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Observation (CEACR) - adopted 2002, published 91st ILC session (2003)

Abolition of Forced Labour Convention, 1957 (No. 105) - Türkiye (Ratification: 1961)

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  1. 2019

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La commission a pris note de la réponse du gouvernement à ses commentaires précédents, ainsi que des observations de la Confédération des syndicats progressistes de Turquie (DISK) et de la Confédération des associations turques d’employeurs (TISK) annexées au rapport du gouvernement.

Article 1 a) de la convention. Coercition politique et sanction pour l’expression de certaines opinions en opposition à l’ordre établi. 1. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que des peines de prison (comportant un travail pénitentiaire obligatoire, en vertu de l’article 198 du règlement relatif à l’administration des centres pénitentiaires et de détention et à l’exécution des jugements, adopté par décision du Conseil des ministres du 5 juillet 1967, no 6/8517, dans sa teneur modifiée) peuvent être infligées en vertu de diverses dispositions de la législation nationale dans des circonstances relevant de l’article 1 a) de la convention, à savoir:

a)  article 143 du Code pénal (participation à des associations et institutions étrangères sans l’autorisation du gouvernement);

b)  article 159 du Code pénal (insulte ou diffamation proférée notamment à l’égard du «turquisme», de diverses autorités de l’Etat, de lois de l’Etat ou des décisions de la grande Assemblée nationale);

c)  article 241 du Code pénal (censure publique de ministres de la religion, de l’administration gouvernementale, des lois de l’Etat ou des activités du gouvernement);

d)  articles 266 à 268 du Code pénal (insulte de représentants de l’Etat); à cet égard, la commission note qu’en vertu de l’article 481 du code, dans les cas spécifiés aux articles 266, 267 et 268, une requête de prouver le bien-fondé de l’imputation d’un acte attentatoire à l’honneur ou à la dignité d’un fonctionnaire ou représentant de l’Etat ne peut être ni soutenue ni examinée, même lorsque l’acte incriminé est liéà l’exercice de la charge ou fonction publique de l’intéressé;

e)  article 312, paragraphes 2 et 3, du Code pénal (incitation publique à la haine de la population sur la base de distinctions de classe, de race, de religion ou de région);

f)  article 526, paragraphe 2, du Code pénal (agissements contraires aux interdictions ou obligations découlant de la loi no 671 concernant le port d’un couvre-chef et de la loi no 1353 concernant l’adoption et l’utilisation de la graphie officielle turque);

g)  article 536, paragraphe 2, du Code pénal (affichage public de feuilles ou affiches manuscrites ou imprimées, etc., notamment sur un moyen de transport ou un panneau d’affichage privé, sans autorisation des pouvoirs publics);

h)  article 8 de la «loi contre le terrorisme», no 3713 du 12 avril 1991, telle que modifiée le 13 novembre 1996 (propagande écrite ou orale, assemblées, manifestations et rassemblements contre l’indivisibilité de l’Etat).

2. La commission avait noté que, si certaines des dispositions visées ci-dessus, notamment sous les alinéas e) et h) semblent dirigées contre les actes de violence ou d’incitation à l’usage de la violence, la résistance armée ou le soulèvement, leur portée, telle qu’elle ressort de l’application qui en est faite dans la pratique, ne se trouve pas limitée à de tels actes mais se prête à la coercition politique et à la répression de l’expression pacifique d’opinions non violente mais critiques à l’égard de la politique du gouvernement et de l’ordre politique établi, avec des peines comportant l’obligation de travailler. A cet égard, la commission note que, ces dernières années, la Cour européenne des droits de l’homme a été saisie d’un certain nombre de cas, dans lesquels des peines comportant l’obligation de travailler ont été infligées en application des dispositions susmentionnées des articles 159 et 312, paragraphes 2 et 3, du Code pénal et de l’article 8 de la «loi contre le terrorisme». En l’espèce, la Cour européenne des droits de l’homme a conclu que les condamnations basées sur la législation nationale constituaient une violation de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, article qui protège la liberté d’expression. La commission avait exprimé l’espoir que les mesures nécessaires seraient prises prochainement au regard des diverses dispositions mentionnées ci-dessus afin de rendre la législation nationale conforme à l’article 1 a) de la présente convention. Ayant noté que le rapport du gouvernement ne comporte aucune information substantielle au sujet des questions soulevées, la commission exprime fermement l’espoir que le gouvernement ne manquera pas de fournir, dans son prochain rapport, de telles informations.

