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Individual Case (CAS) - Discussion: 2010, Publication: 99th ILC session (2010)

Freedom of Association and Protection of the Right to Organise Convention, 1948 (No. 87) - Guatemala (Ratification: 1952)

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Un représentant gouvernemental a déclaré qu’en raison des deux catastrophes naturelles survenues il y a peu dans son pays le ministre du Travail et de la Prévision sociale n’a pas pu assister à la Conférence, mais que la présence de deux magistrats de la Cour suprême de justice et de la présidente de la Commission du travail du Congrès de la République atteste de l’engagement des trois pouvoirs de l’Etat sur cette question.

Suite aux conclusions de la commission de 2009, le gouvernement a convoqué à plusieurs reprises la Commission tripartite des affaires internationales du travail pour élaborer la feuille de route, mais aucun accord n’ayant malheureusement été conclu avec les partenaires sociaux, le gouvernement a pris la décision d’élaborer lui-même la feuille de route avec l’assistance technique du BIT. S’agissant des commentaires de la commission d’experts selon lesquels le gouvernement a manqué de volonté politique, la feuille de route n’ayant été élaborée que dix jours avant la réunion de la commission d’experts en 2009, il convient de faire les déclarations qui suivent: le gouvernement a sollicité l’assistance technique du BIT le 2 juillet 2009; le ministère du Travail a convoqué les partenaires sociaux à cinq reprises sans parvenir à un consensus; une mission d’assistance technique s’est déroulée du 16 au 20 novembre 2009, et le gouvernement a saisi cette occasion pour rédiger lui-même la feuille de route avec l’assistance d’experts techniques du BIT. La commission d’experts a cessé d’examiner ces faits et le rôle éventuel du Bureau dans la fourniture de l’assistance technique demandée. Des actions ont été menées à propos de différentes questions: cas portés devant le Comité de la liberté syndicale, recommandations de la commission d’experts et renforcement des mécanismes de coordination entre les institutions.

S’agissant des cas dont est saisi le Comité de la liberté syndicale, l’Unité des affaires internationales du travail compte deux personnes supplémentaires, et un séminaire a eu lieu; qui avait pour but de faire mieux connaître d’une part les institutions du gouvernement compétentes pour formuler les réponses de l’Etat aux cas et rapports et d’autre part, l’importance des normes et de l’engagement de l’Etat à leur égard. Quant aux recommandations de la commission d’experts concernant la réforme des lois, une proposition a été soumise à l’expertise du BIT suite à l’assistance technique. En ce qui concerne le renforcement des mécanismes de coordination, la Commission multi-institutionnelle pour les relations du travail au Guatemala a été relancée afin de fournir un appui pour les enquêtes sur les affaires de délits commis contre des syndicalistes et préserver le flux d’informations institutionnelles.

S’agissant des carences de l’inspection générale du travail, grâce à l’assistance du BIT, le programme de modernisation de ce service a été mis en oeuvre; une trentaine d’inspecteurs ont repris leurs fonctions et des mesures ont été adoptées pour accroître les ressources et pour pouvoir engager davantage d’inspecteurs. Pour l’heure, trois services fonctionnent, qui ont veillé au recouvrement de salaires impayés et au règlement d’amendes se montant à plus d’un million et demi de dollars.

En ce qui concerne les maquilas, un dispositif de l’inspection du travail a été mis en place dans 21 entreprises. Dans certaines d’entre elles, des irrégularités ont été constatées et des avertissements ont été adressés. Dans d’autres, des plaintes ont été déposées parce que les inspecteurs n’avaient pas eu accès aux locaux. Vingt-huit travailleurs ont pu être réintégrés.

S’agissant de la liberté syndicale, 356 organisations syndicales sont enregistrées et en 2009, 70 syndicats et 45 conventions collectives ont été enregistrés; les chiffres de 2009 sont les plus élevés des cinq dernières années. Pour promouvoir le droit syndical, le gouvernement a conclu des accords avec des organismes éducatifs afin de former des responsables syndicaux. Il a été décidé de créer deux écoles de formation, l’une à Guatemala City et l’autre à Quetzaltenango. Quant à la constitution et à l’enregistrement de syndicats, lorsque les demandeurs ont rempli les conditions prévues par la loi, les procédures de reconnaissance, d’approbation des statuts, d’enregistrement et de publication de l’acte constitutif sont engagées.

Entre novembre 2009 et mars 2010, le gouvernement a mis en place quatre tables rondes tripartites pour le dialogue social, dont trois dans le pays. En mai 2010, une rencontre tripartite sur le dialogue social pour le travail décent a eu lieu, à laquelle le directeur du bureau sous-régional de l’OIT a participé. Le Guatemala bénéficie également d’un projet régional et sous-régional de l’OIT en matière de dialogue social.

Quant à la question de l’impunité, l’impunité et la violence généralisée sont des problèmes qui préoccupent les autorités; en 2009, 6 000 personnes ont été assassinées. S’agissant du traitement des cas de violence visant des syndicalistes, le ministère du Travail tente de déterminer précisément si les personnes dont le nom apparaît dans le cadre de plaintes dirigées contre le gouvernement appartenaient à un syndicat, en recherchant lequel. Dans la majorité des dossiers, les causes du décès sont sans rapport avec les activités syndicales. Dans la plupart des cas, le dépôt des plaintes est encouragé par des entités qui ne figurent pas sur le registre du travail du ministère du Travail, et ce dernier ne dispose pas des informations nécessaires pour déterminer si les victimes appartenaient à un syndicat.

En octobre 2009, la nouvelle Cour suprême de justice a pris ses fonctions et a été informée de la nécessité d’améliorer le système judiciaire, dans le respect de l’indépendance des pouvoirs de l’Etat, pour s’attaquer à l’impunité et aux actes illicites visant les travailleurs syndiqués. La Cour suprême prend actuellement des mesures pour parvenir à une plus grande diligence. Dans le cas de l’assassinat de M. Pedro Zamora, le ministère public a fait appel de la décision d’acquittement du prévenu rendue en première instance. La décision de deuxième instance n’a pas encore été rendue. Des mesures ont également été demandées au nouveau Procureur général pour lutter contre l’impunité.

S’agissant des questions législatives, une table ronde pour le dialogue intersectoriel a été mise en place pour revoir le projet de loi sur la fonction publique. L’organe législatif en est saisi, mais les consensus voulus n’ont pas encore été obtenus.

