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A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  • Analyse des plaintes
    1. 119 Les plaintes de la Fédération américaine du travail et de la Confédération générale du travail du Venezuela portent sur les deux séries de faits suivants qu'il importe d'examiner séparément.
      • a) La situation générale du syndicalisme au Venezuela.
      • b) La dissolution des syndicats des travailleurs du pétrole.
    2. 120 En ce qui concerne la situation générale du mouvement syndical au Venezuela, les plaignants allèguent notamment les faits suivants:
      • a) Au lendemain de la prise du pouvoir par la Junte militaire (24 novembre 1948), le gouvernement aurait suspendu les garanties constitutionnelles et déclenché une campagne violente contre le mouvement syndical. Cette campagne aurait notamment été caractérisée par la fermeture de locaux syndicaux, l'embargo mis sur les fonds syndicaux, l'emprisonnement ou l'expulsion des principaux chefs du mouvement syndical et enfin la dissolution, par voie administrative, de la Confédération générale du travail du Venezuela et de la plupart des fédérations et unions syndicales qui y étaient affiliées.
      • b) Les locaux centraux de la Confédération générale du travail du Venezuela ainsi que ceux de nombreuses unions et fédérations syndicales auraient été fermés. Les organisations syndicales qui auraient échappé à cette mesure auraient été placées sous le contrôle de la police.
      • c) Les fonds de la Confédération générale du travail et des principales fédérations auraient été saisis par les autorités. La presse syndicale aurait été supprimée.
      • d) La police aurait persécuté des centaines de travailleurs et des dirigeants syndicaux, sous le prétexte qu'ils se seraient livrés à des activités politiques illicites. Un grand nombre de dirigeants syndicaux, parmi lesquels le président de la Confédération générale du travail, le président et le vice-président de la Fédération nationale des employés, auraient été emprisonnés à diverses reprises tandis que d'autres, tels que le secrétaire général et plusieurs membres du Comité directeur de la Confédération générale du travail auraient été expulsés du pays. D'autres encore, tels que le président du Comité d'organisation de la Fédération des travailleurs du district fédéral et les membres du Comité d'organisation de la Fédération des travailleurs du pétrole auraient d'abord été emprisonnés puis expulsés du pays.
      • e) Par décret du 25 février 1949, le gouvernement militaire aurait dissous la Confédération générale du travail, les principales fédérations nationales et le Syndicat des arts graphiques.
      • f) Les syndicats de travailleurs qui n'auraient pas été dissous auraient été obligés, en vertu d'un simple ordre ministériel, de procéder, dans un délai déterminé, au renouvellement de leur comité directeur. Les anciens dirigeants de ces syndicats auraient été déclarés inéligibles.
    3. 121 En ce qui concerne la dissolution des syndicats des travailleurs du pétrole, la plainte allègue notamment les faits suivants:
      • a) A la suite d'une grève qui aurait éclaté dans les champs pétrolifères au moment de l'expiration des conventions collectives, le gouvernement militaire aurait, par voie administrative, dissous les 46 syndicats des ouvriers du pétrole du Venezuela.
      • b) La dissolution aurait été accompagnée de mesures de répression contre les travailleurs et, en particulier, contre les dirigeants des syndicats. Ces mesures auraient été notamment caractérisées par l'emprisonnement de plus de 3.000 travailleurs, la coupure du gaz, de l'électricité et de l'eau aux familles des ouvriers en grève, des perquisitions à domicile et la destruction des approvisionnements des familles ouvrières.
      • c) Le décret portant dissolution des 46 syndicats des travailleurs du pétrole serait contraire à des dispositions formelles de la Loi du travail qui prévoit que le ministre du Travail ou le gouvernement doit accorder aux syndicats intéressés un délai de dix jours pendant lequel ceux-ci peuvent recourir à la Cour fédérale des appels.
    4. Analyse de la réponse
    5. 122 Après avoir déclaré que la Confédération générale du travail du Venezuela - " organisation inexistante " - n'a aucune qualité pour présenter une plainte pour atteinte à la liberté syndicale, le gouvernement présente les observations suivantes en ce qui concerne les faits allégués par la Fédération américaine du travail.
  • Comme pour la plainte, on analysera ces observations sous les deux titres suivants:
    • a) Situation générale du mouvement syndical.
    • b) Dissolution des syndicats des travailleurs du pétrole.
      1. 123 La dissolution de la Confédération générale du travail du Venezuela fut ordonnée par le décret no 56 du 25 février 1949 à la suite d'une grève politique illégale. A propos de cette dissolution, le gouvernement donne les précisions suivantes:
    • a) Il n'aurait pas été dans l'intention du gouvernement de dissoudre la Confédération générale du travail et il n'aurait eu recours à cette mesure que plusieurs mois après son arrivée au pouvoir, lorsqu'il était apparu que la Confédération générale du travail s'était transformée en organisme politique dont l'activité était dangereuse pour la stabilité sociale et l'ordre public.
    • b) Tout en sachant que les dirigeants de la C.G.T étaient des membres actifs du parti politique au pouvoir jusqu'en novembre 1948, le gouvernement n'aurait toutefois pas pris de mesures contre la Confédération générale du travail et se serait borné à exercer une surveillance sur ses dirigeants, afin d'éviter que leurs activités politiques ne portent préjudice à l'organisation syndicale.
