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Observation (CEACR) - adopted 2006, published 96th ILC session (2007)

Worst Forms of Child Labour Convention, 1999 (No. 182) - Niger (Ratification: 2000)

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La commission prend note du rapport du gouvernement de mai 2005 ainsi que de ses informations supplémentaires de novembre 2005. Elle prend note également des informations fournies en juin 2005 à la 93e session de la Commission de l’application des normes de la Conférence, ainsi que de la discussion qui a eu lieu à cette occasion. En outre, la commission prend note du rapport détaillé et multidisciplinaire de la Mission d’investigation de haut niveau, laquelle s’est rendue au Niger du 10 au 20 janvier 2006 à la demande de la Commission de la Conférence.

Article 3 de la convention. Pires formes de travail des enfants. Alinéa a). Toutes les formes d’esclavage ou de pratiques analogues. 1. Vente et traite d’enfants. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté les observations de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) indiquant qu’il existait dans le pays un phénomène de traite interne de jeunes filles pour du travail domestique et à des fins d’exploitation sexuelle et de traite de garçons à des fins d’exploitation économique. La commission avait noté que les articles 255 et 258 du Code pénal punissaient quiconque aurait, par fraude ou violence ou sans fraude ni violence, enlevé ou fait enlever des mineurs de moins de 18 ans, ou les aurait entraînés, détournés ou déplacés, ou les aurait fait entraîner, détourner ou déplacer des lieux où ils étaient mis par ceux à l’autorité ou à la direction desquelles ils étaient soumis ou confiés. Elle avait prié le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises ou envisagées visant l’interdiction et l’élimination de cette pire forme de travail des enfants.

La commission prend note de la déclaration de la représentante gouvernementale formulée au sein de la Commission de la Conférence en juin 2005 et selon laquelle le Niger n’est pas un pays de vente ou de traite des enfants, les pouvoirs publics n’ayant pas eu connaissance de telles pratiques. Elle note également que, dans ses informations supplémentaires de novembre 2005, le gouvernement réitère cette déclaration. La commission relève toutefois que, dans son rapport, la Mission d’investigation de haut niveau indique que, selon les informations qu’elle a obtenues, «le Niger est certainement un pays de transit car sa situation géographique fait de lui un carrefour d’échanges entre l’Afrique du Nord et l’Afrique subsaharienne». La commission relève en effet que la situation géographique du Niger, à savoir le partage de près de 5 700 kilomètres de frontières terrestres avec sept Etats – Algérie, Bénin, Burkina Faso, République arabe libyenne, Nigéria, Mali et Tchad –, place le pays au cœur des flux migratoires de la région et l’expose au risque de la traite des personnes, notamment des enfants. Elle souligne d’ailleurs que le Niger est d’autant plus exposé à ce phénomène que la majorité des pays avec lesquels il possède une frontière terrestre sont eux-mêmes affectés par la traite. La commission note en outre que, selon les informations recueillies par la Mission d’investigation de haut niveau, «le Niger serait également un pays d’origine et de destination en ce qui concerne le trafic d’êtres humains, y compris des enfants». A cet égard, la commission fait observer qu’il ressort du rapport de la mission que le trafic des femmes et des enfants entre les pays de la sous-région prend de plus en plus d’ampleur au Niger. En effet, la mission indique que «les réseaux de trafic des personnes seraient alimentés, surtout à Niamey, par des adolescentes recrutées principalement au Nigéria, au Togo, au Bénin et au Ghana sous prétexte d’un avenir professionnel radieux, en fait pour accomplir des tâches traditionnellement jugées avilissantes dans la société nigérienne (tâches domestiques) ou interdites par la religion (travailler dans les bars ou restaurants, etc.)».

La commission note que, dans son rapport, la mission recommande de «compléter le cadre juridique permettant de prévenir et de lutter contre le travail des enfants, notamment les pires formes de travail des enfants». La commission fait observer à cet égard que, bien que les articles 255 et 258 du Code pénal punissent l’enlèvement des mineurs de moins de 18 ans, le Niger ne dispose pas de législation spécifique sur la traite de personnes. La commission note que, dans son rapport, la mission indique que l’Association nigérienne pour la défense des droits de l’homme (ANDDH) a, en collaboration avec l’UNICEF, mis sur pied un programme de lutte contre le trafic des personnes au Niger. Dans le cadre de ce programme, l’ANDDH a rédigé un projet de loi visant à prévenir, réprimer et punir la traite au Niger. Or, dans ses conclusions, la mission suggère que ce projet de texte soit soumis à l’examen critique de la Commission nationale de défense des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CNDHLF) qui a le pouvoir de soumettre au gouvernement des projets de loi sur des questions relatives aux droits de l’homme. La commission prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que le projet de loi visant à prévenir, réprimer et punir la traite au Niger soit adopté le plus rapidement possible. Elle le prie également de communiquer des informations sur tout progrès réalisé à cet égard.