Pour conclure, il convient de mentionner les points qui suivent: la feuille de route s’applique dans le pays; les institutions et le dialogue social ont été renforcés; les mesures engagées font l’objet d’un suivi du BIT; la liberté syndicale et le droit syndical sont reconnus et protégés en droit comme dans la pratique; la constitution de syndicats est subordonnée au respect des conditions prévues par la loi et la formation des syndicalistes est encouragée. Des informations étayant la présente déclaration sont communiquées au BIT.

Les membres travailleurs ont rappelé le nombre de commentaires de la commission d’experts concernant le Guatemala dans le contexte des conventions (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, le nombre de cas examinés par le Comité de la liberté syndicale, dont dix sont actuellement en cours d’examen, et les cinq missions de haut niveau et de contacts directs effectuées dans le pays depuis 2005. Malgré un accord tripartite signé à l’issue d’une mission de haut niveau en 2008, l’absence d’amélioration dans le fonctionnement de la justice est patente. La démission du directeur de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (M. Castresana) est un signal préoccupant qui tendrait à montrer qu’il ne s’est pas senti en situation de mener à bien sa mission parce que le gouvernement, en nommant un Procureur général lié au narcotrafic, aurait renié son engagement de combattre l’impunité. Cette démission constitue un coup dur pour les travailleurs et le peuple en général, qui aspirent à un Etat de droit. La commission d’experts dénonce elle-même une justice beaucoup trop lente et inefficace.

Une mission d’assistance technique du BIT menée en novembre 2009 pour mettre en oeuvre les recommandations de la Commission de la Conférence n’a pas donné de résultat en l’absence de consensus entre les partenaires sociaux. La feuille de route adoptée est peu consistante et tous s’accordent à dire que le dialogue social est en grande difficulté dans le pays.

La violence faite au mouvement syndical affaiblit ce mouvement et le réduit, tant les attaques du gouvernement se révèlent efficaces. La violence, les assassinats, les discriminations, les attaques, les intimidations envers les syndicalistes et leurs familles sont le lot quotidien du mouvement syndical au Guatemala, si bien qu’après vingt-quatre ans de démocratie le taux de syndicalisation est tombé à un demi pour cent.

Malgré les promesses faites au plus haut niveau, l’impunité demeure la règle et se déroule de manière subtile. Le gouvernement retire la reconnaissance à des organisations syndicales qui ont pourtant, pour certaines, participé aux travaux de cette commission, ce qui a pour conséquence que les actes de violence commis contre des syndicalistes seront poursuivis en tant que simples délits de droit commun. De plus, les intimidations et assassinats de syndicalistes, lorsqu’ils font enfin l’objet d’une décision judiciaire, font l’objet d’une qualification pénale banalisant le contexte. Ainsi l’action du pouvoir judiciaire soulèvera des interrogations tant que le gouvernement ne montrera pas sa volonté de respecter les différentes conclusions et recommandations formulées par la commission d’experts, les différentes missions et la présente commission. Le rapport de la commission d’experts peut paraître mesuré devant une situation tellement désespérée, mais les problèmes relevés montrent clairement les atteintes aux droits fondamentaux et aux libertés civiles des syndicalistes auxquelles il est demandé au gouvernement de réagir. Le seul réconfort pour les travailleurs demeure la constante attention que porte l’OIT sur la situation.

Les membres employeurs ont observé que ce cas fait l’objet d’un examen par la commission depuis les années quatre-vingt-dix. Initialement, les commentaires de la commission d’experts sur les questions législatives occupaient une page entière de son rapport; aujourd’hui, la liste est bien plus courte. Le gouvernement a fait preuve de détermination pour s’attaquer aux problèmes au fil des années, et a bénéficié de différents types d’assistance technique du BIT, notamment d’une mission bipartite de haut niveau qui s’est rendue dans le pays l’année dernière, et à laquelle le vice-président travailleur et le vice-président employeur de la présente commission ont participé.

L’observation de la commission d’experts se réfère à deux questions: l’impunité et les questions législatives concernant la libre constitution et le libre fonctionnement des syndicats. La question de l’impunité est très complexe. Elle concerne la société dans son ensemble et ne vise pas uniquement les syndicalistes en tant que tels. Au cours de la mission bipartite de haut niveau, les membres employeurs ont relevé que le manque de ressources pour lutter contre l’impunité; l’impôt représentant une part infime du PIB, était l’un des problèmes fondamentaux auxquels le gouvernement se heurtait. Il y a une pénurie de policiers, de procureurs, d’enquêteurs, de juges, etc., et leurs effectifs doivent être plus importants, notamment pour renforcer le système judiciaire.

Après la session de 2009 de la Conférence internationale du Travail, le gouvernement a établi une feuille de route pour traiter les questions législatives sur la base d’un consensus tripartite. Toutefois, pour l’heure, il n’est pas possible de tirer des conclusions sur l’opportunité ou l’utilité de cette feuille de route. Certains obstacles à la constitution de syndicats et à l’exercice de leurs activités demeurent. Si elles sont confirmées, les statistiques sur la syndicalisation qui ont été communiquées indiquent un pourcentage de représentation syndicale étonnamment faible dans le pays.

Pour conclure, la question la plus importante à ce stade est celle de l’impunité. Le gouvernement a consacré très peu d’attention à ce problème dans son discours liminaire, et devrait fournir des informations complémentaires sur les plans destinés à traiter ce problème.

Un membre travailleur du Guatemala a déclaré que le Guatemala a reçu des observations de la Commission de la Conférence, de la commission d’experts et du Comité de la liberté syndicale similaires, voire plus graves que celles qui ont été reçues entre 1980 et 1995, à l’époque de la guerre. Le Guatemala ne respecte pas la quasi-totalité des engagements pris auprès des différents organes de contrôle et des missions de haut niveau. Les accords tripartites signés avant les missions de haut niveau de 2008 et 2009 se sont avérés inefficaces parce qu’ils n’ont pas fait l’objet d’un suivi adéquat dans la feuille de route.

Les principaux problèmes résident dans le fait que le ministère public n’a pas renforcé les capacités institutionnelles pour répondre aux actes graves de violence quotidienne contre les syndicalistes. Le Procureur spécial pour les crimes contre les syndicalistes né de cette commission a été affaibli et réduit à une unité spéciale sans ressources, avec des méthodes qui méconnaissent les critères d’analyse relatifs à la discrimination antisyndicale. On hésite à utiliser la dénomination de discrimination antisyndicale. Avec cette faible structure, l’Etat n’est pas en mesure de déterminer les circonstances des actes de violence à l’encontre des syndicalistes, d’identifier les auteurs et de les punir.

