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Observation (CEACR) - adopted 2018, published 108th ILC session (2019)

Freedom of Association and Protection of the Right to Organise Convention, 1948 (No. 87) - Egypt (Ratification: 1957)

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La commission prend note des observations de l’Union des travailleurs démocratiques égyptiens et de l’Organisation syndicale des travailleurs du transport du Grand Caire (TUWC) reçues le 31 août 2018, de celles de la Confédération syndicale internationale (CSI), du Syndicat de l’administration de l’impôt foncier, du Syndicat des travailleurs de la Bibliotheca Alexandrina, du Comité syndical des travailleurs de Suez et du Comité syndical des pêcheurs de Damiette reçues le 1er septembre 2018, de celles de la Fédération internationale des ouvriers du transport (FIT) reçues le 4 septembre 2018, et de celles de l’Union générale des travailleurs du transport et des services reçues les 18 et 23 octobre 2018, à propos de l’application de la convention en droit et dans la pratique et de la réponse du gouvernement y relative.
Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier. La commission rappelle qu’avec la Commission de l’application des normes de la Conférence, elle a prié instamment le gouvernement de prendre des mesures pour faire en sorte que tous les travailleurs puissent jouir pleinement de leur droit fondamental à s’organiser librement et, en particulier, de garantir l’indépendance des syndicats et l’élimination de toutes les formes d’ingérence dans les organisations de travailleurs. La commission avait noté que, suivant le gouvernement, la philosophie du nouveau projet de loi est fondée sur la consolidation du principe de la liberté de création d’organisations et de fédérations syndicales, ainsi que sur la garantie de leur caractère démocratique et de leur stabilité. Elle avait noté toutefois les préoccupations exprimées par la CSI et reflétées par un certain nombre de parties prenantes à la mission de contacts directs de 2017, selon lesquelles la disposition n’accordant la personnalité juridique qu’aux organisations syndicales reconnues par la loi au moment de sa mise en œuvre désavantagerait gravement les syndicats qui avaient été enregistrés en vertu de la déclaration ministérielle de 2011 sur la liberté syndicale, car ces syndicats ne sont pas considérés comme reconnus par la loi. La commission avait souligné que, dans le contexte d’un système de monopole syndical imposé depuis longtemps par la législation, il est essentiel que tous les syndicats aient la même chance d’être enregistrés en vertu de la nouvelle loi sur les syndicats. Elle avait prié instamment le gouvernement de veiller à ce que tous les syndicats existant au moment de l’adoption de la loi sur les syndicats soient en mesure de fonctionner librement et d’exercer leurs activités sans ingérence, en attendant leur régularisation en vertu de la loi, et de s’assurer que les travailleurs désireux de changer de syndicat peuvent le faire sans porter atteinte à leurs droits acquis au regard des fonds de prévoyance contributifs, sinon cela les empêcherait de choisir librement l’organisation à laquelle ils souhaitent adhérer.
La commission prend dûment note de l’indication du gouvernement selon laquelle la loi sur les syndicats no 213 a été promulguée le 17 décembre 2017 et les règlements d’application ont été publiés par le décret ministériel no 35 du 13 mars 2018. Le gouvernement déclare que toutes les organisations syndicales ont régularisé leur situation, qu’elles aient été créées en vertu de la loi no 35 de 1976 ou de la déclaration ministérielle de 2011. Il ajoute que des élections syndicales ont eu lieu par vote direct par bulletin secret et que toutes les organisations sont libres de se joindre à d’autres, de former des fédérations ou de travailler isolément.
