient été arrêtés par les autorités hongroises en violation de la liberté syndicale. Le gouvernement reconnaît qu'un certain nombre de membres des conseils ouvriers ont été arrêtés et déclare que des éléments contre-révolutionnaires hostiles à la classe ouvrière se sont infiltrés dans les conseils ouvriers et ont été poursuivis conformément aux dispositions pénales hongroises. Le gouvernement déclare que ceux qui ont participé à cette action subversive se sont rendus coupables de recel d'armes et d'activités séditieuses contre l'ordre établi en République populaire hongroise. Le gouvernement déclare que les poursuites criminelles engagées contre les personnes qui commettent des actes subversifs relevant du droit souverain de chaque Etat, la question de l'arrestation de certains membres des conseils ouvriers n'entre pas dans le champ de la compétence des organisations internationales.
- 331 Le gouvernement hongrois reconnaît l'arrestation de certains membres des conseils ouvriers en raison de prétendues activités subversives. Toutefois, la Confédération internationale des syndicats chrétiens n'a pas mentionné de cas précis de syndicalistes arrêtés et n'a pas présenté d'informations complémentaires bien que la possibilité lui en ait été offerte.
- 332 Dans plusieurs cas dont le Comité a eu à connaître et dans lesquels il était allégué que des syndicalistes ou des dirigeants syndicaux avaient été placés en détention préventive, le Comité avait exprimé l'opinion que les mesures de détention préventive pouvaient impliquer une grave ingérence dans les activités syndicales qui semblerait devoir être justifiée par l'existence d'une crise sérieuse et qui pourrait donner lieu à des critiques, à moins qu'elle ne soit accompagnée de garanties juridiques appropriées, mises en oeuvre dans des délais raisonnables. Dans le cas présent, le gouvernement déclare que les arrestations en question ont eu lieu dans des circonstances exceptionnelles en ce sens que des éléments contre-révolutionnaires se seraient efforcés de renverser le régime de la République populaire. Les personnes arrêtées - indique le gouvernement - sont poursuivies pour activités subversives dirigées contre l'Etat par les autorités hongroises compétentes et conformément à la législation pénale hongroise. Tout en notant la déclaration du gouvernement selon laquelle les personnes arrêtées seraient poursuivies par les autorités compétentes, le Comité observe qu'il ne possède aucune information sur le point de savoir si ces autorités sont des autorités judiciaires indépendantes et, par suite, il tient à réaffirmer l'importance qu'il a toujours attachée dans des cas semblables à ce que soient respectées les garanties d'une procédure judiciaire régulière. De plus, dans le passé, lorsque, répondant à des allégations selon lesquelles des travailleurs ou des dirigeants syndicaux auraient été arrêtés en raison de leurs activités syndicales, les gouvernements faisaient valoir que les arrestations avaient été effectuées à la suite des activités subversives des personnes arrêtées, le Comité a toujours estimé que les gouvernements devraient être priés de fournir des informations complémentaires aussi précises que possible concernant les arrestations et, en particulier, la nature des procédures engagées ainsi que le résultat de ces procédures. Le Comité a également souligné l'importance qu'il attache aux garanties d'une procédure judiciaire régulière y compris la garantie de non-application rétroactive d'une loi pénale.
- 333 La présente plainte a une portée très limitée. Mise à part une accusation de caractère général portant sur de « nouvelles violations flagrantes des libertés syndicales et des droits fondamentaux des travailleurs », concernant laquelle le plaignant n'a pas exercé son droit de présenter des informations complémentaires destinées à l'appuyer, elle traite uniquement de l'arrestation de certains membres des conseils ouvriers. Elle ne soulève donc pas les problèmes plus vastes sur lesquels les vues exprimées par le Comité dans son vingt et unième rapport ont déjà été approuvées par le Conseil d'administration. En conséquence, le Comité considère que la meilleure voie à suivre en ce qui concerne la présente plainte consiste pour lui à recommander au Conseil d'administration:
- a) de réaffirmer l'importance qu'il a toujours attachée à ce que, lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou criminels que le gouvernement considère comme étant étrangers à leurs fonctions syndicales, les personnes en question soient jugées promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante ;
- b) de réaffirmer l'importance qu'il attache, dans de pareils cas, à ce que soit respectée la garantie de non-application rétroactive d'une loi pénale ;
- c) de déclarer que ces principes sont pleinement applicables dans le cas des arrestations de membres des conseils ouvriers effectuées par les autorités hongroises ;
- d) de réaffirmer que l'Organisation internationale du Travail est prête à participer et désire vivement participer à tous arrangements pris afin de déterminer quelle est la situation actuelle en ce qui concerne le respect de la liberté syndicale en Hongrie.