En raison de la faiblesse de l’inspection du travail qui dispose de moins de 15 inspecteurs dans la région métropolitaine, les employeurs détruisent en toute impunité les syndicats tout en rendant la constitution de nouveaux syndicats impossible.

Il n’y a pas de coordination institutionnelle, les syndicats ont demandé l’insertion de l’organe de règlement des différends de la commission interinstitutionnelle sans obtenir de réponse; il y a la corruption et le manque d’indépendance des tribunaux du travail et d’autres institutions, des actes sont pris isolément et de manière non concertée. La création de nouveaux tribunaux ne modifie pas la situation car de nombreux candidats qui ont été rejetés par les syndicats pour attitudes antisyndicales sont maintenant magistrats. En ce qui concerne le secteur des maquilas qui est particulièrement vulnérable, en ce moment même une société licencie massivement et intimide les syndicalistes et leurs conseillers. De nouvelles réformes législatives sont nécessaires conformément aux prescriptions de la commission d’experts.

En conclusion, bien que le gouvernement du Guatemala déclare qu’il n’applique pas une politique antisyndicale, il n’a pas été démontré mettre en oeuvre une politique de respect de la liberté syndicale et cette commission est témoin de cela depuis plus de dix ans, de sorte qu’il est demandé à la commission un paragraphe spécial où seront indiqués la gravité du cas et l’absence de progrès dans le respect des engagements et le climat de violence causant l’assassinat élevé de syndicalistes, des actes d’intimidation et la dégradation des droits individuels qui sont la base de l’exercice de la liberté syndicale.

Un observateur représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) a déclaré que cela fait quinze ans que la présente Commission signale au gouvernement du Guatemala de graves problèmes liés à la convention no 87. Le Guatemala est le deuxième pays au monde en termes de nombre d’instances devant le Comité de la liberté syndicale; entre 2005 et 2010, cinq missions de haut niveau ont eu lieu ainsi que d’innombrables missions techniques. Tant la commission d’experts que d’autres organes de contrôle ont indiqué que la situation avait empiré.

Les cas dénoncés parmi les plus graves et qui sont plus nombreux que jamais sont notamment: des entraves dans la constitution et l’enregistrement d’organisations syndicales, procédure qui demande plus d’un an; des actes de violence graves contre des syndicalistes qui demeurent impunis; la criminalisation et la stigmatisation de l’activité syndicale, le manque d’indépendance et d’efficacité de la justice du travail dont témoignent les délais excessifs dans l’instruction des plaintes liées au travail et dans la réintégration de syndicalistes, pouvant aller jusqu’à plus de huit ans; l’absence de négociation collective et d’un dialogue social effectif.

La situation est si grave qu’il y a quelques jours M. Castresana, membre de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala, a démissionné en invoquant qu’on ne pouvait rien faire pour le Guatemala face au manque de volonté du gouvernement pour que cesse l’impunité et à la nomination d’un procureur qu’il décrit comme appartenant à des groupes liés à la criminalité organisée et au narcotrafic.

Depuis 2007, 47 syndicalistes du Mouvement syndical du peuple indigène et des paysans guatémaltèques (MSICG) font l’objet de menaces, sans que la justice ait fait quoi que ce soit à cet égard; plusieurs militants font l’objet de graves menaces comme celui de Lesbia Amezquita dont le cas a été examiné par la commission en 2009; les actes d’intimidation ont continué et même le Procureur des droits de l’homme a demandé des mesures de sécurité personnelle, lesquelles ne lui ont pas été accordées. En mars 2010, Luis Felipe Cho, qui avait été menacé en raison de ses activités syndicalistes, a été torturé et assassiné. Le ministère du Travail ayant déclaré que Luis Felipe Cho n’était pas un syndicaliste, l’orateur demande que soient mentionnés dans le procès-verbal les documents prouvant l’affiliation syndicale de Luis Felipe Cho. A son avis, le mécanisme de protection des syndicalistes est dans la même situation que le Département des délits commis contre des syndicalistes, qui a été supprimé en 2005 alors que le gouvernement en mentionne l’existence à chaque conférence.

Enfin, les conclusions devront figurer dans un paragraphe spécial et être assorties de propositions concrètes pour remédier immédiatement aux actes de violence graves à l’encontre des syndicalistes et des activités syndicales.

Le membre employeur du Guatemala a déploré le manque d’équilibre régional dans la composition de la liste des cas examinés par la commission, ce qui affecte la crédibilité du système de contrôle, en particulier lorsqu’il s’agit de motivations qui ne relèvent pas du monde du travail. Dans son observation, la commission d’experts se réfère à trois questions fondamentales: les actes de violence à l’encontre des syndicalistes, les problèmes d’ordre législatif et ceux qui touchent le secteur des maquilas, c’est-à-dire, dans les faits, l’industrie de l’habillement et du textile.

En ce qui concerne les actes de violence à l’encontre de syndicalistes, l’orateur a réaffirmé l’attachement des employeurs à ce que des enquêtes soient menées et que les responsabilités soient établies, des démarches ayant été engagées en ce sens devant le Procureur général de la République. Le renforcement et la professionnalisation de l’inspection du travail ont été encouragés. Ceci étant, il ne faut pas oublier que le climat de violence généralisée qui règne dans le pays touche tous les secteurs de la population et que nombre des actes de violence à l’encontre de syndicalistes peuvent avoir d’autres raisons que les activités syndicales de ceuxci. Il faut tenir compte de ce fait, étant donné qu’il n’est pas possible d’affirmer qu’il existe au Guatemala un climat de violence antisyndicale. De même, il ne faut pas attribuer le faible taux de syndicalisation actuel à ces motifs, mais plutôt au caractère informel de l’économie et à la crise du leadership syndical.

En ce qui concerne les questions d’ordre législatif, certaines ne concernent pas la convention, comme par exemple le droit de grève. Néanmoins, dans le cadre de la Commission tripartite des questions internationales du travail, les employeurs ont proposé de modifier le régime de la grève, de sorte que celle-ci puisse être déclarée plus facilement dès lors que le droit des travailleurs qui ne sont pas en faveur de la grève de continuer à travailler est garanti. Cette initiative n’a toutefois pas été soutenue par les travailleurs. S’agissant de la condition de nationalité guatémaltèque pour pouvoir être élu dirigeant syndical, celle-ci est difficile à modifier, étant donné la nécessité, dès lors, de réformes de la Constitution.

