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A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 3. Le Comité a eu l'occasion de soumettre des conclusions au Conseil d'administration sur un certain nombre de plaintes relatives aux violations des droits syndicaux au Venezuela dans ses premier et sixième rapports. On trouvera ci-dessous un bref résumé de ces plaintes.
- Plaintes de la Fédération américaine du travail et de la Confédération générale du travail du Venezuela
- 4. Ces plaintes, analysées dans le premier rapport du Comité, se rapportent à la situation générale du mouvement syndical au Venezuela à la suite de la prise du pouvoir, le 24 novembre 1948, par la Junte militaire. Il était allégué que le mouvement syndical avait fait l'objet d'une campagne de répression dont le point culminant avait été la dissolution par voie administrative de la Fédération générale du travail vénézuélienne et des fédérations syndicales qui y étaient affiliées. De nombreux dirigeants syndicalistes auraient été emprisonnés. Les locaux syndicaux auraient été fermés et les biens de toutes les associations dissoutes auraient été saisis. La presse syndicale aurait été supprimée ; sous prétexte d'une participation à des activités politiques subversives, de nombreux travailleurs auraient été persécutés. Les autres organisations syndicales qui avaient échappé à la dissolution auraient été contraintes par un ordre ministériel de remplacer leurs conseils d'administration, les anciens membres de ces conseils ayant été déclarés inéligibles.
- 5. Les autres allégations se rapportaient à la dissolution - toujours par voie administrative - de 46 syndicats de travailleurs du pétrole. Cette dissolution aurait eu pour origine une grève dans les champs pétrolifères. Il a été allégué que les travailleurs auraient fait l'objet de mesures de répression et que plus de 3.000 d'entre eux auraient été arrêtés.
- 6. En ce qui concerne ces allégations, le gouvernement a présenté une série d'observations tendant à démontrer que la dissolution de la Confédération générale du travail avait été ordonnée en raison de la participation de cette organisation à une grève politique illégale. Le gouvernement n'a pris cette mesure que lorsqu'il devint évident que la Confédération était devenue un instrument d'agitation politique, ses activités illégales ayant trouvé leur point culminant dans la présentation, le 23 février 1949, d'un ultimatum dans lequel elle menaçait le gouvernement de passer à l'action directe. Devant cette provocation, le gouvernement a résolu de dissoudre l'organisation. Le caractère illégal des activités de la Confédération constituait une violation des dispositions du Code du travail et des règles promulguées en ce qui concerne la procédure relative aux conflits collectifs. Le blocage des fonds syndicaux a été ordonné afin d'éviter qu'ils ne puissent être employés à des fins étrangères aux activités syndicales normales. L'emprisonnement des dirigeants syndicalistes, ordonné à titre de mesure de sécurité, avait pour seule origine l'activité politique de ceux qui en ont été l'objet.
- 7. En ce qui concerne la dissolution des syndicats des travailleurs du pétrole, le gouvernement a déclaré que cette dissolution avait été ordonnée à la suite d'une grève déclenchée par ces syndicats, grève qui était contraire aux dispositions formelles des conventions collectives par lesquelles ils étaient liés. Les sanctions prises à la suite de ces grèves illégales étaient basées sur les dispositions du Code du travail, et le gouvernement, rappelant que des mesures similaires avaient été prises dans d'autres pays, disait considérer que les mesures prises par lui ne constituaient pas une atteinte à la liberté syndicale. D'après le gouvernement, un nombre considérable de syndicats de travailleurs du pétrole se seraient par la suite réorganisés et auraient conclu de nouvelles conventions collectives.
- Conclusions formulées par le Comité dans son premier rapport
- 8. Dans son premier rapport, le Comité a formulé les conclusions suivantes:
- 127. En ce qui concerne les allégations portant sur la situation générale du mouvement syndical au Venezuela, le Conseil d'administration a à sa disposition le rapport de la mission du Bureau international du Travail au Venezuela, ainsi que les observations du gouvernement du Venezuela sur ce même rapport. Il dispose ainsi des éléments d'appréciation nécessaires.
- 128. La dissolution des syndicats des travailleurs du pétrole, sur laquelle porte la deuxième partie de la plainte, est postérieure aux événements sur lesquels portent les documents susmentionnés et n'a, par conséquent, pas fait l'objet d'un examen analogue. Les versions du gouvernement et des plaignants diffèrent profondément, en ce qui concerne les conditions dans lesquelles se sont déroulés les événements qui ont eu lieu au moment de la dissolution des syndicats pétroliers, mais elles s'accordent sur le point que cette dissolution a effectivement eu lieu. Il ressort du texte même du décret de dissolution, lequel figure en annexe à la plainte, que cette mesure a été prise par les autorités administratives sans que le cas ait été soumis au préalable aux tribunaux compétents.
- 129. Dans ces conditions, le Comité conclut que le cas appelle un examen plus approfondi de la part du Conseil d'administration.
- 9. En ce qui concerne la politique future à suivre, le Comité, dans ce même rapport, a déclaré ce qui suit
- 142. Le gouvernement du Venezuela... n'a pas été invité formellement à indiquer s'il serait disposé à consentir au renvoi du cas devant la Commission d'investigation et de conciliation. Conformément à la procédure définie par le Conseil d'administration, cette question ne se posera qu'au moment où le Conseil d'administration lui-même aura décidé que le gouvernement intéressé doit être invité à donner son agrément au renvoi du cas à la Commission d'investigation et de conciliation. Bien que le gouvernement ait indiqué dans ses observations préliminaires sur la plainte qu'il ne serait pas disposé à donner son agrément au renvoi à la Commission d'investigation et de conciliation, le Comité estime toutefois qu'une telle réponse préliminaire n'écarte pas, pour le Conseil d'administration, la possibilité d'examiner à nouveau s'il est opportun d'adresser au gouvernement une demande formelle en vue d'obtenir son agrément au renvoi du cas à la Commission d'investigation et de conciliation. Le Comité se croit fondé à espérer que, dans les cas à venir, les gouvernements, dans leurs observations préliminaires, n'anticiperont pas sur une invitation que le Conseil d'administration pourrait juger opportun ou inopportun de leur adresser après avoir eu l'occasion d'examiner les faits et de formuler son opinion...
- Décisions prises par le Comité et contenues dans son troisième rapport
- 10. Les conclusions adoptées par le Comité dans son premier rapport ont été amendées par lui de la façon suivante dans son troisième rapport
- 4. Le Comité a, d'autre part, été saisi d'une lettre de M. Montoya, représentant du gouvernement du Venezuela au Conseil d'administration, l'informant qu'il avait de nouvelles observations à soumettre de la part de son gouvernement relativement au cas no 2 (Venezuela). Dans ces conditions, le Comité a décidé de modifier la recommandation qu'il avait présentée au Conseil d'administration dans son premier rapport, et recommande donc au Conseil d'administration de surseoir à l'examen de ce cas pour permettre au gouvernement de communiquer au Comité ses observations supplémentaires. Le Comité fera à nouveau rapport sur ce cas au Conseil d'administration, lorsque les observations en question lui auront été transmises.
- 11. A sa 118ème session (Genève, mars 1952), le Conseil d'administration a examiné les premier et troisième rapports du Comité et a décidé d'ajourner l'examen du cas.
- Plaintes présentées par la Confédération internationale des syndicats libres et par d'autres organisations
- 12. Dans l'intervalle, une plainte en date du 25 mars 1952 est parvenue au Bureau, émanant de la Confédération internationale des syndicats libres et communiquée au gouvernement du Venezuela, plainte qui confirmait et complétait d'autres plaintes présentées au Conseil économique et social par diverses organisations contre le gouvernement du Venezuela.
- 13. Ces plaintes qui, en partie, reprennent les allégations contenues dans les communications de la Fédération américaine du travail et de la Confédération du travail du Venezuela, se rapportaient particulièrement à la dissolution, en 1949, de divers syndicats et à la dissolution, en 1950, des syndicats de l'industrie pétrolière. Elles contenaient également des allégations relatives à l'arrestation de dirigeants syndicalistes.
- 14. Comme il l'avait fait pour les plaintes antérieures, le gouvernement a présenté une série d'observations contenues dans plusieurs communications formant un tout, et, par l'intermédiaire de son représentant, il a présenté également des déclarations verbales à la séance du 23 juin 1952 du Comité.
- 15. Dans sa communication en date du 19 mai 1952, le gouvernement déclarait que d'importantes modifications étaient intervenues dans la situation syndicale au Venezuela. Depuis le mois de janvier 1951, un grand nombre de syndicats auraient été légalement constitués, et vers le milieu de 1952, on comptait un total de 395 syndicats et de 4 fédérations. D'après le gouvernement, ces chiffres démontrent que ce dernier favorise le développement du syndicalisme ; il indique toutefois qu'il n'entendait pas pour cela tolérer de la part des associations qu'elles s'affilient des partis politiques nationaux ou étrangers, ou qu'elles participent à des activités politiques distinctes des fins que leur assigne le Code du travail. L'exercice du droit de réunion a également été facilité, l'autorisation préalable exigée jusque-là ayant été abolie. Le nombre des conventions collectives s'est accru considérablement de 1950 à 1952. En particulier, le gouvernement a spécialement suivi les négociations collectives dans l'industrie du pétrole, le ministre du Travail ayant obtenu des entreprises de cette industrie l'engagement de ne pas modifier les conditions de travail et de ne pas procéder à des congédiements pendant que les négociations des nouveaux contrats étaient en cours. Le gouvernement a aidé les organisations syndicales en assumant les frais de leurs locaux et du matériel. En ce qui concerne le blocage des fonds des organisations dissoutes, la Commission administrative chargée de l'administration de ces fonds a rendu des sommes considérables aux nouveaux syndicats constitués par les travailleurs anciennement affiliés aux organisations dissoutes. Chaque cas de réattribution de fonds a été consciencieusement étudié.
- 16. Dans la même communication, le gouvernement analysait la jurisprudence du Comité de la liberté syndicale à l'occasion d'autres cas, en particulier à l'occasion du cas no 24 portant sur une plainte présentée par la Fédération internationale des syndicats libres contre le gouvernement du Royaume-Uni (Chypre). Le gouvernement a exprimé l'opinion que les plaintes présentées contre lui étaient de même nature que celle examinée dans le cas no 24, se rapportant, elle aussi, à des associations dont le caractère politique ne laissait aucun doute.
