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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration- 25. Le comité a examiné le présent cas pour la dernière fois à sa réunion de mars 2017 et, à cette occasion, a formulé les recommandations suivantes sur les questions en suspens [voir 381e rapport, mars 2017, paragr. 112]:
- a) Le comité exhorte le gouvernement à prendre immédiatement toutes les mesures nécessaires envers l’entreprise afin que cette dernière mette à exécution sans délai supplémentaire les décisions du Tribunal d’El-Harrach (Alger) ordonnant la réintégration de MM. Nekkache et Ammar Khodja et leur verse tous les arriérés de salaires et les indemnités de compensation conformément aux décisions de justice. Le comité s’attend à ce que le gouvernement l’informe sans délai de la mise en œuvre de sa recommandation.
- b) Le comité s’attend à ce que toutes les mesures soient prises pour que le Syndicat national autonome des postiers (SNAP) puisse exercer ses activités au sein de l’entreprise sans entrave ni intimidation à l’encontre de ses dirigeants ou de ses membres.
- 26. Le gouvernement présente ses observations dans des communications en date du 16 octobre 2017 et du 25 juin 2019 dans lesquelles il indique qu’Algérie Poste (ci-après l’entreprise) a exécuté partiellement la décision du Tribunal d’El-Harrach dans sa partie pécuniaire, à savoir le versement de la somme de 50 000 dinars algériens, à MM. Nekkache et Ammar Khodja. Par ailleurs, le gouvernement informe que ces derniers ont intenté une action en justice contre l’entreprise en septembre 2016 pour le paiement d’une indemnité d’astreinte journalière fixée à 10 000 dinars algériens par jour de retard dans l’exécution de la décision de réintégration. Le gouvernement indique que l’audience qui était prévue le 10 mars 2019 a été reportée et qu’il transmettra au comité le jugement rendu dans cette affaire.
- 27. Par ailleurs, le comité prend note du rapport de la mission de haut niveau qui s’est rendue à Alger en mai 2019 suite aux conclusions de juin 2018 de la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail au sujet de l’application par l’Algérie de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. À cette occasion, la mission de haut niveau a recueilli des informations sur le présent cas. Le comité note en particulier l’indication que l’entreprise s’est acquittée du dédommagement pour MM. Nekkache et Ammar Khodja mais a refusé de les réintégrer. Suite à une nouvelle action en justice de ces derniers, le Tribunal de Dar El Beïda a condamné, par une décision du 21 avril 2019, l’entreprise à s’acquitter d’un montant de 500 000 dinars algériens (équivalant à 3 750 dollars des États-Unis) en guise de dédommagement pour son refus d’exécuter le jugement du 8 septembre 2015. Une représentante du ministère de la Poste a indiqué à la mission de haut niveau que l’entreprise ne comptait pas faire appel du jugement et qu’elle s’acquitterait du dédommagement pour clore l’affaire en vertu de l’article 73-4 de la loi no 90-11 du 21 avril 1990 relative aux relations de travail. Enfin, selon le gouvernement, le licenciement de MM. Nekkache et Ammar Khodja n’avait aucun lien avec leur qualité de dirigeants du SNAP, car au moment de leur licenciement, ils ne pouvaient prétendre être délégués du SNAP qui n’a été enregistré qu’en décembre 2015.
- 28. Lors de son précédent examen du cas, le comité s’était étonné de la possibilité d’un établissement public de ne pas mettre à exécution les injonctions d’une autorité judiciaire sans subir de sanction et avait regretté qu’une telle atteinte à la liberté syndicale avait porté lourdement préjudice à deux dirigeants syndicaux en les maintenant sans ressources. Le comité ne peut qu’exprimer une nouvelle fois sa profonde préoccupation devant le traitement dilatoire des décisions de justice de septembre 2015 qui ont reconnu le caractère abusif des licenciements et ordonné la réintégration des deux syndicalistes, mais qui, en mai 2019, n’étaient pas encore exécutées malgré une astreinte prononcée par la justice à l’encontre de l’entreprise. Par ailleurs, le comité s’interroge sur le caractère suffisamment dissuasif du dédommagement ordonné en avril 2019 par le Tribunal de Dar El Beïda, qui ne semble pas avoir pris en compte les astreintes ordonnées précédemment par la justice à l’encontre de l’entreprise. À cet égard, le comité rappelle sa position que le gouvernement doit prendre des mesures pour que les syndicalistes qui le souhaitent soient réintégrés dans leurs fonctions lorsqu’ils ont été licenciés pour des activités liées à la création d’un syndicat. Au cas où l’autorité judiciaire constaterait que la réintégration des travailleurs licenciés en violation de la liberté syndicale est impossible, des mesures devraient être prises pour qu’ils soient indemnisés intégralement. Les indemnités perçues devraient être appropriées compte tenu du préjudice subi et de la nécessité d’éviter qu’une telle situation ne se reproduise à l’avenir. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 1184, 1172 et 1173.] Dans ces conditions, le comité attend du gouvernement qu’il indique sans délai la suite donnée au jugement du 21 avril 2019 du Tribunal de Dar El Beïda, en particulier si le jugement a fait l’objet d’un recours de la part des plaignants ou s’il a été exécuté. Par ailleurs, le comité attend du gouvernement qu’il informe de la situation professionnelle de MM. Nekkache et Ammar Khodja, notamment s’ils ont demandé la réintégration dans l’entreprise et s’ils continuent d’exercer un mandat syndical. Enfin, le comité prie le gouvernement d’indiquer si le SNAP, enregistré depuis décembre 2015, continue d’exercer ses activités au sein de l’entreprise.
- 29. Le comité attire l’attention du gouvernement sur les conclusions de la mission de haut niveau concernant le côté partiellement abusif que peut revêtir le licenciement de syndicalistes durant la période d’enregistrement d’un syndicat entraînant de facto la cessation de leur relation de travail avec l’entreprise en question, ce qui aux termes de l’interprétation prévalant de la loi, conduit à remettre en cause leur capacité d’exercer leur mandat syndical et de se prévaloir des dispositions de protection contre la discrimination antisyndicale. Une telle faille dans la protection de la liberté syndicale peut entraîner de sérieuses difficultés dans l’exercice du droit syndical et même favoriser des pratiques de discrimination antisyndicale. Le comité veut croire que le gouvernement engagera sans délai un examen empirique de la loi, avec l’assistance technique du Bureau, afin de garantir une protection des représentants syndicaux en pleine conformité avec la liberté syndicale.