Il faut souligner les résultats positifs du dialogue social, grâce auquel un consensus a pu être obtenu sur le fait que les réformes du régime des sanctions doivent être élaborées avec la coopération technique du Bureau, selon les conditions décidées par la Commission tripartite des questions internationales du travail. Il faut espérer que les autres questions législatives qui restent à résoudre pourront l’être grâce au dialogue social. S’agissant du secteur de l’habillement et du textile, celui-ci représente 23 pour cent des exportations du pays, compte pour 8 pour cent de l’emploi formel et correspond à l’un des secteurs offrant les meilleures garanties en matière d’emploi. Dans ce secteur, la négociation collective se déroule de façon directe et sans conflit entre les travailleurs ou leurs représentants et les employeurs, ce qui apporte des avantages importants en faveur des travailleurs et une productivité accrue des entreprises. Cependant, en cas de conflit, ces derniers sont traités à deux niveaux. Tout d’abord, dans le cadre d’une médiation volontaire devant le Centre de résolution alternative des conflits de Vestex et, dans un deuxième temps, par l’Inspection générale du travail.

Le membre gouvernemental de la République bolivarienne du Venezuela, s’exprimant au nom des membres gouvernementaux de la commission, membres du Groupe des pays d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), a observé que la commission d’experts a noté que le gouvernement a procédé à des consultations en vue d’élaborer la feuille de route, mais que celle-ci n’a pas bénéficié d’un consensus parmi les organisations de travailleurs et d’employeurs. Le développement de cet outil, conformément aux recommandations faites par la commission en juin 2009, doit néanmoins être salué. Le GRULAC souhaite également souligner l’assistance technique fournie par le Bureau aux fins de la modernisation de la législation et demande qu’il soit tenu compte de la requête du gouvernement de se voir accorder sans délai toute l’assistance nécessaire au moyen d’une vision d’ensemble. Le gouvernement a démontré sa volonté de coopérer en acceptant la mission de haut niveau en 2008 ainsi que d’autres missions d’assistance technique.

Le membre gouvernemental de la Belgique, s’exprimant au nom de l’Allemagne, de l’Autriche, de la Belgique et des Pays-Bas, a déclaré que le gouvernement du Guatemala a, depuis 1991 et jusqu’en 2010, fait l’objet de plusieurs observations de la part de la commission d’experts pour non-respect de la liberté syndicale. Depuis 2005, cinq missions de haut niveau ainsi que des programmes d’assistance technique ont été déployés par l’OIT au Guatemala, sans aboutir à des résultats législatifs concrets. Une Commission nationale tripartite pour la mise en oeuvre effective de la convention ainsi qu’une feuille de route ont été mises en place. La nature tripartite de cette commission doit être préservée afin de garantir la participation effective des partenaires sociaux dans ce processus. Il est urgent que des mesures adéquates soient prises pour poursuivre les responsables des actes de violence commis contre des syndicalistes et que les résultats des enquêtes menées soient rendus publics. Par de telles actions, le gouvernement prouvera sa volonté politique de combattre de façon crédible les violences commises à l’encontre des syndicalistes, de lutter contre l’impunité et de se conformer aux recommandations acceptées par le Guatemala dans le cadre de l’examen périodique du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. La création par le gouvernement d’une commission d’experts pour nommer des candidats à la Cour suprême ne peut dès lors qu’être accueillie favorablement, surtout si elle permet la participation de la société civile.

Le membre travailleur de la Colombie a rappelé qu’au cours des vingt dernières années ce cas a été examiné 14 fois en ce qui concerne les mêmes questions. Diverses recommandations ont été adoptées par la commission et ont jusque-là été ignorées par le gouvernement. Il convient d’examiner quelles mesures l’OIT peut adopter dans des situations permanentes de violence et de harcèlement à l’encontre des syndicalistes, d’impunité et d’obstacles juridiques et institutionnels à la création ou à l’affiliation à des syndicats, et devant le manque de dialogue social. Les mesures prises jusqu’ici par l’OIT n’ont pas permis d’améliorer la situation. Que faire face à un gouvernement qui, tout en affirmant sa bonne volonté, ne prend pas les mesures pour lutter contre ces situations? Les employeurs et les travailleurs de cette commission doivent s’entendre sur des mesures plus efficaces. On ne saurait ignorer cette situation et seulement espérer qu’elle s’améliorera l’an prochain. Il faut une volonté politique sincère et profonde fondée sur la démocratie et le dialogue social efficace pour éliminer les obstacles à l’exercice des libertés syndicales. Une telle volonté n’existe pas au Guatemala.

La membre gouvernementale des Etats-Unis a indiqué qu’en 2008 son gouvernement avait reçu une soumission publique de la Fédération américaine du travail-Congrès des organisations industrielles (AFL-CIO) et six syndicats guatémaltèques, en vertu du chapitre sur le travail de l’Accord de libre-échange entre l’Amérique centrale, les Etats-Unis et la République dominicaine. Depuis lors, dans ce contexte, son gouvernement a réexaminé bon nombre de problèmes que la commission d’experts a soulevés en ce qui concerne l’application de la convention par le Guatemala. L’oratrice a indiqué que l’application effective de la législation du travail et des droits de l’homme et des droits syndicaux des travailleurs du Guatemala est considérée comme prioritaire par son gouvernement qui déplore le manque de progrès accomplis à ce jour. Le gouvernement du Guatemala est conscient des défis sérieux qu’il doit relever et a bénéficié à plusieurs reprises de l’assistance technique du BIT, y compris de plusieurs missions de haut niveau, dont la dernière a abouti à l’élaboration d’une feuille de route préparée par le gouvernement et précisant les mesures à prendre pour se conformer aux observations de la commission d’experts. Compte tenu de l’action déployée par le BIT pour fournir l’aide nécessaire, il est particulièrement inquiétant de constater que les actes de violence graves à l’encontre de syndicalistes n’ont pas été endigués, que les nombreuses déficiences du système de la justice pénale persistent, et que l’impunité demeure plus préoccupante que jamais. Il faut, de toute évidence et de manière durable, améliorer l’application de la législation du travail pour garantir que les travailleurs puissent former des syndicats en toute liberté – y compris dans les zones franches d’exportation – et que ces organisations puissent prévoir et mener leurs activités librement. L’oratrice a encouragé le gouvernement à redoubler d’efforts – en étroite collaboration avec le BIT et par un engagement total des partenaires sociaux, afin que des progrès concrets soient réalisés sans délai en ce qui concerne l’ensemble des aspects de la liberté d’association et du droit de s’organiser.