3. Dans ses précédents commentaires, la commission s’était référée à certaines dispositions de la loi de 1965 concernant les partis politiques, laquelle interdit aux partis politiques d’affirmer l’existence en Turquie de minorités sur la base de la nationalité, de la culture, de la religion ou de la langue, ou de chercher à perturber la sécurité nationale à travers la préservation, le développement ou la propagation de langues et de cultures autres que la langue et la culture turques. Elle avait demandé au gouvernement de fournir des copies de la législation en vigueur concernant les partis et associations politiques. La commission avait noté que des peines de prison (comportant un travail obligatoire) peuvent être infligées aux termes des dispositions suivantes de la loi sur les partis politiques (no 2820 du 22 avril 1983) et de la loi sur les associations (no 2908 du 6 octobre 1983), dont copie a été fournie par le gouvernement avec son dernier rapport:

-  articles 80, 81 et 82 lus conjointement avec l’article 117 de la loi sur les partis politiques (chercher à porter atteinte au principe de l’unité de l’Etat, revendiquer l’existence de minorités fondées sur la culture nationale ou religieuse ou sur les différences raciales ou linguistiques, chercher à former des minorités par la protection et la promotion de langues et de cultures autres que la langue et la culture turques, utiliser toute langue autre que le turc dans l’élaboration et la publication des statuts et programmes des partis, préconiser le régionalisme);

-  articles 5 et 76 de la loi sur les associations (attaquer le principe de l’unité de l’Etat; entreprendre des activités basées sur les principes de régionalisme, de classe sociale, de religion ou de secte; revendiquer l’existence de minorités fondées sur la culture nationale ou religieuse ou sur les différences raciales ou linguistiques, etc.).

4. La commission fait observer, se référant aux explications figurant aux paragraphes 133 à 140 de son étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, ainsi qu’au paragraphe 2 de son observation, que les interdictions assorties de peines comportant du travail obligatoire et frappant la constitution et le fonctionnement d’associations ou de partis politiques, soit généralement, soit lorsqu’elles visent la propagation de certaines vues politiques ou idéologiques, sont incompatibles avec l’article 1 a) de la convention. La commission espère que les mesures nécessaires seront prises en vue de mettre la loi sur les partis politiques et la loi sur les associations en conformité avec la convention et que le gouvernement fera rapport de l’action entreprise à cette fin.

5. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait noté qu’une série d’autres dispositions de la législation nationale prévoient des sanctions comportant l’obligation de travailler dans des circonstances définies dans des termes assez larges pour susciter des questions quant à leur application dans la pratique. Elle aborde à nouveau ces questions dans une demande adressée directement au gouvernement, en vue de vérifier le respect de la convention à cet égard.

Article 1 b). 6. La commission avait précédemment pris note de l’observation de la TÜRK-IŞ selon laquelle la résolution no 87/11945 du Conseil des ministres en date du 12 juillet 1987 prévoit que les conscrits, dont l’effectif excède les besoins de l’armée, peuvent être tenus sans leur consentement, en lieu et place du service militaire, de travailler dans des entreprises publiques sous le régime de la discipline militaire. La commission avait également pris note des dispositions de l’article 10 de la loi no 1111 sur le service militaire tel que modifiée par la loi no 3358, ainsi que de l’article 5 de la résolution no 87/11945 du Conseil des ministres en date du 12 juillet 1987, adoptée en application de l’article 10 de la loi no 1111, énonçant les procédures concernant les réserves excédentaires, y compris les personnes non dispensées du service militaire qui sont affectées à certaines fonctions dans des organes et institutions publics. Elle a également pris note de la résolution no 86/10266 du Conseil des ministres en date du 17 janvier 1986 au sujet des principes régissant l’accomplissement des obligations au titre du service militaire par les réserves excédentaires des forces armées turques, fournie par le gouvernement avec son dernier rapport. La commission a noté que, aux termes de la législation susmentionnée, les personnes tenues d’accomplir leurs obligations au titre du service militaire en travaillant dans des organes et institutions publics seront déterminées par tirage au sort parmi les personnes restantes, déduction faite de celles qui acceptent de payer la somme qui les affranchit de cette obligation.