- 17. Dans une deuxième communication également en date du 19 mai 1952, le gouvernement du Venezuela a attiré l'attention sur le rapport de la Commission de vérification des pouvoirs présenté à la 35ème session de la Conférence internationale du Travail. Dans ce rapport, la Commission de vérification des pouvoirs recommandait le rejet d'une protestation présentée contre les pouvoirs du délégué travailleur vénézuélien à la Conférence.
- 18. Dans les déclarations faites verbalement par le représentant du gouvernement vénézuélien à la séance du 23 juin 1952 du Comité, le gouvernement déclarait que la grève qui avait amené la dissolution des syndicats des ouvriers du pétrole constituait, du point de vue juridique, un mouvement illégal, puisqu'aussi bien les syndicats qui J'avaient déclenchée étaient liés par des conventions collectives. Le gouvernement avait mis les syndicats au courant de cet état de choses avant de procéder à leur dissolution ; toutefois, devant le refus qui lui a été opposé, le gouvernement s'est vu contraint de dissoudre les syndicats afin d'assurer l'exploitation de l'industrie pétrolière, vitale pour le pays.
- 19. Dans ses dernières communications, en date des 5 novembre 1952, 26 novembre 1952 et 12 février 1953, le gouvernement, estimant que les nouvelles plaintes qui lui avaient été communiquées (plainte de la Confédération inter nationale des syndicats libres, etc.) ne contenaient aucune allégation nouvelle, s'est borné à renouveler les déclarations qu'il avait faites antérieurement. Le gouvernement transmettait en outre au Comité le texte d'un discours prononcé le 30 novembre 1952 par le président du gouvernement de la Junte à la veille des élections, discours dans lequel il déclarait que la politique du gouvernement vénézuélien visait à rétablir dans le pays un régime constitutionnel qui serait l'expression de la volonté populaire. Dans sa dernière communication, datée du 17 février 1953, le gouvernement présentait un mémorandum sur l'évolution de la situation syndicale. Il déclarait que le ministère du Travail avait adopté une politique libérale et qu'aucune mesure restrictive n'avait été prise contre le mouvement syndical. Avec la création de nouveaux syndicats dans diverses régions du pays, le terrain était préparé pour la constitution d'une confédération nationale. Les nombreuses négociations collectives en cours, notamment dans l'industrie pétrolière, témoignent - disait-il - de la liberté d'action dont jouissent les syndicats. Le projet de Constitution alors à l'étude devant l'Assemblée constituante contient des clauses de garantie de la liberté d'association, reconnaît le droit de grève, autorise la conclusion de conventions collectives, etc.
- Conclusions formulées par le Comité
- 20. Le Comité, après avoir déduit des informations présentées par le gouvernement qu'une certaine amélioration s'était manifestée dans la situation syndicale générale, a formulé les conclusions suivantes relatives aux deux principales allégations.
- 21. En ce qui concerne la dissolution des syndicats des travailleurs du pétrole, le Comité, après avoir constaté que " les sanctions prévues par la loi sur le travail pour les cas de grève déclenchée en violation de la loi, s'appliquent uniquement aux personnes responsables de la grève, mais non pas aux organisations syndicales ", a conclu:
- 1002. Le Comité a constaté, en se fondant sur les circonstances du cas, que la dissolution des syndicats pétroliers n'a pas été prononcée en vertu de l'article 193.
- 1003. Le Comité est arrivé à la même conclusion quant à l'article 199, qui présuppose pour son application qu'une organisation syndicale soit affiliée ou associée à un groupement politique national ou étranger, fait qui n'a pas été mis en cause.
- 22. En ce qui concerne les allégations relatives à la dissolution des syndicats pétroliers, le Comité a abouti à la conclusion suivante:
- 1005. Le Comité estime donc que les explications données par le gouvernement n'ont pas infirmé la conclusion à laquelle il était arrivé à sa réunion de janvier 1952, à savoir que les syndicats pétroliers ont été dissous par mesure administrative.
- 1006. Cependant, le Comité a tenu compte des informations nouvelles fournies par le gouvernement dans sa réponse du 19 mai 1952, informations tendant à montrer que la situation dans l'industrie du pétrole était redevenue normale. Ainsi, le gouvernement insiste sur le fait que les syndicats des travailleurs de l'industrie pétrolière, qui avaient été dissous en 1952, ont été reconstitués dans les mêmes districts et avec les mêmes effectifs. Le gouvernement signale en plus qu'il a maintenu en vigueur les conventions collectives conclues en 1947, et que s'il a dû intervenir dans les négociations entre les compagnies et les syndicats, ce fut dans l'intérêt propre des travailleurs, puisqu'il a réussi à faire insérer de meilleures conditions de travail dans les conventions collectives. Enfin, le gouvernement déclare qu'il a fait régulièrement appel aux représentants des syndicats pour collaborer avec les autorités et les employeurs dans différents organismes créés dans l'industrie pétrolière.
- 1007. Il semble donc que dans l'industrie pétrolière, les syndicats ont pu se former à nouveau et sont à même d'exercer normalement leurs fonctions.
- 23. En ce qui concerne les allégations relatives à la situation syndicale en général, le Comité a abouti aux conclusions suivantes, conclusions qui ont été approuvées par le Conseil d'administration à sa 121ème session lorsqu'il a adopté le sixième rapport du Comité:
- 1012. De l'examen de l'ensemble du cas, le Comité dégage les conclusions suivantes:
- 1) En ce qui concerne la situation syndicale en général, le Comité a noté avec satisfaction que certaines des restrictions antérieurement apportées à l'exercice des droits syndicaux ont été effectivement levées, comme le montrent la restauration de la liberté de réunion syndicale, la restitution des fonds syndicaux séquestrés, la liberté de former des syndicats et, dans certaines limites, des fédérations ou des confédérations syndicales. Cependant, il ne semble pas que les décrets rendus en 1949 et portant dissolution de la Confédération des travailleurs vénézuéliens et de la plupart des fédérations et unions syndicales qui y étaient affiliées aient été effectivement révoqués. Dans ces conditions, le Comité estime qu'il serait désirable que le gouvernement envisage de prendre les mesures propres à restaurer la pleine liberté pour les employeurs et les travailleurs de former des organisations syndicales de leur choix et d'y adhérer.
- 2) En ce qui concerne en particulier la situation syndicale dans l'industrie pétrolière, le Comité a pris acte avec satisfaction que les syndicats dissous en 1950 ont pu se reconstituer dans les mêmes districts et avec les mêmes effectifs. Le Comité désire toutefois souligner que la dissolution des syndicats de l'industrie pétrolière, opérée en vertu de la loi sur les pleins pouvoirs, constituait une grave atteinte à l'exercice des droits syndicaux et était contraire au principe universellement admis et consacré par la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, d'après lequel les organisations professionnelles ne devraient pas être sujettes à une suspension ou à une dissolution par voie administrative.
- 3) En ce qui concerne le rétablissement des garanties fondamentales, le Comité a de même pris acte avec satisfaction du fait que la plupart des libertés fondamentales suspendues en 1948 ont été rétablies. Il a noté également qu'aux termes du projet de Constitution que la nouvelle Assemblée constituante examine actuellement, la législation du travail devra assurer aux travailleurs le droit, de s'organiser en syndicats ainsi que les principaux droits syndicaux. Le Comité, convaincu qu'un mouvement syndical réellement libre et indépendant ne peut se développer que dans un régime garantissant les droits fondamentaux de l'homme, exprime l'espoir que la nouvelle Assemblée constituante rétablira intégralement ces garanties.
- 4) Le Comité a également noté avec satisfaction que le plus grand nombre des dirigeants ou membres des syndicats détenus ont été remis en liberté, mais suggère au gouvernement d'envisager la possibilité de libérer également les chefs et membres des syndicats qui seraient encore actuellement détenus et qui n'auraient pas bénéficié des garanties d'une procédure judiciaire régulière.
- 5) Le Comité a pris note des assurances données par le gouvernement que les mesures prises contre les syndicats ou les dirigeants ou membres de syndicats ne l'ont pas été en raison de leur activité syndicale, mais uniquement en raison de leurs activités politiques. Pour mettre les syndicats à l'abri des vicissitudes politiques et pour les soustraire à la dépendance des pouvoirs publics, le Comité estime qu'il serait souhaitable que les organisations professionnelles limitent leur activité - sans préjudice de la liberté d'opinion de leurs membres - aux domaines professionnel et syndical et que le gouvernement, d'autre part, s'abstienne d'intervenir dans le fonctionnement des syndicats.
- 1013. En conclusion, le Comité recommande au Conseil d'administration d'exprimer l'espoir que les discussions sur les mesures nécessaires pour assurer une application plus stricte des principes de la liberté syndicale déjà engagées entre le gouvernement du Venezuela et les organisations syndicales nationales et internationales intéressées se poursuivront et d'attirer, d'autre part, l'attention du gouvernement du Venezuela sur l'opportunité:
- i) de prendre les mesures propres à assurer aux employeurs et aux travailleurs la pleine liberté de former, dans les limites de la légalité, des organisations de leur choix et d'y adhérer ;
- ii) de réexaminer les cas des dirigeants syndicaux qui seraient encore actuellement détenus en vertu de la législation d'exception, afin d'assurer qu'aucune personne ne soit privée, sans avoir bénéficié des garanties d'une procédure judiciaire régulière, de sa liberté en raison de son affiliation à un syndicat ou de son activité syndicale licite ;
- iii) de réexaminer les dispositions légales actuellement applicables aux syndicats professionnels afin de les mettre en harmonie avec les principes formulés dans la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et en particulier celles qui concernent la révocation de l'enregistrement des syndicats et la dissolution des syndicats par voie administrative.