Le membre travailleur du Brésil s’est référé aux problèmes législatifs existant depuis des années: des restrictions à la création d’organisations, la moitié plus un des employés de l’entreprise étant nécessaire à cet effet; des restrictions au droit de choisir librement les dirigeants syndicaux puisqu’il est nécessaire que les travailleurs soient guatémaltèques et travaillent dans l’entreprise ou dans l’activité économique pour être éligibles; des restrictions au libre exercice d’activités, les grèves devant être déclarées à la majorité des travailleurs; la possibilité d’imposer l’arbitrage obligatoire dans les conflits du secteur des transports publics et des services liés aux combustibles; l’interdiction des grèves de solidarité; ainsi que le projet de loi qui exige des pourcentages élevés pour la formation de syndicats. En outre, l’enregistrement des syndicats peut être retardé d’un an et demi. Il existe également des entraves au droit des syndicats de s’affilier à des fédérations et des confédérations. L’orateur a souligné, en particulier, la situation de l’Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA) qui, bien que fondée en 1985, n’a toujours pas été enregistrée. Le gouvernement a récemment accepté avec une rapidité surprenante l’enregistrement d’une nouvelle fédération, qui porte le même nom et est composée de quatre organismes dont les activités réelles sont douteuses. Face à cette situation de violation de la convention, en 2008, une mission de haut niveau a adopté un accord tripartite visant à moderniser la législation et à la mettre en conformité avec la convention, et la commission d’experts a pris note de l’assistance technique ainsi fournie. Ce type de mesures et les promesses du gouvernement se répètent depuis 2000, mais la commission ne devrait pas continuer d’avoir la même attitude qu’il y a dix ans.

Le membre employeur de l’Espagne a déclaré que le climat croissant de violence au Guatemala, est démontré par le fait que plus de 6 000 personnes ont été tuées, selon les chiffres avancés par le gouvernement lui-même. L’augmentation du trafic de drogues est également préoccupante. Dans ces circonstances, la priorité est d’assurer un climat de stabilité et de normalité dans toutes les activités, tout en renforçant la lutte contre l’impunité. Il est également important d’identifier et de déterminer si des actes de violence et de criminalité contre des syndicalistes sont la conséquence de leurs activités syndicales. Bien qu’il soit possible de constater certains progrès en ce qui concerne les ressources allouées aux mécanismes de protection constitutionnelle, il est nécessaire de rationaliser les processus liés à l’activité syndicale et de veiller à l’efficacité des sanctions. En outre, la feuille de route établie par le gouvernement constitue une étape positive, et sa mise en oeuvre devrait être prioritaire et suffisamment efficace, conformément aux conclusions des deux missions de haut niveau. Enfin, il convient de noter que cette question concerne l’ensemble de la société guatémaltèque. Outre une forte volonté politique des pouvoirs publics, il est également nécessaire que les organisations d’employeurs et de travailleurs assument une responsabilité en la matière. Une attitude constructive, ouverte à la recherche de solutions et une volonté de lutter efficacement contre les actes d’intimidation et de violence seront, par conséquent, déterminantes.

Le membre travailleur de la France a déclaré que la gravité des faits et le nombre de violations des droits syndicaux au Guatemala sont épouvantables et en font l’un des pays les plus dangereux au monde pour les syndicalistes. Les crimes commis contre des syndicalistes et des leaders de travailleurs agricoles se distinguent par une cruauté et ont pu se produire parce qu’ils restent impunis et que les syndicalistes sont perçus comme des cibles. Luis Felipe Cho a été torturé et sauvagement assassiné après avoir été menacé en raison de ses activités syndicales. Son corps gravement mutilé a été retrouvé le 6 mars 2010. Il est l’un des six syndicalistes du véritable mouvement syndical du Guatemala, uni au sein du MSICG à avoir été assassiné depuis le début de 2010. Le gouvernement doit faire comparaître les assassins et les commanditaires de ces meurtres devant la justice.

Se référant aux conclusions formulées par la commission en 2009, l’orateur a regretté que, depuis lors, la situation n’ait fait que se dégrader. Les dernières observations de la commission d’experts ont été particulièrement sévères et concluent que le gouvernement n’a pas réussi à démontrer une volonté politique suffisante pour combattre la violence contre des dirigeants et des membres syndicaux et lutter contre l’impunité. La commission d’experts indique également que les conclusions de la Commission de la Conférence concernant l’absence de progrès significatifs, malgré les missions répétées de l’OIT et les recommandations très claires et très fermes des organes de contrôle, continuent, dans l’ensemble, d’être pertinentes. Au cours des dix-sept dernières années, des missions d’assistance technique ont été menées, de nombreux rapports de la commission d’experts ont été effectués, et de nombreuses recommandations de la Commission de la Conférence et conclusions du Comité de la liberté syndicale ont été formulées. Ce dernier a condamné le gouvernement pour avoir laissé la violence et l’impunité se perpétuer et pour son refus de coopérer. Une Commission internationale de lutte contre l’impunité au Guatemala a été instituée. Une feuille de route a été élaborée à la dernière minute, mais elle n’a pas été mise en oeuvre. Le gouvernement a refusé d’accorder aux travailleurs domestiques le droit de s’organiser en syndicats. Le Service des poursuites pénales n’a pas enquêté sur les crimes contre des syndicalistes, en dépit de son engagement à le faire. Il est clair que, malgré ses déclarations, le gouvernement du Guatemala n’a pas la volonté d’agir pour créer un climat plus sûr pour les syndicats, les travailleurs et les paysans.

L’orateur a exprimé l’espoir que le gouvernement coopérera pleinement avec ses partenaires internationaux ainsi qu’avec l’OIT. Il est regrettable qu’aucune déclaration n’ait été faite par l’Union européenne, qui promeut et soutient les droits de l’homme et la démocratie à travers le monde. Il convient de soutenir la demande d’un paragraphe spécial sur le Guatemala dans le rapport de cette année, et l’OIT doit donner plus de visibilité aux allégations formulées contre le gouvernement et à son attitude négative.