Tout en se félicitant de l’adoption de la nouvelle loi sur les syndicats qui ne se réfère plus à une quelconque fédération syndicale qui avait précédemment donné lieu à une situation de monopole syndical imposé par la loi, la commission prend note avec préoccupation des nombreuses observations reçues d’organisations syndicales égyptiennes et internationales indiquant que l’application de la loi sur les syndicats est semée d’ingérences et d’obstacles à l’enregistrement de syndicats indépendants ou autonomes qui ne souhaitent pas être regroupés sous la houlette de la traditionnelle Fédération des syndicats égyptiens (ETUF). A cet égard, le gouvernement cite plusieurs raisons pour lesquelles certains comités syndicaux n’ont pas régularisé leur statut, par exemple parce qu’aucune demande de régularisation n’a été déposée; l’entreprise a fusionné ou a été mise en liquidation; en raison de problèmes entre les membres du comité exécutif du syndicat; parce qu’un syndicat ne communique pas avec ses adhérents; parce que les documents fournis ne répondaient pas aux critères et que le syndicat n’a pas réagi; pour double affiliation dans plus d’un syndicat au même niveau sans exercer plus d’une profession; pour ne pas répondre au critère d’effectif minimum. D’après le gouvernement, 2 214 comités syndicaux, 27 syndicats généraux et 1 confédération ont été enregistrés après régularisation. Sur les chiffres qui précèdent, 135 comités syndicaux et 3 syndicats généraux qui avaient été créés en application de la déclaration de 2011 ont été régularisés. Dans une communication ultérieure, le gouvernement indique que 142 comités syndicaux non affiliés à l’ETUF ont régularisé leur statut. Le gouvernement ajoute que ceux qui n’ont pas pu régulariser leur situation peuvent demander à tout moment un certificat d’établissement et de dépôt auprès de l’administration.
La commission note dans les nombreuses communications reçues des organisations de travailleurs toutes sortes de préoccupations à propos de l’enregistrement et du processus électoral, notamment: des syndicats ont pu régulariser leur situation mais n’ont pas pu organiser d’élections syndicales, ce qui a eu pour effet de leur interdire toute activité syndicale; des demandes injustifiées; des reports dans l’acceptation des demandes de documentation ou d’enregistrement; l’imposition de règlements types; des retards dans la délivrance des certificats, rendant toute activité syndicale impossible; le refus d’enregistrer des comités syndicaux là où un autre syndicat était déjà en place; l’exclusion par le gouvernement de certains candidats du processus électoral. D’autres plaintes portaient sur des pressions pour rejoindre les rangs de l’ETUF se référant à plusieurs exemples de syndicats généraux qui finalement se sont affiliés, et des détails ont été fournis sur l’exclusion de centaines de candidats indépendants du processus électoral. D’après ces organisations, les autorités compétentes n’ont rien fait pour remédier à ces situations alors qu’elles ont été portées à la connaissance du ministre. La CSI transmet une liste de 40 comités syndicaux qui attendent toujours leur régularisation et conclut que l’application de la loi sur les syndicats se fait de telle manière à perpétuer le monopole syndical imposé dans le passé.
La commission prend note de la réponse du gouvernement à ces observations: i) la majorité des plaintes manquent de preuves tangibles, concrètes ou de documents exacts et comprennent des allégations ou des impressions non fondées qui ne peuvent être prouvées; ii) trois syndicats généraux qui n’étaient pas affiliés à l’ETUF ont librement demandé à adhérer à l’organisation après avoir normalisé leur statut; iii) le syndicat général des travailleurs des secteurs du transport et des services a été créé et il n’est pas affilié à l’ETUF, même s’il y existe des syndicats similaires affiliés aux syndicats généraux; iv) 14 sur 25 comités syndicaux du Syndicat des services fiscaux pour l’immobilier ont été capables de régulariser leur statut; v) aucune preuve n’a été fournie à propos du retrait des travailleurs de l’ETUF ni de leur demande de cesser de déduire leurs cotisations syndicales; vi) le rôle du ministère de la Main d’œuvre dans les élections se limite à l’organisation, alors que l’exclusion des candidats et l’examen des griefs sont du ressort du juge; vii) tout retard entraînait une prolongation du délai pour voter; et viii) le fait de ne pas participer à l’élection ne fait obstacle ni aux activités syndicales ni à la personnalité juridique acquise par les syndicats. Le gouvernement assure qu’il continuera à travailler en toute transparence et en coopération avec le BIT afin de surmonter les défis auxquels est confrontée l’expérience égyptienne établissant une liberté syndicale nouvelle qui n’a pas été observée dans le pays depuis longtemps.