- OBSERVATIONS PRESENTEES PAR LE GOUVERNEMENT DU VENEZUELA SUR CERTAINES DES RECOMMANDATIONS FAITES PAR LE COMITE DANS LE CADRE DU CAS No 2
- 24. Dans une communication en date du 9 octobre 1953, le gouvernement du Venezuela a transmis une étude faite par le ministère du Travail et contenant une comparaison entre les recommandations présentées par le Comité dans les alinéas i) et iii) du paragraphe 1013 de son sixième rapport, et les dispositions législatives en vigueur au Venezuela.
- 25. En ce qui concerne la première recommandation relative à l'opportunité de prendre des mesures propres à assurer aux employeurs et aux travailleurs la pleine liberté de former dans les limites de la légalité des organisations de leur choix et d'y adhérer, le gouvernement cite l'article 165 de la loi du travail, qui reconnaît le droit de se grouper en syndicats aux personnes de l'un ou de l'autre sexe qui travaillent dans une même entreprise ou qui exercent soit un même métier ou une même profession, soit des métiers ou professions similaires ou connexes ; le gouvernement cite également l'article 167, qui prévoit que les syndicats peuvent être composés, soit d'employeurs, soit d'employés ou d'ouvriers, soit encore des deux à la fois, ou de personnes exerçant ses professions libérales ou des métiers indépendants ; les articles 168 et 169 interdisent diverses mesures d'intervention dans le fonctionnement des syndicats, ainsi que les actes de discrimination antisyndicale. Le gouvernement déclare que ces dispositions ne correspondent pas seulement aux principes énoncés dans la recommandation, mais qu'elles vont au-delà de celle-ci et que l'application des dispositions de la loi du travail est effectivement assurée, le ministère du Travail étant responsable de sa mise en oeuvre et les inspecteurs du travail étant chargés de veiller à l'application des dispositions de la loi dans leur ressort territorial.
- 26. Au sujet de la recommandation contenue dans le paragraphe 1013 iii) du sixième rapport du Comité, relative à l'opportunité pour le gouvernement de réexaminer sa législation en vue de la mettre en harmonie avec les principes formulés dans la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et dans la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, le gouvernement explique que la situation au Venezuela se présente comme suit : en ce qui concerne la convention no 87, le gouvernement estime que les principes définis dans son article 2 sont mis en oeuvre par les articles 165, 167, 168 et 169 de la loi du travail mentionnée ci-dessus, et que le droit des organisations d'élaborer leurs statuts (article 3 de la convention) est reconnu par les articles 174, 176 et 178 de la loi, le droit des inspecteurs du travail d'examiner les documents constitutifs des syndicats ayant pour seul objet de garantir la légalité de la constitution de l'organisation, ce qui correspond aux dispositions de l'article 8 de la convention et étant donc destiné à protéger et non pas à entraver l'exercice de la liberté syndicale. Le droit de constituer des fédérations et des confédérations (article 5 de la convention) est consacré par l'article 188 de la loi du travail et réglementé par les articles 189 et 190.
- 27. Les syndicats n'ont pas le droit de se fédérer avec des associations politiques ou avec des partis affiliés à ces associations. Aux termes de l'article 220 de la loi, le pouvoir exécutif établirait toutes les règles relatives aux conventions ou aux congrès d'employeurs ou d'employés.
- 28. La définition du terme " organisation " désignant toute organisation ayant pour but de promouvoir et de défendre les intérêts des travailleurs et des employeurs (article 10 de la convention) est analogue à la définition des objets des syndicats contenue dans l'article 66 de la loi, tandis que l'engagement d'assurer le libre exercice du droit syndical (article 11 de la convention) est mis en oeuvre par les dispositions vénézuéliennes qui font une obligation aux autorités du travail de veiller au respect des dispositions légales. Le principe suivant lequel les syndicats ne sont pas sujets à dissolution ou à suspension par voie administrative (article 4 de la convention) est appliqué, de l'avis du gouvernement, du fait que, lorsque la dissolution se produit conformément à la loi du travail, il y a une possibilité de recours devant la Chambre fédérale de la Cour d'appel.
- 29. Enfin, quant à la mesure dans laquelle la convention s'applique aux forces armées et à la police (article 9), le gouvernement se réfère à la disposition de la loi du travail (article 6) et exclut de son champ d'application les membres des forces armées ainsi que les fonctionnaires ou employés des services publics.
- 30. En ce qui concerne la convention no 98, le gouvernement a fait porter ses commentaires sur les principes concernant la protection des travailleurs contre les actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale (article 1), la protection des organisations d'employeurs et de travailleurs contre les actes d'ingérence les unes à l'égard des autres, soit directement, soit par leurs agents ou membres (article 2), la constitution d'organismes chargés d'assurer le respect du droit d'organisation (article 3) et les mesures qui doivent être prises, s'il est nécessaire, pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation de procédures de négociation volontaire. Le gouvernement compare à ces dispositions un certain nombre de dispositions de la loi du travail du Venezuela qui interdisent les actes d'ingérence dans le fonctionnement des syndicats et l'exercice du droit d'organisation (articles 168 et 169) ; l'article 170 prévoit que les buts des syndicats seront de conclure des conventions collectives et de faire valoir les droits découlant de ces conventions en faveur de leurs membres, ainsi que de représenter leurs membres dans les négociations des différends collectifs du travail et spécialement dans les procédures de négociation, de conciliation et d'arbitrage ; l'article 198 accorde une protection contre le licenciement ou autre préjudice aux personnes qui ont l'intention d'organiser un syndicat et aux membres du comité directeur d'un syndicat sauf dans les cas où l'inspecteur du travail estime, sur preuve, que, dans ce cas particulier, le licenciement est raisonnable ; l'article 85 oblige l'employeur à conclure des contrats collectifs si ceux-ci sont demandés par le syndicat ou par les groupes de travailleurs intéressés ; enfin, les articles 47 et 48 garantissent la continuité d'application d'une convention collective si un employeur quitte le syndicat ou le groupe patronal ayant conclu le contrat, ou si le groupe de travailleurs est dissous. Le gouvernement affirme que ces dispositions de la loi du travail contiennent et dépassent celles de la convention no 98.
- 31. A sa septième session (novembre 1953), le Comité a examiné les observations présentées par le gouvernement vénézuélien ainsi que la question de savoir si la réponse du gouvernement appelle une quelconque modification des conclusions formulées dans son sixième rapport (paragraphes 1012 et 1013). Alors que les observations présentées par le gouvernement du Venezuela consistaient essentiellement en une analyse comparative des dispositions des conventions internationales relatives à la liberté syndicale et au système législatif vénézuélien, les conclusions du Comité formulées dans son sixième rapport se rapportaient exclusivement à une situation de fait sur laquelle aucun élément nouveau d'information n'avait été présenté par le gouvernement vénézuélien.
- 32. Etant donné ces considérations, le Comité, tout en remerciant le gouvernement vénézuélien des observations qu'il a fournies, estime qu'elles ne justifient pas une modification quelconque des conclusions formulées au paragraphe 1013 de son sixième rapport.
- AUTRES PLAINTES PRESENTEES CONTRE LE GOUVERNEMENT DU VENEZUELA PAR LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES, L'ORGANISATION REGIONALE INTERAMERICAINE DES TRAVAILLEURS, LA FEDERATION SYNDICALE MONDIALE, LA FEDERATION DES TRAVAILLEURS DU PETROLE DU PEROU, L'UNION INTERNATIONALE DES TRAVAILLEURS DES PORTS ET DES ENTREPOTS (SAN-FRANCISCO), L'UNION INTERNATIONALE DES SYNDICATS DES TRAVAILLEURS DES INDUSTRIES CHIMIQUES, DU PETROLE ET SIMILAIRES ET LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS CHRETIENS
- 33. Après l'adoption de son sixième rapport, le Comité a reçu un certain nombre de plaintes alléguant que des atteintes seraient portées à l'exercice des droits syndicaux au Venezuela et sur lesquelles il n'a pas eu l'occasion de faire rapport au Conseil. La première, en date du 12 décembre 1952, adressée par la Confédération internationale des syndicats libres (C.I.S.L.) au Secrétaire général des Nations Unies et transmise par celui-ci à l'O.I.T. ; la seconde, en date du 28 avril 1953, qui émane de l'Organisation régionale interaméricaine des travailleurs (O.R.I.T) et a été directement soumise à l'O.I.T. ; la troisième, en date du 20 mars 1954, adressée par la Fédération syndicale mondiale (F.S.M.) au Secrétaire général des Nations Unies et renvoyée par celui-ci à l'O.I.T. ; la quatrième, en date du 2 octobre 1954, soumise directement à l'O.I.T par la Fédération des travailleurs du pétrole du Pérou ; la cinquième, en date du 15 novembre 1954, adressée par l'Union internationale des travailleurs des ports et des entrepôts (San-Francisco) au Secrétaire général des Nations Unies et renvoyée, par celui-ci à l'O.I.T. ; la sixième, en date du 12 janvier 1955, soumise directement à l'O.I.T par l'Union internationale des syndicats des travailleurs des industries chimiques, du pétrole et similaires ; la septième enfin, en date du 2 juin 1955, soumise directement à l'O.I.T par la Confédération internationale des syndicats chrétiens.
- Plainte de la Confédération internationale des syndicats libres (communication du 12 décembre 1952)
- Analyse de la plainte
- 34. Dans sa plainte, la C.I.S.L, après avoir fait allusion aux élections générales de 1952, affirme que le peuple du Venezuela " a courageusement affirmé son existence en dépit de la suppression des droits des travailleurs CL de la liberté syndicale... ". Le plaignant demande une enquête approfondie sur la violation des droits syndicaux au Venezuela.
- 35. Etant donné que la plainte de la C.I.S.L contenait des allégations de même nature que celles examinées dans son sixième rapport, le Comité a décidé, à sa réunion du 26 juin 1953, de communiquer cette plainte au gouvernement vénézuélien, à titre d'information, à la lumière des recommandations approuvées par le Conseil d'administration.
- Analyse de la réponse du gouvernement (communication du 9 octobre 1953)
- 36. Dans cette communication, le gouvernement confirmait les observations qu'il avait présentées à propos du sixième rapport du Comité et déclarait, en ce qui concerne cette plainte et la plainte présentée le 28 avril 1953 par l'O.R.I.T, que, dans aucun cas, le gouvernement n'a porté atteinte aux activités des organisations syndicales légalement constituées ; il affirme qu'il a toujours défendu les droits des syndicats dans la mesure où ceux-ci ont agi dans les limites des buts qui leur sont assignés par la loi.