    • c) Les activités politiques de ces chefs auraient eu leur point culminant dans un ultimatum adressé au gouvernement le 23 février 1949, lui enjoignant en termes comminatoires de prendre certaines mesures dans un délai de 48 heures, sous peine de recours à l'action directe. En présence d'une telle provocation, accompagnée d'arrêts de travail, le gouvernement se serait vu contraint, et cela bien contre son gré, de dissoudre la Confédération générale du travail et d'annuler l'enregistrement du Syndicat des arts graphiques. Le caractère illégal de l'action de la Confédération générale du travail apparaît clairement à la lumière des dispositions de la Loi du travail (Titre VIII) et de celles du Règlement d'application de cette loi (Titre 31), dispositions se rapportant aux conventions collectives et à la déclaration de grève.
    • d) Le fait que la dissolution ne s'appliquait qu'à la Confédération générale du travail et non pas aux syndicats professionnels (à l'exception du seul Syndicat des arts graphiques) prouverait que cette mesure n'avait pas pour objet de supprimer le mouvement syndical. Le Syndicat des arts graphiques aurait d'ailleurs, par la suite, bénéficié d'un nouvel enregistrement et cela en dépit du fait que ses membres étaient les mêmes que ceux qui avaient participé à la grève illégale.
      1. 124 En ce qui concerne l'embargo mis sur les fonds syndicaux, le gouvernement déclare que cette mesure aurait été décrétée dans les premiers mois de son avènement au pouvoir et aurait eu pour but d'empêcher que de tels fonds ne fussent utilisés pour des fins étrangères aux activités normales des syndicats. Cette mesure, prise en vertu des pouvoirs de contrôle conférés au gouvernement par la Loi du travail, aurait été rapportée et les syndicats auraient de nouveau la libre disposition des fonds en question. Quant aux fonds appartenant aux organisations dissoutes, ils auraient été placés en sécurité et leur affectation définitive serait actuellement à l'étude.
      2. 125 Quant aux persécutions dont les plaignants font état, le gouvernement déclare que des mesures de sécurité ont dû être prises contre certains chefs syndicaux, non pas en leur qualité de chefs syndicaux, mais en raison de leurs activités politiques contraires à l'ordre public.
      3. 126 En ce qui concerne la dissolution des 46 syndicats des travailleurs du pétrole, le gouvernement présente les observations suivantes:
    • a) Les rapports d'emploi entre employeurs et travailleurs dans l'industrie pétrolière auraient été gouvernés par des conventions collectives conclues au début de 1948 entre l'ancienne Fédération des syndicats du pétrole et chacune des entreprises de cette industrie. Ces conventions auraient été conclues pour une durée de trois ans et resteraient en vigueur en conformité avec la Loi du travail que le gouvernement militaire a reconnue par le décret no 56 mentionné ci-dessus.
    • b) La grève déclenchée par les syndicats des travailleurs du pétrole dissous par le décret incriminé n'aurait pas eu lieu comme l'allèguent les plaignants à l'expiration du terme des conventions collectives. Elle se serait, au contraire, produite au mépris des dispositions formelles des conventions collectives en vigueur (dispositions citées dans la réponse du gouvernement et qui sont reproduites dans l'annexe), serait par conséquent illégale et entraînerait, pour ses auteurs, les sanctions prévues par la loi.
    • c) Les sanctions administratives prises par le gouvernement seraient basées sur la Loi du travail actuellement en vigueur. Le gouvernement ajoute que des mesures semblables sont prises par d'autres gouvernements et ne constituent pas, à son avis, une atteinte à la liberté syndicale.
    • d) Le respect que le gouvernement témoigne au libre développement d'un mouvement syndical à caractère strictement professionnel et non soumis à la direction de groupes politiques, est prouvé par le fait que, depuis le 24 novembre 1948, 88 syndicats ont été reconnus et enregistrés, dont 42 relèvent de l'industrie du pétrole.
    • e) Des pourparlers sont actuellement en cours, notamment dans l'industrie pétrolière, en vue de renouveler les conventions collectives qui arrivent prochainement à échéance.

B. B. Conclusions du comité

B. B. Conclusions du comité
  1. 127. En ce qui concerne les allégations portant sur la situation générale du mouvement syndical au Venezuela, le Conseil d'administration a à sa disposition le rapport de la mission du Bureau international du Travail au Venezuela ainsi que les observations du gouvernement du Venezuela sur ce même rapport. Il dispose ainsi des éléments d'appréciation nécessaires.
  2. 128. La dissolution des syndicats des travailleurs du pétrole, sur laquelle porte la deuxième partie de la plainte, est postérieure aux événements sur lesquels portent les documents susmentionnés et n'a, par conséquent, pas fait l'objet d'un examen analogue. Les versions du gouvernement et des plaignants diffèrent profondément en ce qui concerne les conditions dans lesquelles se sont déroulés les événements qui ont donné lieu à la dissolution des syndicats pétroliers. Mais elles s'accordent sur le point que cette dissolution a effectivement eu lieu. Il ressort du texte même du décret de dissolution, lequel figure en annexe à la plainte, que cette mesure a été prise par les autorités administratives sans que le cas ait été soumis au préalable aux tribunaux compétents.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 129. Dans ces conditions, le Comité conclut que le cas appelle un examen plus approfondi de la part du Conseil d'administration.
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