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Interim Report - REPORT_NO362, November 2011

CASE_NUMBER 2723 (Fiji) - COMPLAINT_DATE: 01-JUL-09 - Follow-up

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809. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de novembre 2010 et a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 358e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 309e session (novembre 2010), paragr. 523-558.]

  1. 809. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de novembre 2010 et a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 358e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 309e session (novembre 2010), paragr. 523-558.]
  2. 810. Les organisations plaignantes ont présenté de nouvelles allégations dans des communications en date du 18 février et du 10 mars 2011. La Confédération syndicale internationale (CSI) s’est associée à la plainte et a communiqué des renseignements complémentaires les 1er et 8 août, et 1er et 4 novembre 2011. Le Conseil des syndicats des îles Fidji (FICTU) s’est associé à la plainte et a communiqué des informations complémentaires le 23 septembre 2011.
  3. 811. Le gouvernement n’ayant fourni aucune réponse, le comité a dû ajourner l’examen du cas à deux reprises. A sa réunion de mai-juin 2011 [voir 360e rapport, paragr. 5], le comité a lancé un appel pressant au gouvernement indiquant que, en vertu des règles de procédures énoncées au paragraphe 17 du 127e rapport approuvé par le Conseil d’administration, il pourrait présenter un rapport sur le fond de l’affaire à sa réunion suivante même si les informations ou observations demandées n’étaient pas reçues à temps. A ce jour, le gouvernement n’a envoyé aucune information.
  4. 812. Les Fidji ont ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 813. Lors de son précédent examen du cas en novembre 2010, le comité a formulé les recommandations ci-après [voir 358e rapport, paragr. 558]:
    • a) Compte tenu du changement du système judiciaire des Fidji et de l’absence apparente de toute garantie constitutionnelle, le comité demande au gouvernement d’adopter les mesures nécessaires conduisant à la réintégration immédiate de M. Koroi dans ses fonctions antérieures de chef d’établissement sans perte de salaire ou d’indemnités, et de le tenir informé sur l’évolution de la situation à cet égard.
    • b) Le comité prie instamment le gouvernement de s’abstenir de toute nouvelle ingérence dans les affaires internes de la FTA et d’autoriser M. Koroi, en tant que représentant légitime de cette organisation, à exercer ses fonctions de représentation dans les réunions pertinentes, notamment le Forum de l’éducation, le Bureau national d’agrément des enseignants, la JCC et le CSB.
    • c) Le comité invite les organisations plaignantes à lui fournir toute information complémentaire pertinente et prie instamment le gouvernement de fournir sans délai une réponse complète concernant les allégations d’actes de violence et de harcèlement antisyndical exercés contre les dirigeants syndicaux.
    • d) Le comité demande aussi au gouvernement de répondre en détail aux allégations plus récentes concernant les restrictions imposées aux réunions syndicales, à la liberté de mouvement des syndicalistes et à l’affiliation syndicale, les restrictions au droit d’exprimer ses opinions à travers la presse et l’abolition d’organes représentatifs ou de leur composition tripartite.
    • e) Compte tenu de la gravité des allégations des organisations plaignantes et de l’absence d’informations complètes sur la situation sur le terrain, le comité invite le gouvernement à accepter l’envoi sur place d’une mission consultative tripartite de l’OIT qui aura pour mandat de clarifier les faits et d’aider le gouvernement et les partenaires sociaux à trouver des solutions appropriées conformes aux principes de la liberté syndicale.
    • f) Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.

B. Nouvelles allégations des organisations plaignantes

B. Nouvelles allégations des organisations plaignantes
  • Allégations concernant un acte de discrimination antisyndicale à l’encontre de M. Koroi
    1. 814 Dans leurs communications datées du 18 février et du 10 mars 2011, les organisations plaignantes, l’Internationale de l’éducation (IE) et l’Association des enseignants des Fidji (FTA) indiquent que le licenciement du président de la FTA, M. Tevita Koroi, de ses fonctions de chef d’établissement, est toujours en vigueur. Elles souscrivent aux recommandations de novembre 2010 du comité, qui requièrent la réintégration immédiate de M. Koroi dans la fonction publique fidjienne. Les recommandations ont été communiquées en décembre 2010 par la FTA au président et au secrétaire permanent de la Commission de la fonction publique (PSC), ainsi qu’au secrétaire permanent du ministère du Travail et des Relations professionnelles, et un suivi officiel a été transmis en janvier 2011. Les organisations plaignantes indiquent que les représentants de la FTA se sont entretenus sur ce point avec le secrétaire permanent de la PSC et qu’ils ont été informés oralement du fait que la Commission de la fonction publique commencerait par solliciter un avis juridique sur les recommandations du bureau du Solicitor General. Dans une communication du 10 mars 2011, les organisations plaignantes indiquent que, dans une lettre du 22 février 2011, la Commission de la fonction publique des Fidji a rejeté la demande de réintégration de M. Koroi formulée par la FTA en indiquant que la présente plainte n’avait aucun lien avec son licenciement.
    2. 815 S’agissant de l’argument qui figure dans la réponse du gouvernement selon lequel M. Koroi n’a pas épuisé la procédure d’appel de la Commission de la fonction publique en ce qui concerne la décision de licenciement ayant pris effet le 30 avril 2009, les organisations plaignantes réitèrent la chronologie des événements intervenus aux Fidji à l’époque, notamment le fait que la Constitution fidjienne avait été abrogée le 10 avril et que la Commission de recours de la fonction publique, ainsi que les tribunaux et toutes les voies de recours avaient été supprimés si bien que le processus de médiation proposé par le ministère du Travail était la seule option offerte. Ils estiment qu’il n’est pas exact d’affirmer que les voies de recours n’ont pas été épuisées alors que de tels mécanismes n’existent pas. Les organisations plaignantes réfutent en outre l’argument selon lequel «le gouvernement a dû, à plusieurs reprises, prendre des mesures à l’encontre de M. Koroi en raison de sa participation à des activités politiques et de ses déclarations publiques», étant donné qu’il n’avait reçu aucune communication officielle ou verbale de la Commission de la fonction publique.
    3. 816 Les organisations plaignantes soulignent en outre que M. Koroi est le président d’une association qui existe depuis plus de 70 ans et dont les anciens présidents ont tous été des fonctionnaires exerçant les mêmes pouvoirs prévus par le même code de conduite de la PSC, la loi sur les syndicats et les règlements en vigueur et que pas un seul d’entre eux n’a fait l’objet de mesures disciplinaires. Les prédécesseurs de M. Koroi, qui avait également représenté l’association lors de réunions publiques, de réunions avec des représentants du ministère de l’Education et des représentants de la société civile, de même que d’anciens présidents d’autres syndicats de la fonction publique, ont par la suite été nommés hauts fonctionnaires, diplomates et ministres bien qu’ayant activement promu la démocratie.
    4. 817 Selon les organisations plaignantes, M. Koroi était l’un des principaux, des plus anciens et des meilleurs chefs d’établissement du pays au moment de son licenciement. Il occupait ses fonctions depuis 20 ans et durant cette période s’était avéré apte, en tant qu’administrateur, à transformer des écoles abandonnées, délabrées et peu performantes en écoles dynamiques et bien disciplinées. Lorsqu’il a été nommé chef d’établissement pour la première fois en 1988, il était le plus jeune chef d’établissement de l’époque et le plus jeune à être nommé président de la FTA. Le bilan de M. Koroi dans l’enseignement secondaire aux Fidji en dit long et c’est un système qui, depuis, s’est retourné contre lui qui lui avait permis d’y parvenir.
    5. 818 Les organisations plaignantes soulignent que, chaque fois que M. Koroi participe à des réunions publiques se déroulant en dehors de son établissement, il le fait à titre de président de son association et non pas à titre de chef d’établissement. Il ne profite pas de sa qualité de président de la FTA et ne néglige pas son rôle de chef d’établissement; il établit par ailleurs une distinction claire entre ces rôles tout en suivant dans la pratique les procédures appropriées pour régler les problèmes. Selon les organisations plaignantes, M. Koroi est très au courant des réglementations régissant son rôle de chef d’établissement, en particulier au sein de son établissement, et des règles qui le protègent en sa qualité de dirigeant syndical. En ce qui concerne la déclaration du président de la Commission de la fonction publique dans sa lettre du 22 février 2011, selon laquelle M. Koroi «a pris la parole contre le gouvernement» lors de la réunion du 5 décembre 2008 du Mouvement pour la démocratie, les organisations plaignantes rejettent fermement cette allégation et soulignent à nouveau que M. Koroi intervenait en sa qualité de président de la FTA et qu’il ne s’adressait pas à des élèves, mais à un rassemblement de dirigeants syndicaux, de représentants de la société civile, d’hommes politiques et de notables qui souhaitaient un retour rapide de la démocratie aux Fidji; cette réunion ne s’est pas déroulée pendant les heures de cours mais en période de vacances scolaires; elle n’a pas eu lieu dans les locaux de l’école mais au siège de la FTA. Selon les organisations plaignantes, il est sans fondement de dire que M. Koroi s’est exprimé sur des sujets ne relevant pas de sa compétence en tant que dirigeant syndical et en tant que fonctionnaire, des précédents ayant été établis par ses prédécesseurs.
  • Allégations d’autres violations graves des droits syndicaux
    1. 819 Les organisations plaignantes, l’IE et la FTA, dans leur communication en date du 18 février 2011, de même que la CSI – nouvelle organisation plaignante dans l’affaire – dans ses communications en date des 1er et 8 août 2011, ont présenté de nouvelles allégations faisant état de: i) voies de fait, harcèlement, intimidation et arrestation de syndicalistes pour avoir exercé leur droit à la liberté syndicale; ii) leurs droits syndicaux et leurs droits civils de liberté d’expression, leur droit d’accès aux médias et leur liberté de réunion; iii) l’attaque du gouvernement contre les droits syndicaux sanctionnée par décret exécutif.
  • Voies de fait, harcèlement, intimidation et arrestation de syndicalistes
    1. 820 Les organisations plaignantes dénoncent une série d’actes d’agression, de harcèlement, d’intimidation et d’arrestation de syndicalistes pour avoir exercé leur droit à la liberté syndicale. Selon l’ordre chronologique, il est allégué que, le 10 février 2011, M. Anand Singh, un avocat de renom a été emmené de son domicile vers 21 heures et conduit à la caserne militaire pour y être interrogé à propos de rumeurs de menaces à l’encontre du régime. Cette même nuit, deux autres citoyens au moins ont été arrêtés.