- Plainte de l'Organisation régionale interaméricaine des travailleurs, de la Fédération syndicale mondiale et de l'Union internationale des travailleurs des ports et des entrepôts (communications datées respectivement du 28 avril 1953, du 20 mars 1954 et du 15 novembre 1954)
- Analyse des plaintes
- 37. La plainte de l'Organisation régionale interaméricaine des travailleurs (O.R.I.T) se basant sur une lettre de protestation émanant de M. Augusto Malave Villalba, secrétaire général de la Confédération des travailleurs du Venezuela, affiliée à l'O.R.I.T, alléguait que, malgré les efforts que l'O.I.T a faits, à la suite de plaintes réitérées, en vue d'obtenir du gouvernement vénézuélien la pleine reconnaissance des droits syndicaux, ce gouvernement poursuivait sa politique de répression syndicale. Des centaines de dirigeants syndicalistes se trouveraient toujours en prison. Il en serait ainsi, notamment, de M. Pérez Salinas, président de la Confédération des travailleurs du Venezuela. M. Ramón Quijada, secrétaire général de cette confédération, chargé des questions agricoles et remplaçant de M. Pérez Salinas, aurait été arrêté récemment.
- 38. La plainte de la F.S.M alléguait que M. Federico Rondón, membre du Comité central de la Confédération des travailleurs de l'Amérique latine, aurait été arrêté le 15 décembre 1953 à son retour du troisième Congrès syndical mondial de la F.S.M et soumis à des tortures brutales. Sa femme aurait de même été arbitrairement emprisonnée. La plainte soulignait qu'aucune accusation n'avait été formulée contre M. Federico Rondón et que celui-ci avait quitté son pays en octobre 1953 avec un passeport régulièrement délivré par le gouvernement du Venezuela. La plainte protestait également contre l'arrestation, le 15 février 1954, de M. Rodolfo Quintero, président de la Fédération des travailleurs du District fédéral et de l'Etat de Miranda, bien qu'aucune accusation valable n'ait été formulée et ne puisse être formulée contre lui.
- 39. La plainte de la F.S.M protestait d'autre part contre un certain nombre de mesures prises à l'encontre du syndicat des travailleurs du pétrole des districts de Ribas et de Zaraza. D'après le plaignant, une convention collective du travail analogue à celle conclue entre les principales compagnies pétrolières et le "Mouvement syndical indépendant", d'obédience gouvernementale, aurait été signée le 24 septembre 1953 entre l'Atlantic Refining Co. et le Comité exécutif du syndicat mentionné ci-dessus, en présence des délégués régionaux du ministère du Travail. La signature de cette convention fut ratifiée devant les autorités civiles de Caracas conformément aux dispositions du Code du travail. Conformément aux décisions prises par une assemblée du syndicat tenue le 21 septembre 1953, les membres du comité exécutif déposèrent à cette réunion une protestation écrite contre les conditions dans lesquelles cette convention leur était imposée et ils rendirent publique cette protestation le 1er octobre. Ils auraient été emprisonnés le même jour, et les locaux du syndicat auraient été l'objet d'une perquisition de police. Six jours après, certains d'entre eux auraient été libérés, les autorités civiles leur délivrant un document certifiant qu'ils avaient été détenus préventivement et n'étaient coupables d'aucun crime. Les autres membres du comité exécutif - MM. Claudio Chacón, Fernando Bolivar, Ramón Lozada et Carlos Laza - auraient été maintenus en prison pendant 27 jours, puis licenciés de leur entreprise avec l'accord des autorités de l'inspection du travail, relâchés et expulsés. Le secrétaire du syndicat, M. Rafael Castillo, l'un des dirigeants qui avaient été libérés après six jours d'emprisonnement, aurait été obligé de faire l'inventaire des biens du syndicat et de le quitter sous la menace de poursuites judiciaires. Le 23 octobre, les fonds et les documents du syndicat auraient été saisis par la police ; le 29, l'inspecteur du travail aurait remis au délégué local du travail un document tendant à prouver que les travailleurs, au cours d'une réunion tenue le 23 octobre, avaient décidé de liquider le syndicat et d'en remettre tous les fonds au syndicat indépendant. En fait, déclarait le plaignant, cette assemblée n'avait pas eu lieu, mais les autorités essayaient de légaliser la liquidation arbitraire du syndicat par l'obtention forcée de la signature des travailleurs. Le plaignant estimait que ces faits établissaient clairement l'ingérence flagrante des autorités administratives et policières dans le fonctionnement d'une organisation syndicale et leurs tentatives en vue de détruire cette organisation. Par une lettre en date du 22 juin 1954, la F.S.M a été informée que, conformément à la procédure en vigueur, elle pourrait présenter des informations complémentaires à l'appui de sa plainte dans le délai d'un mois. Par une lettre en date du 24 juillet 1954, la F.S.M a fait connaître qu'à son avis, les faits cités dans sa première plainte établissaient d'une façon suffisamment probante les atteintes portées à l'exercice des droits syndicaux au Venezuela.
- 40. La plainte de l'Union internationale des travailleurs des ports et des entrepôts (San-Francisco) protestait contre l'arrestation de plusieurs dirigeants syndicalistes vénézuéliens en vue de les empêcher d'accomplir leurs fonctions syndicales et en particulier de MM. Jesús Faria, Federico Rondón, Luis Emiro Arrieta et Alicedes Hurtado. Informée, conformément à la procédure en vigueur, de son droit de présenter des informations complémentaires dans le délai d'un mois, l'organisation plaignante a fait connaître par une lettre en date du 7 janvier 1955 qu'à son avis, il n'était pas nécessaire de fournir des preuves à l'appui des faits allégués dans la plainte, étant donné que le gouvernement n'a pas réfuté les allégations le concernant, relatives à l'arrestation de militants syndicalistes et que les personnes mentionnées dans la plainte originelle se trouvent encore en prison.
- Analyse des réponses du gouvernement (communications des 9 octobre 1953, 10 février 1954 et 28 octobre 1954)
- Communication du 9 octobre 1953
- 41. Dans cette communication, qui porte également sur la plainte du 12 décembre 1952 de la C.I.S.L qui a déjà été analysée, le gouvernement a présenté les observations suivantes sur la plainte de l'O.R.I.T.
- 42. En aucun cas les travailleurs n'ont été l'objet d'actes de répression en raison de leur affiliation syndicale. Les travailleurs appartenant à des organisations syndicales ayant fait dans le passé l'objet de sanctions conformément à la législation du travail n'ont pas été déclarés interdits et, de nombreux travailleurs - parfois même tous les travailleurs ayant appartenu à des syndicats dissous - se sont depuis affiliés à d'autres syndicats ou en ont créé de nouveaux. Les mesures que le gouvernement a prises ou pourra prendre à l'avenir en vue de sauvegarder la paix sociale et de maintenir l'ordre public ont été sanctionnées par l'Assemblée nationale constituante, qui a adopté à cet effet la troisième des dispositions transitoires de la Constitution nationale du 11 avril 1953. Etant du domaine exclusif de la souveraineté nationale, ces mesures fondées sur la Constitution ne sauraient être discutées par aucun organisme international.
- Première demande d'informations complémentaires - 43. A sa septième session (novembre 1953), le Comité, tout en prenant acte avec satisfaction des assurances données par le gouvernement déclarant qu'il n'avait pas porté atteinte aux activités des organisations syndicales légalement constituées et que les travailleurs n'avaient pas été l'objet d'actes de répression en raison de leur affiliation syndicale, a constaté que le gouvernement ne donnait aucune information au sujet de l'allégation relative à l'arrestation de certains dirigeants syndicalistes. Il a, par conséquent, décidé, avant d'aborder l'examen de l'ensemble du cas, de charger le Directeur général de demander au gouvernement vénézuélien de bien vouloir donner des précisions sur l'emprisonnement de certains dirigeants syndicalistes, mentionné dans la plainte de l'O.R.I.T du 28 avril 1953. Cette demande a été transmise au gouvernement vénézuélien par une lettre en date du 4 décembre 1953.
- Communication du 10 février 1954
- 44. Dans une communication en date du 10 février 1954, le gouvernement vénézuélien, se référant à sa première réponse, a réaffirmé en premier lieu que non seulement il ne fait nullement obstacle aux activités des organisations syndicales légalement constituées, mais que, bien au contraire, c'est l'un des principes de sa politique sociale de protéger les droits de ces organisations dans la mesure où celles-ci cantonnent leur activité dans le cadre des fonctions qui leur sont assignées par la loi.
- 45. En ce qui concerne l'arrestation de MM. Pedro B. Pérez Salinas et Ramón Quijada, le gouvernement soutient que ceux-ci n'étaient plus des dirigeants syndicalistes. En effet, la Confédération des travailleurs du Venezuela et ses organisations affiliées ont été dissoutes par le décret exécutif no 56, en date du 25 février 1949, mesure ultérieurement sanctionnée par l'Assemblée constituante. Par conséquent, une plainte en violation des droits syndicaux ne pouvait pas, d'après le gouvernement, être fondée sur la détention de personnes n'ayant plus actuellement le caractère de dirigeants syndicalistes. De même, M. Augusto Malave Villalba n'a plus le droit de se présenter comme secrétaire général d'une confédération qui a cessé d'exister depuis plus de quatre ans.
- 46. A propos des raisons pour lesquelles MM. Pérez Salinas et Ramón Quijada ont été arrêtés, le gouvernement déclarait que ces derniers s'étaient livrés à des activités illicites, punissables par la loi, sans aucun rapport avec les activités syndicales et incompatibles avec celles-ci. De l'avis du gouvernement, ces actes étaient d'autant plus graves qu'ils tendaient à se dissimuler sous le couvert d'activités syndicales afin de bénéficier ainsi de la protection que la loi assure à ces activités.
- 47. Le gouvernement concluait en soulignant qu'il lui appartenait à lui seul, selon ses pouvoirs constitutionnels, de décider de la ligne de conduite à suivre à l'égard des personnes en question, et il réaffirmait à nouveau que "les mesures prises en matière de tranquillité publique étaient du domaine exclusif de la souveraineté nationale et ne pouvaient, par conséquent, être discutées par aucun organisme international ".
