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Observation (CEACR) - adopted 1990, published 77th ILC session (1990)

Freedom of Association and Protection of the Right to Organise Convention, 1948 (No. 87) - Central African Republic (Ratification: 1960)

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Se référant à ses commentaires antérieurs et aux commentaires de la Commission de l'application des normes de la Conférence internationale du Travail de juin 1989, la commission note avec intérêt qu'une mission de contacts directs s'est rendue en République centrafricaine du 8 au 12 octobre 1989 et qu'elle a rencontré des représentants du gouvernement, des travailleurs et des employeurs afin d'examiner les questions de fait et de droit relatives à l'application de la convention.

La commission prend note des informations recueillies par la mission et du rapport écrit du gouvernement relatif à l'application de cette convention.

La commission rappelle que ses commentaires portaient sur les points suivants:

- suspension générale depuis septembre 1981 de toutes les activités syndicales, dénommée "trêve syndicale";

- dissolution par voie administrative, le 16 mai 1981, de l'Union générale des travailleurs de Centrafrique (UGTC);

- sort des biens de l'UGTC tant en ce qui concerne les avoirs immobiliers que les liquidités;

- raisons pour lesquelles le tribunal de Bangui, saisi de la question de la dévolution des biens de l'UGTC depuis 1982, n'a pas encore statué;

- droit des travailleurs centrafricains d'exercer librement leurs activités de défense et de promotion de leurs intérêts économiques et sociaux par l'intermédiaire des centrales syndicales de leur choix;

- raisons pour lesquelles les statuts des deux centrales syndicales, la Confédération centrafricaine des syndicats libres (CCSL) et la Fédération centrafricaine des travailleurs (FCT), déposés en 1981, n'ont pas encore reçu l'agrément des autorités;

- l'incompatibilité avec les exigences de la convention de l'article 4 de la loi no 88/009 du 19 mai 1988 se référant à l'unicité syndicale dans la loi et à la condition d'appartenance à la profession en tant que travailleur salarié pour être membre d'un syndicat et candidat au bureau d'un syndicat.

1. Trêve syndicale

La commission note avec intérêt, d'après les informations recueillies pendant la mission en octobre 1989, que la trêve syndicale a été levée par la loi du 19 mai 1988 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical. Elle note que les autorités gouvernementales ont déclaré que les activités syndicales avaient été maintenues pendant la trêve syndicale et que des accords d'établissements avaient été signés entre employeurs et délégués des travailleurs dans le secteur privé. La commission note que la mission a pu prendre connaissance de certains de ces accords.

La commission note également que les autorités gouvernementales ont indiqué que la Confédération nationale des travailleurs centrafricains (CNTC) avait reçu l'agrément des autorités en mai 1981 avant l'imposition de la trêve syndicale, et que son secrétaire général avait représenté les travailleurs centrafricains à la Conférence internationale du Travail jusqu'en juin 1988. Elles ont expliqué que la CNTC n'avait pas représenté les travailleurs centrafricains à la Conférence de juin 1989, car la loi du 19 mai 1988 avait été adoptée et qu'il fallait reconstituer les syndicats de base. Elles ont indiqué également que la CNTC souhaitait tenir un congrès à une date prochaine afin de prononcer son autodissolution volontaire dans un esprit de solidarité avec les travailleurs.

La commission note que la mission a pu constater sur place que les syndicats de base étaient effectivement en train de se reconstituer, que les modèles de statuts types de syndicats avaient été distribués au mois de mai 1989 dans les différents secteurs, public et privé, que les assemblées générales des syndicats s'étaient tenues et continuaient à se tenir et que les syndicats avaient déposé leurs statuts auprès du ministère de l'Intérieur en application de l'article 7 du Code du travail de 1961, à partir du mois d'août 1989. Au moment où la mission se trouvait sur place, 24 syndicats de base avaient ainsi déposé leurs statuts.

Depuis lors, des sources syndicales font apparaître que 35 syndicats de base ont obtenu leur récépissé d'enregistrement et qu'un comité de coordination syndicale, en place depuis le 5 janvier 1990 et composé de représentants de divers syndicats, est chargé d'organiser les activités syndicales jusqu'à la mise en place dans les prochains mois de la nouvelle centrale syndicale.

2. Question relative à la Confédération centrafricaine des syndicats libres (CCSL) et à la Fédération centrafricaine des travailleurs (FCT)

La commission note que les informations recueillies pendant la mission ont permis de confirmer que ces deux confédérations, dont il avait été allégué devant le Comité de la liberté syndicale (cas no 1040) qu'elles avaient été créées à l'initiative du gouvernement, avaient été touchées par la trêve syndicale de septembre 1981 et qu'elles n'avaient pas reçu l'agrément des autorités. Tant les autorités gouvernementales que les représentants des travailleurs ont déclaré que les bureaux desdites centrales étaient composés de personnes qui ne représentaient pas de regroupements de syndicats de base ni de fédérations et qu'en conséquence ces centrales n'avaient que des effectifs théoriques. Les uns et les autres ont convenu également que, depuis la levée de la trêve syndicale, les dirigeants de ces centrales ne se sont pas manifestés, certains d'ailleurs étant décédés. Les représentants des travailleurs rencontrés par la mission ont affirmé qu'actuellement le mouvement syndical souhaite se reconstituer à partir des syndicats de base.