Enfin, la commission prend note des observations des organisations de travailleurs selon lesquelles les dispositions législatives font obstacle au droit des organisations de travailleurs d’élaborer leurs constitutions et leurs règles de fonctionnement et d’élire leurs représentants en toute liberté. Elle prend note également de la réponse générale du gouvernement à cet égard. La commission traitera pleinement ces questions lors de l’examen du rapport détaillé du gouvernement qui est dû l’année prochaine.
Tout en prenant dûment note des informations fournies par le gouvernement, la commission se voit obligée de noter avec un profond regret que, en dépit des efforts consentis pendant de nombreuses années pour mettre la législation en conformité avec la convention, certaines dispositions de la loi sur les syndicats, ses règlements d’application et leur application dans la pratique soulèvent des allégations d’obstacles graves empêchant le plein exercice de la liberté syndicale par tous les travailleurs. La commission se félicite de l’invitation du gouvernement à aider les organisations qui n’ont pas pu régulariser leur situation et, à la lumière des observations détaillées et des cas particuliers soulevés dans les communications reçues des organisations syndicales nationales et internationales, prie le gouvernement de réexaminer chacun des cas avec l’organisation concernée et de fournir des informations détaillées sur les mesures prises à cet égard.
Exigence d’effectif minimum. Dans son précédent commentaire de 2017, la commission avait pris note des préoccupations exprimées par la CSI et par diverses parties prenantes à la mission de contacts directs, selon lesquelles la condition d’un effectif minimal pour créer un syndicat aux différents niveaux (entreprise, sectoriel et national) était excessive et susceptible d’entraver le droit des travailleurs de constituer l’organisation de leur choix et d’empêcher la création de syndicats indépendants dans la pratique. Elle avait prié le gouvernement d’abaisser le nombre minimum de membres requis pour former un syndicat au niveau de l’entreprise, fixé à 150, afin de garantir le respect des droits des travailleurs de former l’organisation de leur choix et de s’y affilier. La commission prend note des informations figurant dans le dernier rapport en date du gouvernement selon lequel il étudie actuellement l’impact des dispositions de la loi sur les syndicats et entame un dialogue sociétal associant toutes les organisations syndicales, les représentants des employeurs et quelques représentants des travailleurs qui n’ont pas pu régulariser leur situation, afin de discuter de l’abaissement du seuil minimum exigé pour former un comité syndical à 50 travailleurs. Le gouvernement ajoute que dans sa réponse aux observations des organisations de travailleurs nationales et internationales que de nombreux syndicats ont pu satisfaire cette exigence, et que aucune plainte n’a été reçue, comme quoi cela constitue un obstacle à l’enregistrement. La commission doit toutefois observer que les nombreuses observations reçues des organisations internationales et nationales de travailleurs indiquent que les éléments du mouvement syndical qui ont bénéficié du monopole syndical imposé par la loi, pendant des décennies, peuvent facilement remplir les conditions minimales d’affiliation, ce qui a été beaucoup plus difficile pour les syndicats indépendants. A cet égard, la commission rappelle qu’elle avait précédemment noté que bien plus de 90 pour cent de l’économie égyptienne se développait dans des micro ou petites entreprises employant moins de 50 travailleurs. La commission veut croire que la loi sur les syndicats sera modifiée dans un proche avenir de manière à garantir que le seuil minimum d’adhérents exigé au niveau de l’entreprise, de même que celui exigé pour la constitution de syndicats généraux et de confédérations syndicales (établis respectivement à 15 travailleurs pour les syndicats d’entreprise, à 20 000 travailleurs pour les syndicats généraux, et à 10 syndicats généraux et 200 000 travailleurs pour les confédérations syndicales), est modifié de façon à ne pas constituer un obstacle au droit de tous les travailleurs de constituer les organisations de leur choix et de s’y affilier.