- Deuxième demande d'informations complémentaires - 48. A sa huitième session (mars 1954) et à sa neuvième session (mai 1954), le Comité a décidé d'ajourner l'examen de ces plaintes dans l'espoir d'obtenir certaines informations complémentaires du gouvernement, vénézuélien sur la plainte de l'O.R.I.T et ses observations sur la plainte de la F.S.M en date du 20 mars 1954 et qui avait été communiquée au gouvernement par une lettre du 22 juillet 1954.
- Communication du 28 octobre 1954
- 49. Dans une communication en date du 28 octobre 1954, le gouvernement a présenté, d'une part, ses observations en ce qui concerne la plainte de la F.S.M et, d'autre part, les informations complémentaires sollicitées par le Comité au sujet de la plainte de l'O.R.I.T.
- 50. Au sujet des allégations présentées par la F.S.M relativement à l'arrestation de M. Federico Rondón et de M. Rodolfo Quintero, le gouvernement signalait que, bien que ces deux personnes fussent des dirigeants communistes connus et bien que le parti communiste ait été dissous par le décret no 480 en date du 13 mai 1950, elles avaient continué, tant qu'elles avaient maintenu leur qualité de syndicalistes, à jouir des droits que la loi et les autorités du travail reconnaissent à tous les travailleurs du Venezuela. Les faits qui ont provoqué les mesures adoptées à leur égard n'ont aucune relation avec leur qualité de syndicalistes et le gouvernement rappelait ses déclarations antérieures suivant lesquelles les mesures qu'il prend pour protéger la tranquillité publique et la sécurité de l'Etat dans l'exercice de ses pouvoirs constitutionnels ne peuvent être discutées par un organisme international quelconque, étant donné qu'elles sont du domaine de la souveraineté nationale.
- 51. En ce qui concerne l'allégation de la F.S.M relative aux mesures prises à l'encontre du syndicat des travailleurs du pétrole des districts de Ribas et de Zaraza, le gouvernement déclarait que la situation de ce syndicat a fait l'objet d'un examen attentif de la part des fonctionnaires compétents du ministère du Travail et que l'enregistrement de ce syndicat a été annulé en raison du fait qu'il ne remplissait pas les conditions prévues par l'article 191 de la loi du travail, qui stipule que les syndicats de travailleurs ne peuvent subsister sans avoir le nombre de membres fixé à l'article 171 de la même loi. L'annulation de l'enregistrement du syndicat en question et le transfert des fonds qui lui appartenaient ont été réglés conformément aux dispositions de la loi du travail et consignés dans les procès-verbaux pertinents, ainsi que cela ressort de la communication adressée le 25 octobre 1953 à l'inspecteur du travail de l'Etat de Guarico par les membres de la commission de dissolution, MM. Gabriel Ramirez, trésorier du syndicat, Rafael Castillo, secrétaire, et Luis Padra Alvarez. L'assemblée qui a décidé la dissolution du syndicat et la désignation de la commission de liquidation s'est tenue à Tucupido, capitale du district de Ribas, le 23 octobre 1953, comme en fait foi le procès-verbal, et, le 24 octobre 1953, la commission de liquidation a décidé de transférer les fonds existants au Syndicat des employés et ouvriers de l'industrie pétrolière de l'Etat de Guarico, conformément à la décision de l'assemblée ci-dessus mentionnée et en raison du fait que la majorité des ouvriers appartenant au syndicat dissous avait rejoint ce syndicat. On a seulement déduit de ces fonds les dettes contractées par le syndicat et notamment le montant d'une subvention accordée par le comité exécutif pour contribuer aux frais du voyage à Vienne, en octobre 1953, de M. Luis A. Sánchez, secrétaire général du syndicat, lorsqu'il a assisté au troisième Congrès de la F.S.M. Le gouvernement faisait remarquer que le syndicat des travailleurs pétroliers des districts de Ribas et de Zaraza ne pouvait contribuer à exister en vertu de la loi et qu'il avait dû procéder à sa dissolution réalisée normalement au cours d'une assemblée plénière, et que les ouvriers qui constituaient le syndicat dissous continuaient à faire partie d'autres organisations syndicales. Le gouvernement ajoutait que les pièces et documents dont il est fait mention sont à la disposition du Comité.
- 52. En ce qui concerne la demande d'informations complémentaires relatives à la plainte de l'O.R.I.T, le gouvernement déclarait qu'il avait déjà fourni ses observations et qu'il n'avait pas d'autres informations complémentaires à présenter.
- Plaintes de la Fédération des travailleurs du pétrole du Pérou, et de l'Union internationale des travailleurs des industries chimiques, du pétrole et industries connexes (communications datées respectivement des 5 novembre 1954 et 12 janvier 1955)
- Analyse des plaintes
- 53. Dans la plainte de la Fédération des travailleurs du pétrole du Pérou également basée sur une communication de la Confédération des travailleurs vénézuéliens en exil, il était demandé à l'O.I.T d'entreprendre avant toute enquête qui pourrait sembler utile des démarches auprès du gouvernement du Venezuela en vue d'obtenir le rétablissement complet de la liberté syndicale de manière que la cinquième session de la Commission du pétrole qui devait se réunir à Caracas au milieu de 1955, puisse se tenir dans une atmosphère de liberté.
- 54. La plainte de l'Union internationale des syndicats des travailleurs des industries chimiques, du pétrole et industries connexes, également présentée en raison de la réunion imminente de la cinquième session de la Commission du pétrole à Caracas, contient des allégations de caractère général relatives à des violations des droits syndicaux au Venezuela ; elle demande que des mesures soient prises en vue d'obtenir la libération des syndicalistes emprisonnés, de faire respecter la liberté syndicale, d'assurer la suppression des violences politiques et des ingérences gouvernementales dans le fonctionnement des syndicats.
- 55. La plainte de la Fédération des travailleurs du pétrole du Pérou a été communiquée au gouvernement vénézuélien le 2 décembre 1954. L'organisation plaignante a été informée le 5 novembre 1954 de son droit de présenter des informations complémentaires à l'appui de sa plainte, droit dont elle n'a pas fait usage. En ce qui concerne la plainte du 12 janvier 1955 émanant de l'Union internationale des travailleurs des industries chimiques, du pétrole et industries connexes, le Comité, à sa douzième session (mai 1955), a décidé de ne pas communiquer ladite plainte au gouvernement, ayant estimé que cette plainte ne contenait aucune allégation précise nouvelle par rapport aux autres plaintes antérieurement transmises au gouvernement.
- 56. A ce jour, le gouvernement du Venezuela n'a présenté aucune observation sur la plainte de la Fédération des travailleurs du pétrole du Pérou.
- Plainte de la Confédération internationale des syndicats chrétiens (communications des 2 juin et 29 septembre 1955)
- Analyse de la plainte
- 57. Dans sa communication en date du 2 juin 1955, la Confédération internationale des syndicats chrétiens indique que son Comité exécutif a décidé de considérer la communication du 25 avril 1955 de la Confédération latino-américaine des syndicats chrétiens comme une plainte en violation des droits syndicaux présentée en son nom à l'O.I.T. Dans ladite communication, la Confédération latino-américaine des syndicats chrétiens allègue que les mesures prises par le gouvernement constitueraient " une persécution violente et inadmissible du syndicalisme libre... en contradiction formelle avec les garanties de liberté acceptées par le Venezuela ". Le secrétaire général de la COFETROV (Comité pour la fédération des travailleurs organisés du Venezuela), M. Elio Aponte, aurait été arrêté dès son retour au Venezuela après le premier Congrès latino-américain du syndicalisme chrétien, à Santiago, en 1955. Le 9 février 1955, les dirigeants du Syndicat des travailleurs organisés du pétrole (S.T.O.P.) de Cabimas (Etat de Zulia) auraient été convoqués par le délégué au travail local. Ce fonctionnaire aurait exigé les livres de comptabilité du syndicat et aurait invité ses dirigeants à s'affilier aux syndicats du Mouvement indépendant, membre de la Confédération nationale des travailleurs, laquelle est inféodée au gouvernement. Ils refusèrent cette invitation, car elle aurait signifié, si elle avait été acceptée, la perte de l'indépendance du syndicat ; le même jour, les locaux du syndicat furent envahis par une foule conduite par les dirigeants du Mouvement indépendant. Le commissaire au travail, qui assistait à la scène, aurait déclaré que la fusion des deux organisations devrait avoir lieu immédiatement. M. Cesar Vergel Lozano, représentant du COFETROV, aurait refusé d'obtempérer ; les locaux du syndicat auraient alors été occupés par la force, tous les biens du syndicat - y compris une forte somme en espèces - auraient été confisqués.
- 58. Le jour suivant, des représentants du Mouvement syndical indépendant ont pris des mesures similaires contre le Syndicat des travailleurs organises du pétrole (S.T.O.P) de Bachaquero (Etat de Zulia), également un syndicat chrétien. Les biens de ce syndicat auraient été transférés au commissariat de police. Le Syndicat des travailleurs organisés du pétrole (S.T.O.P) du district de Simón Rodriguez dans l'Etat de Anzoategui, également affilié au COFETROV, aurait été, lui aussi, l'objet de mesures similaires ; en outre, M. Francisco Fernández, représentant du COFETROV et membre de son comité exécutif aurait été arrêté. Les syndicats des travailleurs organisés du pétrole des districts de Sotillo auraient été traités de la même manière.
- 59. Au nom du Syndicat des travailleurs indépendants du pétrole, affilié au Mouvement syndical indépendant, des menaces ont été faites publiquement le 15 février 1955 contre les branches de Carirubana, de Los Taques et de Punto Cardón (district et Etat de Falcón) du S.T.O.P. Ces menaces ont été mises à exécution, plusieurs chefs de ces syndicats ayant été attaqués.
- 60. Le COFETROV a porté plainte, sans résultat, contre ces attaques auprès du ministre du Travail, car des fonctionnaires du ministère auraient pris part à ces attaques.
