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Observation (CEACR) - adopted 2023, published 112nd ILC session (2024)

Freedom of Association and Protection of the Right to Organise Convention, 1948 (No. 87) - Myanmar (Ratification: 1955)

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Suivi des recommandations de la Commission d’enquête (plainte déposée en vertu de l’article   26 de la Constitution de l’OIT)

La commission rappelle que, l’an dernier, elle avait pris note de la formation d’une Commission d’enquête pour étudier la question du non-respect par le Myanmar de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. La commission avait indiqué qu’elle reprendrait son examen de l’application de la convention dès que la commission d’enquête aurait achevé sa mission. La commission prend note du rapport détaillé que la commission d’enquête a présenté le 4 août 2023, dont le Conseil d’administration a pris note à sa 349e session (novembre 2023).
La commission note que la Commission d’enquête avait souligné l’interdépendance et la complémentarité de la convention et de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et l’importance d’en tenir compte dans la mise en œuvre de ses recommandations. La commission partage les vues de la Commission d’enquête selon lesquelles la liberté syndicale est au cœur de la démocratie et de l’état de droit, et constitue une condition préalable au dialogue social, à la négociation collective et à la coopération tripartite.
La commission note que, dans son rapport, la Commission d’enquête a conclu que les diverses mesures imposées par les autorités militaires, y compris par les autorités compétentes en matière de travail placées sous leur contrôle, conjuguées au climat d’insécurité totale et aux menaces permanentes dont font l’objet les dirigeants et membres syndicaux, ont eu pour effet de restreindre considérablement les droits syndicaux expressément énoncés dans la convention no 87 (paragr. 520 à 594). En particulier, la Commission d’enquête a conclu ce qui suit:
  • les actions multiples et généralisées des autorités militaires constituent de graves entraves à l’exercice des libertés publiques suivantes, qui sont une condition sine qua non de l’exercice de la liberté syndicale: le droit à la vie, à la sécurité et à l’intégrité physique et morale de la personne; le droit de ne pas être arrêté ou détenu arbitrairement; le droit de ne pas subir de traitements cruels et inhumains; le droit à un procès équitable; la liberté de circulation; la liberté de réunion; la liberté d’opinion et d’expression; et la protection des biens privés des dirigeants et des membres des syndicats;
  • il existe d’importants obstacles matériels à la constitution d’organisations de travailleurs sans autorisation préalable, parmi lesquels une procédure d’enregistrement longue, des pots-de-vin versés pour décourager l’enregistrement ou en échange de celui-ci, des pressions exercées par les autorités compétentes en matière de travail pour se voir remettre les certificats d’enregistrement, l’antisyndicalisme ambiant dans le secteur privé et l’absence de voies de recours permettant de contester les restrictions imposées en matière d’enregistrement auprès d’autorités indépendantes, ce qui va à l’encontre de l’article 2 de la convention;
  • les autorités militaires ont porté atteinte à la liberté qu’ont les syndicats d’élire leur dirigeants, notamment dans le cas particulier de la Confédération des syndicats du Myanmar (CTUM); le droit de grève, qui est un moyen essentiel pour les travailleurs de défendre leurs intérêts, est sévèrement limité depuis le coup militaire, en raison à la fois des ordonnances militaires imposant des restrictions aux rassemblements de plus de cinq personnes dans l’espace public, et des risques et répercussions considérables auxquels s’exposent les participants à une grève; cette situation est contraire à l’article 3 de la convention no 87; et le climat de violence et d’intimidation envers les dirigeants et les membres des syndicats, qui résulte de leur stigmatisation et de leur mise en accusation permanentes, restreint encore davantage le droit des organisations de travailleurs d’organiser librement leur gestion et leur activité et de formuler librement leur programme d’action;
  • les autorités militaires ont déclaré 16 syndicats et organisations de la société civile comme non enregistrés légalement au sens de la loi sur l’organisation du travail (LOL), ce qui est contraire à l’article 4 de la convention.
La commission note également que, sur la base des constatations susmentionnées, la Commission d’enquête a exhorté les autorités militaires à (paragr. 643):