2. Travail forcé ou obligatoire. Mendicité. La commission avait pris note des observations de la CISL selon lesquelles des enfants étaient forcés de mendier en Afrique occidentale, notamment au Niger. De nombreuses familles confiaient leurs enfants, pour des raisons économiques et religieuses, dès l’âge de 5 ou 6 ans, à un guide spirituel (marabout) avec qui ils vivaient jusqu’à l’âge de 15 ou 16 ans. Durant cette période, le guide spirituel avait un contrôle total sur les enfants. Il se chargeait de leur enseigner la religion et en retour les obligeait à effectuer diverses tâches, dont celle de mendier. La commission avait noté que l’article 179 du Code pénal punissait la mendicité et que l’article 181 du même code punissait les parents de mineurs de moins de 18 ans se livrant habituellement à la mendicité, et tous ceux qui les auraient invités à mendier ou qui en tiraient sciemment profit. La commission d’experts s’était dite préoccupée, tout comme le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies, devant la situation de vulnérabilité des enfants qui mendiaient dans les rues. Elle avait prié le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises pour améliorer la situation des enfants mendiants et sur l’application des articles 179 et 181 du Code pénal.

La commission prend note que, en juin 2005, la représentante gouvernementale a tenu à rappeler à la Commission de la Conférence que la mendicité relève d’une pratique culturelle et éducative visant à développer l’humilité et la compassion chez l’adulte. La représentante gouvernementale a indiqué toutefois que les administrations compétentes menaient une réflexion sur les mesures appropriées destinées à répondre aux risques de dérive de cette pratique dus à la pauvreté. Dans ses conclusions de juin 2005, la Commission de la Conférence a partagé la préoccupation de la commission d’experts concernant la vulnérabilité des enfants qui mendient dans les rues et a prié le gouvernement d’indiquer les mesures efficaces prises dans un délai déterminé pour retirer des rues les enfants de moins de 18 ans se livrant à la mendicité. La commission note qu’il ressort des entretiens tenus par la Mission d’investigation de haut niveau qu’il convient de bien distinguer entre trois formes de mendicité au Niger, à savoir la mendicité classique, la mendicité éducative et la mendicité qui utilise les enfants à des fins purement économiques. La mendicité classique est celle pratiquée par les populations indigentes. Au Niger, la mendicité éducative est celle pratiquée dans le sens prôné par la religion musulmane, c’est-à-dire comme un apprentissage de l’humilité de la part de celui qui la pratique et de la compassion pour celui qui fait l’aumône. Et, finalement, la mendicité qui utilise les enfants à des fins purement économiques est celle qui fait des enfants un fonds de commerce. La commission prend note que, selon le rapport de la mission, l’existence de cette troisième forme de mendicité a été reconnue par les interlocuteurs, dont le gouvernement. Elle relève que l’enracinement de cette forme de mendicité dans une pratique culturelle et religieuse fait en sorte que l’exploitation des enfants dans ce contexte choque peu les populations. Or il résulte que, dans cette forme de mendicité, les enfants sont d’autant plus vulnérables que les parents qui, même s’ils sont soucieux de l’éducation religieuse de leurs enfants, n’ont pas toujours les moyens d’assurer la subsistance de leurs enfants. Les enfants se retrouvent donc sous l’entière responsabilité des marabouts.

La commission se dit gravement préoccupée de «l’instrumentalisation» des enfants à des fins purement économiques par certains marabouts, d’autant plus que, selon les informations récoltées par la mission, il semble que cette forme de mendicité soit en plein essor. De plus, la commission se dit préoccupée par le fait que, selon le rapport de la mission, «il est apparu que la mendicité des talibés est intimement liée au phénomène de la traite des enfants et que [certains] marabouts ou maîtres coraniques sont les principaux auteurs de cette forme d’exploitation». La commission note en outre que le gouvernement a reconnu que cette forme de mendicité est à la hausse. Elle note d’ailleurs que, lors de la cérémonie de présentation des vœux de 2006, le Premier ministre nigérien a mentionné dans son discours le fléau de la mendicité. La commission prie le gouvernement de redoubler d’efforts et de prendre les mesures nécessaires pour faire appliquer la législation nationale sur la mendicité et punir les marabouts qui utilisent les enfants à des fins purement économiques. En outre, la commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures efficaces prises dans un délai déterminé pour protéger ces enfants contre le travail forcé et assurer leur réadaptation et intégration sociale.