- 61. La Confédération internationale des syndicats chrétiens a été informée de son droit de présenter des informations complémentaires à l'appui de sa plainte, droit dont elle a fait usage par une communication en date du 29 septembre 1955. Par la même communication, elle a transmis au Bureau des photocopies de documents émanant du Cabinet du ministre du Travail et du Comité exécutif national du Mouvement syndical indépendant. Le premier de ces documents déclare que M. Temilio A. Chirinos "est chargé de mission pour des questions intéressant les syndicats ". Le second document déclare que la même personne est autorisée à représenter le comité exécutif du Mouvement syndical indépendant dans toutes les transactions qu'il pourrait être appelé à faire avec les autorités civiles et militaires de l'Etat. Dans la plainte, il est spécifiquement déclaré que certains éléments du Mouvement syndical indépendant ont, sur les ordres du ministère, exercé des mesures de répression contre les syndicats chrétiens. De l'avis du plaignant, les documents qu'il a présentés démontrent que le ministère du Travail a chargé de missions concernant les affaires syndicales des personnes en même temps fonctionnaires du Mouvement syndical indépendant. Le plaignant considère que c'est là une preuve de l'intervention du gouvernement dans les affaires syndicales et de la collaboration qui existe entre le gouvernement et le Mouvement syndical indépendant.
- 62. Les communications de la Confédération internationale des syndicats chrétiens ont été transmises au gouvernement par une lettre en date du 24 novembre 1955. A ce jour, le gouvernement n'a pas transmis d'observations à leur sujet.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- Question préjudicielle relative au retrait du Venezuela de l'O.I.T.
- 63 Etant donné le préavis de retrait de l'Organisation internationale du Travail donné le 2 mai 1955 par le gouvernement vénézuélien, le Comité a examiné, à titre de question préjudicielle, les effets possibles d'un préavis de retrait de l'O.I.T d'un Etat Membre sur l'applicabilité de la procédure d'examen des plaintes. A sa douzième session (Genève, mai 1955), le Comité a estimé qu'aucune question ne se posait quant à sa compétence pour poursuivre l'examen de plaintes présentées avant la date à laquelle l'Etat Membre a donné un préavis de retrait pendant les deux ans qui précèdent la date où le retrait prend effet conformément à l'article 1, paragraphe 5, de la Constitution de l'O.I.T. Ce n'est que dans le cas où il n'aurait pas terminé l'examen desdites plaintes à l'expiration du délai prévu qu'il deviendrait nécessaire d'examiner les conséquences de cette échéance sur la procédure alors en cours. Le Comité a donc poursuivi son examen du cas conformément à la procédure ordinaire.
- 64 Les allégations contenues dans les plaintes précédemment analysées sont de deux sortes:
- a) une allégation contenue dans les plaintes présentées par la F.S.M et par la C.I.S.C relatives à l'annulation de l'enregistrement des syndicats et aux obstacles mis par le gouvernement au libre fonctionnement des organisations;
- b) une série d'allégations, contenues dans les plaintes de l'O.R.I.T, de la F.S.M, de l'Union internationale des travailleurs des docks et entrepôts et de la C.I.S.C, se rapportant à l'arrestation de dirigeants syndicaux.
- 65 Toutes ces plaintes, comme celles présentées par la C.I.S.L, par la Fédération péruvienne des ouvriers du pétrole, par l'Union internationale des travailleurs des docks et entrepôts et par l'Union internationale des travailleurs des industries chimiques, du pétrole et industries connexes, se rapportent égale ment, en des termes généraux, à la situation syndicale existant au Venezuela.
- Allégation relative à l'annulation de l'enregistrement du Syndical des travailleurs du pétrole des districts de Ribas et Zaraza
- 66 Dans sa lettre en date du 28 octobre 1954, le gouvernement déclarait que la raison pour laquelle il avait décidé d'annuler l'enregistrement du syndicat en question résidait dans le fait que ledit syndicat ne se conformait pas aux dispositions des articles 171 et 191 de la loi du travail.
- Ces deux articles ont la teneur suivante:
- Article 171. - Les syndicats d'employeurs ne pourront se constituer avec moins de trois membres et les syndicats de travailleurs avec moins de vingt membres, s'il s'agit de syndicats d'entreprise, et avec moins de quarante membres s'il s'agit d'un syndicat professionnel ou d'un syndicat de personnes exerçant des professions ou métiers indépendants.
- Article 191. - Nul syndicat ne pourra subsister sans avoir le nombre de membres fixé à l'article 171 de la présente loi pour sa constitution.
- 67 Dans divers cas antérieurs, le Comité a reconnu qu'il était de pratique habituelle pour les Etats de prévoir dans leur législation des formalités qui leur semblent propres à assurer le fonctionnement normal des organisations professionnelles. En particulier, il a estimé que, lorsque les conditions mises à l'enregistrement d'un syndicat étaient de pure forme, elles ne sauraient être interprétées comme une restriction apportée à la liberté syndicale.
- 68 En l'espèce, le Comité estime que la disposition de la loi vénézuélienne selon laquelle on doit procéder à la dissolution d'un syndicat si ses effectifs tombent au-dessous de 20 ou 40 membres, selon qu'il s'agit, respectivement, d'un syndicat d'entreprise ou d'un syndicat professionnel, ne constitue pas en elle-, même une atteinte à l'exercice des droits syndicaux, pourvu qu'une telle dissolution soit entourée de toutes les garanties nécessaires afin de prévenir toute possibilité d'abus dans l'interprétation de cette disposition : à savoir, le droit de faire appel devant la Cour fédérale et de cassation (article 193 de la loi du travail).
- 69 A cet égard, le plaignant (F.S.M.) alléguait que l'annulation de l'enregistrement du syndicat en question aurait été motivée par le fait que les membres du Comité exécutif auraient rendue publique une protestation déposée lors de la signature d'une convention collective conclue entre ce syndicat et l'Atlantic Refining Co. au sujet des conditions dans lesquelles cette convention leur était imposée. De plus, la dissolution du syndicat aurait été accompagnée d'un certain nombre de mesures établissant l'ingérence flagrante des autorités administratives et policières dans le fonctionnement d'une organisation syndicale et leur tentative de détruire cette organisation : emprisonnement plus ou moins prolongé de plusieurs des membres du Comité exécutif, suivi de leur licenciement et de leur expulsion, perquisition de police dans les locaux du syndicat, saisie des fonds et des documents, obtention forcée de la signature des travailleurs pour légaliser la liquidation arbitraire du syndicat, etc.
- 70 Sur ce point, le gouvernement a répondu que la dissolution du syndicat - qui ne pouvait continuer à subsister en vertu de l'article 191 de la loi du travail - s'était effectuée dans des conditions normales et conformément aux dispositions de la loi du travail, comme en font foi les procès-verbaux établis : tenue d'une assemblée générale du syndicat le 23 octobre 1953 à Tucupido, qui a décidé la dissolution du syndicat, désigné la commission de liquidation et décidé le transfert des fonds au syndicat des employés et ouvriers de l'industrie du pétrole de l'Etat du Guarico comme étant le syndicat auquel se serait affiliée la majorité des membres du syndicat dissous. Le transfert de ces fonds aurait été effectué d'une manière normale, déduction faite du montant d'une subvention accordée par le Comité exécutif pour contribuer aux frais du voyage à Vienne, en octobre 1953, de M. Luis A. Sánchez, secrétaire général du Syndicat, lorsqu'il a assisté au troisième Congrès de la F.S.M. Le gouvernement ne faisait pas allusion à l'arrestation de certains membres du Comité exécutif.
- 71 D'autre part, dans sa communication du 9 octobre 1953, le gouvernement, en présentant certaines observations sur la plainte de la C.I.S.L, qui lui avait été transmise à titre d'information, déclarait que, dans chacun des cas où il a été nécessaire d'appliquer à des syndicats déterminés les sanctions prévues par la loi du travail, comme celles qui figurent à l'article 191, cette mesure n'a pas eu pour effet d'empêcher les membres des organisations dissoutes de poursuivre leurs activités syndicales, de créer de nouvelles organisations syndicales ou de s'affilier à celles existant déjà.
- 72 En ce qui concerne cette allégation, le Comité estime qu'il ne lui est pas possible de se prononcer sur les circonstances de fait qui ont pu entourer la dissolution du syndicat en question, étant donné que les allégations du plaignant quant au motif de la dissolution diffèrent entièrement de la version donnée par le gouvernement. Dans ces conditions, et sous réserve que, comme le gouvernement l'a affirmé à plusieurs reprises, les membres des organisations dissoutes puissent constituer de nouvelles organisations ou s'affilier à celles existant déjà - comme cela semble avoir été le cas --, le Comité, sans préjuger en quoi que ce soit les circonstances de fait qui ont pu entourer la dissolution ni les allégations relatives à l'arrestation de certains membres du Comité exécutif - allégations qui sont examinées dans la suite du présent document -, considère qu'il n'est pas en mesure, en se limitant exclusivement à l'aspect juridique de la dissolution, d'exprimer un avis sur l'allégation relative à l'annulation de l'enregistrement du Syndicat des travailleurs du pétrole des districts de Ribas et de Zaraza, opérée en application d'une disposition législative qui ne constitue pas en soi une restriction a l'exercice des droits syndicaux.
- Allégations relatives à l'arrestation de certains dirigeants syndicalistes
- 73 Les personnes suivantes sont mentionnées dans les plaintes de l'O.R.I.T et de la F.S.M comme ayant été l'objet de mesures d'arrestation en raison de leurs activités syndicales : MM. Pedro Pérez Salinas, ancien président de la Confédération des travailleurs du Venezuela, Ramón Quijada, secrétaire de la même organisation, Federico Rondón, membre du Comité central de la Confédération des travailleurs de l'Amérique latine, Rodolfo Quintero, président de la Fédération des travailleurs du District fédéral et du district de Miranda, et plusieurs membres du Comité exécutif du Syndicat des travailleurs du pétrole des districts de Ribas et de Zaraza, à savoir MM. Claudio Chacón, Fernando Bolivar, Ramón Losada, Carlos Lasa, Rafael Castillo, Raúl Rafael Soto et Gabriel Ramirez. Plusieurs de ces personnes auraient été par la suite libérées, mais elles auraient été expulsées.