  • a) faire cesser sur-le-champ toute forme de violence, notamment la violence fondée sur le genre, la torture et autres traitements inhumains infligés à des dirigeants syndicaux, des membres syndicaux ou d’autres personnes en relation avec l’exercice d’activités légitimes par des travailleurs ou des employeurs, y compris à l’encontre de minorités ethniques, religieuses ou autres, en particulier les violences commises dans le cadre de la répression de protestations et de manifestations publiques pacifiques, lors d’arrestations ou pendant la détention, ainsi que les attaques militaires contre des infrastructures civiles, qui, par leur effet conjugué, créent un climat de violence et de terreur qui compromet l’exercice effectif de la liberté syndicale;
  • b) libérer sans condition et sans délai tous les syndicalistes arrêtés, condamnés et détenus en raison de l’exercice de leurs libertés publiques ou d’activités syndicales légitimes, y compris ceux ayant été arrêtés, condamnés et détenus pour avoir exprimé des opinions critiques à l’égard des autorités militaires, pour avoir participé à des manifestations pacifiques ou les avoir organisées, ou pour avoir manifesté pacifiquement de toute autre manière leur opposition aux autorités militaires à la suite du coup d’État;
  • c) abandonner toutes les poursuites pénales engagées contre des syndicalistes et d’autres personnes ayant exercé pacifiquement leurs libertés publiques dans le cadre d’activités syndicales légitimes; et mettre fin immédiatement à toute forme d’intimidation, de menace, de stigmatisation, de harcèlement et de surveillance vis-à-vis des syndicalistes et de leur famille, ainsi qu’aux attaques et actes de destruction visant les locaux et les biens des syndicats;
  • d) annuler toutes les ordonnances militaires ou autres dispositions, y compris de nature législative, décrétées depuis février 2021 et considérées comme attentatoires à la liberté syndicale et aux libertés publiques fondamentales des syndicalistes; et rétablir pleinement les libertés publiques fondamentales nécessaires à l’exercice de la liberté syndicale qui ont été suspendues ou restreintes, notamment le droit de ne pas être arrêté ou détenu arbitrairement, le droit à un procès équitable devant un tribunal indépendant et impartial, la liberté de réunion, d’opinion et d’expression, et la protection de la propriété privée;
  • e) mettre fin à toutes les mesures punitives arbitraires ou disproportionnées à l’encontre des personnes qui exercent pacifiquement leurs libertés publiques en appelant au rétablissement d’un régime démocratique dans lequel elles pourraient exercer pleinement leur droit de liberté syndicale;
  • f) révoquer les retraits de citoyenneté frappant des dirigeants et des membres syndicaux et restituer sans délai leurs documents de voyage aux dirigeants et membres syndicaux concernés;
  • g) cesser toute forme d’ingérence dans l’établissement, l’administration et le fonctionnement des syndicats à tous les niveaux, notamment en ce qui concerne l’élection de dirigeants syndicaux, le règlement des différends du travail, la conduite d’actions collectives et la dissolution ou la suspension administrative de syndicats; et
  • h) s’abstenir de cautionner, de faciliter ou d’encourager, par tous actes ou déclarations, les pratiques antisyndicales, l’ingérence et autres atteintes aux droits syndicaux par des employeurs publics ou privés.
La commission prend note de la recommandation de la Commission d’enquête selon laquelle les militaires et les autorités sous leur contrôle devraient immédiatement faire cesser ou annuler toute mesure ou activité contraire aux obligations du Myanmar en vertu de la convention.
La commission note en outre que la Commission d’enquête, observant qu’une véritable mise en œuvre de la convention nécessitera le rétablissement d’un gouvernement civil, d’institutions pleinement démocratiques et de l’état de droit, a formulé d’autres recommandations à l’intention du Myanmar,à mettre en œuvre dès qu’un régime démocratique aura été rétabli (paragr. 645 à 647 et 649).
La commission note que, dans une communication en date du 29 septembre 2023, les autorités militaires ont indiqué au Conseil d’administration que la position du Myanmar à propos des recommandations de la Commission d’enquête serait communiquée dans un délai de trois mois.
La commission déplore profondément les informations selon lesquelles les graves violations, par les autorités militaires, des libertés publiques fondamentales des travailleurs et des employeurs se poursuivent. La commission note avec une profonde préoccupation que la Commission d’enquête n’a fait que confirmer les plus profondes préoccupations qu’elle avait déjà exprimées, et qu’elle n’a pu observer aucune mesure positive afin d’assurer l’application de la convention. La commission prie instamment et fermement les autorités militaires de mettre en œuvre immédiatement les recommandations de la Commission d’enquête, et de communiquer un rapport détaillé sur les mesures prises dans ce sens, et de répondre à toutes les demandes détaillées qu’elle a formulées dans son commentaire de 2021.
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