Alinéa d). Travaux dangereux. Enfants travaillant dans les mines et carrières. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté les indications de la CISL selon lesquelles une étude, effectuée en 1999 par le BIT sur le travail des enfants dans les petites exploitations minières et qui avait couvert quatre types d’exploitations minières artisanales (exploitation du natron dans la région du Boboye, du sel de Tounouga, du gypse de Madaoua et de l’or du Liptako-Gourma), avait montré que le travail des enfants était répandu au Niger, principalement dans l’économie informelle, et que le travail dans les petites exploitations minières était l’activité du secteur informel la plus dangereuse. La commission avait noté que l’article 152 du décret no 67-126/MFP/T du 7 septembre 1967 disposait qu’il était interdit d’employer des enfants aux travaux souterrains dans les mines. Elle avait prié le gouvernement de redoubler d’efforts afin d’assurer l’application effective de la législation sur la protection des enfants contre le travail souterrain dans les mines.

La commission note que, dans ses conclusions de juin 2005, la Commission de la Conférence a partagé la préoccupation de la commission d’experts concernant la vulnérabilité des enfants qui effectuent des travaux dangereux dans les mines et carrières. La Commission de la Conférence a pris note de la volonté exprimée par le gouvernement du Niger de poursuivre ses efforts afin d’éradiquer de telles situations avec l’assistance technique et la coopération du BIT. La commission note que, selon les informations recueillies par la mission, le travail des enfants dans les travaux dangereux, notamment dans les mines et carrières, existe dans les sites informels. La commission note que, selon le rapport, le gouvernement a indiqué à la mission que, «lorsque les parents travaillent dans des sites informels, ils sont souvent accompagnés d’enfants parce qu’ils sont trop jeunes pour rester seuls à la maison et que dans certains cas ces enfants accomplissent de menus travaux pour leurs parents». La commission note toutefois qu’il ressort des différents entretiens de la mission, lors de son séjour dans le pays, que les jeunes enfants ne font pas qu’accompagner les parents. En effet, selon la mission, «ils interviennent dans la chaîne de production, que ce soit dans les mines de gypse ou les carrières de sel, parfois pour de menus travaux visant à faciliter la tâche de leurs parents sur le site, parfois pour des tâches physiquement dangereuses, tous les jours de la semaine, pour une durée journalière de plus de huit heures avec des risques d’accident et de maladie».

A cet égard, la commission fait observer qu’il existe une différence entre le travail des enfants interdit par les conventions de l’OIT et les menus travaux que peut réaliser un enfant dans le cadre du milieu familial et qui peuvent être considérés comme principal facteur de socialisation de l’enfant. Le travail des enfants interdit par les conventions de l’OIT concerne les travaux réalisés par les enfants qui, en fait, cachent une servitude ouvrant la voie à toute forme d’abus, notamment à l’impossibilité de poursuivre des études et l’exposition à des situations dangereuses pour la santé et le développement de l’enfant. Bien que l’ampleur du problème soit moindre que celle précédemment mentionnée par la CISL, la commission se dit préoccupée par l’utilisation du travail des enfants à des travaux dangereux, notamment dans les sites informels des mines et carrières. La commission note que, comme beaucoup d’autres pays en voie de développement, le Niger est affecté par le phénomène du travail des enfants du fait du niveau de pauvreté des populations et de l’expansion de l’économie informelle au détriment de l’économie formelle. La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que la législation nationale sur la protection des enfants contre le travail souterrain dans les mines s’applique également aux sites informels des mines et carrières.