S’agissant de ses précédents commentaires selon lesquels l’interdiction faite aux travailleurs de s’affilier à plus d’un syndicat ne devrait pas s’appliquer dans les cas où le travailleur occupe plus d’un emploi dans des lieux de travail différents, la commission note que le gouvernement indique que l’expression «même si le travailleur exerce plus d’une profession» a été supprimée de l’interdiction figurant à l’article 21(h) relatif à l’appartenance à plus d’une organisation de travailleurs. Le gouvernement ajoute toutefois qu’un travailleur qui adhère à deux syndicats de même niveau enfreindrait cette disposition. La commission veut croire que cette modification à laquelle le gouvernement fait référence permettra, dans les faits, aux travailleurs qui occupent plus d’un emploi d’adhérer aux syndicats correspondants même s’ils sont de même niveau (comités syndicaux, syndicats généraux).
Articles 3 et 5. Droit des organisations de travailleurs d’organiser leur administration sans ingérence et de bénéficier des avantages de l’affiliation internationale. Dans ses précédents commentaires, la commission prenait note des préoccupations exprimées par la CSI dans ses observations et par plusieurs parties prenantes à la mission de contacts directs au sujet de l’interdiction de recevoir des subventions d’organismes étrangers telle qu’elle figure dans le projet de loi sur les syndicats. Rappelant sa demande adressée au gouvernement pour qu’il modifie cette interdiction pour faire en sorte que les syndicats soient clairement autorisés à bénéficier de l’assistance technique et du soutien que peuvent leur apporter des entités étrangères dans l’exercice de leurs activités syndicales légitimes, la commission note avec intérêt que l’article 5 du règlement d’application prévoit explicitement que les organisations syndicales peuvent bénéficier des programmes et activités de coopération technique proposés par des organisations internationales spécialisées dans les questions liées au travail et aux travailleurs.
Enfin, la commission note avec regret que le gouvernement n’a pas modifié l’article de la loi sur les syndicats qui sanctionne diverses infractions de peines de prison, se bornant à déclarer que leur but est de protéger l’action syndicale contre l’ingérence ou le détournement du nom d’un syndicat à des fins illicites. Tout en notant que le gouvernement réitère que les sanctions sont imposées pour des infractions relevant du Code pénal et non pour des activités syndicales, la commission observe néanmoins que des peines d’emprisonnement peuvent être infligées pour un large éventail d’infractions et prie le gouvernement de maintenir ces dispositions à l’examen et de communiquer des informations détaillées sur leur application.
Code du travail. S’agissant des commentaires qu’elle formule depuis plusieurs années au sujet du Code du travail no 12 de 2003, la commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle bon nombre de dispositions ayant fait l’objet de ses commentaires ont été supprimées dans la dernière version du projet. Le gouvernement fournit des explications en réponse à certains commentaires de la commission, quoiqu’il semble que certaines questions subsistent s’agissant de l’obligation faite par la loi aux organisations de travailleurs de préciser à l’avance la durée d’une grève, le non-respect de cette disposition étant considéré comme un manquement grave justifiant le licenciement des travailleurs (art. 201 et 121(8) du projet de loi); de la possibilité de recourir à l’arbitrage obligatoire à la demande d’une seule des parties (art. 186 et 198); et de l’interdiction de toute action collective dans des entreprises vitales ou stratégiques dont la mise à l’arrêt compromettrait la sécurité nationale ou des services de base fournis aux citoyens et dont la liste sera dressée par décret du Premier ministre (art. 203). La commission prie le gouvernement de communiquer copie du dernier projet en date du Code du travail et s’attend à ce qu’il tienne pleinement compte de ses précédents commentaires afin de le mettre en conformité avec la convention.
S’agissant du champ d’application du projet de Code du travail, la commission avait noté dans ses précédents commentaires que le gouvernement avait annoncé qu’il élaborerait un nouveau projet de loi réglementant le travail domestique et protégeant les droits des travailleurs domestiques. La commission prie à nouveau le gouvernement de communiquer copie de la loi réglementant le travail domestique.
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