- 74 Dans sa lettre en date du 10 février 1954, le gouvernement avait dénié à MM. Pérez Salinas et Quijada la qualité de dirigeants syndicalistes ainsi que le droit de M. Augusto Malavé Villalba, secrétaire général de la Confédération des travailleurs du Venezuela en exil, de présenter une plainte en raison de la dissolution de la Confédération des travailleurs du Venezuela et des fédérations et syndicats y affiliés, organisations au sein desquelles ces personnes avaient occupé des postes de direction ; ne les possédant plus, ils auraient perdu la qualité de dirigeants syndicalistes.
- Première question préalable: Recevabilité de la plainte de la Confédération des travailleurs du Venezuela transmise par l'O.R.I.T.
- 75 A sa neuvième session (mai 1954), le Comité a eu l'occasion d'examiner les deux questions préalables soulevées par le gouvernement du Venezuela dans sa communication du 10 février 1954. La première concerne la recevabilité d'une plainte de la Confédération des travailleurs du Venezuela transmise à l'O.I.T par l'O.R.I.T.
- 76 Le Comité a noté que, dans son premier rapport (février 1952), il avait eu l'occasion d'examiner la question de savoir s'il pouvait considérer comme recevable une plainte émanant d'une organisation de travailleurs à propos de laquelle le gouvernement intéressé soutient que les personnes prétendant agir au nom d'une telle organisation n'ont pas qualité pour le faire, pour la raison que l'organisation en question a été dissoute. Le Comité avait alors été d'avis qu'il ne serait pas conforme aux fins pour lesquelles a été instituée la procédure d'examen des plaintes relatives à des atteintes qui auraient été portées à l'exercice des droits syndicaux d'admettre que la dissolution d'une organisation en vertu d'une mesure gouvernementale mette fin au droit de cette organisation d'invoquer ladite procédure. En s'inspirant des conclusions approuvées à l'unanimité par le Conseil d'administration en 1937, au sujet d'une réclamation formulée par le parti travailliste de l'île Maurice contre le gouvernement du Royaume-Uni, conformément à l'article 23 de la Constitution de l'O.I.T. (article 24 actuel), le Comité avait estimé qu'il ne considérait aucune plainte comme irrecevable pour le simple motif que le gouvernement mis en cause a dissous l'organisation au nom de laquelle la plainte a été présentée. Ce principe figure dans les paragraphes 27 et 28 du premier rapport du Comité et il a depuis été appliqué dans le cas no 55 (Grèce), à propos duquel le Comité a souligné qu'il possédait entière liberté pour décider si une organisation peut être considérée comme organisation professionnelle au sens de la Constitution de l'O.I.T.
- 77 Au surplus, dans le cas présent, l'Organisation régionale interaméricaine des travailleurs - dont la capacité de présenter la plainte n'a pas été mise en cause - ayant fait sienne la lettre de protestation que lui avait adressée M. Augusto Malave Villalba, secrétaire général de la Confédération des travailleurs du Venezuela, avait donc repris la plainte à son compte, et c'est elle qui l'avait directement présentée. Le Comité a noté que dans le cas no 3 (République dominicaine), il avait déclaré recevable une plainte présentée par quatre personnalités dominicaines en exil après avoir constaté que, quelle que fût la validité des objections soulevées contre la qualité de ces personnalités, cette plainte avait été non seulement transmise, mais formellement endossée par une organisation syndicale internationale, en l'espèce la Confédération interaméricaine des travailleurs, ce qui rendait inutile pour lui d'examiner la qualité des autres auteurs de la plainte en tant que plaignants. D'autre part, dans le cas no 78 (Suisse), au sujet duquel le gouvernement avait déclaré que le fait que la plainte avait été présentée par une organisation qui ne comprenait aucune section en Suisse aurait pu constituer un motif suffisant pour qu'il ne réponde pas à cette plainte, le Comité avait estimé que, si ce fait devait retenir spécialement son attention lors de l'examen du bien-fondé de la plainte - pour la simple raison qu'il peut être difficile de savoir, dans certains cas, dans quelle mesure l'on peut se fier aux témoignages de personnes ne résidant pas dans le pays en question -, il ne devait pas être pris en considération pour juger de la recevabilité de la plainte, car il peut arriver que seules des personnes se trouvant à l'extérieur du pays mis en cause jouissent de la liberté nécessaire pour soumettre à l'appréciation du Comité un cas de violation de la liberté syndicale. Ayant constaté, dans le cas d'espèce, que la plainte avait été présentée dans les formes requises par une organisation syndicale internationale, le Comité l'avait déclarée recevable.
- 78 Etant donné les principes rappelés dans les paragraphes ci-dessus, le Comité estime, comme il l'avait fait dans les cas mentionnés plus haut, que les arguments avancés par le gouvernement vénézuélien ne constituaient pas un motif suffisant pour déclarer la plainte irrecevable, puisqu'elle avait été présentée, dans les formes requises, par une organisation syndicale internationale.
- Deuxième question préalable: Qualité de syndicalistes de certaines des personnes dont l'arrestation est alléguée.
- 79 Le gouvernement avait, soutenu par ailleurs, également dans sa communication du 10 février 1954, que MM. Pérez Salinas et Ramón Quijada, dont l'arrestation était alléguée dans la plainte de l'O.R.I.T, avaient perdu leur qualité de dirigeants syndicaux et que, partant, il ne pouvait prendre en considération une plainte en violation de la liberté syndicale, fondée sur l'arrestation de personnes ayant cessé d'avoir la qualité de syndicalistes.
- 80 Dans le cas présent, le fait qu'aucune des deux personnes intéressées n'exerce de fonctions syndicales découle de la dissolution, ordonnée par le gouvernement, de la Confédération des travailleurs du Venezuela, dont ils étaient tous deux dirigeants.
- 81 Dans le cas no 65 (Cuba), le Comité a également été appelé à se prononcer sur un cas où le gouvernement contestait la qualité de syndiqués des personnes mises en cause dans la plainte en affirmant que ces personnes avaient été éliminées du mouvement syndical par les travailleurs eux-mêmes. Le Comité, dans cette affaire, tout en estimant que la procédure d'investigation et de conciliation en matière de liberté syndicale ne peut couvrir, par définition, que des travailleurs ou employeurs syndiqués, et tout en admettant qu'un travailleur ou employeur peut perdre sa qualité de syndiqué, avait estimé qu'il ne saurait, pour le seul motif que les personnes intéressées auraient cessé d'être membres ou dirigeants d'un syndicat national, s'abstenir d'examiner une plainte présentée par une organisation syndicale internationale habilitée à le faire.
- 82 Dans le cas présent, le Comité tient à réaffirmer la position qu'il avait adoptée à sa neuvième session (mai 1954), selon laquelle le fait que certaines des personnes arrêtées ne remplissent pas actuellement les fonctions de dirigeants syndicalistes ne constitue pas un motif suffisant pour s'abstenir d'examiner la plainte, étant donné surtout que la raison pour laquelle ils ne remplissent plus de telles fonctions paraît être qu'il leur a été interdit, en vertu d'une mesure gouvernementale dissolvant l'organisation syndicale à laquelle elles appartenaient, de continuer à les exercer. Cette question ne se pose pas en ce qui concerne les autres syndicalistes détenus.
- 83 Après avoir disposé des deux questions préliminaires, il appartient maintenant au Comité d'examiner quant au fond les diverses allégations relatives à l'emprisonnement de syndicalistes. En ce qui concerne l'emprisonnement de M. Pérez Salinas et M. Ramón Quijada, le gouvernement vénézuélien, dans sa lettre en date du 9 octobre 1953, déclarait que la liberté syndicale était pleinement assurée par les dispositions de la législation en vigueur et qu'en aucun cas, des travailleurs n'avaient été l'objet d'actes de répression en raison de leur affiliation syndicale, ou de leur participation à des activités syndicales. Il avait fait remarquer, d'autre part, que l'Assemblée nationale constituante, en adoptant la troisième disposition transitoire de la Constitution du 11 avril 1953, avait sanctionné les mesures que le gouvernement a prises, ou pourrait prendre à l'avenir, en vue de sauvegarder la paix sociale et de maintenir l'ordre public.
- 84 Cette disposition de la Constitution vénézuélienne est conçue comme suit:
- En attendant les mesures législatives prévues au chapitre de cette Constitution relatif aux garanties individuelles, les mesures prises en la matière par le gouvernement provisoire resteront en vigueur; le Président de la République est autorisé à prendre toutes mesures qu'il jugera appropriées en vue d'assurer la sécurité de la Nation, de sauvegarder la paix sociale et de maintenir l'ordre publie.
- 85 Le gouvernement déclarait donc qu'à son avis, les mesures qu'il avait prises dans l'exercice des pouvoirs que lui confère la Constitution nationale en vue d'assurer l'ordre public relevaient du domaine exclusif de la souveraineté nationale et ne pouvaient faire l'objet d'une discussion par un organisme international.
- 86 Il semblait ressortir de cette réponse - confirmée dans des réponses ultérieures - que le gouvernement vénézuélien estimait que les allégations présentées, relatives à l'arrestation de dirigeants syndicaux, rentraient dans les mesures que le gouvernement est autorisé à prendre en vertu de la troisième disposition transitoire de la Constitution et échappaient, par là même, à la compétence du Comité.