Article 5. Mécanismes de surveillance. La commission s’était référée à son observation formulée en 2003 sous la convention (nº 81) sur l’inspection du travail, 1947, dans laquelle elle avait noté que le fonctionnement des services d’inspection se heurterait, comme celui des autres structures administratives de l’Etat, à l’insuffisance de ressources et à la limitation rigoureuse des recrutements nécessitée par l’objectif de maîtrise de la masse salariale. Selon le gouvernement, la part du budget de l’Etat, qui devait être allouée pour l’exercice 2004 au service de l’inspection du travail, devait être augmentée et, ainsi, améliorer la situation de ce service. La commission avait prié le gouvernement de fournir des précisions sur les mesures prises ou envisagées afin de renforcer les moyens dont disposent les inspecteurs du travail. La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles l’augmentation du budget du service de l’inspection du travail pour l’exercice 2004 n’a pas eu lieu. A cet égard, la commission prend note que, dans son rapport, la mission indique que, lors de ses visites sur le terrain, elle a pu constater que «l’inspection du travail, laquelle joue un rôle clé en matière de lutte contre le travail des enfants et le travail forcé, manque […] des moyens nécessaires pour accomplir ses différentes missions, tant du point de vue des ressources humaines que du point de vue matériel». La mission a recommandé la tenue d’un audit de l’inspection du travail pour déterminer exactement la nature et l’ampleur des besoins de l’inspection du travail au Niger. Se référant à son observation formulée sous la convention (nº 81) sur l’inspection du travail, 1947, la commission espère que le gouvernement prendra les mesures pour mettre en œuvre la recommandation de la mission. Elle le prie de communiquer des informations à cet égard.

Article 7, paragraphe 1. Sanctions. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de communiquer des informations sur l’application des sanctions concernant la vente et la traite de personnes, la mendicité et l’utilisation des enfants dans les travaux dangereux, notamment dans les mines et carrières. La commission note que, en juin 2005, la représentante gouvernementale a indiqué à la Commission de la Conférence que les juges n’avaient pas été saisis de plaintes et n’avaient donc pas eu l’opportunité de prononcer des sanctions. La représentante gouvernementale a indiqué également que, même si le gouvernement avait accompli un effort particulier sur le plan juridique, la réalité économique ne permettait pas toujours l’application effective des normes. La commission note que, dans ses informations supplémentaires de novembre 2005, le gouvernement réitère que les juges n’ont pas été saisis de plaintes. Or la commission relève qu’il ressort du rapport de la mission que l’application de la législation nationale en matière de travail forcé ou d’exploitation d’enfants à des fins économiques et sexuelles est difficile. Elle rappelle qu’en vertu de l’article 7, paragraphe 1, de la convention le gouvernement doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la mise en œuvre effective et le respect des dispositions donnant effet à la présente convention, y compris par l’établissement et l’application de sanctions pénales ou, le cas échéant, d’autres sanctions. La commission, tout en prenant note que la réalité économique ne permet pas toujours l’application effective des normes, prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que les sanctions pénales, imposées par la loi concernant la vente et la traite de personnes, la mendicité et l’utilisation des enfants dans les travaux dangereux, notamment dans les mines et carrières, sont réellement efficaces et strictement appliquées. Elle prie également le gouvernement de communiquer des informations sur l’application des sanctions dans la pratique.

Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces prises dans un délai déterminé. Alinéa a). Empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants. 1. Amélioration du fonctionnement du système éducatif. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté l’indication de la CISL selon laquelle, bien que l’éducation ait une durée obligatoire de six ans, seulement 32 pour cent des enfants d’âge d’enseignement primaire fréquentaient l’école. La CISL avait indiqué que la plupart des filles étaient gardées à la maison pour travailler et se mariaient très jeunes. Le taux d’alphabétisme est de 7 pour cent pour les filles et de 21 pour cent pour les garçons. La CISL avait en outre communiqué un tableau montrant que seulement 30,3 pour cent d’enfants entre 5 et 12 ans fréquentaient l’école. La commission avait noté l’indication du gouvernement selon laquelle l’éducation de base était gratuite au Niger et qu’il existait des centres de formation professionnelle dans le pays. Elle avait noté également l’information communiquée par le gouvernement selon laquelle, depuis quelques années, il se focalisait sur la scolarisation de la jeune fille et que plusieurs actions avaient été menées en faveur de cette catégorie de la population. La commission avait en outre pris note de l’adoption du Plan décennal de l’éducation 2002-2012.