Le membre gouvernemental du Panama s’est associé à la déclaration faite par le GRULAC et a reconnu les efforts du gouvernement pour mettre en oeuvre la convention ainsi que les recommandations de la commission. Le Panama et le Guatemala reconnaissent, en leur qualité de membres du Système d’intégration centraméricain (SICA), l’importance de la liberté syndicale comme un droit humain fondamental étroitement lié à la liberté d’expression et à la base de la représentation démocratique et de la gouvernance. L’orateur a, par conséquent, lancé une invitation pour que le gouvernement reçoive toute l’assistance demandée pour la mise en oeuvre effective de la feuille de route.

Le membre travailleur de l’Allemagne a exprimé sa vive préoccupation devant la situation des syndicalistes au Guatemala, où ils sont continuellement exposés au harcèlement, à la violence physique et aux disparitions et où aucune amélioration n’est à constater: les crimes commis à l’encontre des syndicalistes restent impunis, l’impunité est totale, la législation du travail est sans cesse violée et reste lettre morte, l’enregistrement des syndicats est entravé, les militants syndicaux sont stigmatisés et les syndicalistes licenciés. De plus, l’Etat en sa qualité d’employeur, a lui-même pris des mesures antisyndicales à l’encontre de son propre personnel, comme en témoignent les cas des travailleurs des services municipaux de Gualpapa et de plusieurs ministères. A maintes reprises, les syndicats guatémaltèques ont attiré l’attention sur les pratiques antisyndicales graves qui ont cours, notamment la constitution de listes noires de syndicalistes et l’obligation, lorsqu’on postule à un emploi, de préciser si l’on est syndiqué. Cette obligation a cours non seulement dans le secteur privé, mais aussi dans les entreprises d’Etat, alors qu’elle représente une infraction flagrante à la Constitution du pays. L’orateur s’est dit consterné par cette situation et a appelé les représentants gouvernementaux des pays de l’Union européenne à adopter une position ferme sur la question des droits des travailleurs en Amérique centrale; il a demandé avec insistance que les droits du travail soient inscrits dans une clause spéciale de l’Accord d’association avec l’Union européenne et assortis d’un mécanisme ad hoc permettant d’assurer le respect de ces droits.

Le membre travailleur de l’Espagne a indiqué que le Guatemala est l’archétype des pays où les droits fondamentaux sont systématiquement violés. Outre les violences directes et extrêmes visant les syndicats (assassinats, séquestrations, violations et menaces), il existe d’autres formes de violences qui portent atteinte à la liberté syndicale comme la pénalisation des activités syndicales ou l’inefficacité du système judiciaire et de l’inspection du travail, l’absence de protection contre les actes d’intimidation, la discrimination, l’ingérence ou la non-reconnaissance des organisations syndicales. Toutes ces mesures ont pour objectif de mettre fin au mouvement syndical autonome, comme le MSICG, que le gouvernement n’a pas accrédité à la Conférence. En plus des autres problèmes majeurs que connaît le Guatemala, tels le travail informel et les problèmes liés à l’égalité des sexes, le dialogue social n’existe pas, comme en témoigne l’adoption de la feuille de route par le gouvernement sans tenir de consultations avec les partenaires sociaux. Cette feuille de route a été adoptée en novembre 2009, alors que la plupart des délais prévus pour l’adoption des mesures arrivaient à échéance le 31 décembre et que d’autres délais étaient déjà échus avant même son approbation par le gouvernement. La feuille de route n’a pas été respectée, pas plus qu’aucun des autres engagements pris par le gouvernement devant les organes de contrôle. Il n’existe pas de volonté politique pour le développement du dialogue social. Pour l’ensemble de ces raisons, il est demandé que ce cas figure dans un paragraphe spécial du rapport de la commission; que le dialogue social soit renforcé moyennant la mise en oeuvre de la convention; que tous les domaines de représentation des travailleurs soient passés en revue et comprennent des représentants librement choisis par les travailleurs; et que les observations des organes de contrôle soient respectées.

Le membre travailleur des Etats-Unis a rappelé que ce cas a été inscrit à l’ordre du jour de la commission au cours des treize dernières années et regretté que la quasi-totalité de ses conclusions et recommandations aient été ignorées par le gouvernement. La commission d’experts l’a clairement signalé en évoquant le manque de volonté politique. Le gouvernement est responsable de deux types d’impunités: l’une concerne l’impunité des auteurs de violences commises à l’encontre de syndicalistes au Guatemala et l’autre celle du gouvernement au regard du système de contrôle et de la fonction normative de l’OIT en général.

En ce qui concerne le premier point, au cours des trois dernières années, il y a eu au moins 40 cas non résolus d’assassinats brutaux de syndicalistes pour avoir exercé leur droit à la liberté d’association et à la négociation collective. Ce nombre est en augmentation par rapport à celui d’au moins sept meurtres recensés pour la période 2005-06. Au moins six meurtres ont eu lieu en 2010, y compris l’assassinat et la mutilation de Luis Felipe Cho et l’assassinat de Pedro Antonio Garcia du Syndicat des travailleurs municipaux de Malacatán à San Marcos. Selon le Rapport de 2009 sur les droits de l’homme du Département d’Etat américain, en dépit de certaines enquêtes limitées réalisées par le ministère public, aucun progrès n’a été noté. Le Département d’Etat a également rapporté que le suspect Valiente Garcia, arrêté pour l’assassinat en 2007 de Pedro Zamora et Puerto Quetzal, secrétaire général du Syndicat des travailleurs portuaires, a été acquitté et libéré, et qu’un deuxième suspect, Dremier Fuentes, est toujours en fuite. Lors d’une réunion à l’ambassade du Guatemala à Washington en 2009, l’orateur a indiqué avoir été personnellement informé que l’affaire de l’assassinat de Zamora a été résolue de manière satisfaisante puisque les responsables ont fait l’objet d’enquêtes et de poursuites, à la suite d’une plainte déposée conjointement par le mouvement syndical guatémaltèque et l’AFL-CIO en application du chapitre sur le travail de l’Accord de libre-échange entre l’Amérique centrale, les Etats-Unis et la République dominicaine. En 2009, une mission de haut niveau de l’OIT a reçu des preuves quant à «l’absence générale d’indépendance des autorités judiciaires et des organismes du gouvernement» en relation avec les crimes violents commis à l’encontre de syndicalistes. Selon le rapport de 2010 du BIT sur l’inspection du travail dans la région d’Amérique centrale, le Guatemala a réduit sa contribution budgétaire dédiée à l’inspection. Il a ainsi contribué à davantage d’impunité et a délibérément méconnu son engagement pris devant la commission tripartite à l’issue de la mission de haut niveau du BIT de 2008.