    2. 821 Les organisations plaignantes prétendent notamment que le gouvernement a, à de multiples reprises, harcelé et fait subir des voies de fait à M. Felix Anthony, le plus haut responsable syndical des Fidji, secrétaire national du Congrès des syndicats des Fidji et secrétaire général du Syndicat du secteur sucrier des Fidji. Elles indiquent que, le 12 février 2011, vers 20 heures, M. Anthony a été emmené de son domicile par trois officiers militaires en uniforme et conduit à la caserne militaire de Lautoka. Pendant le transfert, les officiers l’ont menacé ainsi que sa famille et lui ont demandé à plusieurs reprises s’il était au courant de tentatives de renversement du gouvernement et s’il soutenait le régime actuel. M. Anthony a nié avoir connaissance de telles tentatives. Il a été redéposé à son domicile vers 22 heures et averti que la prochaine fois les choses pourraient empirer pour lui. Le 18 février 2011, M. Anthony a été informé que le Premier ministre voulait le rencontrer dans une raffinerie de sucre à Ba, sur la partie occidentale des Fidji. Il a assisté à la réunion avec deux autres hauts responsables syndicaux et y a été accusé d’être à l’origine des problèmes que connaissaient les raffineries de sucre; par ailleurs, alors qu’il faisait le tour de la raffinerie avec des responsables de la raffinerie, il a pu constater certains des problèmes, notamment l’absence de mise à niveau de la raffinerie – problème dans lequel le syndicat ne pouvait intervenir. Selon les organisations plaignantes, on a ensuite ordonné aux trois hommes de se rendre à Namaka où ils se sont entretenus avec des officiers de l’armée. A l’issue d’une brève discussion, les soldats ont entrepris de passer à tabac M. Anthony et les autres dirigeants syndicaux présents. Les agressions physiques et verbales se sont poursuivies pendant environ deux heures. Les organisations plaignantes indiquent qu’ils ont ensuite été conduits à la caserne militaire de l’aéroport de Namaka, à une heure de route de Ba, où M. Anthony et ses collègues ont à nouveau été passés à tabac par un personnel militaire en civil. A la suite de ce passage à tabac, M. Anthony a subi une lésion du tympan. Les deux autres dirigeants syndicaux ont souffert de blessures nécessitant également des soins médicaux; les trois hommes ont fini par être libérés vers 21 h 30 sous la menace d’autres violences. Le 2 mars 2011, le secrétaire général de la CSI ayant rapporté ces incidents à l’Organisation internationale du Travail (OIT) et demandé une intervention immédiate, le Directeur général a écrit peu après au gouvernement fidjien pour lui faire part de sa grave inquiétude et lui demander d’enquêter sur l’incident et de transmettre toute information à cet égard; il a par ailleurs noté que le Comité de la liberté syndicale avait recommandé l’envoi aux Fidji d’une mission tripartite qui bénéficiait du plein appui de l’OIT. Les organisations plaignantes soulignent qu’aucune suite n’a été donnée à cette lettre et elles signalent que le 1er avril 2011, alors que M. Anthony déjeunait avec des amis, l’officier militaire qui l’avait passé à tabac l’a accosté et l’a prévenu devant ses amis qu’il pourrait subir d’autres violences physiques. Le harcèlement des syndicalistes que pratique le gouvernement intérimaire s’est poursuivi lorsque M. Anthony a cherché à participer à la 100e session de la Conférence internationale du Travail (CIT) en juin 2011. Le gouvernement a omis de déposer les pouvoirs de M. Anthony, qui avait été désigné par le FTUC, l’organisation syndicale la plus représentative, pour représenter les travailleurs fidjiens à la Conférence. La Commission de vérification des pouvoirs a examiné une protestation présentée par la CSI à cet égard et elle a conclu que:
  • … Comme indiqué par le gouvernement lui-même, ce dernier a délibérément ignoré la proposition faite par l’organisation consultée en vue de la désignation de la délégation. La commission a souligné dans le passé que les gouvernements étaient tenus d’accepter le choix des organisations les plus représentatives s’agissant des personnes devant être désignées comme délégués des travailleurs et des employeurs. Le refus de le faire constitue une violation manifeste de l’obligation prévue à l’article 3, paragraphe 5, de la Constitution de l’OIT.
  • La Commission de vérification des pouvoirs a conclu que les actions du gouvernement «sèment le doute sur son impartialité vis-à-vis du FTUC, à la lumière des allégations relatives à la dégradation des droits syndicaux dans le pays». Les organisations plaignantes souscrivent également à la conclusion de la Commission de vérification des pouvoirs selon laquelle si M. Anthony s’était vu refuser les pouvoirs qui lui auraient permis d’assister à la Conférence internationale du Travail, c’était très probablement à titre de représailles contre lui pour avoir exercé ses droits syndicaux fondamentaux aux Fidji. Dans sa communication la plus récente, l’ITUC condamne l’arrestation alléguée, le 4 novembre 2011, de M. Felix Anthony, sa garde à vue sans charges ainsi que la fouille par la police des bureaux du syndicat et de son domicile.
    1. 822 Par ailleurs, les organisations plaignantes allèguent qu’immédiatement après la 100e session de la Conférence internationale du Travail des officiers de l’armée ont agressé Mohammed Khalil, président à Ba du Syndicat des travailleurs de l’industrie sucrière et de l’Union générale des travailleurs des fidji. Le 22 juin 2011, vers 21 heures, deux officiers militaires ont agressé M. Khalil et l’ont accusé d’être un homme fort des syndicats. Ils l’ont obligé à se rouler dans la boue, lui ont donné des coups de pied et l’ont traîné par terre devant ses collègues et d’autres spectateurs. Les officiers militaires l’ont dénoncé ainsi que M. Anthony (qui n’était pas présent à ce moment-là) pour leur défense des droits syndicaux et ont exigé, pendant qu’ils le passaient à tabac, qu’il présente sa démission du syndicat avant 15 heures le lendemain avant de prendre son poste de travail normal, sans quoi il subirait le même sort. M. Khalil n’a pas démissionné. L’organisation plaignante estime que, non seulement l’agression contre M. Khalil constitue une violation grave en elle-même mais, qui plus est, le passage à tabac s’inscrivait en représailles de déclarations faites par son collègue M. Anthony à la Conférence internationale du Travail et constitue donc par conséquent une autre violation grave de la liberté syndicale.
    2. 823 Les organisations plaignantes dénoncent également le fait que, le 3 août 2011, M. Daniel Urai, président du FTUC et secrétaire général du Syndicat national des salariés des industries de l’hôtellerie, de la restauration et du tourisme (NUHCTIE) ainsi que Nitin Goundar, actif au sein de ce syndicat, ont été détenus et interrogés au commissariat de police de Nadi. Ils ont été inculpés de «rassemblement illégal», pour s’être, semble-t-il, entretenus avec des membres des syndicats et les avoir conseillés au sujet des négociations collectives en cours avec l’administration hôtelière. Ils ont été libérés sous caution le 4 août et cités à comparaître le 31 octobre 2011. Les organisations plaignantes dénoncent également que, le 29 octobre 2011, M. Urai ait été de nouveau arrêté, cette fois à l’aéroport à son retour de la réunion des chefs des gouvernements du Commonwealth à Perth, en Australie, où il a parlé des violations des droits de l’homme et de la liberté syndicale commises par le gouvernement des Fidji. Bien qu’il n’ait pour l’instant été inculpé d’aucune infraction, il reste en détention. Selon les organisations plaignantes, l’arrestation de syndicalistes pour avoir mené une activité syndicale constitue une grave atteinte à la liberté syndicale.
  • Liberté de réunion, liberté d’expression et d’accès aux médias
    1. 824 Selon les organisations plaignantes, les règlements d’urgence d’ordre public (Public Emergency Regulations (PER)) en vigueur depuis avril 2009 ont continué à être reconduits tous les mois donnant au gouvernement des pouvoirs illimités pour interdire les rassemblements non autorisés, bien qu’aucune manifestation de protestation ne se soit produite contre le régime actuel. L’article 3 accorde à la police le pouvoir d’interdire tout défilé, réunion ou assemblée, et tout rassemblement de ce type peut être dispersé par la police ou l’armée, même si aucune interdiction formelle n’a été prononcée au préalable. La police et l’armée sont libres de faire usage de la force si le défilé, la réunion ou l’assemblée n’ont pas été dispersés après sommation. Les personnes qui participent à un rassemblement interdit sont coupables d’une infraction à la loi. Les articles 5 à 7 accordent à la police des pouvoirs très étendus concernant la libre circulation des personnes et l’article 18 lui accorde également le pouvoir de les arrêter et de les détenir. Les organisations plaignantes indiquent que, dans la pratique, ces règlements ont eu des répercussions considérables sur les activités régulières des syndicats fidjiens. En cas d’organisation d’activités syndicales, telles que séminaires, ateliers et réunions, il faut demander une autorisation. Les organisations continuent à demander l’autorisation de se réunir et celle-ci leur est accordée dans des conditions très strictes, notamment avec la présence d’officiers de l’armée qui assistent aux réunions et écoutent les délibérations, approuvent l’ordre du jour de la réunion et désignent même les personnes autorisées à prendre la parole ou à participer à de telles activités. Selon les organisations plaignantes, le 14 juillet 2011, le FTUC a demandé l’autorisation d’organiser un atelier de deux jours sur les réformes du droit du travail. Le gouvernement la lui a refusée en expliquant que «le FTUC n’avait pas soutenu le gouvernement actuel». Le 15 juillet, l’Union nationale des travailleurs de l’industrie de l’habillement a demandé l’autorisation d’organiser une réunion syndicale; celle-ci lui a été refusée en invoquant les PER de 2009. Il arrive aussi que les autorisations soient délivrées avec retard ce qui empêche parfois les syndicats d’avoir le quorum voulu. Dans sa communication en date du 23 septembre 2011, le FICTU indique que, le 25 août, une autorisation d’organiser une réunion publique a été refusée à une organisation affiliée au FICTU, le Syndicat des travailleurs dans la communication, les mines et en général. De même, la Fédération nationale du FICTU s’est vu refuser, les 16 juillet et 27 août 2011, des autorisations pour tenir des réunions. Le 12 juillet, l’autorisation d’organiser une marche et un rassemblement des affiliés du FICTU, des travailleurs et des retraités, a été refusée pour des raisons de sécurité. Le 19 septembre 2011, l’autorisation d’organiser l’assemblée générale annuelle du Syndicat des travailleurs du transport (TWU), une organisation affiliée au FICTU, a été refusée avec la mention que «toutes les réunions syndicales sont suspendues jusqu’à nouvel ordre (…)».
    2. 825 Les organisations plaignantes affirment également que les médias continuent d’être fortement censurés aux Fidji depuis la mise en œuvre du décret de 2010 relatif aux médias. L’article 16 des PER place tous les médias sous le contrôle du gouvernement en exigeant de tout radiodiffuseur ou éditeur qu’il présente tous les documents pouvant être publiés ou diffusés pour qu’ils soient soumis à une évaluation préalable avant d’être autorisés. Le personnel militaire est présent dans tous les organes de presse (TV, radio et journaux) et filtre toutes les nouvelles. Les commentaires du public, des syndicats et des organisations de la société civile se voient refuser la publication. Alors que les recommandations de la commission ont été transmises à la plupart des organes de presse du pays, les organisations plaignantes déplorent le fait qu’elles n’aient jamais été mentionnées dans aucune rubrique, du fait qu’il est interdit d’imprimer les déclarations des syndicats ou de les diffuser. Les organisations plaignantes estiment qu’il n’y a pratiquement pas de liberté d’expression ni de parole dans le pays.
  • Attaque du gouvernement contre les droits syndicaux sanctionnée par décret exécutif
    1. 826 Selon les organisations plaignantes, le gouvernement fidjien a publié depuis 2009 une série de décrets qui restreignent sévèrement les droits syndicaux et autres droits fondamentaux et portent une grave atteinte aux principes de la liberté syndicale, notamment pour les travailleurs de la fonction publique mais aussi pour les travailleurs des organismes publics et les travailleurs de plusieurs secteurs clés syndicalisés tels que ceux du sucre et du transport aérien. A cet égard, les organisations plaignantes soulignent dans une communication en date du 18 février, que les salaires de la plupart des fonctionnaires n’ont pas été ajustés depuis la fin de l’année 2006, à l’exception de ceux des membres des forces de l’ordre (deux fois depuis 2007), des personnels infirmiers et de la police (en 2010); c’est la première fois que la fonction publique fidjienne n’accorde pas d’indemnités de cherté de vie à tous les fonctionnaires sans distinction, et ne favorise que certains secteurs. Par ailleurs, les organisations plaignantes indiquent que les décrets qui ont été adoptés éliminent à la fois la possibilité de recours et de réparation en cas de violation passée, présente ou future des droits, et que ces nombreux changements, qui vont à l’encontre des droits et des intérêts des travailleurs, ont été mis en œuvre sans que les syndicats concernés aient été consultés au préalable. Les organisations plaignantes décrivent comme suit les principales caractéristiques des décrets susmentionnés:
      • a) Décret no 6 du 14 avril 2009 sur les services publics. L’article 17 a aboli la Commission de recours des services publics qui avait été établie dans le cadre de la loi relative à la fonction publique (amendement de 1998) pour examiner les plaintes des travailleurs de la fonction publique concernant l’absence de promotion, les mesures disciplinaires prises par l’employeur, ou les mutations entre régions. Le décret a même levé toutes les procédures d’appel et les affaires en première instance, si bien que les fonctionnaires ont perdu leur droit à tout réexamen administratif de ces questions (un tribunal disciplinaire des services publics a été établi par la suite, mais seulement pour examiner les mesures à prendre en matière disciplinaire). L’article 17 a aussi abaissé sans délai l’âge de départ obligatoire à la retraite de 60 à 55 ans, si bien que plus de 2 000 fonctionnaires ont été contraints de prendre une retraite anticipée et les nouvelles embauches et promotions se font sur une base contractuelle, les postes à responsabilité étant pourvus par un personnel non civil.
