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Observation (CEACR) - adopted 2022, published 111st ILC session (2023)

Forced Labour Convention, 1930 (No. 29) - Eswatini (Ratification: 1978)

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Article 1, paragraphe 1, article 2 et article 25 de la convention. 1. Évolution de la législation. La commission prend note de l’indication du gouvernement dans son rapport selon laquelle le Conseil consultatif du travail tripartite (LAB) a finalisé la révision du projet de loi sur l’emploi, à la suite des commentaires techniques formulés par le BIT. La commission note en particulier que les articles 19 à 21 du projet de loi sur l’emploi interdisent le travail forcé et que l’article 158 1 b) établit les sanctions applicables en cas de travail forcé. La commission note que l’article 19 du projet de loi, qui fait référence à cinq situations dans lesquelles le travail ou le service imposé ne doit pas être considéré comme du travail forcé, reprend de manière générale les exceptions prévues à l’article 2, paragraphe 2, de la convention. La commission observe toutefois que:
  • i)l’article 19 d) du projet de loi prévoit que le type des services communaux qui doivent être accomplis par le membre d’une collectivité dans l’intérêt direct de la communauté, et qui n’ont pas pour but un gain financier, ne constituent pas un travail forcé. À cet égard, la commission souhaite attirer l’attention du gouvernement sur le fait que l’article 19 d) du projet de loi va plus loin que l’article 2, paragraphe 2 e), de la convention, qui exclut du champ d’application de la convention les menus travaux de village, dès lors qu’ils sont «exécutés dans l’intérêt direct de la collectivité par les membres de celle-ci […] à condition que la population elle-même ou ses représentants directs aient le droit de se prononcer sur le bien-fondé de ces travaux» (Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 281);
  • ii)l’article 19 e) du projet de loi prévoit que tout travail ou service qui relève des obligations civiques et culturelles normales des citoyens d’un pays pleinement autonome ne constitue pas un travail forcé. À ce sujet, la commission souhaite attirer l’attention du gouvernement sur le fait que l’article 19 e) du projet de loi va plus loin que l’article 2, paragraphe 2 b), de la convention dans la mesure où l’exception des «obligations civiques normales» prévue par cette disposition de la convention doit être comprise de manière très restrictive; et
  • iii)l’article 158 1 b) du projet de loi dispose qu’exiger ou imposer un travail forcé, ou faire en sorte, ou permettre, qu’un travail forcé soit exigé ou imposé est passible d’une amende ou d’une peine d’emprisonnement d’une durée maximale d’un an, ou des deux. La commission note que, en vertu de cette disposition, une personne qui impose un travail forcé peut n’être condamnée qu’à une amende. Elle rappelle que, conformément à l’article 25 de la convention, le fait d’exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire doit être passible de sanctions pénales et que, lorsque la sanction prévue consiste en une amende ou une peine de prison de très courte durée, elle ne saurait constituer une sanction efficace compte tenu de la gravité de l’infraction et du caractère dissuasif que les sanctions doivent revêtir (Étude d’ensemble de 2012, paragr. 319).
La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle, en août 2021, le projet final du projet de loi sur l’emploi a été soumis au ministre du Travail et de la Sécurité sociale et transmis au bureau du procureur général. Le projet de loi sera ensuite soumis au Cabinet pour approbation et au Parlement pour adoption. Le gouvernement indique qu’il est prévu de finaliser le processus législatif sans plus de retard, compte tenu notamment du niveau et de l’étendue des consultations qui ont eu lieu au sein du Conseil consultatif du travail tripartite. La commission exprime donc le ferme espoir que le gouvernement prendra en compte les commentaires ci-dessus et adoptera les mesures nécessaires pour que la version finale du projet de loi sur l’emploi soit pleinement conforme aux dispositions de la convention, notamment en modifiant:
  • –les articles 19 d) et e) du projet de loi, afin de limiter la portée des exclusions de la définition du travail forcé aux: i) menus travaux de village, en prévoyant l’obligation de consulter les membres de la communauté ou leurs représentants directs au sujet de l’obligation d’effectuer ces menus travaux de village; et aux ii) «obligations civiques normales», en interprétant ces obligations de manière très restrictive; et
  • –l’article 158 1 b) du projet de loi afin d’établir des peines d’emprisonnement suffisamment dissuasives pour l’exaction du travail forcé.
