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Observation (CEACR) - adopted 2021, published 110th ILC session (2022)

Right to Organise and Collective Bargaining Convention, 1949 (No. 98) - Ecuador (Ratification: 1959)

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La commission prend note de la réponse du gouvernement aux observations conjointes de la Confédération équatorienne des organisations unitaires de classe des travailleurs (CEDOCUT) et de l’Association syndicale des travailleurs agricoles bananiers et paysans (ASTAC), reçues le 1er octobre 2020.
La commission prend également note des observations de l’Internationale des services publics en Équateur (ISP-Équateur) reçues le 1er septembre 2021, sur des questions examinées par la commission dans le présent commentaire, ainsi que de la réponse du gouvernement à ces observations.
Assistance technique. La commission rappelle que, en décembre 2019, le Bureau a mené, à la demande du gouvernement, une mission d’assistance technique et que celle-ci a présenté aux mandants tripartites un projet de feuille de route afin d’entamer un dialogue tripartite et de prendre ainsi des mesures pour répondre aux commentaires des organes de contrôle de l’OIT. La commission note que le gouvernement indique que, bien que l’engagement pris précédemment ne se soit pas concrétisé, le gouvernement souhaite recevoir une assistance technique, pour le moment en ce qui concerne le dialogue social tripartite. Constatant avec regret que le gouvernement n’a pas donné suite à l’assistance technique fournie par le Bureau en décembre 2019 concernant les mesures pour répondre aux commentaires des organes de contrôle de l’OIT, la commission exprime le ferme espoir que l’assistance souhaitée par le gouvernement se concrétisera dès que possible, et que le renforcement du dialogue social qui en résultera permettra de progresser dans l’adoption des mesures nécessaires pour mettre la législation en conformité avec la convention en ce qui concerne les points mentionnés ci-dessous.

Application de la convention dans le secteur privé

Article 1 de la convention. Protection adéquate contre les actes de discrimination antisyndicale. Depuis de nombreuses années, la commission souligne la nécessité d’inclure dans la législation des dispositions garantissant la protection contre les actes de discrimination antisyndicale au stade de l’accès à l’emploi. La commission note que le gouvernement réaffirme que la législation du travail en vigueur assure un niveau de protection adéquat et qu’il ne juge pas nécessaire d’adopter d’autres dispositions à ce sujet. Rappelant que l’article 1 de la convention interdit notamment la discrimination antisyndicale au moment du recrutement individuel du travailleur, afin que l’accès à l’emploi ne soit pas subordonné à la condition que le travailleur ne s’affilie pas à un syndicat ou cesse de faire partie d’un syndicat, ainsi que des pratiques telles que l’établissement de «listes noires» de travailleurs syndiqués dans le but d’empêcher leur recrutement, la commission souligne la nécessité d’inclure les dispositions susmentionnées dans la législation, et prie le gouvernement d’indiquer toute mesure prise dans ce sens.