      • b) Décret no 9 d’administration de la justice du 16 avril 2009, tel qu’amendé jusqu’à février 2010. Le système judiciaire du pays a été rétabli par ce décret. Toutefois, au titre de l’article 5, les tribunaux ont été dessaisis de leur compétence pour connaître des oppositions à la loi d’amendement de la Constitution des fidji de 1997, au décret de révocation de 2009, et à tout autre décret déjà prononcé par le Président ou prononcé par lui après le 10 avril 2009. L’article 23(3) a levé toute mesure de réfutation en cours de la légalité des décrets ou des déclarations prononcées entre le 5 décembre 2006 et le 9 avril 2009 et de la plupart des décisions prises par tout fonctionnaire exécutif au cours de cette période. Ce décret mentionnait expressément toute décision de mettre fin à un contrat d’emploi pour quelque motif que ce soit entre le 5 décembre 2006 et le 7 janvier 2007. Il touchait plusieurs syndicats du secteur public qui se sont trouvés dans l’incapacité de saisir la justice sur des réclamations liées au travail. Le décret, tel qu’amendé en mai 2009, allait encore plus loin en levant l’examen de toutes les procédures, demandes, différends et griefs contestant ou ayant contesté toute décision prise par la Commission de la fonction publique entre le 5 décembre 2006 et le 9 avril 2009 et portant sur les conditions d’emploi des fonctionnaires du secteur public et notamment sur les changements éventuels de rémunération. Le décret, tel qu’amendé en février 2010, allait toujours plus loin en dessaisissant les tribunaux de leur compétence pour connaître de toute opposition formulée par quiconque relativement à toute décision ou ordonnance du gouvernement visant la restructuration ou la réforme de la fonction publique, la modification des conditions d’emploi de toute personne occupant des fonctions publiques ou toute modification des modalités de service, y compris de la rémunération. Toutes les demandes en instance concernant ces questions ont été levées sans délai. A compter de février 2010, seules les dispositions relatives au règlement des conflits de la loi sur les relations professionnelles de 2007 permettaient le redressement dans certains cas particuliers (ces dispositions se sont avérées de courte durée). En outre, le décret a étendu son champ d’application à d’autres organismes publics et, par conséquent, à davantage de travailleurs syndiqués.
      • c) Décret no 10 de 2009 relatif aux différends commerciaux.
      • d) Modification de la loi sur les relations d’emploi (décret no 21 du 16 mai 2011). Ce décret portait modification de l’article 3 de la loi sur les relations professionnelles de 2007 pour exclure du champ d’application tous les travailleurs de la fonction publique. Environ 15 000 travailleurs de la fonction publique fidjienne ont perdu du jour au lendemain leurs droits syndicaux et autres droits fondamentaux. Aujourd’hui, les travailleurs de la fonction publique, qui constituent la majorité de la population active des Fidji, ne jouissent d’aucun des droits énoncés dans les conventions nos 87 et 98. Par ailleurs, le décret interdit aux travailleurs de la fonction publique et à leurs syndicats d’engager devant un quelconque tribunal toute mesure, procédure ou revendication ou de soumettre un quelconque grief lié à la loi sur les relations professionnelles. Le décret annule aussi toute décision de justice rendue par un tribunal compétent dans le cadre d’une poursuite judiciaire qui serait intentée en vertu de la loi sur les relations professionnelles. Les seuls garde-fous qui n’ont pas été éliminés par le décret sont ceux qui découlent de la loi sur la réparation des accidents du travail et de la loi sur la santé et la sécurité au travail.
      • e) Projet de décret sur les industries critiques en difficulté financière. En application de l’article 23 et suivants, les employeurs qui font la demande d’une déclaration de difficultés financières auprès d’un arbitre et la reçoivent peuvent demander à résilier unilatéralement les conventions collectives en vigueur. Pour répondre aux préoccupations d’un syndicat, il suffit à l’employeur d’établir que la décision de mettre fin à l’accord «constitue un exercice raisonnable du jugement professionnel de la société», que l’accord collectif «faisait baisser la productivité de la société, ou la rendait non compétitive, ou qu’il ne constituait pas une norme dans l’industrie», que «la balance des inconvénients favorise le rejet de l’accord» ou que «des efforts raisonnables ont été faits en vue de négocier une modification volontaire, mais ne sont pas susceptibles de déboucher sur une solution rapide et satisfaisante» (art. 26). Bien qu’aux termes de l’article 27 l’employeur soit tenu de proposer au syndicat les modifications à l’accord qu’il juge nécessaires, de fournir au syndicat les informations requises pour évaluer la proposition et de s’efforcer de s’entretenir avec le syndicat, ce dernier n’a en fait que très peu de possibilités de négocier collectivement afin de parvenir à des modifications véritablement nécessaires, justes et équitables. Avec ce projet de décret il est bien trop facile pour les employeurs de se passer des conventions collectives en vigueur négociées avec leurs syndicats.
      • f) Décret de 2011 sur les industries nationales essentielles (emploi). De l’avis de l’organisation plaignante, l’application de ce décret, publié le 29 juillet 2011 et entré en vigueur le 9 septembre 2011 selon des mentions légales no 81 en date du 8 septembre 2011, sonnera pratiquement le glas du mouvement syndical indépendant et, partant, fera taire le plus ardent défenseur de la société civile aux Fidji non seulement en ce qui concerne les travailleurs de la fonction publique, mais aussi de nombreux autres travailleurs. Certaines des dispositions les plus inadmissibles figurent ci-après.
        • - Au titre de l’article 6, tous les enregistrements de syndicats existants dans des industries désignées sont annulés dans la pratique; pour pouvoir exercer leurs activités, les syndicats sont tenus de se faire réenregistrer dans le cadre de la loi selon de nouvelles modalités extrêmement problématiques. L’organisation plaignante condamne la radiation d’un syndicat du registre par le pouvoir exécutif qui constitue selon elle une grave infraction aux principes de la liberté syndicale. Pour se faire réenregistrer, le syndicat est tenu de se soumettre à de nouvelles élections pour désigner un dirigeant dans le cadre de procédures qui ne se conforment pas aux principes de la liberté syndicale. Ainsi, au titre de l’article 7, tous les chefs de syndicat tels que les dignitaires, les cadres, les représentants et les dirigeants doivent être employés par les organisations désignées qu’ils représentent. Ceux qui enfreignent cette disposition doivent faire face à des sanctions civiles et pénales rigoureuses – une amende allant jusqu’à 50 000 dollars fidjiens (FJD) ou une peine de prison pouvant aller jusqu’à cinq ans pour les individus et une amende pour le syndicat allant jusqu’à 100 000 dollars fidjiens.
        • - Au titre de l’article 10, un syndicat doit d’abord faire une demande d’élection ou de réélection en tant que représentant de l’unité de négociation auprès du Premier ministre et fournir les informations demandées. Il est difficile de déterminer si le Premier ministre dispose du pouvoir discrétionnaire supplémentaire pour permettre à un requérant de tenter de représenter l’unité de négociation – en particulier à la lumière de l’article 12. Les organisations plaignantes se déclarent profondément préoccupées par le fait que, dans la pratique, ce décret pourrait équivaloir à une autorisation préalable du gouvernement. Lorsqu’il reçoit une demande, le Premier ministre possède l’entière discrétion, au titre de l’article 11, de décider de la composition et du champ d’application de l’unité de négociation sans qu’il soit possible de faire appel de cette décision.
        • - Par «unité de négociation» on entend à l’article 2 un groupe d’au moins 75 travailleurs ayant le même employeur, ce qui apparemment fait obstacle à la représentation de travailleurs dans les entreprises essentielles qui emploient moins de 75 travailleurs. Par ailleurs, une seule entité peut représenter l’unité de négociation. Le syndicat n’est enregistré comme représentant de l’unité de négociation que si 50 pour cent des travailleurs + 1 de l’unité de négociation votent en faveur, plutôt que 50 pour cent des votants + 1 – critère qui rend plus difficile la réussite à une élection – en particulier si l’on tient compte des pressions que le gouvernement impose aux travailleurs pour qu’ils refusent que le syndicat les représente.
        • - Même une fois le syndicat élu, le responsable du registre peut annuler l’inscription du syndicat et imposer une nouvelle élection à tout moment si, après réception de la plainte d’un employeur, il y a suffisamment de signes qui donnent à penser que le syndicat ne jouit plus de l’appui minimal requis. En pareil cas, la convention collective est frappée de nullité et l’employeur peut imposer les conditions d’emploi. Tous les deux ans le syndicat doit solliciter un nouveau mandat en tant que représentant des travailleurs (art. 9), ce qui a pour effet de mettre à rude épreuve l’administration du syndicat. Si les travailleurs ne veulent plus que ce syndicat les représente, le décret prévoit déjà une procédure pour organiser de nouvelles élections au titre de l’article 16.
        • - Au titre de l’article 8, toutes les conventions collectives existantes sont nulles et non avenues 60 jours après l’entrée en vigueur du décret. Les nouvelles conventions doivent être négociées par les parties concernées avant l’expiration des 60 jours dans le cadre de nouvelles procédures très restrictives; toutefois, si aucune convention n’est en place conformément aux nouvelles procédures, l’entreprise peut mettre en œuvre de manière unilatérale de nouvelles conditions par le biais d’une nouvelle convention collective ou de contrats individuels. De l’avis des organisations plaignantes, cette disposition garantit que les syndicats ne pourront pas négocier un contrat équitable car l’employeur sera encouragé à engager des négociations de façade pendant 60 jours pour ensuite imposer ses conditions en l’absence de convention collective acceptée d’un commun accord.
        • - Les nouvelles règles applicables aux négociations collectives (partie 4) soulèvent également plusieurs préoccupations majeures. L’article 21(3) prévoit une période de négociation pouvant durer jusqu’à trois ans. Si aucun accord n’intervient au bout de trois ans, l’une ou l’autre des parties concernées peut demander au Premier ministre d’intervenir conformément à l’article 21(4), afin d’imposer un accord définitif et contraignant. Cet accord sera contraignant pour les parties pendant une durée de deux ans. Au titre de l’article 22, les conventions collectives n’expirent pas. Elles peuvent plutôt faire l’objet d’amendements quinquennaux en l’absence d’accord contraire. Il semble qu’il n’y ait aucun dispositif qui permette de modifier un accord par consentement mutuel en dehors de la période prévue pour cette modification. Selon l’article 23 les employeurs, s’ils sont considérés comme étant en difficulté financière, peuvent rouvrir l’accord. Si la négociation ne débouche pas sur une nouvelle convention, l’employeur peut demander et le Premier ministre peut imposer de nouvelles conditions en ce qui concerne uniquement les propositions de l’employeur et toutes informations complémentaires que le Premier ministre peut juger utile de consulter.