Le gouvernement a également montré son mépris vis-à-vis des organes de contrôle. Selon le MSICG, un membre de la commission d’experts a tenté de contacter le ministère du Travail, la Cour suprême de justice et le Service des poursuites du ministère public, mais en vain. En réponse aux préoccupations et aux conclusions du Comité de la liberté syndicale publiées en novembre 2009, le gouvernement a complètement éludé les requêtes du comité en déclarant ne pas avoir eu connaissance de l’existence de l’organisation plaignante MSICG, malgré le fait que cette organisation soit composée d’organisations affiliées à la CSI, y compris la CGTG, la CUSG et l’UNSITRAGUA. En conséquence, en mars 2009, le Comité de la liberté syndicale a exprimé sa préoccupation quant aux réponses dilatoires du gouvernement dans le cas no 2709, ainsi que ses objections à l’éligibilité des plaignants. L’orateur a, par conséquent, demandé que cette affaire soit inscrite dans un paragraphe spécial.

Le représentant gouvernemental a indiqué que la violence et l’impunité constituent les principaux problèmes du pays et qu’elles ont des effets sur la société dans son ensemble. Le Guatemala a sollicité une assistance pour lutter contre l’impunité, ce qui a abouti à la création de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG) en 2007, dont le président, au moment d’abandonner ses fonctions il y a quelques jours, a porté des accusations visant le nouveau Procureur général de la République du Guatemala. Le Président de la République a ordonné que ces accusations fassent l’objet d’une enquête. Cette situation ne remet pas en cause l’engagement liant le gouvernement et la CICIG, dont la mission se poursuit, continue d’être nécessaire et doit être renforcée.

En ce qui concerne le commentaire des membres travailleurs quant au manque de consistance de la feuille de route, le représentant gouvernemental a fait observer qu’elle a été élaborée avec l’assistance du Bureau, et qu’il est regrettable que l’on ne soit pas parvenu à un consensus à ce sujet au sein de la commission tripartite. S’agissant du travail dans les maquilas, le projet de réforme du Code du travail contient des dispositions pertinentes. Le gouvernement a déjà renouvelé sa demande d’assistance technique, au moins pour ce qui est de la feuille de route, du dialogue social, des questions législatives et celle de la formation des syndicalistes, et espère que celle-ci sera fournie sous peu, qu’elle adoptera une vision d’ensemble et s’adressera aux partenaires sociaux et au gouvernement. En ce qui concerne l’école de formation syndicale, projet pour lequel le gouvernement a recherché d’autres sources d’assistance, elle comprendra une composante de renforcement de l’aptitude des organisations syndicales à faire des propositions. Quant au système judiciaire, huit nouvelles juridictions ont été créées et il est prévu la création d’une nouvelle chambre d’appel, et le nouveau Code de procédure pénale, réformé depuis peu, qui permet d’accélérer les procédures en instituant des audiences, est en vigueur. L’organe législatif s’est engagé à renforcer le budget des autorités judiciaires.

En ce qui concerne l’assassinat de M. Pedro Zamora, le ministère public a fait appel contre la décision rendue en première instance, qui innocentait l’accusé, et l’on attend actuellement l’issue de ce recours. Le prochain rapport du gouvernement contiendra des informations sur les autres sujets encore en suspens.

Les membres travailleurs, après avoir entendu les explications fournies par le représentant gouvernemental, ont demandé expressément que les conclusions de la commission figurent dans un paragraphe spécial de son rapport. Cette inclusion dans un paragraphe spécial devra servir à rappeler au gouvernement, mais aussi à la communauté internationale et aux partenaires sociaux, 1’importance que revêt l’exercice plein et entier de la liberté syndicale dans le renforcement de la démocratie, en particulier au Guatemala. Les points suivants devraient figurer dans les conclusions de la commission: 1) la promulgation d’une loi garantissant l’exercice effectif de la liberté syndicale au profit de tous les travailleurs, y compris les travailleurs du secteur public, en conformité avec la convention no 87; 2) la mise en place, dans le cadre de la loi sur la protection des droits (ley de amparo), d’une voie de recours conforme à celle prévue par l’article 25 de la Convention américaine relative aux droits de l’homme, à laquelle le Guatemala est partie; 3) la modification de la législation nationale de telle sorte que les observations des organes de contrôle de l’OIT puissent être invoquées comme des dispositions contraignantes; 4) la réintégration immédiate de tous les syndicalistes qui ont été suspendus par les institutions de l’Etat du Guatemala; 5) le renforcement du dialogue social par le biais de la redéfinition de tous les espaces de représentation des travailleurs et l’accès garanti à ceux-ci pour tous les représentants librement élus de toutes les organisations existant dans le pays, conformément à la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976; 6) l’enregistrement de l’UNSITRAGUA, qui demande depuis plus d’un an son enregistrement au même titre que les autres organisations syndicales; 7) le renforcement des moyens financiers de 1’inspection du travail pour qu’elle puisse procéder au contrôle de 1’application effective des lois sur le travail; et 8) le fonctionnement effectif des mécanismes de protection des syndicalistes et des défenseurs de la liberté syndicale et des autres droits de la personne.

Les membres employeurs ont déclaré qu’il s’agit d’un cas important. Cependant, ils sont en désaccord avec l’avis des membres travailleurs selon lequel ce cas doit être inclus dans un paragraphe spécial du rapport de la commission. Le gouvernement, depuis de nombreuses années, a pu profiter d’une assistance technique, et il a apporté des améliorations à sa législation du travail. Cependant, deux problèmes importants subsistent: l’impunité et les lacunes au niveau de la législation concernant l’ingérence dans les activités des organisations de travailleurs, qui a pour effet de les empêcher de fonctionner en toute liberté. Une assistance technique a été fournie sur ces deux questions, y compris des visites par les vice-présidents travailleur et employeur de cette commission, mais il semble que rien n’ait fonctionné. L’impunité continue d’être un problème qui affecte tous les membres de la société, y compris les syndicats. Ils ont souligné la nécessité de rechercher des solutions qui vont au-delà des outils standards utilisés par l’OIT pour régler ces problèmes. Les membres employeurs ont proposé d’envoyer une personnalité importante au Guatemala, avec un soutien de haut niveau de l’OIT, afin d’étudier la situation et de formuler des recommandations concernant l’impunité.