Article 4. Promotion de la négociation collective. La commission rappelle que, conformément à l’article 221 du Code du travail, la convention collective de travail doit être conclue avec le comité d’entreprise et, en l’absence d’un tel comité, avec l’association comptant le plus grand nombre de travailleurs affiliés, à condition qu’elle représente plus de 50 pour cent des travailleurs de l’entreprise. La commission avait prié instamment le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux, les mesures nécessaires pour modifier cet article afin que, lorsqu’il n’y a pas d’organisation réunissant au moins 50 pour cent des travailleurs, les organisations syndicales minoritaires puissent, seules ou conjointement, négocier au moins au nom de leurs membres. La commission note que le gouvernement réaffirme que cette condition requise pour négocier une convention collective est étroitement lié aux principes de démocratie, de participation et de transparence, étant donné que les avantages découlant de la convention collective bénéficient à tous les travailleurs de l’entreprise ou de l’institution qui les occupent. La commission fait observer à nouveau que, s’il est admissible que le syndicat qui représente la majorité ou un pourcentage élevé de travailleurs d’une unité de négociation jouisse de droits préférentiels ou exclusifs de négociation, elle estime que dans le cas où aucun syndicat ne réunirait ces conditions, ou bien ne jouirait pas de tels droits exclusifs, les organisations syndicales minoritaires devraient au minimum pouvoir conclure une convention ou un accord collectif au nom de leurs membres (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 226). La commission rappelle que la condition de représentativité pour conclure des conventions collectives est pleinement compatible avec la convention, mais que le niveau de représentativité fixé ne doit pas entraver la promotion et le développement de la négociation collective libre et volontaire auxquels se réfère l’article 4 de la convention. La commission rappelle que, dans des commentaires précédents, elle avait noté le faible taux de couverture de la négociation collective dans le secteur privé. La commission note que, entre 2019 et août 2021, selon les données statistiques fournies par le gouvernement, 45 conventions collectives ont été conclues dans le secteur privé. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie instamment le gouvernement, après avoir consulté les partenaires sociaux, de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 221 du Code du travail afin que, lorsqu’aucune organisation ne réunit plus de 50 pour cent des travailleurs, les organisations syndicales puissent, seules ou conjointement, négocier au moins au nom de leurs membres. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toutes mesures prises ou envisagées à cet égard. Elle le prie aussi de continuer à communiquer des informations sur le nombre de conventions collectives conclues et en vigueur dans le pays, et sur les secteurs d’activité (y compris les secteurs agricole et bananier) et le nombre de travailleurs couverts par ces conventions.

Application de la convention dans le secteur public

Articles 1, 2 et 6. Protection des travailleurs du secteur public qui ne sont pas commis à l’administration de l’État contre les actes de discrimination antisyndicale et d’ingérence. Dans ses précédents commentaires, la commission avait pris note des dispositions de protection contre la discrimination et l’ingérence antisyndicales, y compris du dispositif de démission forcée assortie d’une indemnisation, contenues dans la loi organique portant réforme des lois régissant le service public (loi organique de réforme). Ayant noté que cette loi contenait des dispositions protégeant expressément les membres de la direction des comités de fonctionnaires, la commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la législation prévoie des dispositions protégeant expressément les dirigeants de toutes les organisations de fonctionnaires contre les actes de discrimination et d’ingérence antisyndicales. La commission avait également prié le gouvernement d’indiquer les sanctions et les moyens de recours et de réparation applicables aux actes de discrimination et d’ingérence antisyndicales commis dans le secteur public, et de fournir des informations sur l’issue du recours en inconstitutionnalité intenté contre le dispositif de démission forcée assortie d’une indemnisation. La commission note que le gouvernement indique que la protection contre les actes de discrimination et que le droit de constituer des syndicats sont prévus expressément, tant dans la Constitution politique de la République qu’à l’article 187 du Code du travail, ainsi que dans la loi organique sur la fonction publique (LOSEP), qui interdit tout acte de discrimination à l’égard des fonctionnaires, hommes et femmes. Le gouvernement