La commission note que, dans sa déclaration faite à la Commission de la Conférence en juin 2005, la représentante gouvernementale a souligné que son gouvernement continuait à déployer des efforts importants pour la scolarisation des enfants, mais que ceux-ci restaient tributaires des possibilités financières limitées du pays et étaient affectés par sa forte croissance démographique. La représentante gouvernementale a également indiqué que le gouvernement était disposé à enrayer l’analphabétisme. La commission note qu’il ressort du rapport de la mission que, derrière le problème du travail des enfants, se pose le problème de l’accès des enfants à l’éducation et à une formation qui réponde aux besoins du marché du travail. De plus, malgré les efforts importants déployés par le gouvernement en matière d’éducation, et notamment pour atteindre l’objectif fixé d’ici 2015 de donner à tous les enfants, garçons et filles, les moyens d’achever un cycle complet d’études primaires, la situation reste insatisfaisante. De plus, la mission indique que «les parents hésitent à mettre leur enfant à l’école car ils constatent qu’elle ne garantit pas un emploi à la clé alors que l’école coranique, elle, garantit au moins la formation d’un bon musulman et d’un maître coranique potentiel, d’où le boum des écoles coraniques que connaît le Niger». A cet égard, la commission note en outre que, selon le rapport de la mission, «l’enseignement dispensé par les maîtres coraniques n’est pas sanctionné par un diplôme, ce qui limite l’insertion professionnelle future de ces enfants».

La commission se dit fortement préoccupée par le faible taux de scolarisation et l’importance de l’analphabétisme. Elle prend note de la recommandation de la mission selon laquelle il est nécessaire «d’améliorer le fonctionnement du système éducatif afin d’assurer l’accès de tous à une éducation de qualité». La commission note également que, dans son rapport, la mission mentionne que le gouvernement réfléchit actuellement à la possibilité d’intégrer les écoles coraniques à l’Education nationale, ce qui permettrait un meilleur contrôle des enseignants et de l’enseignement dispensé. La commission fait observer que l’éducation est l’un des moyens les plus efficaces de lutte contre le travail des enfants, notamment de ses pires formes. Elle prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour mettre en œuvre la recommandation de la mission d’investigation et d’améliorer le fonctionnement du système éducatif afin d’assurer l’accès aux filles et garçons à une éducation de qualité. De plus, compte tenu des informations recueillies par la mission sur la mendicité forcée des enfants, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour intégrer les écoles coraniques à l’Education nationale.

2. Sensibilisation et éducation des populations sur les problématiques du travail des enfants et du travail forcé. La commission prend note que, dans son rapport, la mission recommande de «mener des actions de sensibilisation [et] d’éducation des populations sur les problématiques du travail des enfants et du travail forcé sans omettre la dimension genre», «parce que, aussi bien le travail des enfants que le travail forcé affectent différemment les deux sexes et parce que l’expérience a montré que, si l’on arrive à sensibiliser les femmes (mères), l’impact sur le développement est plus grand». La commission prend note également que, dans son rapport, la mission suggère que des «actions spécifiques de sensibilisation des maîtres coraniques et des parents soient entreprises pour éviter «l’instrumentalisation» de la mendicité par certains marabouts». A cet égard, la commission prend note des informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles, en collaboration avec l’OIT/IPEC, le PAMODEC, la société civile (ONG et associations) et des leaders d’opinion des populations (chefs traditionnels et chefs religieux), il a mené des campagnes de sensibilisation sur les dangers que représente le travail des enfants pour l’avenir des familles, des populations et du pays tout entier. La commission relève qu’il ressort du rapport de la mission d’investigation que la société nigérienne est encore très traditionaliste. Ainsi, il y a toujours beaucoup à faire en matière de sensibilisation des populations aux problématiques du travail des enfants, et de ses pires formes. La commission encourage donc le gouvernement à poursuivre ses efforts de sensibilisation sur les dangers que représente le travail des enfants, et de ses pires formes, en collaborant avec les différentes entités gouvernementales, la société civile en général et la chefferie traditionnelle. Elle le prie de communiquer des informations sur les mesures prises à cet égard.

3. Projet dans les mines d’or artisanales en Afrique de l’Ouest. La commission note avec intérêt que le gouvernement participe au projet de l’OIT/IPEC intitulé «Prévention et élimination du travail des enfants dans les mines d’or artisanales en Afrique de l’Ouest», auquel participent également le Burkina Faso et le Mali. Elle note que, selon les informations disponibles au Bureau, plus de 1 500 enfants seront empêchés d’être engagés dans les mines d’or artisanales. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur le nombre d’enfants qui seront effectivement empêchés d’être engagés dans cette pire forme de travail des enfants suite à la mise en œuvre du projet dans les mines d’or artisanales du Niger.