- Allégations relatives à l'usage qui est fait de la « procédure criminelle accélérée »
- 484 Les plaignants allèguent qu'un décret du 12 janvier 1957 aurait introduit une procédure criminelle accélérée applicable notamment aux actes visant à faire cesser ou à désorganiser le travail dans les entreprises comptant plus de 100 ouvriers. Le but de cette mesure serait d'intimider les travailleurs afin qu'ils s'abstiennent d'exercer une activité syndicale authentique et indépendante. Des arrestations massives auraient été opérées en application de ce texte.
- 485 Le gouvernement indique que l'introduction de la procédure criminelle accélérée constitue une mesure exceptionnelle rendue nécessaire par l'insurrection dont la Hongrie a été le théâtre et par les suites de cette insurrection. Cette mesure vise à la protection de la vie et des biens des citoyens, à garantir la production des produits de première nécessité et, de façon générale, à consolider la sécurité et l'ordre publics et rendre plus efficace la lutte contre les actes contre-révolutionnaires.
- 486 La procédure en question, qui ne s'applique qu'aux délits les plus graves revêtant un caractère de sabotage, est assortie - déclare le gouvernement - des garanties légales du Code de procédure : limitation de la durée de la détention préventive, publicité, droit d'appel. Il y a lieu de noter à cet égard que, dans les cas où le Comité a constaté l'existence de procédures d'exception, il a tenu à souligner l'importance qu'il attache en pareil cas à ce que soient respectées toutes les garanties d'une procédure judiciaire régulière y compris la garantie de non-application rétroactive d'une loi pénale'-. De plus, dans le passé, lorsque, répondant à des allégations selon lesquelles des travailleurs auraient été arrêtés en raison des activités d'ordre syndical déployées par eux, les gouvernements faisaient valoir que les arrestations avaient été effectuées à la suite des activités subversives des personnes arrêtées, le Comité a toujours estimé que les gouvernements devraient être priés de fournir des informations aussi précises que possible concernant les arrestations et, en particulier, la nature des procédures engagées ainsi que le résultat de ces procédures.
- 487 En réponse à l'allégation selon laquelle des arrestations massives de travailleurs auraient été effectuées en application du décret incriminé, le gouvernement déclare que la procédure criminelle accélérée n'a été appliquée qu'à 54 personnes en tout ; parmi ces personnes, 23 ont été condamnées pour meurtre, brigandage ou pillage, 22 pour recel d'armes et 9 pour avoir organisé un complot contre l'Etat. S'il apparaît donc que le plaignant n'a pas apporté de preuve suffisante tendant à montrer que des « arrestations massives » auraient été opérées en application du décret du 12 janvier 1957, il semble indiqué toutefois de réaffirmer, à l'occasion de cette procédure, les principes qui ont été rappelés au paragraphe précédent.
- 488 En ce qui concerne l'allégation selon laquelle la procédure criminelle accélérée serait applicable aux personnes s'étant livrées à des actes visant à faire cesser le travail ou à le désorganiser, le gouvernement déclare que le décret du 12 janvier 1957 ne prévoit pas l'infliction d'une peine pour l'organisation d'une grève ou la participation à une grève - ni d'ailleurs aucune règle juridique du Code criminel hongrois. Le décret n'est applicable que dans le cas d'actes revêtant un caractère de sabotage et ne vise en rien à restreindre l'exercice des droits syndicaux des travailleurs.
- 489 Toutefois, dans sa réponse, le gouvernement précise que la notion de sabotage s'étend aux actes qui « visent à un arrêt massif du travail ou comportent, par ailleurs, un grand danger ». L'imprécision même de cette définition comporte un danger d'abus dans l'utilisation de textes législatifs qui revêtent un caractère exceptionnel.
- 490 Dans plusieurs cas, le Comité a reconnu l'importance du droit de grève en termes généraux. Dans le cas no 47 concernant l'Inde, le Comité a déclaré que « le droit de grève est communément considéré comme un des droits généraux reconnus aux travailleurs et à leurs organisations pour leur permettre de défendre leurs intérêts économiques », mais que « dans le cas des services essentiels, le droit de grève peut être restreint à titre temporaire, en attendant qu'aient pris fin des procédures de négociations, de conciliation ou d'arbitrage ». Le Comité a émis une opinion analogue lors de l'examen du cas no 50 concernant la Turquie. Dans le cas no 11, relatif au Brésil, le Comité a attiré l'attention sur l'importance qu'il attache à ce que, dans les cas où les grèves sont interdites, des garanties appropriées soient accordées pour sauvegarder pleinement les intérêts des travailleurs ainsi privés d'un moyen essentiel de défense professionnelle - principe qu'il a proclamé de nouveau dans le cas no 60 concernant le Japon.