estime que les principes juridiques en vigueur dans le domaine du travail garantissent un niveau de protection approprié aux fonctionnaires. La commission fait observer que le Comité de la liberté syndicale a récemment examiné des allégations de licenciement de dirigeants d’organisations de fonctionnaires, et s’est dit confiant que le gouvernement prendrait toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que les dispositions législatives applicables au secteur public, actuellement axées sur la protection des dirigeants des comités de fonctionnaires, protègent contre d’éventuels actes de discrimination antisyndicale les dirigeants des organisations de fonctionnaires dans leur ensemble (voir rapport no 393, mars 2021, cas no 3347, paragr. 433). La commission souligne une fois de plus l’importance que la législation accorde le même type de protection contre d’éventuels actes de discrimination antisyndicale et d’ingérence à tous les dirigeants de toutes les organisations de fonctionnaires. La commission prie donc instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la législation applicable au secteur public contienne des dispositions protégeant expressément les dirigeants de toutes les organisations de fonctionnaires contre les actes de discrimination antisyndicale et d’ingérence, ainsi que des dispositions prévoyant des sanctions dissuasives dans le cas de la perpétration de ces actes. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute mesure prise ou envisagée à cet égard. Par ailleurs, en ce qui concerne le recours en inconstitutionnalité relatif au dispositif de démission forcée assortie d’une indemnisation, la commission note que, selon l’ISP-Équateur, dans un arrêt rendu le 28 octobre 2020, la Cour constitutionnelle a déclaré inconstitutionnel le caractère obligatoire du dispositif de démission forcée assortie d’une indemnisation. La commission rappelle que le dispositif de démission forcée assortie d’une indemnisation permettait à l’administration publique, en échange du versement d’une indemnisation, de licencier unilatéralement des fonctionnaires sans avoir à indiquer les motifs de la cessation de la relation de travail. La commission rappelle qu’elle avait souligné l’importance de prendre des mesures pour garantir que l’utilisation du dispositif de démission forcée assortie d’une indemnisation ne donne pas lieu à des actes de discrimination antisyndicale. La commission prend dûment note de l’arrêt de la Cour constitutionnelle. La commission note que l’arrêt indique que le règlement sur le dispositif de démission forcée assortie d’une indemnisation restera en vigueur, à condition que l’application de ce dispositif ne soit pas obligatoire. La commission note que l’ISP-Équateur considère que cet arrêt consacre un progrès important, sans pour autant assurer la protection contre la discrimination antisyndicale prévue par la convention: s’il supprime le caractère obligatoire du dispositif, et permet aux personnes licenciées dans ces conditions de retrouver un emploi dans le secteur public, il laisse les victimes sans protection et ne prévoit ni leur réintégration dans leur emploi ni des réparations. L’ISP-Équateur affirme aussi qu’à ce jour, le gouvernement ne s’est pas conformé aux dispositions de l’arrêt qui permettent désormais de retrouver un emploi dans le secteur public. Rappelant que les organisations syndicales avaient dénoncé l’utilisation du dispositif de démission forcée assortie d’une indemnisation pour licencier des fonctionnaires en raison de leurs activités syndicales, la commission prie le gouvernement de communiquer ses commentaires à cet égard.
Articles 4 et 6. Négociation collective des travailleurs du secteur public qui ne sont pas commis à l’administration de l’État. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que la loi organique de réforme et l’arrêté ministériel no MDT-2018-0010 ne reconnaissaient pas le droit de négociation collective aux employés des services publics et que seuls les ouvriers du secteur public, régis par le Code du travail, pouvaient négocier collectivement. La commission avait noté également que la Cour constitutionnelle avait annulé les modifications apportées en 2015 à la Constitution qui excluaient la totalité du secteur public du champ de la négociation collective (arrêt no 018-18-SIN-CC du 1er août 2018). La commission avait noté aussi que, pour mettre en œuvre l’arrêt de la Cour constitutionnelle, le ministère du Travail avait pris l’arrêté no 373 du 4 décembre 2019. La commission avait prié le gouvernement de garantir la pleine application de l’arrêté ministériel no 373 dans les différentes institutions de l’État. La commission l’avait aussi prié instamment de redoubler d’efforts pour rouvrir un débat de fond avec les organisations syndicales concernées en vue d’instaurer, pour toutes les catégories d’employés du secteur public couverts par la