3. Sort des biens de l'UGTC

La commission note, d'après les informations recueillies par la mission, que cette question reste controversée. Selon les autorités gouvernementales, les sommes déposées sur les comptes de l'UGTC ont été dépensées par les ex-syndicalistes de cette confédération. Une plainte a été déposée en justice par le gouvernement contre les ex-dirigeants syndicaux, mais la justice ne s'est pas encore prononcée. Les représentants des travailleurs rencontrés par la mission ont expliqué qu'au moment de la dissolution par voie administrative de l'UGTC le local de la Bourse du travail a été investi par les gendarmes sans mandat judiciaire. Les gendarmes ont fait évacuer les permanents syndicaux qui s'y trouvaient et ont procédé à une perquisition. Par la suite, des policiers ont succédé aux gendarmes dans la garde des locaux. Les biens tels que machines à écrire, classeurs, tableau noir, archives ont été pillés ou ont disparu, le compte de l'UGTC à la Banque nationale centrafricaine de dépôt (BNCD) a été bloqué. En outre, la mission a pu constater que la Bourse du travail est actuellement détruite. L'ex-secrétaire général de l'UGTC a indiqué que les syndicalistes ont voulu préserver certains biens de la destruction et que les ex-dirigeants de l'UGTC souhaitaient rendre compte de leur gestion devant le prochain Congrès des syndicats.

La commission note également, d'après les informations recueillies par la mission, que le président du tribunal de grande instance de Bangui a indiqué que le décret de dissolution de l'UGTC du 16 mai 1981 émanait du Président de la République de l'époque. Quant à la dévolution des biens du syndicat dissous, d'après le président du tribunal, le pouvoir de décider en la matière appartient au Congrès des délégués des syndicats de base. Or, en l'espèce, la dissolution de l'UGTC résultant d'une voie de fait caractérisée, le président du tribunal n'a pas pu savoir la destination des biens, meubles et immeubles, ainsi que des avoirs bancaires dont elle était propriétaire, l'acte de dissolution étant muet à ce propos.

La commission rappelle, à cet égard, que la suspension par voie administrative des organisations syndicales constitue une grave limitation du droit syndical, puisqu'elle ne permet pas d'assurer les droits de la défense qui ne peuvent être garantis que par une procédure judiciaire normale. Elle souligne également que toute perquisition de locaux syndicaux ne devrait pouvoir se produire qu'à la suite de la délivrance d'un mandat par l'autorité judiciaire ordinaire, lorsque cette autorité est convaincue qu'il y a de solides raisons de supposer qu'on y trouvera les preuves nécessaires à la poursuite d'un délit de droit commun, et à la condition que la perquisition soit limitée aux objets qui ont motivé la délivrance du mandat. En conséquence, de l'avis de la commission, les autorités publiques devraient s'abstenir d'intervenir abusivement dans les locaux des syndicats, et la dévolution des biens d'un syndicat dissous devrait être répartie entre les membres de l'organisation dissoute ou transférée à l'organisation qui lui succède, à savoir l'organisation ou les organisations qui poursuivent les buts pour lesquels le syndicat dissous s'est constitué et les poursuivent dans le même esprit.

4. Mise en conformité de la loi no 88/009 du 19 mai 1988 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical avec les exigences de la convention

La commission note qu'un avant-projet de loi préparé par le BIT a été communiqué par la mission au gouvernement centrafricain visant à mettre les dispositions des articles 1, 2 et 4 de la loi en conformité avec les articles 2 et 3 de la convention. Ce projet modifie les dispositions législatives sur la condition d'appartenance à la profession en tant que travailleur salarié pour être membre d'un syndicat et candidat au bureau d'un syndicat (art. 1 et 2 de la loi nouvelle).

Il modifie également les dispositions sur l'unicité syndicale inscrite dans la législation (art. 4 de la loi nouvelle).

La commission relève qu'au cours de la mission de contacts directs les autorités gouvernementales ont pris note des suggestions faites par le BIT et contenues dans l'avant-projet. Elles ont indiqué qu'elles examineraient les suites qu'il conviendrait d'y donner, mais elles ont rappelé que l'Assemblée législative avait adopté un texte qui, selon elles, n'impose pas l'unicité syndicale. Ce texte prévoit seulement que les syndicats professionnels, les fédérations et les confédérations "peuvent", et non "doivent", se regrouper en une centrale syndicale unique. L'assemblée s'est prononcée et le peuple a été en mesure de présenter son avis sur ce point.

Depuis lors, le gouvernement a précisé dans une communication du 17 février 1990 que l'avant-projet de loi communiqué par la mission a été transmis aux autorités compétentes qui ont estimé que la loi no 88/009 du 19 mai 1988 est conforme à la convention no 87 et qu'il n'est pas nécessaire d'y apporter de modification. Le gouvernement confirme, par ailleurs, dans sa communication écrite la mise en place de plusieurs syndicats de base, l'approbation de 39 statuts et règlements intérieurs et l'exercice effectif des activités syndicales. Il indique, cependant, qu'à sa connaissance aucun comité de coordination syndicale n'a été officiellement agréé.

La commission, tout en prenant note des développements intéressants intervenus en ce qui concerne l'application dans la pratique de cette convention, rappelle qu'en vertu des articles 2, 5 et 6 de la convention les organisations de travailleurs ont le droit de constituer des fédérations et des confédérations sans autorisation préalable, et qu'en vertu de l'article 7 l'acquisition de la personnalité juridique ne peut être subordonnée à des conditions de nature à mettre en cause l'application de la convention.

La commission invite en conséquence, à nouveau, le gouvernement à reconsidérer sa position en ce qui concerne la nécessité de modifier les articles 1, 2 et 4 de la loi sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical de 1988, afin de garantir à tous les travailleurs, sans distinction d'aucune sorte, le droit de constituer les syndicats de leur choix en dehors de la centrale syndicale unique à laquelle se réfère la loi, s'ils le désirent. [Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 77e session.]

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