Les membres travailleurs ont souligné que ce cas est un cas très sérieux et les conclusions adoptées sont bien formulées. Il est néanmoins incompréhensible de constater que les membres employeurs refusent de mettre ce cas dans un paragraphe spécial du rapport de cette commission. Les objectifs économiques ne doivent pas prévaloir sur le respect des droits sociaux fondamentaux. Les membres travailleurs ont déclaré avoir envisagé de ne pas accepter ces conclusions. Toutefois, conscients du danger que cela aurait représenté pour le système de contrôle de l’OIT, ces conclusions ont été acceptées même si elles ne figureront pas dans un paragraphe spécial.

Conclusions

La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi, ainsi que des nombreux cas examinés par le Comité de la liberté syndicale.

La commission a noté que la commission d’experts continuait à exprimer sa préoccupation concernant les questions suivantes: actes de violence nombreux et graves, y compris des assassinats et des menaces visant les syndicalistes, stigmatisation des syndicats et dispositions législatives ou pratiques incompatibles avec les droits prévus dans la convention. La commission d’experts a également pris note de l’inefficacité des procédures pénales relatives aux actes de violence, des délais excessifs des procédures judiciaires et du manque d’indépendance du pouvoir judiciaire, ce qui entraîne une situation d’impunité grave.

La commission a noté que le représentant gouvernemental avait signalé que la situation de violence et d’impunité était générale, et qu’elle ne concernait pas uniquement le mouvement syndical. Le gouvernement a sollicité l’appui des Nations Unies pour lutter contre l’impunité et une Commission internationale contre l’impunité a été créée à cette fin. Le gouvernement a demandé l’établissement de rapports pour déterminer si les assassinats de syndicalistes étaient liés à des activités syndicales. Le gouvernement a sollicité à de multiples reprises l’assistance technique du BIT pour traiter l’ensemble des problèmes posés, notamment la violence, l’impunité et les réformes législatives demandées, et pour élaborer la feuille de route. Le représentant gouvernemental a déclaré que le dialogue social tripartite avait lieu dans le cadre de la Commission tripartite nationale, et que quatre tables rondes pour le dialogue tripartite avaient été créées au niveau régional. Il a également indiqué que, suite à la dernière mission de haut niveau de l’OIT, les mécanismes de coordination interinstitutionnelle avaient été renforcés. En outre, des actions ont été menées pour réintégrer les travailleurs des maquilas. Des activités de formation ont également été mises en oeuvre, et il a été décidé de créer deux centres de formation. Il a également indiqué que, même si des mesures avaient été prises pour renforcer l’inspection du travail et les services du ministère chargés des relations avec l’OIT, l’assistance technique du BIT s’avère encore nécessaire.

La commission a noté qu’il s’agit d’un cas important discuté depuis de nombreuses années, et que le gouvernement avait bénéficié de nombreuses missions d’assistance technique afin de rendre la législation et la pratique conformes à la convention.

La commission a noté avec une profonde préoccupation que la situation de violence et d’impunité semblait s’être aggravée, et rappelé qu’il importe de s’assurer de toute urgence que les travailleurs puissent mener leurs activités syndicales dans un climat exempt de peur, de menaces et de violence. La commission a également pris note avec préoccupation de la démission du directeur de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICG) le 7 juin 2010. La commission a instamment prié le gouvernement d’adopter les mesures nécessaires pour garantir le fonctionnement efficace des mécanismes de protection des syndicalistes et des défenseurs de la liberté syndicale et des autres droits de la personne.

La commission a noté avec préoccupation que le gouvernement n’avait pas fait preuve d’une volonté politique suffisante pour lutter contre la violence visant les dirigeants syndicaux et les syndicalistes, et pour combattre l’impunité. La commission a souligné la nécessité de réaliser des progrès significatifs en ce qui concerne la condamnation des auteurs d’actes de violence antisyndicale et les sanctions infligées, qui doivent viser non seulement les auteurs directs de crimes, mais également les instigateurs. La commission a prié le gouvernement d’intensifier ses efforts pour mettre fin à l’impunité, notamment en augmentant considérablement les ressources budgétaires allouées au système judiciaire, aux services du Procureur général, à la police et à l’inspection du travail.

Relevant également avec préoccupation que le climat de violence est généralisé, la commission a rappelé que la liberté syndicale ne peut s’exercer si la sécurité des personnes et le respect des libertés civiles fondamentales ne sont pas assurés. La commission a instamment prié le gouvernement de garantir une voie de recours simple et rapide ou tout autre recours efficace devant les tribunaux compétents, afin d’assurer une protection contre les actes portant atteinte aux droits fondamentaux.

La commission a prié le gouvernement de prendre des mesures pour renforcer le dialogue social, en redéfinissant les organes de représentation et en garantissant aux représentants librement élus par les organisations du pays l’accès à ces organes, conformément aux commentaires des organes de contrôle. A cet égard, la commission a prié le gouvernement de clarifier sans délai la situation de l’Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA), avec l’assistance du BIT.

La commission a estimé que des solutions innovantes devaient être examinées pour traiter en priorité la question de l’impunité et les questions législatives en suspens. Elle a prié le gouvernement d’accepter la possibilité d’une visite par une personnalité internationale importante, accompagnée d’une mission de haut niveau de l’OIT, qui examinerait ces questions et formulerait des recommandations.

La commission a prié le gouvernement de communiquer cette année un rapport détaillé à la commission d’experts au sujet des progrès tangibles réalisés sur l’ensemble des points mentionnés, et a exprimé le vif espoir que, l’année prochaine, elle serait en mesure de prendre note d’améliorations substantielles concernant l’application de la convention.

Les membres travailleurs ont souligné que ce cas est un cas très sérieux et les conclusions adoptées sont bien formulées. Il est néanmoins incompréhensible de constater que les membres employeurs refusent de mettre ce cas dans un paragraphe spécial du rapport de cette commission. Les objectifs économiques ne doivent pas prévaloir sur le respect des droits sociaux fondamentaux. Les membres travailleurs ont déclaré avoir envisagé de ne pas accepter ces conclusions. Toutefois, conscients du danger que cela aurait représenté pour le système de contrôle de l’OIT, ces conclusions ont été acceptées même si elles ne figureront pas dans un paragraphe spécial.

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