        • - Les organisations plaignantes désapprouvent également le mécanisme de règlement des différends établi par le décret. Au titre de l’article 26, aucun différend ne peut être porté devant les tribunaux; les conventions collectives doivent être assorties d’une procédure de règlement des différends relative à la discipline et au renvoi, et d’une interprétation et application de l’accord; ces différends doivent être réglés de manière interne ou par le responsable de la révision mandaté par l’employeur; les différends ayant trait à une somme de plus de 5 millions de dollars fidjiens peuvent être portés devant le Premier ministre pour qu’il rende une décision exécutoire. Toutefois, il n’est en aucun cas possible à un travailleur ou à un syndicat de former une demande devant une personne ou un organisme juridique ou quasi-juridique (neutre). Selon les organisations plaignantes, ceci garantit pratiquement le non-accès à la justice industrielle.
        • - Enfin, les organisations plaignantes dénoncent le fait que le décret impose des restrictions sévères au droit de grève. L’article 27(1) affirme catégoriquement qu’il «ne sera autorisé à aucun moment et pour aucune raison tout moyen de pression, grève, déclaration fictive de maladie, freinage de la production ou autres activités nuisibles d’un point de vue financier ou opérationnel». On remarque en particulier qu’aucune interdiction de ce genre ne frappe les armes économiques qu’utilisent les employeurs, notamment les lock-out. Le décret indique par ailleurs que de tels actes sont «formellement interdits» dans le cadre d’efforts visant à obtenir l’enregistrement, d’efforts visant à influencer le dénouement ou le cours des négociations ou de différends concernant l’interprétation ou l’application d’une convention collective. Nonobstant les dispositions de l’article 27(1), l’article 27(2) prévoit qu’un syndicat peut faire la grève si les parties ne sont pas parvenues à une nouvelle convention collective à l’issue de trois ans de négociations, et ce seulement après le dépôt d’un préavis de 28 jours et sur autorisation écrite préalable du gouvernement. Par ailleurs, le Premier ministre doit vérifier les résultats du scrutin secret pour autoriser la grève. Les organisations plaignantes soulignent que, dans le cas très peu probable d’une grève, l’employeur peut imposer un lock-out aux travailleurs; il peut aussi imposer de manière unilatérale les conditions d’emploi. Par ailleurs, le Premier ministre peut, à tout moment, déclarer illégale toute grève dans une industrie essentielle. Quiconque enfreint cette loi, est passible d’une amende de 50 000 dollars fidjiens et d’une peine de prison de cinq ans; le syndicat, pour sa part, risque une sanction de 250 000 dollars fidjiens. Le travailleur qui poursuit une grève après que celle-ci a été déclarée illégale par le Premier ministre risque une amende allant jusqu’à 100 000 dollars fidjiens ou une peine de prison allant jusqu’à dix ans; le syndicat, pour sa part, risque une amende ne dépassant pas 250 000 dollars fidjiens.
        • - Par ailleurs, l’article 24(2) et (3) dispose que, dans une entreprise déterminée fonctionnant à plein temps, nul n’a droit au paiement d’heures supplémentaires pour un travail accompli les week-ends ou les jours fériés. Dans l’industrie aérienne, les travailleurs n’ont en aucun cas droit au paiement d’heures supplémentaires, à moins que l’employeur et le syndicat en conviennent autrement. L’article 24(4) interdit la déduction automatique des cotisations à moins que l’employeur y consente – ce qui, selon l’organisation plaignante, ne risque pas de se produire. Enfin, l’article 30 dispose que la validité du décret même et des décisions des agents de l’Etat ou de toute société qui seraient prises au titre de ce décret, échappe au contrôle judiciaire de tout tribunal. Le décret va jusqu’à éteindre toute réclamation en suspens au titre de la loi sur les relations professionnelles de 2007. En conséquence, les travailleurs et les syndicats des industries essentielles ne disposent d’absolument aucun recours en cas de violation éventuelle de ce qui leur reste de droits sur le lieu de travail.
        • - Le FTUC estime que ce décret constitue une tentative de décimer les syndicats des industries sucrière et aérienne.
      • g) Suppression des déductions de cotisations dans le secteur public. A dater du 4 août 2011, le gouvernement a interdit la déduction automatique des cotisations pour tous les travailleurs de la fonction publique par décret modifiant la loi sur la fonction publique. Il est évident que ce décret se propose d’affaiblir financièrement les syndicats du secteur public en les obligeant à collecter les cotisations auprès de chaque membre de la main à la main.
    2. 827 En conclusion, la perte, par décret, de ces droits fondamentaux, l’impossibilité même de contester la validité de ce préjudice, en plus de l’extinction de toutes les demandes en suspens, sont manifestement contraires aux obligations du pays au titre du droit international du travail et constituent une preuve supplémentaire de l’avancée de l’autoritarisme aux Fidji. Il ne fait aucun doute que ce cas est et reste grave et urgent. La CSI et l’IE prient instamment le comité de recommander au gouvernement fidjien de mettre immédiatement fin à toutes les violences, menaces de violence et arrestations dont sont victimes les syndicalistes et leurs familles; de faire en sorte que les travailleurs fidjiens et leurs syndicats puissent opérer dans un climat exempt de crainte et d’intimidation; d’amender la législation fidjienne du travail pour qu’elle soit en totale conformité avec les conventions de l’OIT – notamment les conventions nos 87 et 98; et d’annuler les PER de 2009 afin de permettre aux syndicats de s’acquitter du rôle qui leur revient et des activités qui sont les leurs, ainsi que le décret relatif aux médias afin de permettre aux syndicats de soulever des questions essentielles dans les médias et dans leurs propres publications. Compte tenu de la gravité et de l’urgence de la situation, les organisations plaignantes prient le comité d’envoyer une mission préliminaire dans le pays. Dans sa communication du 23 septembre 2011, le FICTU formule un certain nombre d’autres allégations graves et demande notamment que l’impact des PER sur les droits syndicaux aux Fidji fasse l’objet d’un examen du comité.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 828. Le comité regrette que, en dépit du temps écoulé depuis le dernier examen de la plainte, le gouvernement n’ait pas communiqué les informations demandées bien qu’il ait été invité à plusieurs reprises, y compris par un appel pressant, à présenter ses commentaires et ses observations sur le cas.
  2. 829. Dans ces conditions, et conformément à la règle de procédure applicable [voir 127e rapport du comité, approuvé par le Conseil d’administration, paragr. 17], le comité se voit dans l’obligation de présenter un rapport sur le fond de l’affaire sans pouvoir tenir compte des informations qu’il avait espéré recevoir du gouvernement sur tous les points en suspens.
  3. 830. Le comité rappelle que l’ensemble de la procédure instituée par l’OIT pour l’examen des allégations concernant la violation de la liberté syndicale est de promouvoir le respect de cette liberté en droit et en pratique. Le comité est convaincu que, si cette procédure les protège contre des accusations sans fondement, les gouvernements devraient, pour leur part, reconnaître l’importance de présenter, en vue d’un examen objectif, des réponses détaillées aux allégations formulées à leur encontre.
    • Acte de discrimination antisyndicale à l’encontre de M. Koroi
  4. 831. Le comité note avec regret au vu des communications en date du 18 février et du 10 mars présentées par les organisations plaignantes, l’IE et la FTA, que le licenciement du président de la FTA, M. Tevita Koroi, de ses fonctions de chef d’établissement, est maintenu et que, dans une lettre du 22 février 2011, la Commission de la fonction publique (PSC) a rejeté la demande de réintégration formulée par la FTA en indiquant que la présente plainte n’avait aucun rapport avec le licenciement de M. Koroi. Le comité note en outre que, en ce qui concerne la réponse du gouvernement, les organisations plaignantes réitèrent qu’elles n’ont pas pu épuiser les voies de recours parce que le système en place ne le permettait pas et que, préalablement à son licenciement, M. Koroi n’avait reçu aucune communication verbale ou formelle de la PSC en raison de sa participation à des activités politiques et de ses déclarations publiques. Selon les organisations plaignantes, M. Koroi était l’un des principaux, des plus anciens et des meilleurs chefs d’établissement du pays au moment de son licenciement. Le comité note également que l’organisation plaignante réaffirme que M. Koroi prenait la parole en sa qualité de président de la FTA et non pas en tant que chef d’établissement, qu’il s’adressait à un rassemblement public de dirigeants syndicaux, de représentants de la société civile, d’hommes politiques et de notables et non pas d’élèves; et que son discours n’a pas été prononcé pendant les heures de cours mais en période de vacances scolaires et ce non pas dans les locaux de l’école mais au siège de la FTA.
  5. 832. En l’absence d’observations du gouvernement, le comité se trouve dans l’obligation de réitérer les conclusions qu’il avait formulées en ce qui concerne M. Koroi lors de l’examen du cas à sa réunion de novembre 2010 [voir 358e rapport, paragr. 547-554]:
    • Le comité note que, dans le présent cas, les organisations plaignantes allèguent le licenciement d’un dirigeant syndical travaillant dans le secteur public de l’éducation, un harcèlement antisyndical permanent et une ingérence dans les affaires internes d’un syndicat.
    • Le comité note que, d’après les organisations plaignantes, le gouvernement a porté préjudice à M. Tevita Koroi, président de la FTA, président du Conseil de la Pacific Education et membre du bureau exécutif du FICTU, en le suspendant de ses fonctions de chef d’établissement le 10 décembre 2008 et en mettant fin par la suite à son emploi dans la fonction publique le 30 avril 2009 en raison du mandat qu’il détient de l’association d’enseignants qu’il préside. Les organisations plaignantes indiquent que la Commission de la fonction publique des fidji (PSC) a accusé M. Koroi d’avoir commis trois infractions au Code de conduite de la fonction publique des fidji en prononçant un discours le 5 décembre 2008 à l’occasion de la création du Mouvement pour la démocratie à Fidji, durant lequel il a déclaré que «[le mouvement] organisera et coordonnera une campagne pour rétablir le système parlementaire à Fidji le plus rapidement possible. L’annonce de cette initiative vient à point nommé car elle coïncide avec le deuxième anniversaire du renversement par la force, par la République des forces militaires des fidji, du gouvernement élu.» Etant donné que cette réunion n’a pas eu lieu dans un établissement scolaire ou pendant des heures de cours et que des élèves n’y ont pas participé, mais qu’elle s’est tenue au siège de la FTA à Suva et qu’elle réunissait des représentants des syndicats, des groupes de la société civile, des partis politiques et un public plus général, les organisations plaignantes estiment que M. Koroi agissait en sa qualité de président de la FTA et qu’il est injuste de le sanctionner dans le cadre de ses fonctions de chef d’établissement. D’après les organisations plaignantes, le ministère de l’Education a répondu le 18 février 2009 à une lettre de l’IE condamnant la suspension de M. Koroi que ce dernier «a été sanctionné pour s’être exprimé sur des sujets ne relevant pas de sa compétence en tant que fonctionnaire mais aussi en tant que dirigeant d’un syndicat qui a pour unique mandat de défendre les enseignants et leurs conditions de travail». La FTA indique également qu’elle a déposé plainte auprès du ministère du Travail et des Relations professionnelles contre la décision prise par la PSC mais n’a pas reçu de réponse jusqu’à présent. D’après les organisations plaignantes, du fait de l’abrogation de la Constitution des fidji le 10 avril 2009, la Commission gouvernementale de recours, la Haute Cour, la Cour d’appel et la Cour suprême ont été abolies et il n’existe aucun autre moyen de recours dans le cadre du système juridique des fidji. La FTA fait valoir que d’autres mesures de discrimination ont été prises par le gouvernement dans la mesure où, dans une lettre du 11 août 2009, le ministère de l’Education a ordonné que M. Koroi ne soit plus reconnu comme étant le représentant de la FTA dans diverses réunions. Se référant à l’ancienne loi sur les syndicats, la loi sur les relations professionnelles de 2007 et la Constitution des fidji récemment abrogée, les organisations plaignantes concluent que le licenciement de M. Koroi constitue une claire violation de la législation des fidji et des normes internationales du travail et qu’il a été sanctionné en sa qualité de chef d’établissement pour les activités qu’il a exercées en tant que dirigeant syndical. Les organisations plaignantes demandent que M. Koroi soit immédiatement réintégré dans la fonction publique et dans son poste de chef d’établissement, qu’il reçoive une compensation adéquate et que toutes les charges pesant contre lui soient abandonnées par les autorités compétentes.