convention, un mécanisme adapté de négociation collective. La commission note que le gouvernement indique que, bien qu’il n’existe pas de réglementation sur les mécanismes de négociation collective pour les employés des services publics, ce droit n’étant conféré qu’aux ouvriers du secteur public, le gouvernement réaffirme son engagement à faciliter le dialogue tripartite à ce sujet. En ce qui concerne la mise en œuvre de l’arrêté ministériel no 373, le gouvernement indique ce qui suit: i) le 6 février 2020, la Direction des services consultatifs juridiques a émis un avis sur l’applicabilité de l’arrêté; ii) le 15 mai 2020, le ministère a diffusé plusieurs circulaires dans lesquelles il a demandé aux entités du secteur public de donner des informations sur le respect de l’arrêté; iii) 87 institutions du secteur public ont adressé des documents à ce sujet; 57 d’entre elles ont modifié le régime de travail d’un total de 346 agents visés par la LOSEP afin qu’ils relèvent du Code du travail; et iv), pour sa part, le ministère a effectué cette modification pour 242 travailleurs. La commission prend dûment note de ces informations et note que, d’après le gouvernement, au cours de la période 2019-août 2021, 85 conventions collectives ont été conclues dans le secteur public. La commission note également que, selon l’ISP-Équateur, la loi organique sur l’aide humanitaire pour lutter contre la crise sanitaire découlant de la COVID-19 (loi humanitaire) édictée le 22 juin 2020, impose des restrictions à la négociation collective pour les ouvriers du secteur public régis par le Code du travail. L’ISP-Équateur indique que plusieurs recours en inconstitutionnalité ont été intentés et que la Cour constitutionnelle n’a pas encore statué à ce sujet. Par ailleurs, constatant que la législation ne reconnaît toujours pas le droit de négociation collective des agents publics, force est à la commission de rappeler de nouveau que, en vertu des articles 4 et 6 de la convention, les personnes occupées dans le secteur public qui ne sont pas commises à l’administration de l’État (employés des entreprises publiques, employés municipaux, employés des institutions décentralisées, enseignants du secteur public, personnel du secteur des transports, etc.) sont couvertes par la convention (voir Étude d’ensemble de 2012, paragr. 172). Ces personnes devraient donc pouvoir négocier collectivement leurs conditions d’emploi, y compris leurs conditions salariales, et la simple consultation des syndicats intéressés ne répond pas suffisamment aux prescriptions de la convention (voir Étude d’ensemble de 2012, paragr. 219). La commission prie donc instamment le gouvernement de rouvrir un débat de fond avec les organisations syndicales concernées en vue d’instaurer, pour toutes les catégories d’employés du secteur public couverts par la convention, un mécanisme adapté de négociation collective. La commission prie le gouvernement de fournir des données sur les conventions collectives conclues avec les ouvriers du secteur public et d’indiquer également l’issue des recours en inconstitutionnalité intentées contre la loi humanitaire.
La commission constate avec regret qu’à ce jour elle n’a pas été en mesure d’observer des progrès dans les mesures à prendre pour mettre la législation en conformité avec la convention. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle, pour le moment, compte tenu des dégâts causés par la pandémie de COVID-19, il a donné la priorité à une proposition de loi sur les possibilités d’emploi, qui prend en compte les vues des partenaires sociaux et des acteurs du domaine du travail, et grâce à laquelle le gouvernement entend dynamiser et revitaliser le marché du travail. Tout en prenant bonne note de ces indications, la commission rappelle qu’il est fondamental d’assurer la pleine application de la convention pour faire face aux conséquences de la pandémie, et prie instamment le gouvernement de faire le nécessaire pour prendre des mesures concrètes au sujet des questions soulevées dans le présent commentaire. La commission note à ce sujet que le ministère du Travail, par l’intermédiaire de la Direction des organisations du travail, manifeste son intention de collaborer à toute initiative législative visant à améliorer l’exercice des droits des travailleurs. La commission espère que l’assistance technique mentionnée par le gouvernement pour renforcer le dialogue social se concrétisera dans les meilleurs délais et que ses résultats permettront de progresser au sujet des questions soulevées dans le présent commentaire. La commission exprime l’espoir que, en consultation avec les partenaires sociaux, les réformes législatives qui seront menées contribueront à assurer le respect des droits consacrés par la convention.
[Le gouvernement est prié de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2022.]
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