- 491 Dans le cas no 148 relatif à la Pologne, le Comité a souligné « l'importance qu'il attache au principe selon lequel le droit de grève est communément considéré comme un élément essentiel des droits généraux des travailleurs et de leurs organisations de défendre leurs intérêts économiques », et a exprimé l'avis que, si la loi peut restreindre provisoirement les grèves, une telle restriction devrait « s'accompagner de procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives ».
- Allégations relatives au contrôle exercé sur les syndicats par le ministre des Forces armées et de la Sécurité publique
- 492 La C.I.S.L allègue qu'un décret du 20 janvier 1957 charge le ministre des Forces armées et de la Sécurité publique d'exercer « le contrôle et la supervision » de toutes les associations culturelles et professionnelles, parmi lesquelles - ajoute le plaignant - se trouvent les organisations syndicales. Le décret en question se doublerait d'un autre décret portant création de milices ouvrières chargées de défendre le régime dans les milieux travailleurs. De son côté, la Fédération internationale des journalistes libres proteste contre l'application à l'Union nationale des journalistes hongrois du décret du 20 janvier 1957 et allègue que cette application équivaut en fait à une dissolution de l'Union nationale des journalistes.
- 493 Le gouvernement déclare que le décret invoqué par les plaignants (décret no 3 de 1957) défère provisoirement à la compétence du ministre des Forces armées et de la Sécurité publique la surveillance des associations auxquelles s'applique le décret-loi no 18 de 1955. Il ajoute - et il insiste sur ce fait - que le dernier décret-loi et, partant, le décret no 3 de 1957, ne sont pas applicables aux syndicats, mais aux seules associations. Quant aux milices ouvrières, ces dernières, recrutées sur une base volontaire, auraient pour fonction d'empêcher le retour aux activités contre-révolutionnaires et n'exercent aucune influence sur les syndicats, ni dans les usines ni ailleurs ; elles sont d'ailleurs recrutées sur une base territoriale et non dans le cadre des usines ou des entreprises. En ce qui concerne par contre l'Union nationale des journalistes hongrois, le gouvernement reconnaît que, cette organisation constituant une association au sens du décret-loi no 18 de 1955, le décret no 3 de 1957 lui a été appliqué.
- 494 A ce propos, le gouvernement donne les précisions suivantes : en vertu du décret-loi no 18 de 1955, les associations sont enregistrées, aux fins de contrôle, par l'« organe de supervision », lequel, pour les associations nationales, est le ministre des Forces armées et de la Sécurité publique. Si la direction d'une association commet des actes contraires au bon fonctionnement de l'association, l'« organe de supervision » suspend l'autonomie de l'association et désigne un commissaire de surveillance qu'elle place à la tête de l'association. Si le fonctionnement d'une association viole ou compromet l'ordre étatique ou social de la République, l'« organe de supervision » dissout l'association.
- 495 Dans le cas de l'Union nationale des journalistes hongrois, le gouvernement déclare que l'« organe de supervision » a non pas dissous l'organisation comme le laisse entendre le plaignant, mais suspendu temporairement son autonomie en attendant que l'assemblée générale des journalistes élise une nouvelle direction et a désigné à la tête de l'Union un commissaire du gouvernement chargé d'en assurer le contrôle. Le gouvernement ajoute que, d'ailleurs, la suspension de l'autonomie n'entraîne pas l'arrêt du fonctionnement de l'association qui, sous la direction du commissaire du gouvernement désigné, continue à accomplir les tâches qu'elle exécutait auparavant. Le gouvernement déclare enfin que l'Union des écrivains hongrois, elle, qui s'était livrée à des actes dirigés contre l'ordre social de la République, a fait l'objet d'une mesure de dissolution en application de ce même décret no 3 de 1957.
- 496 Etant donné les informations disponibles, il est difficile de percevoir bien nettement le critère en vertu duquel le gouvernement opère la distinction entre, d'une part, les « associations », auxquelles le décret-loi no 18 de 1955 et le décret no 3 de 1957 sont applicables et, d'autre part, les syndicats proprement dits, auxquels ces textes ne s'appliquent pas. Ainsi qu'on l'a vu aux paragraphes 469 et 470 ci-dessus et pour autant que l'on puisse en juger, ce que le gouvernement paraît entendre par « syndicats » proprement dits sont uniquement les organisations reconnues comme étant représentatives des travailleurs, alors que les « associations » groupent les autres organisations. Or il apparaît que, bien que n'étant pas reconnues comme étant représentatives, certaines de ces autres organisations auxquelles ont été imposées les pratiques de contrôle, de suspension et de dissolution décrites par le gouvernement - et notamment l'Union nationale des journalistes hongrois - peuvent être considérées comme constituant des organisations professionnelles auxquelles devraient s'appliquer les principes de la liberté syndicale qui sont énoncés dans les articles 3 et 4 de la convention no 87 et qui sont la non-ingérence des autorités publiques dans le fonctionnement des organisations professionnelles et l'interdiction de la suspension ou de la dissolution desdites organisations par voie administrative.