    • Le comité note, à la lecture de la réponse du gouvernement, que M. Koroi avait déjà été accusé en 2002 d’avoir commis divers manquements à la discipline et avait été, à ce titre, réprimandé et condamné à verser une amende au titre de la loi sur les finances. Il note également que M. Koroi a été inculpé en vertu des ordonnances générales 309(b) et (c), reconnu coupable et rétrogradé en 2008. Concernant la participation de M. Koroi à des activités politiques et les prises de position publiques de celui-ci contre le gouvernement, le gouvernement indique que le ministère de l’Education a tenté à plusieurs reprises de raisonner M. Koroi en lui signalant qu’il devait ne pas négliger les obligations que lui impose son statut de fonctionnaire, respecter le Code de conduite de la fonction publique lorsqu’il participait à des réunions publiques et se garder de croire qu’il pouvait agir comme il l’entendait lorsqu’il intervenait en tant que président de son syndicat. Le ministère a également conseillé à la FTA de faire appel à des responsables syndicaux à plein temps qui ne soient pas des fonctionnaires pour s’exprimer sur des sujets de nature politique dans des réunions auxquelles participent des partis politiques. D’après le gouvernement, cet avis n’a pas été pris en considération par M. Koroi dans la mesure où celui-ci a continué de participer à de telles réunions et de s’y exprimer, participant ainsi à des activités qui n’entrent pas dans le cadre de ses attributions et, qui plus est, sont incompatibles avec les obligations que lui impose son statut de fonctionnaire et d’employé de l’Etat. Le gouvernement estime qu’en raison du manque de coopération de M. Koroi il n’a eu d’autre choix que de prendre des mesures disciplinaires à l’encontre de l’intéressé. Le ministère de l’Education, après avoir diligenté une enquête interne pour vérifier les faits, a, dans une communication datée du 10 décembre 2008, suspendu M. Koroi de ses fonctions. Après avoir donné à M. Koroi la possibilité de contester la décision de suspension prise à son encontre lors d’une audience qui s’est tenue le 30 avril 2009, la PSC l’a reconnu coupable de toutes les charges qui pesaient contre lui et a décidé de le licencier le jour même. Le gouvernement fait observer que, s’il respecte pleinement les droits que sa qualité de syndicaliste confère à M. Koroi, il se doit de rappeler que M. Koroi est, en tant que fonctionnaire, tenu d’observer les prescriptions de la loi sur la fonction publique de 1999, de s’abstenir de diffamer son employeur et de porter atteinte aux principes de bonne foi. Le gouvernement estime que la loi sur la fonction publique est une loi nationale telle que prévue à l’article 8, paragraphe 1, de la convention no 87 qui doit être respectée par tous les fonctionnaires sans exception, que ces derniers soient ou non affiliés à une organisation syndicale, et que l’affaire en question est une affaire touchant à la relation d’emploi existant entre un employeur et un salarié qui a manqué à ses obligations contractuelles. D’après le gouvernement, la décision de la PSC d’exclure M. Koroi de la fonction publique se fonde uniquement sur le fait que ce dernier a enfreint les dispositions des sections 6 et 7 de la loi sur la fonction publique et la section (c) des ordonnances générales qui énoncent de façon générale que les fonctionnaires ne sont pas autorisés à s’exprimer publiquement ou à diffuser des déclarations sur des sujets pouvant être considérés comme étant de nature politique ou administrative. Le gouvernement indique également que, d’après ses registres, M. Koroi n’a pas encore introduit de recours contre la décision de la PSC auprès de l’instance d’appel de cette dernière. Au lieu de cela, la FTA a, dans une lettre datée du 6 mai 2009, intenté auprès du ministère du Travail une action contre l’employeur dans le cadre du mécanisme de notification des conflits du travail prévu par la loi sur les relations professionnelles de 2007 mais s’est désistée le 11 septembre 2009 compte tenu de la décision no 35 de 2008 du Tribunal des relations professionnelles statuant que, dans le cas d’un conflit du travail, le tribunal n’était pas compétent pour statuer sur le licenciement d’un employé. La FTA a, en conséquence, informé le ministère du Travail qu’elle introduirait un recours pour licenciement abusif auprès du service de médiation au titre de la loi sur les relations professionnelles de 2007. Cependant, selon le ministère du Travail, la FTA n’a pas encore formé ce recours. Le gouvernement conclut que, dans le cas en question, M. Koroi n’a pas épuisé toutes les voies de recours et espère que la FTA ne retardera pas la procédure et intentera son action selon les procédures prévues par la loi sur les relations professionnelles.
    • Le comité note que les informations fournies par les organisations plaignantes et le gouvernement concordent sur le fait que M. Koroi a été suspendu de ses fonctions de chef d’établissement le 10 décembre 2008 et qu’il a été mis fin à son emploi dans la fonction publique le 30 avril 2009 au motif d’une déclaration publique prononcée en décembre 2008 au cours d’une réunion. Le comité note cependant que les versions des deux parties sont contradictoires concernant la nature et l’objet de la déclaration et la légitimité du licenciement. Si les organisations plaignantes estiment que M. Koroi s’est exprimé au siège de la FTA à Suva en qualité de président de la FTA et que sa déclaration s’inscrit dans le cadre d’activités syndicales légitimes, le gouvernement considère qu’en prononçant un discours public à caractère politique critiquant le gouvernement M. Koroi a enfreint les sections 6 et 7 de la loi sur la fonction publique et les ordonnances générales 309(c) et donc manqué à ses obligations contractuelles.
    • Dans des cas précédents se rapportant à des licenciements de dirigeants syndicaux, le comité a, à plusieurs reprises, souligné que l’un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs doivent bénéficier d’une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d’emploi – licenciement, transfert, rétrogradation et autres actes préjudiciables. Cette protection est particulièrement souhaitable en ce qui concerne les délégués syndicaux étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendance, ceux-ci doivent avoir la garantie qu’ils ne subiront pas de préjudice en raison du mandat syndical qu’ils détiennent. Le comité a estimé que la garantie de semblable protection dans le cas de dirigeants syndicaux est en outre nécessaire pour assurer le respect du principe fondamental selon lequel les organisations de travailleurs ont le droit d’élire librement leurs représentants. Il a rappelé que l’une des manières d’assurer la protection des délégués syndicaux est de prévoir que ces délégués ne peuvent être licenciés ni dans l’exercice de leurs fonctions ni pendant un certain laps de temps suivant la fin de leur mandat, sauf évidemment en cas de faute grave. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 799 et 804.]
    • Le comité estime que la question essentielle est de savoir si la déclaration publique de M. Koroi peut être considérée comme s’inscrivant dans le cadre des activités syndicales légitimes et souhaite rappeler qu’il a déjà examiné à plusieurs occasions la question des activités syndicales normales par opposition aux activités dépassant le cadre syndical. Le comité note que les sections 6 et 7 de la loi sur la fonction publique et les ordonnances générales 309(c) interdisent catégoriquement aux fonctionnaires de s’exprimer publiquement sur des questions de nature politique. A cet égard, le comité souligne en premier lieu qu’à son avis les enseignants n’exécutent pas des tâches de fonctionnaires commis à l’administration de l’Etat, ce type d’activité étant en fait également mené dans le secteur privé. Dans ces conditions, il importe que les enseignants à statut de fonctionnaire puissent bénéficier des garanties prévues par la convention no 98. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 901.] En second lieu, le comité souhaite réaffirmer que des mesures, bien qu’étant de nature politique et n’ayant pas pour but de restreindre les droits syndicaux comme tels, risquent néanmoins d’être appliquées de telle manière que l’exercice de ces droits soit affecté et qu’une interdiction générale de toute activité politique par les syndicats non seulement serait incompatible avec les principes de la liberté syndicale, mais manquerait en outre du réalisme nécessaire à son application pratique. En effet, les organisations syndicales peuvent vouloir exprimer publiquement, par exemple, leur opinion sur la politique économique et sociale du gouvernement. La liberté d’expression dont devraient jouir les organisations syndicales et leurs dirigeants devrait également être garantie lorsque ceux-ci veulent formuler des critiques à l’égard de la politique économique et sociale du gouvernement. Pour que la contribution des syndicats et des organisations d’employeurs ait le degré voulu d’utilité et de crédibilité, il est nécessaire que leur activité se déroule dans un climat de liberté et de sécurité. Ceci implique que, dans une situation où ils estimeraient ne pas jouir des libertés essentielles pour mener à bien leur mission, les syndicats et les organisations d’employeurs seraient fondés à demander la reconnaissance et l’exercice de ces libertés et que de telles revendications devraient être considérées comme entrant dans le cadre d’activités syndicales légitimes. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 157, 206, 503 et 36.] De manière plus générale, le comité souhaite souligner l’importance qu’il attache au respect des libertés publiques fondamentales des syndicalistes et pour les organisations d’employeurs, notamment la liberté d’expression, qui sont essentielles au plein exercice de la liberté syndicale, et estime que la déclaration de M. Koroi (qui n’a pas été contestée par le gouvernement) relève de la catégorie des discours qui devraient être protégés, en particulier du fait que le point de vue a été exprimé en dehors du champ de la relation de travail.
    • Le comité note que la FTA a indiqué qu’elle a intenté une action auprès du ministère du Travail, considérant qu’il n’existe aucune autre voie de recours dans le système juridique national du fait de l’abrogation de la Constitution des fidji, mais n’a jusqu’à présent pas reçu de réponse du ministère. Si le gouvernement indique pour sa part que M. Koroi n’a pas encore formé de recours contre la décision de la PSC auprès de l’instance d’appel de cette dernière et que la FTA s’est désistée de son action et n’a pas encore formé de recours contre l’employeur auprès du service de médiation au titre de la loi sur les relations professionnelles de 2007, le comité rappelle que le gouvernement a la responsabilité de prévenir tous actes de discrimination antisyndicale et doit veiller à ce que les plaintes pour des pratiques discriminatoires de cette nature soient examinées dans le cadre d’une procédure nationale qui doit être prompte, impartiale et considérée comme telle par les parties intéressées. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 817.] En conséquence, compte tenu des principes précités, du changement du système judiciaire des fidji et de l’absence apparente de toute garantie constitutionnelle, le comité demande au gouvernement d’adopter les mesures nécessaires pour procéder à la réintégration immédiate de M. Koroi dans ses fonctions antérieures de chef d’établissement sans perte de salaire ou d’indemnités, et de le tenir informé de l’évolution de la situation à cet égard.
    • Concernant l’allégation selon laquelle le ministère de l’Education nationale aurait ordonné le 11 août 2009 que M. Koroi ne soit plus reconnu comme étant le représentant de la FTA dans diverses réunions, le comité attire l’attention du gouvernement sur le fait que, compte tenu que les organisations de travailleurs ont le droit d’élire librement leurs représentants, le licenciement d’un dirigeant syndical ou le simple fait qu’il abandonne le travail qu’il avait dans une entreprise déterminée ne devrait pas avoir d’incidence en ce qui concerne sa situation et ses fonctions syndicales, sauf si les statuts du syndicat concerné en disposent autrement. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 411.] Notant que la FTA continue de considérer M. Koroi comme étant le président du syndicat, le comité invite expressément le gouvernement à s’abstenir de toute ingérence à cet égard et d’autoriser M. Koroi, en qualité de représentant légitime de la FTA, à exercer ses fonctions de représentation dans les réunions pertinentes, notamment le Forum de l’éducation, le Bureau national d’agrément des enseignants, la JCC et le CSB.