7. Dans son dernier rapport, le gouvernement confirme sa précédente indication selon laquelle la loi no 3358 a été appliquée entre 1987 et 1991 mais que, depuis cette date, il n’y a plus eu de conscrits en nombre supérieur aux besoins de l’armée, de sorte que cette loi n’a plus été appliquée. Le gouvernement indique, cependant, que la loi no 3358, qui était signalée dans son précédent rapport comme ayant été abrogée, est toujours en vigueur mais qu’elle n’a plus été appliquée dans la pratique depuis cette date. Tout en prenant note de ces informations, la commission se réfère à nouveau aux paragraphes 49 à 54 de son étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé, dans laquelle elle faisait observer que «la conférence a rejeté, comme incompatible avec les conventions sur le travail forcé, la pratique de faire participer les jeunes gens à des travaux de développement dans le cadre du service militaire obligatoire ou en lieu et place de celui-ci»; même lorsque les jeunes gens accomplissant des travaux de développement économique ou d’intérêt général dans le cadre d’un service national obligatoire sont dans la pratique toujours volontaires et, même si ces volontaires sont libérés du service militaire obligatoire, «cela devrait prendre la forme d’une exemption et ne pas constituer un moyen de pression pour qu’un service civique recrute un nombre de personnes pour lesquelles les forces armées n’ont de toute manière pas de place». La commission espère que les mesures nécessaires seront bientôt prises en vue d’abroger les dispositions susmentionnées et de mettre la législation en conformité avec la convention et la pratique indiquée, et que le gouvernement fournira des informations sur l’action prise à cette fin.

Article 1 c) et d). 8. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que:

a)  aux termes de l’article 1467 du Code du commerce (loi no 6762 du 29 juin 1956), les marins peuvent être ramenés de force à bord pour y accomplir leurs obligations;

b)  aux termes de l’article 1469 du même code, diverses infractions à la discipline du travail par les gens de mer sont passibles de l’emprisonnement (comportant, comme noté précédemment, l’obligation de travailler).

La commission avait également noté que le gouvernement avait saisi le Parlement d’un projet de loi tendant à modifier l’article 1467 du Code du commerce et comportant une disposition limitant les pouvoirs conférés par l’article 1467 au capitaine aux seules circonstances dans lesquelles la sécurité du navire ou la vie des passagers et de l’équipage serait mise en danger. La commission espère que l’article 1469 du Code du commerce sera de même modifié, de telle sorte que son champ se limite aux actes mettant en danger la sécurité du navire ou la vie ou l’intégrité physique de personnes. Le gouvernement indique dans son dernier rapport que le projet de loi se trouve toujours devant le Parlement. La commission espère que le projet de loi sera adopté dans un proche avenir et que les dispositions susmentionnées seront modifiées, conformément à la convention. Elle prie le gouvernement de fournir copie des dispositions modificatrices, dès qu’elles auront été adoptées.

Article 1 d). 9. La commission avait précédemment noté que la loi no 2822 du 5 mai 1983, concernant les conventions collectives du travail, les grèves et les lock-out, prévoit dans ses articles 70 à 73, 75, 77 et 79 des peines de prison (comportant un travail obligatoire) comme sanction pour participation à des grèves illégales, mépris de l’interdiction de l’appel à la grève, grèves illégales tendant à influencer des décisions et non-respect d’un ordre de suspension de la grève ou de restrictions concernant le nombre de piquets de grève et le droit de rassemblement pacifique devant les établissements de l’employeur. La commission avait rappelé que l’article 1 d) de la convention interdit expressément le recours à des sanctions comportant toute forme de travail obligatoire «en tant que punition pour avoir participéà des grèves».

10. Le gouvernement déclare dans son rapport que les dispositions susmentionnées sont fondées sur la définition des grèves illégales et que les sanctions sont applicables en cas de participation à des grèves illégales. Selon le gouvernement, ces sanctions ne devraient pas être interprétées et appliquées en tant que recours au travail forcé, ou obligatoire pour avoir participéà des grèves. La commission attire à nouveau à cet égard l’attention du gouvernement sur les explications figurant aux paragraphes 120 à 132 de son étude d’ensemble de 1979 sur l’abolition du travail forcé dans lesquels elle avait estimé que l’article 1 d) de la convention ne s’oppose pas à la répression d’actes collectifs tendant à paralyser des services dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé des personnes, ni à la punition de la participation à des grèves purement politiques, c’est-à-dire à des grèves qui ne tendent pas à la défense des intérêts économiques et sociaux des participants, ou du non-respect d’une procédure normale à suivre pour appeler à la grève ou organiser un tel mouvement, sous réserve que les dispositions régissant cette question ne fassent pas peser de restrictions sur le droit de grève lui-même. La commission avait fait observer, cependant, que les dispositions susmentionnées de la loi no 2822 ne sont pas limitées dans leur portée à de telles circonstances. Elle réitère en conséquence l’espoir que, tout en se référant à ses commentaires adressés au gouvernement au sujet de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, les mesures nécessaires seront adoptées en ce qui concerne la loi no 2822 de 1983 afin d’assurer le respect de l’article 1 d) de la convention (no 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, et que le gouvernement fera rapport sur l’action prise ou envisagée à cette fin.

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