- Allégations relatives à l'arrestation de journalistes et d'écrivains hongrois
- 497 La Fédération internationale des journalistes libres allègue que plusieurs journalistes et écrivains (dont elle donne les noms) ont été arrêtés à la suite des opinions exprimées par eux. Ici encore, le gouvernement indique que les personnes poursuivies l'ont été, non pas en raison de leurs activités syndicales ou des opinions qu'elles ont exprimées, mais bien à la suite d'activités subversives visant à renverser l'ordre établi. Dans ces conditions, le problème posé étant le même que celui examiné par le Comité dans le cadre du cas no 158 (Hongrie) déjà cité, il y a lieu, comme dans le cas visé au paragraphe 483 ci-dessus, de se référer aux conclusions auxquelles le Comité avait abouti dans le cas no 158 et qui figurent aux paragraphes 330 à 333 de son vingt-cinquième rapport, reproduits audit paragraphe 483.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 498. Dans ces conditions, le Comité, tout en notant la ratification par la Hongrie de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, recommande au Conseil d'administration:
- a) de noter que l'Assemblée générale des Nations Unies a, le 14 septembre 1957, fait siennes par 60 voix contre 10, avec 10 abstentions, les conclusions concernant la situation syndicale en Hongrie et les conseils ouvriers contenues dans le rapport du Comité spécial des Nations Unies pour la question de Hongrie ;
- b) d'affirmer que les principes de la liberté syndicale mentionnés dans le Préambule de la Constitution de l'O.I.T et la Déclaration de Philadelphie et définis par les conventions de liberté syndicale ne sont pas observés en Hongrie;
- c) d'appeler l'attention des autorités hongroises sur l'importance de l'application effective des dispositions de la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, conformément à l'obligation solennelle qui a été assumée par la Hongrie, et, en particulier, des principes suivants:
- i) les travailleurs ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s'affilier à ces organisations (article 2) ;
- ii) ces organisations ont le droit d'élaborer leurs statuts, d'élire librement leurs représentants, d'organiser leur gestion et leur activité et de formuler leur programme d'action, les autorités publiques devant s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal (article 3);
- iii) ces organisations ne sont pas sujettes à dissolution ou à suspension par voie administrative (article 4) ;
- d) de réaffirmer l'importance qu'il attache aux principes selon lesquels:
- i) les gouvernements ne devraient pas chercher à transformer le mouvement syndical en un instrument politique qu'ils utiliseraient pour atteindre leurs objectifs, et ne devraient pas essayer de s'immiscer dans les fonctions normales des syndicats ;
- ii) lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou criminels que le gouvernement considère comme étant étrangers à leurs activités syndicales, les personnes en question devraient être jugées promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante et, dans de pareils cas, la garantie de non-rétroactivité de la loi pénale devrait être respectée;
- iii) le droit de grève est communément considéré comme un élément essentiel des droits généraux des travailleurs et de leurs organisations de défendre leurs intérêts économiques et, si la loi peut restreindre provisoirement les grèves, ces restrictions doivent être compensées par l'introduction de procédures de conciliation et d'arbitrage impartiales et expéditives ;
- e) d'attirer l'attention des autorités hongroises sur le fait que la Conférence internationale du Travail à sa 40ème session, en 1957, a demandé qu'un rapport volontaire sur l'état de la législation et de la pratique en matière de liberté syndicale en Hongrie soit communiqué à temps pour être examiné par la Commission d'experts à sa prochaine session ;
- f) de demander à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations d'accorder une attention particulière à cette question ;
- g) de demander aux autorités hongroises de consentir à ce que la question de la liberté syndicale en Hongrie soit transmise à la Commission d'investigation et de conciliation;
- h) de communiquer les présentes conclusions à l'Assemblée générale des Nations Unies et d'indiquer à nouveau à l'Organisation des Nations Unies que l'Organisation internationale du Travail est toujours prête à participer et désire vivement participer à tous arrangements qui pourraient être pris en application des résolutions de l'Assemblée générale afin de déterminer quelle est la situation actuelle en ce qui concerne le respect de la liberté syndicale en Hongrie.