    • Voies de fait, harcèlement, intimidation et arrestation de syndicalistes
  6. 833. Le comité note les nouvelles allégations des organisations plaignantes concernant les actes suivants dans l’ordre chronologique dans lequel ils se sont produits: i) le 10 février 2011, M. Anand Singh, un avocat de renom, a été emmené de son domicile vers 21 heures et conduit à la caserne militaire pour y être interrogé à propos de rumeurs de menaces à l’encontre du régime; ii) le 12 février 2011, vers 20 heures, M. Felix Anthony, secrétaire national du FTUC et secrétaire général du Syndicat des travailleurs de l’industrie sucrière des fidji, a été emmené de son domicile par trois officiers militaires en uniforme qui l’ont menacé ainsi que sa famille et l’ont interrogé à de nombreuses reprises au sujet de prétendues tentatives visant à renverser le gouvernement; il a ensuite été redéposé à son domicile vers 22 heures et averti que les choses pourraient empirer pour lui; iii) le 18 février 2011, M. Anthony a été convoqué à une réunion dans une raffinerie de sucre de Ba; il y a assisté avec deux autres hauts responsables syndicaux et y a été accusé d’être à l’origine des problèmes que connaissaient les raffineries de sucre; on a ensuite ordonné aux deux hommes de se rendre à Namaka pour s’y entretenir avec des officiers de l’armée. A l’issue d’une brève discussion, ces derniers ont entrepris de passer à tabac M. Anthony et les autres dirigeants syndicaux présents et leur ont fait subir des agressions physiques et verbales pendant environ deux heures; les trois hommes ont ensuite été conduits à la caserne militaire de l’aéroport de Namaka où M. Anthony et ses collègues ont à nouveau été passés à tabac par un personnel militaire en civil, et ont souffert de blessures (notamment d’une lésion du tympan) qui ont nécessité des soins médicaux; ils ont fini par être libérés sous la menace d’autres violences; iv) le 1er avril 2011, l’officier militaire qui l’avait passé à tabac a accosté M. Anthony et l’a prévenu devant ses amis qu’il pourrait subir d’autres violences physiques; v) lorsque M. Anthony a cherché à participer à la 100e session de la Conférence internationale du Travail (CIT) en juin 2011, le gouvernement a refusé d’envoyer les pouvoirs de ce dernier, bien qu’il eût été désigné par le FTUC, l’organisation syndicale la plus représentative des Fidji; vi) après la Conférence internationale du Travail, le 22 juin 2011, vers 21 heures, deux officiers de l’armée ont agressé M. Mohammed Khalil, président à Ba du Syndicat des travailleurs de l’industrie sucrière et de l’Union générale des travailleurs des fidji; ils l’ont ensuite dénoncé, ainsi que M. Anthony (qui n’était pas présent à ce moment-là), pour leur défense des droits syndicaux et ont exigé, pendant qu’ils le passaient à tabac, qu’il présente sa démission du syndicat avant 15 heures le lendemain avant de prendre son poste de travail normal, sans quoi il subirait le même sort. M. Khalil n’a pas démissionné; de l’avis des organisations plaignantes, le passage à tabac de M. Khalil constituait une forme de représailles contre les déclarations que son collègue, M. Anthony, avait faites à la Conférence internationale du Travail; vii) le 3 août 2011, M. Daniel Urai, président du FTUC et secrétaire général du Syndicat national des salariés des industries de l’hôtellerie, de la restauration et du tourisme (NUHCTIE) ainsi que Nitin Goundar, actif au sein de ce syndicat, ont été détenus et interrogés au commissariat de police de Nadi, puis inculpés de «rassemblement illégal» pour s’être, semble-t-il, entretenus avec des membres des syndicats et les avoir conseillés. Ils ont été libérés sous caution le 4 août et cités à comparaître le 31 octobre 2011; viii) le 29 octobre 2011, M. Urai a été de nouveau arrêté, cette fois à son retour de la réunion des chefs des gouvernements du Commonwealth à Perth, en Australie, où il a parlé des violations des droits de l’homme et de la liberté syndicale aux Fidji, et il reste en détention bien qu’il n’ait été inculpé d’aucune infraction; et ix) le 4 novembre 2011, M. Felix Anthony a été arrêté à son domicile, et les bureaux du syndicat ont, selon les allégations, été fouillés, et il est maintenu en détention apparemment sans charges. En outre, le comité garde présent à l’esprit le fait que, selon les allégations formulées en 2009 par les organisations plaignantes, M. Attar Singh, secrétaire général du Fiji Islands Council of Trade Unions (FICTU), avait été emmené dans un camp militaire pour y être torturé, son domicile et son véhicule avaient été vandalisés, que son bureau avait été par deux fois visé par des bombes incendiaires, et que d’autres dirigeants syndicaux tel M. Taniela Tabu, secrétaire général du syndicat national Viti des travailleurs de Taukei, avaient également été victimes de ce type de traitement.
  7. 834. Compte tenu de ce qui précède, le comité se déclare profondément préoccupé par les nombreux actes allégués d’agression, de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de dirigeants et membres de syndicats pour avoir exercé leur droit à la liberté syndicale, et notamment les actes récents et répétés d’agression physique et de harcèlement à l’encontre du secrétaire national du FTUC, qui ont suscité une intervention informelle du Directeur général. Le comité regrette profondément que le gouvernement n’ait pas répondu à ces allégations et souhaite rappeler que les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et qu’il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. S’agissant des allégations de mauvais traitements physiques infligés à des syndicalistes, le comité rappelle que les gouvernements doivent donner les instructions nécessaires et imposer des sanctions efficaces dans les cas où de tels actes seraient commis. L’absence de jugements contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d’insécurité, et qui est donc extrêmement dommageable pour l’exercice des activités syndicales. En cas d’atteintes à l’intégrité physique ou morale, le comité a toujours estimé qu’il convenait d’engager immédiatement une enquête judiciaire indépendante afin d’établir pleinement les faits, de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et de prévenir la répétition de tels actes. [Voir Recueil, op. cit., cinquième édition, 2006, paragr. 44, 50, 52 et 55.] Le comité prie donc instamment le gouvernement de diligenter sans délai une enquête indépendante au sujet des incidents allégués plus haut et de lui transmettre des informations détaillées concernant ses conclusions et les mesures prises en conséquence. Les actes d’intimidation et de violence physique à l’encontre de syndicalistes constituant une violation grave des principes de la liberté syndicale et l’absence de protection contre de tels actes équivalant à une impunité de fait qui ne saurait que renforcer un climat de crainte et d’incertitude très préjudiciable à l’exercice des droits syndicaux, le comité prie instamment le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour garantir à l’avenir le plein respect des principes susmentionnés.
  8. 835. S’agissant en particulier de l’allégation selon laquelle un acte d’agression aurait été commis à l’encontre d’un dirigeant syndical à titre de représailles pour des déclarations faites par son collègue, M. Anthony, à la Conférence internationale du Travail, le comité estime que le fonctionnement de la Conférence risquerait d’être considérablement entravé et la liberté de parole des délégués des organisations d’employeurs et de travailleurs paralysée si les délégués concernés ou leurs collègues étaient victimes d’agression ou d’arrestation en raison des vues qu’ils auraient exprimées à la Conférence. Le comité prie instamment le gouvernement de tenir pleinement compte de ce principe à l’avenir et de veiller à ce qu’aucun syndicaliste ne subisse des représailles pour avoir exercé sa liberté d’expression.
  9. 836. En outre, le comité s’inquiète tout autant de l’arrestation, le 4 novembre 2011, et de la détention en garde à vue sans charges du secrétaire national du FTUC, de l’arrestation du président du FTUC, le 29 octobre 2011, et de sa détention en garde à vue sans charges, et de l’arrestation et de la détention de nuit, le 3 août 2011, du président du FTUC, du secrétaire général du NUHCTIE ainsi que d’un membre du NUHCTIE, ainsi que des poursuites pénales engagées contre ces derniers pour rassemblement illégal en raison de leur non-respect des conditions liées aux PER. Le comité souhaite avant toute chose rappeler que la détention de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs constitue une grave violation des libertés publiques en général, et des libertés syndicales en particulier, et que l’arrestation de dirigeants syndicaux et de syndicalistes ainsi que de dirigeants d’organisations d’employeurs dans l’exercice d’activités syndicales légitimes en rapport avec leurs droits d’association, même si c’est pour une courte période, constitue une violation des principes de la liberté syndicale. Le comité souligne également que l’arrestation et la détention de syndicalistes, sans que leur soit imputé un délit, ou sans qu’il existe un mandat judiciaire, constituent une grave violation des droits syndicaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 62, 64 et 69.] En ce qui concerne ses conclusions relatives aux PER comme énoncé ci-après, le comité considère par ailleurs que, si des personnes menant des activités syndicales ou exerçant des fonctions syndicales ne peuvent prétendre à l’immunité vis-à-vis de la législation pénale ordinaire, l’arrestation et l’inculpation de syndicalistes doivent s’appuyer sur des exigences légales qui ne portent pas elles-mêmes atteinte au principe de la liberté syndicale. Le comité prie instamment le gouvernement de tenir pleinement compte de ces principes à l’avenir. En ce qui concerne en particulier les syndicalistes susmentionnés, il prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que le secrétaire national du FTUC et le président du FTUC soient immédiatement libérés de leur détention et que toutes les charges retenues contre ces derniers et le membre du NUHCTIE soient immédiatement abandonnées et de le tenir informé sans délai de l’évolution de la situation à cet égard, y compris du résultat de l’audience du 31 octobre 2011.
  10. 837. En ce qui concerne la fouille alléguée des bureaux du syndicat et du domicile de M. Anthony par la police, le comité rappelle que toute perquisition au siège d’un syndicat ainsi qu’au domicile de syndicalistes sans mandat judiciaire constitue une très grave violation de la liberté syndicale [voir Recueil, op. cit., paragr. 182], et il prie le gouvernement de fournir ses observations sur cette allégation.
    • Absence de liberté de réunion, de liberté d’expression et d’accès aux médias
  11. 838. Le comité prend note des allégations de l’organisation plaignante et des informations disponibles selon lesquelles: i) en raison de l’instauration en avril 2009 des PER qui sont reconduits tous les mois, les activités syndicales telles que les séminaires, ateliers et réunions sont subordonnées à l’obtention d’une autorisation qui est, soit refusée (le 14 juillet 2011, par exemple, le FTUC s’est vu refuser l’autorisation d’organiser un atelier sur les réformes du droit du travail; le 15 juillet, l’Union nationale des travailleurs de l’industrie de l’habillement n’a pas obtenu l’autorisation de se réunir; le 13 août, le permis de réunion accordé au Conseil national du FTUC a été révoqué; les 16 juillet et 27 août, refus d’accorder des autorisations de réunions au FICTU; le 19 septembre, refus d’accorder une autorisation au TWU pour son assemblée générale annuelle; etc.), soit accordée avec retard (ce qui empêche parfois les syndicats d’avoir le quorum voulu), soit accordée dans des conditions très strictes (notamment avec la présence d’officiers de l’armée qui assistent aux réunions et écoutent les délibérations, approuvent l’ordre du jour de la réunion et désignent même les personnes autorisées à prendre la parole ou à assister à la réunion); et ii) en raison du décret relatif aux médias et des PER, la censure des médias reste sévère aux Fidji et il est interdit d’imprimer les déclarations des syndicats ou de les diffuser. C’est pourquoi les recommandations de la commission que les organisations plaignantes ont transmises à la plupart des organes de presse du pays se sont vu refuser la publication.