2. Législation concernant les travaux ou services d’intérêt public obligatoires. Depuis un certain nombre d’années, la commission attire l’attention du gouvernement sur l’ordonnance no 6 de 1998 de l’administration swazie qui prévoit l’obligation pour les Swazis, sous peine de sanctions sévères, d’obéir à des ordres exigeant leur participation à des travaux obligatoires, tels que des travaux obligatoires de culture, de lutte contre l’érosion des sols et de construction, d’entretien et de protection des routes. La commission a précédemment noté que, malgré l’indication du gouvernement selon laquelle cette ordonnance avait été déclarée nulle et non avenue par la Haute Cour du Swaziland (affaire no 2823/2000), ces pratiques persistaient, étant enracinées dans un droit coutumier bien établi et institutionnalisé – notamment la pratique coutumière du kuhlehla (services rendus au chef local ou au Roi, par exemple labourer les champs des chefs traditionnels) qui avait encore cours et était assortie de sanctions pour les personnes qui refusaient de l’effectuer. Tout en prenant note de l’explication du gouvernement selon laquelle cette pratique coutumière n’était pas obligatoire, la commission a constaté qu’aucun texte ne réglementait la nature de ces travaux ni les conditions dans lesquelles ceux-ci devaient être réalisés ou organisés. La commission a prié le gouvernement de prendre des mesures afin de prévoir expressément dans la législation la nature volontaire de la participation à la pratique coutumière du kuhlehla.
La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle le pays dispose d’un double système juridique fondé sur la common law écrite romanonéerlandaise et sur les lois traditionnelles et coutumières non écrites, comme le prévoient les articles 252 et 258 de la Constitution (loi no 1 de 2005). Le gouvernement ajoute que la pratique coutumière du kuhlehla fait partie des lois traditionnelles et coutumières non écrites, si bien qu’il est impossible pour le gouvernement d’adopter un texte réglementant cette pratique. Le gouvernement indique que, pour mettre un terme à cette situation, un nouvel article 19 e) a été incorporé dans le projet de loi sur l’emploi, afin d’exclure de la définition du «travail forcé» tout travail qui fait partie des «obligations culturelles» des citoyens. À ce sujet, la commission renvoie à ses commentaires ci-dessus sur l’article 19 e) du projet de loi sur l’emploi. La commission note avec préoccupation que, malgré les demandes qu’elle a adressées précédemment au gouvernement afin qu’il garantisse le caractère volontaire de la participation à des travaux effectués dans le cadre des pratiques coutumières, telles que le kuhlehla, le gouvernement envisage d’exclure expressément ces pratiques du champ d’application de la législation interdisant le travail forcé. La commission attire l’attention du gouvernement sur le fait que, tant que les pratiques coutumières, telles que le kuhlehla, ne répondront pas aux critères des exceptions au travail forcé prévues à l’article 2 de la conventionpour les «menus travaux de village», les «obligations civiques» ou les «cas de force majeure», elles seront incompatibles avec la convention. La commission prie donc instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect de la convention, que ce soit en garantissant le caractère volontaire de la participation aux travaux effectués en vertu des lois traditionnelles et coutumières, et plus particulièrement de la pratique coutumière du kuhlehla, ou en limitant le travail exigé dans le cadre de ces pratiques aux exceptions prévues par la convention. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé à cet égard. Elle le prie aussi de communiquer des informations sur le nombre de personnes qui ont travaillé dans le cadre de pratiques coutumières, y compris le kuhlehla, et sur le type et la durée des services effectués.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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