Alinéa b). Aide directe et nécessaire pour soustraire les enfants des pires formes de travail des enfants et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. La commission note que, dans le cadre du projet intitulé «Prévention et élimination du travail des enfants dans les mines d’or artisanales en Afrique de l’Ouest», il est prévu que plus de 1 500 enfants seront retirés des mines d’or artisanales. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur le nombre d’enfants qui seront effectivement retirés des mines d’or artisanales suite à la mise en œuvre du projet au Niger. Elle prie également le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises pour assurer la réadaptation et l’intégration sociale de ces enfants.

Article 8. Coopération. 1. Coopération régionale et internationale. La commission note avec intérêt que le gouvernement collabore déjà avec l’OIT/IPEC, ainsi qu’avec d’autres agences spécialisées de l’ONU et certains gouvernements. Elle note également que le gouvernement a signé, le 27 juillet 2005, l’Accord multilatéral de coopération en matière de lutte contre la traite des enfants en Afrique de l’Ouest dont font partie les pays suivants: Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée, Libéria, Mali, Nigéria et Togo. La commission est d’avis que, pour lutter efficacement contre les pires formes de travail des enfants, notamment de la vente et de la traite, il convient de coordonner les actions au niveau sous-régional. Elle prie donc le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises dans le cadre de l’Accord multilatéral de coopération en matière de lutte contre la traite des enfants en Afrique de l’Ouest pour collaborer avec les autres pays signataires et avec lesquels le Niger partage les frontières. En outre, compte tenu de la volonté exprimée par le gouvernement de renforcer l’assistance technique du BIT et la coopération internationale, la commission fait appel au BIT et aux Etats Membres pour fournir cette assistance, conformément à l’article 8 de la convention.

2. Réduction de la pauvreté. La commission note la déclaration de la représentante gouvernementale formulée à la Commission de la Conférence en juin 2005 et selon laquelle le Niger a élaboré une stratégie de réduction de la pauvreté. La commission prend note que, dans ses recommandations, la Mission d’investigation de haut niveau indique que, pour lutter contre la pauvreté, il faut mettre la création d’emplois décents et productifs au cœur de toute politique de réduction de la pauvreté. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur sa stratégie de réduction de la pauvreté, particulièrement en ce qui concerne la réduction effective de la pauvreté parmi les enfants victimes des pires formes de travail, notamment de la vente et de la traite, de la mendicité qui utilise les enfants à des fins purement économiques ainsi que des travaux dangereux dans les mines et carrières.

Points IV et V du formulaire de rapport. Application de la convention dans la pratique. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté l’indication du gouvernement selon laquelle le travail des enfants était un problème de développement, la pauvreté étant la première cause de ce genre de travail, et la rémunération obtenue par les enfants constituant un appoint important pour les revenus de certaines familles pauvres. Elle avait noté également l’indication du gouvernement selon laquelle le travail des enfants concernait surtout le secteur non structuré. Elle avait prié le gouvernement de fournir des informations sur l’application de la convention dans la pratique.

La commission prend note que, dans son rapport, la Mission d’investigation de haut niveau relève un «manque […] de données fiables permettant de quantifier avec exactitude l’ampleur et les caractéristiques» de la problématique du travail des enfants. Elle suggère donc «que des enquêtes soient menées de façon objective et scientifique avec l’implication de tous les intéressés». Selon les informations disponibles au Bureau, une étude diagnostique est en cours dans les deux zones urbaines de Maradi et de Niamey ainsi que dans les deux zones rurales de Kollo et Boboye. En outre, une étude exploratoire sur le travail des filles dans les exploitations minières et les carrières serait également en cours de réalisation. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les résultats de ces études ainsi que sur la façon dont la convention est appliquée dans la pratique en donnant, par exemple, des données statistiques et des informations sur la nature, l’étendue et l’évolution des pires formes de travail des enfants, sur le nombre d’enfants protégés par les mesures donnant effet à la convention, sur le nombre et la nature des infractions signalées, les enquêtes menées, les poursuites, les condamnations et les peines appliquées, dès qu’elles seront disponibles. Dans la mesure du possible, les informations fournies devraient être différenciées selon le sexe.

En outre, la commission soulève d’autres points dans une demande adressée directement au gouvernement.

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