  12. 839. A cet égard, le comité, exprimant sa préoccupation concernant l’annonce officielle du 19 septembre 2011 faite à l’occasion du refus d’accorder une autorisation au TWU selon laquelle «toutes les réunions syndicales sont suspendues jusqu’à nouvel ordre […]», rappelle que la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations a souligné que les conventions sur la liberté syndicale ne contiennent pas de dispositions permettant d’invoquer l’excuse d’un état d’exception pour motiver une dérogation aux obligations découlant des conventions ou une suspension de leur application. Dans un cas de proclamation réitérée de l’état d’urgence, le comité a indiqué que la résolution concernant les droits syndicaux et leurs relations avec les libertés civiles, adoptée par la Conférence internationale du Travail en 1970, déclare que «les droits conférés aux organisations de travailleurs et d’employeurs doivent se fonder sur le respect des libertés civiles et que l’absence de ces libertés civiles enlève toute signification au concept des droits syndicaux». Le comité souhaite également rappeler de manière générale que la Conférence internationale du Travail a signalé que le droit de réunion, la liberté d’opinion et d’expression et, en particulier, le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de divulguer, sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit, constituaient des libertés civiles qui sont essentielles à l’exercice normal des droits syndicaux (résolution concernant les droits syndicaux et leurs relations avec les libertés civiles, adoptée à la 54e session, 1970). [Voir Recueil, op. cit., paragr. 38, 193 et 194.] En ce qui concerne la liberté de réunion en particulier, le comité rappelle que l’autorisation de tenir des réunions et manifestations publiques, ce qui constitue un droit syndical important, ne doit pas être arbitrairement refusée. Par ailleurs, le comité a appelé l’attention sur le fait que, lorsqu’un représentant des autorités publiques a le droit d’être présent à des réunions syndicales, cela peut influencer les délibérations et les décisions adoptées (à plus forte raison si ce représentant a le droit d’intervenir dans les débats) et peut donc constituer une ingérence incompatible avec le principe de libre réunion syndicale. En ce qui concerne la liberté d’opinion et d’expression, le comité rappelle que le droit d’exprimer des opinions par la voie de la presse ou autrement est l’un des éléments essentiels des droits syndicaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 132, 142 et 155.] Soulignant que la liberté de réunion et la liberté d’opinion et d’expression sont une condition sine qua non de l’exercice de la liberté syndicale, le comité prie donc instamment le gouvernement de tenir pleinement compte à l’avenir des principes énoncés plus haut et de s’abstenir d’entraver indûment l’exercice légal des droits syndicaux. En outre, il demande au gouvernement de fournir des informations détaillées sans délai en réponse à la communication du FICTU en date du 23 septembre 2011, et en particulier en ce qui concerne l’impact des PER sur la liberté syndicale et le refus général présumé d’autoriser la tenue de réunions syndicales.
    • Violations de la liberté syndicale sanctionnées par décret exécutif
  13. 840. Le comité note que, selon les organisations plaignantes, le gouvernement a publié depuis 2009, une série de décrets qui restreignent sévèrement les droits syndicaux et autres droits fondamentaux et portent une grave atteinte aux principes de la liberté syndicale, notamment pour les travailleurs de la fonction publique (par exemple le décret no 21 du 16 mai 2011 portant modification de la loi sur les relations d’emploi et aux termes duquel 15 000 travailleurs de la fonction publique ne bénéficient toujours pas de la couverture prévue par la loi) ainsi que les travailleurs des organismes publics. Le comité a indiqué à plusieurs reprises que les normes contenues dans la convention no 87 s’appliquent à tous les travailleurs «sans distinction d’aucune sorte», et couvrent donc le personnel de l’Etat; il a semblé en effet inéquitable d’établir une discrimination dans le domaine syndical entre les travailleurs du secteur privé et les agents de la fonction publique qui doivent, les uns comme les autres, être en mesure de s’organiser pour la défense de leurs intérêts. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 218.] Le comité prie donc instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les fonctionnaires publics puissent jouir des garanties consacrées par la convention no 87.
  14. 841. Le comité note l’indication des organisations plaignantes selon laquelle plusieurs décrets (notamment, le décret no 6 du 14 avril 2009 sur les services publics, le décret du 16 avril 2009 relatif à l’administration de la justice tel qu’amendé , le décret no 21 du 16 mai 2011 portant modification de la loi sur les relations d’emploi et le décret no 35 du 29 juillet 2011 sur les industries nationales essentielles (emploi)) éliminent collectivement la possibilité d’un examen judiciaire ou administratif de la légalité des décrets mêmes ou de toute décision exécutive (y compris les décisions de la PSC) concernant la fonction publique (et notamment les conditions de travail des fonctionnaires publics) ou d’autres secteurs déterminés, et mettent fin aux procédures judiciaires ou administratives en suspens ou en cours à cet égard. Le comité note en outre avec regret que toutes les modifications auraient été décidées sans consultation préalable des syndicats concernés. Le comité souligne à cet égard l’importance qu’il convient d’attacher à ce que des consultations franches et complètes aient lieu sur toute question ou tout projet de dispositions législatives ayant une incidence sur les droits syndicaux et il rappelle que le respect des garanties légales ne semble pas assuré si, en vertu de la législation nationale, l’état de siège a pour conséquence qu’un tribunal ne peut procéder, et ne procède effectivement pas, à un examen de l’affaire quant au fond. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 85 et 1074.] Le comité prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires afin que des consultations préalables soient tenues avec les organisations de travailleurs concernées sur les projets de loi qui concernent les droits syndicaux, en tenant compte du fait que le respect des garanties légales doit normalement inclure l’existence d’un droit de faire appel des décisions administratives devant les tribunaux, et de modifier sans délai la législation concernée afin de garantir l’accès à un tribunal.
  15. 842. Le comité note en outre l’importance particulière accordée par l’organisation plaignante au décret entré en vigueur le 9 septembre 2011 sur les industries nationales essentielles (emploi) et dont l’application, selon elle, sonnera pratiquement le glas du mouvement syndical indépendant et, partant, fera taire le plus ardent défenseur de la société civile aux Fidji, car il s’est donné pour but de décimer les syndicats des industries sucrière et aérienne. D’une façon générale, le comité estime que ce décret engendre de nombreuses violations des conventions nos 87 et 98 ainsi que des principes de la liberté syndicale et de la négociation collective. Le comité souhaite en particulier attirer l’attention du gouvernement sur ses considérations concernant les problèmes suivants:
    • i) Au titre de l’article 6, tous les enregistrements de syndicats existants dans les industries nationales essentielles sont annulés dans la pratique; pour pouvoir exercer leurs activités, les syndicats sont tenus de se faire réenregistrer dans le cadre de la loi. Le comité a, à maintes reprises, fait observer qu’une législation qui permet au ministre d’ordonner l’annulation de l’enregistrement d’un syndicat, à son entière discrétion et sans aucun droit de recours aux tribunaux, est contraire aux principes de la liberté syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 689.]
    • ii) L’article 7 dispose que les dirigeants syndicaux doivent, sous réserve de sanctions civiles et pénales graves, être employés par les organisations désignées qu’ils représentent. Notant qu’une des mesures nécessaires au réenregistrement du syndicat est l’élection de nouveaux dirigeants syndicaux, le comité souhaite rappeler que les dispositions relatives à la nécessité d’appartenir à une profession ou une entreprise pour pouvoir être dirigeant syndical sont contraires au droit des travailleurs de choisir librement leurs représentants. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 407.]
    • iii) Selon les articles 10 à 12, un syndicat doit demander par écrit au Premier ministre d’être élu ou réélu représentant de l’unité de négociation; le Premier ministre décide de la composition et du champ d’application de l’unité de négociation en vue d’organiser l’élection d’un représentant et le responsable du registre organise et supervise les élections au sein de l’unité de négociation. Notant les préoccupations exprimées par l’organisation plaignante relativement à l’étendue du pouvoir discrétionnaire dont dispose le Premier ministre lorsqu’il autorise un candidat à briguer la représentation de l’unité de négociation, le comité rappelle qu’une disposition législative prévoyant que le droit d’association est soumis à une autorisation donnée d’une manière purement discrétionnaire par un département ministériel est incompatible avec le principe de la liberté syndicale. En outre, le droit des organisations de travailleurs d’élire librement leurs dirigeants constitue une condition indispensable pour qu’elles puissent effectivement agir en toute indépendance et promouvoir avec efficacité les intérêts de leurs membres. Pour que ce droit soit pleinement reconnu, il importe que les autorités publiques s’abstiennent de toute intervention de nature à en entraver l’exercice, que ce soit dans la détermination des conditions d’éligibilité des dirigeants ou dans le déroulement des élections elles-mêmes. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 273 et 391.]
    • iv) Dans sa partie 3, l’article 2 vise à déterminer le rôle des représentants – qu’ils appartiennent ou non à un syndicat – en tant qu’agents de négociation collective. Le comité croit comprendre que le terme de «représentant» peut recouvrir un délégué syndical ou un représentant élu des travailleurs. A cet égard, il estime que, comme le garantissent les conventions (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971, et (no 154) sur la négociation collective, 1981, lorsqu’une entreprise compte des représentants syndicaux et des représentants élus, des mesures appropriées doivent être prises pour assurer que la présence de représentants élus ne puisse servir à affaiblir la situation des syndicats intéressés. La négociation directe conduite entre l’entreprise et son personnel, en feignant d’ignorer les organisations représentatives existantes, est contraire au principe selon lequel il faut encourager et promouvoir la négociation collective entre les employeurs et les organisations de travailleurs. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 945 et 946.] Le comité prie instamment le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour veiller à ce que l’application des dispositions législatives soit pleinement conforme aux principes précités.
    • v) Au titre des articles 12 et 14, un seul représentant est élu pour représenter les travailleurs de l’unité de négociation et un syndicat n’est enregistré en tant que représentant de l’unité de négociation que si 50 pour cent des travailleurs + 1 de l’unité votent en sa faveur. Compte tenu du fait que le libellé de l’article 14, et notamment du paragraphe 4, semble indiquer que le chiffre de 50 pour cent + 1 constitue non seulement apparemment le pourcentage requis pour qu’un syndicat soit l’agent de négociation exclusif, mais aussi pour que le syndicat soit enregistré, le comité rappelle que le droit des travailleurs de constituer les organisations de leur choix implique notamment la possibilité effective de créer – si les travailleurs le désirent – plus d’une organisation de travailleurs par entreprise. Un nombre minimum de membres requis au niveau de l’entreprise n’est pas en soi incompatible avec la convention no 87 mais le seuil devrait être fixé à un niveau raisonnable, de façon à ne pas entraver la constitution des organisations, ce chiffre pouvant varier selon les conditions particulières dans lesquelles la restriction a été imposée. Quoi qu’il en soit, un pourcentage de 30 pour cent au moins des travailleurs concernés exigé pour constituer un syndicat est trop élevé. Par conséquent, une disposition imposant un pourcentage de 50 pour cent au moins des travailleurs ne serait pas conforme à la convention no 87. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 287, 288 et 315.]
    • vi) Au titre de l’article 8, toutes les conventions collectives existantes sont nulles et non avenues 60 jours après l’entrée en vigueur du décret et les nouvelles conventions doivent être négociées par les parties concernées avant l’expiration des 60 jours; autrement, l’entreprise peut mettre en œuvre unilatéralement de nouvelles conditions par le biais d’une nouvelle convention collective ou de contrats individuels. Le comité tient à souligner qu’une disposition légale qui autorise l’employeur à modifier unilatéralement la teneur d’une convention collective conclue antérieurement, ou contraint les parties à la renégocier, est contraire aux principes de la négociation collective. En examinant des allégations relatives à l’annulation et à la renégociation forcée de conventions collectives en raison d’une crise économique, le comité a considéré que l’obligation de renégocier des conventions collectives en vigueur en vertu d’une loi est contraire aux principes de la négociation collective libre et volontaire consacrés par la convention no 98, et insisté sur le fait que le gouvernement aurait dû s’efforcer de faire en sorte que la renégociation des conventions collectives en vigueur soit décidée en vertu d’un accord entre les parties. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 942 et 1021.] En outre, aucune raison claire et impérative n’a apparemment été donnée pour justifier la nécessité d’une stabilisation économique dans un contexte donné. La législation a des répercussions sur des secteurs entiers et ne fait nullement allusion à des dispositions particulières ne pouvant être appliquées dans le cadre d’une crise nationale grave mais prévoyant plutôt une intervention générale pour toutes les conventions collectives. Le comité estime donc que l’abrogation de conventions collectives ainsi que l’imposition unilatérale de conditions de travail, en cas de non-conclusion d’un accord, est contraire à l’article 4 de la convention no 98 en ce qui concerne les mesures prises pour encourager et promouvoir la négociation collective.
    • vii) Conformément à l’article 27, et sous peine de graves sanctions civiles et pénales, les grèves menées dans les secteurs nationaux essentiels dans le but d’obtenir l’enregistrement, d’influencer le résultat ou le cours des négociations, et les différends sur l’interprétation ou l’application d’une convention collective sont expressément interdits. L’unité de négociation ne peut faire la grève que si les parties concernées ne sont pas parvenues à une convention collective à l’issue de trois ans de négociations, et ce sous réserve d’un dépôt de préavis de 28 jours et sur autorisation écrite préalable du gouvernement. Le Premier ministre peut, par ordonnance, déclarer illégal toute grève ou lock-out dans un secteur national essentiel. Aux termes des règlements sur les industries nationales essentielles et les entreprises désignées de 2011, les limitations précitées du droit de grève s’appliquent aux secteurs suivants qui sont actuellement considérés comme faisant partie des «secteurs nationaux essentiels»: le secteur financier (y compris les douanes); le secteur des télécommunications; le secteur de l’aviation civile; et le secteur des services publics (y compris l’électricité et l’approvisionnement en eau). Selon la définition qui figure à l’article 2 du décret, le terme de «secteurs nationaux essentiels» renvoie à des secteurs: i) vitaux pour que l’économie nationale des Fidji puisse continuer à prospérer, ou que le produit intérieur brut poursuive sa progression, ou ceux dans lesquels les pouvoirs publics détiennent la majorité du capital ou qui sont pour eux d’un intérêt essentiel; et ii) qui sont déclarés secteurs nationaux essentiels par le ministère aux termes de règlements pris en exécution de ce décret. A cet égard, le comité tient d’abord à souligner que le droit de grève est un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux. Le comité rappelle que le droit de grève peut être restreint, voire interdit: 1) dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat; ou 2) dans les services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. En conséquence, les services d’électricité, les services d’approvisionnement en eau et les services téléphoniques peuvent être considérés comme services essentiels dans lesquels le droit de grève peut être restreint ou supprimé, et l’interdiction du droit de grève aux travailleurs des douanes, fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat, n’est pas contraire aux principes de la liberté syndicale. Toutefois, la radio et la télévision, les banques et l’aviation civile en général ne constituent pas des services essentiels au sens strict du terme. Le fait d’établir un lien entre les restrictions aux actions revendicatives et l’entrave aux échanges et au commerce permet de porter atteinte à une large gamme d’actions légitimes. Certes, l’impact économique des actions revendicatives et leurs effets sur les échanges et le commerce sont regrettables; cependant, ils ne suffisent pas à rendre le service «essentiel» et le droit de grève devrait être maintenu. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 522, 576, 579, 585, 587 et 592.] Le comité souhaite en outre souligner que la décision de déclarer la grève illégale ne devrait pas appartenir au gouvernement mais à un organe indépendant des parties et jouissant de leur confiance. Par ailleurs, des sanctions pénales ne devraient pouvoir être infligées pour faits de grève que dans les cas d’infraction à des interdictions de la grève conformes aux principes de la liberté syndicale. Toute sanction infligée en raison d’activités liées à des grèves illégitimes devrait être proportionnée au délit ou à la faute commis, et les autorités devraient exclure le recours à des mesures d’emprisonnement contre ceux qui organisent une grève pacifique ou y participent. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 628 et 668.]
    • viii) Au titre de l’article 26, les litiges relatifs à la discipline et au renvoi ainsi qu’à l’interprétation ou l’application d’une convention collective doivent être réglés de manière interne ou par le responsable de la révision mandaté par l’employeur sans passer par un organe judiciaire ou quasi-judiciaire; les différends ayant trait à une somme de plus de 5 millions de dollars fidjiens (2,78 millions de dollars des Etats-Unis) qui ne sont toujours pas réglés peuvent être portés devant le Premier ministre pour qu’il rende une décision finale et exécutoire. Le comité estime qu’il devrait être entièrement possible de faire appel devant les tribunaux en cas de différend ayant trait à une question de droit (le licenciement d’un travailleur, par exemple), quel que soit le montant en jeu; ces différends pourraient être arbitrés en première instance.
  16. 843. Compte tenu des nombreux problèmes soulevés plus haut, le comité regrette profondément la publication le 8 septembre 2011 des règlements d’application au titre de l’article 31 du décret de 2011 sur les industries nationales essentielles (emploi) et prie instamment le gouvernement d’en modifier sans délai les dispositions, en pleine consultation avec les partenaires sociaux, afin de le rendre conforme aux conventions nos 87 et 98, qui ont été ratifiées par les Fidji. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
  17. 844. Le comité note enfin les allégations selon lesquelles, à dater du 4 août 2011, le gouvernement aurait interdit la déduction automatique des cotisations pour tous les agents de la fonction publique par un décret portant modification de la loi sur la fonction publique ce qui, selon les organisations plaignantes, a pour but d’affaiblir financièrement les syndicats du secteur public en les obligeant à collecter les cotisations auprès de chaque membre de la main à la main. Le comité note en outre que, de la même manière, l’article 24(4) du décret sur les industries nationales essentielles (emploi) de 2011 interdit la déduction automatique des cotisations à moins que l’employeur n’y consente – ce qui, selon l’organisation plaignante, ne risque pas de se produire. Le comité rappelle que la suppression de la possibilité de retenir les cotisations à la source, qui pourrait déboucher sur des difficultés financières pour les organisations syndicales, n’est pas propice à l’instauration de relations professionnelles harmonieuses et devrait donc être évitée. Il prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que les cotisations continuent d’être retenues à la source dans les secteurs concernés.
  18. 845. Compte tenu de la gravité des allégations des organisations plaignantes et de l’absence d’informations complètes sur la situation sur le terrain, le comité prie instamment le gouvernement d’accepter la tenue d’une mission de contacts directs qui aura pour mandat de clarifier les faits et d’aider le gouvernement et les partenaires sociaux à trouver des solutions appropriées conformes aux principes de la liberté syndicale.
  19. 846. Le comité attire l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas. Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur ce cas en raison de l’extrême gravité et de l’urgence des problèmes en cause.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 847. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Compte tenu du remaniement en cours du système judiciaire aux Fidji et de l’absence apparente de toute garantie constitutionnelle, le comité demande au gouvernement d’adopter les mesures nécessaires pour procéder à la réintégration immédiate de M. Koroi dans ses fonctions antérieures de chef d’établissement sans perte de salaire ou d’indemnités, et de le tenir informé sur l’évolution de la situation à cet égard.
    • b) Le comité prie instamment le gouvernement de s’abstenir de toute nouvelle ingérence dans les affaires internes de la FTA et d’autoriser M. Koroi, en tant que représentant légitime de cette organisation, à exercer ses fonctions de représentation dans les réunions pertinentes, notamment le Forum de l’éducation, le Bureau national d’agrément des enseignants, la JCC et le CSB.
    • c) Profondément préoccupé par les nombreux actes allégués d’agression, de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de dirigeants et membres de syndicats pour avoir exercé leur droit à la liberté syndicale, et notamment les actes récents et répétés d’agression physique et de harcèlement à l’encontre du secrétaire national du FTUC, le comité prie instamment le gouvernement de mener sans délai une enquête indépendante sur ces incidents et de lui transmettre des informations détaillées sur ses conclusions et sur les mesures prises en conséquence. Le comité prie instamment le gouvernement de prendre sans délai toutes les mesures nécessaires pour assurer à l’avenir le plein respect des principes énoncés dans ses conclusions à cet égard. S’agissant en particulier de l’allégation selon laquelle un acte d’agression aurait été commis à l’encontre d’un dirigeant syndical à titre de représailles pour des déclarations faites par le secrétaire national du FTUC lors de la Conférence internationale du Travail, le comité prie instamment le gouvernement de veiller à ce qu’aucun syndicaliste ne subisse des représailles pour avoir exercé sa liberté d’expression.
    • d) Inquiet de l’arrestation le 4 novembre 2011 et de la détention en garde à vue sans charges du secrétaire national du FTUC, de l’arrestation du président du FTUC le 29 octobre 2011 et de sa détention en garde à vue sans charges, ainsi que de l’arrestation et de la détention de nuit le 3 août 2011 du président du FTUC et du secrétaire général du NUHCTIE ainsi que d’un membre du NUHCTIE, et des poursuites pénales engagées contre ces derniers pour rassemblement illégal en raison de leur non-respect des conditions liées aux PER, le comité prie instamment le gouvernement de tenir pleinement compte à l’avenir des principes énoncés dans ses conclusions et de prendre les mesures nécessaires pour garantir que le secrétaire national du NUHCTIE et le président du FTUC soient immédiatement libérés de leur détention, et que toutes les poursuites contre le membre du NUHCTIE soient immédiatement abandonnées, et de le tenir informé sans délai de l’évolution de la situation à cet égard, y compris du résultat de l’audience du 31 octobre 2011.
    • e) En ce qui concerne la fouille alléguée des bureaux du syndicat et du domicile du secrétaire national du FTUC par la police, le comité prie le gouvernement de fournir ses observations sur cette allégation.
    • f) Soulignant que la liberté de réunion et la liberté d’opinion et d’expression sont une condition sine qua non de l’exercice de la liberté syndicale, le comité prie instamment le gouvernement de tenir pleinement compte à l’avenir des principes énoncés dans ses conclusions et de s’abstenir d’entraver indûment l’exercice légal des droits syndicaux. En outre, il prie le gouvernement de fournir sans délai des informations détaillées en réponse à la communication du FICTU en date du 23 septembre 2011, et en particulier en ce qui concerne l’impact des PER sur la liberté syndicale et le refus général présumé d’autoriser la tenue de réunions syndicales.
    • g) En ce qui concerne la violation présumée des droits syndicaux sanctionnée par décret exécutif et qui vise en particulier les travailleurs de la fonction publique, le comité prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les fonctionnaires publics jouissent des garanties consacrées par la convention no 87, de modifier sans délai les décrets concernés afin de garantir l’accès aux tribunaux et de faire en sorte qu’à l’avenir des consultations préalables soient menées avec les syndicats concernés sur toute proposition de législation affectant les droits syndicaux.
    • h) En ce qui concerne en particulier le décret sur les industries nationales essentielles (emploi), qui est entré en vigueur le 9 septembre 2011, et compte tenu du fait que ce décret engendre de nombreuses violations des conventions nos 87 et 98 ainsi que des principes de la liberté syndicale et de la négociation collective, le comité regrette profondément la publication le 8 septembre 2011 des règlements d’application au titre de l’article 31 du décret et prie instamment le gouvernement d’en modifier les dispositions sans délai et en pleine consultation avec les partenaires sociaux afin de le rendre conforme aux conventions nos 87 et 98, qui ont été ratifiées par les Fidji. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
    • i) Le comité prie également le gouvernement de faire le nécessaire pour que la possibilité de retenir les cotisations à la source continue d’être accordée aux syndicats du secteur public et à ceux des secteurs considérés comme faisant partie des «secteurs nationaux essentiels».
    • j) Compte tenu de la gravité des allégations des organisations plaignantes et de l’absence d’informations complètes sur la situation sur le terrain, le comité prie instamment le gouvernement d’accepter la tenue d’une mission de contacts directs qui aura pour mandat de clarifier les faits et d’aider le gouvernement et les partenaires sociaux à trouver des solutions appropriées conformes aux principes de la liberté syndicale.
    • k) Le comité attire l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et des recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
    • l) Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur ce cas en raison de l’extrême gravité et de l’urgence des problèmes en cause.
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