- 87 A sa septième session (novembre 1953), le Comité, en sollicitant du gouvernement des informations complémentaires, avait signalé que, dans une série de cas antérieurs, il avait exprimé l'avis que, s'il appartenait à l'Etat de prendre, dans sa pleine souveraineté, des mesures commandées par le maintien de l'ordre publie, ces mesures ne devaient toutefois en aucun cas porter atteinte à l'exercice des droits syndicaux. Ainsi dans le cas no 28 (Royaume-Uni-Jamaïque), le Comité avait souligné que les mesures prises par les autorités pour faire respecter la légalité ne devraient pas avoir pour effet d'empêcher les syndicats d'organiser des réunions à l'occasion des conflits du travail. Dans le cas no 40 (France : Tunisie), ayant constaté que les mesures prises par les autorités, sans viser directement l'exercice des droits syndicaux, avaient toutefois eu des répercussions sérieuses sur la situation syndicale, le Comité a attiré l'attention du gouvernement sur l'opportunité qu'il y aurait à accorder au mouvement syndical tunisien la plus grande liberté d'action professionnelle compatible avec la sauvegarde de l'ordre public. S'il a conclu également dans ce cas que certaines allégations relatives à l'arrestation de militants syndicalistes ne méritaient pas un examen plus approfondi, c'est après avoir pris note des observations du gouvernement donnant le détail des mesures prises à l'encontre de certains militants syndicalistes et établissant de manière suffisamment précise et circonstanciée que ces mesures ne se rattachaient nullement à l'exercice des libertés syndicales, mais seulement à une action dépassant le cadre syndical et qui était, soit préjudiciable à l'ordre public, soit de nature politique. Dans ce cas, si les allégations relatives à l'arrestation de responsables syndicaux n'ont pas été retenues par le Comité pour un examen plus approfondi, c'est à la suite des renseignements détaillés fournis par le gouvernement indiquant les mesures prises dans chaque cas concret à l'égard de ces personnes et précisant que ces mesures avaient eu pour objet non pas d'entraver l'exercice des droits syndicaux, mais de maintenir l'ordre public. Dans le cas no 31 (Royaume-Uni-Nigeria), où le Comité a estimé que l'action des autorités avait eu seulement pour but de maintenir l'ordre, et dans le cas no 6 (Iran), où il a constaté que les poursuites intentées contre des dirigeants syndicalistes s'inspiraient exclusivement du souci de maintenir l'ordre public et n'avaient pas été dirigées contre le mouvement syndical, le Comité n'est parvenu à ces conclusions que sur la base des renseignements détaillés fournis par les gouvernements.
- 88 Or en examinant la première réponse du gouvernement vénézuélien en date du 9 octobre 1953, le Comité avait dû constater que celle-ci ne donnait aucune information précise au sujet de l'allégation relative à l'arrestation de certains dirigeants syndicalistes, et en particulier en ce qui concerne celle de MM. Pérez Salinas et Ramón Quijada. Il avait par conséquent, comme il a été dit plus haut, chargé le Directeur général de demander au gouvernement vénézuélien des informations complémentaires. Cette demande du Comité a été communiquée au gouvernement par une lettre en date du 4 décembre 1953.
- 89 Dans sa communication du 10 février 1954, le gouvernement vénézuélien a réaffirmé que la détention de MM. Pérez Salinas et Quijada ne constituait pas une violation des droits syndicaux. Il ajoutait que les intéressés avaient été détenus pour s'être rendus coupables d'actes illicites punis par la législation vénézuélienne, actes qui non seulement n'ont aucune relation avec les activités syndicales, mais sont bien au contraire incompatibles avec celles-ci, et sont d'autant plus graves qu'ils tendent à se dissimuler sous le couvert de telles activités syndicales afin de bénéficier de la protection des lois.
- 90 A sa neuvième session (mai 1954), le Comité avait constaté que le gouvernement vénézuélien, tout en déclarant que les actes reprochés à MM. Pérez Salinas et Quijada étaient des délits punissables conformément à la législation en vigueur au Venezuela, ne donnait aucune information concrète sur la nature de ces délits, ni sur les suites judiciaires ou autres auxquelles ils avaient éventuellement donné lieu. Le Comité avait noté à cet égard que, dans plusieurs cas antérieurs où une décision judiciaire était intervenue, il avait demandé aux gouvernements intéressés de l'informer du détail du jugement rendu avant de se prononcer sur ces cas. Dans le cas no 18 (Grèce), le Comité, saisi d'allégations relatives à la poursuite et à la condamnation de dirigeants syndicalistes, avait adressé au gouvernement grec une demande d'informations complémentaires portant sur la nature exacte des crimes reprochés aux personnes poursuivies et sur les décisions rendues contre elles. Ultérieurement, il a adressé au gouvernement une deuxième demande exprimant son désir d'être informé du résultat de la révision du procès des dirigeants syndicalistes qui devait être effectuée dans le cadre de mesures de clémence adoptées par le gouvernement. Dans le cas no 22 (Philippines), où le Comité a estimé que les allégations relatives à l'arrestation de dirigeants syndicalistes étaient d'un caractère si purement politique qu'il n'était pas opportun de poursuivre l'affaire, il n'a formulé ses recommandations définitives au Conseil qu'après avoir été saisi du texte d'une décision rendue par le tribunal de première instance de Manille, d'où il ressort que l'action judiciaire intentée contre ces dirigeants avait été motivée par leurs activités subversives en relation avec le soulèvement armé organisé par l'Armée de libération du peuple, en vue de renverser le gouvernement par la force. Dans d'autres cas, cas no 61 : (France-Tunisie), et cas no 69 : (France), le Comité avait décidé d'ajourner l'examen des allégations dont il était saisi jusqu'au moment où la teneur des décisions judiciaires à intervenir sur des questions qui ont un rapport direct ou indirect avec les cas qui lui sont soumis lui serait communiquée, car il a estimé que de telles décisions seraient susceptibles de lui apporter de précieux éléments d'information.
- 91 Compte tenu de ces considérations, le Comité avait estimé à sa neuvième session (mai 1954) que, pour se prononcer sur les allégations relatives à l'arrestation de M. Pérez Salinas et de M. Ramón Quijada, il lui était indispensable d'obtenir du gouvernement du Venezuela des informations complémentaires sur la nature des délits ayant motivé leur détention ainsi que sur les décisions judiciaires susceptibles d'être intervenues à cet égard.
- 92 Dans sa communication en date du 28 octobre 1954, le gouvernement a indiqué qu'il n'avait pas d'autres informations complémentaires à présenter, estimant avoir déjà dit tout ce qu'il avait à dire. Dans cette même lettre, le gouvernement présentait dès observations sur la plainte dé la F.S.M. ; il s'abstenait toutefois de répondre sur l'allégation selon laquelle un certain nombre de membres du comité exécutif du Syndicat des travailleurs du pétrole de Ribas et de Zaraza auraient été emprisonnés puis expulsés. Par contre, dans cette lettre, le gouvernement s'était référé à l'allégation relative à l'arrestation de MM. Federico Rondón et Rodolfo Quintero. Il signalait que, bien que ces deux personnes fussent dès dirigeants communistes connus et bien que le parti communiste ait été dissous par le décret no 480 en daté du 13 mai 1950, elles avaient continué, tant qu'elles avaient maintenu leur qualité de syndicalistes, à jouir des droits que la loi et lés autorités du travail reconnaissent aux travailleurs du Venezuela. Il affirmait que les faits ayant provoqué lés mesurés adoptées à l'égard dé ces personnes n'avaient aucun rapport avec leur qualité dé syndicalistes et rappelait une fois de plus que les mesures prisés par le gouvernement du Venezuela dans l'exercice de ses pouvoirs constitutionnels pour protéger la tranquillité publique et la sécurité dé l'Etat ne pouvaient être discutées par un organisme international quelconque, étant donné qu'elles sont du domaine de la souveraineté nationale.
- 93 A cet égard, le Comité, dans son premier rapport, avait eu l'occasion de préciser que, lorsque des allégations spécifiques avaient été formulées, il ne pouvait pas considérer comme satisfaisantes dès réponses de gouvernements qui né s'en tiendraient qu'à des généralités. Il avait précisé que, lorsqu'il s'agit de cas où des allégations précises ont été formulées en ce qui concerne une situation de fait, il ne pourrait se contenter de réponses qui ne renverraient qu'à dès dispositions légales applicables, ou qui rappelleraient seulement de telles dispositions. " Le but de l'ensemble de la procédure instituée, avait-il souligné, est d'assurer le respect dès libertés syndicales en droit comme en fait, et le Comité est convaincu que, si elle protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ceux-ci voudront bien reconnaître à leur tour l'importance qu'il y a pour leur propre réputation à ce qu'ils présentent, en vue d'un examen objectif, des réponses bien détaillées portant sur des faits précis aux accusations bien détaillées et portant sur des faits précis qui pourraient être dirigées contre eux. " C'est conformément à ce principe que, dans tous lés cas où lés informations fournies par un gouvernement lui avaient paru être d'un caractère trop général, le Comité a demandé à ce gouvernement des informations plus détaillées afin dé lui permettre d'exprimer une opinion bien motivée au Conseil d'administration.
- 94 Dans le présent cas, le Comité se trouvait saisi, d'un côté, d'allégations précises concernant l'arrestation dé certains dirigeants syndicalistes, qui, d'après les plaignants, aurait été motivée par l'activité syndicale de ces dirigeants, et, d'un autre côté, d'affirmations du gouvernement selon lesquelles lés mesures prises n'avaient aucun rapport avec la qualité de syndicalistes des personnes en question et avaient été motivées par des faits sur lesquels le gouvernement n'avait pas à fournir d'informations puisqu'ils ne concernent pas l'exercice de la liberté syndicale.
- 95 Ultérieurement, bien que n'ayant pas reçu d'informations complémentaires du gouvernement, le Comité a appris que certains des dirigeants syndicaux mentionnés dans la plainte dé l'O.R.I.T, parmi lesquels M. Pérez Salinas, ancien président de la Confédération des travailleurs vénézuéliens, dissoute par le gouvernement, ont été remis en liberté et se trouvent maintenant à l'étranger. Par ailleurs, le Comité a été depuis saisi de nouvelles plaintes - émanant de l'Union internationale des travailleurs portuaires et dé la Confédération internationale des syndicats chrétiens - dans lesquelles il est allégué que de nouvelles arrestations de syndicalistes auraient été opérées.
- 96 Tenant compte de toutes les circonstances du cas et bien qu'il ait appris la libération de certains des syndicalistes détenus, le Comité considère qu'il n'a reçu du gouvernement aucune information précise quant au sort des autres syndicalistes arrêtés mentionnés dans la plainte et que, même dans le cas dé ceux qui ont été libérés, tels que l'ancien président de la Confédération des travailleurs vénézuéliens, dissoute par le gouvernement, il ne saurait considérer qu'il y a eu restauration des droits syndicaux, puisque les personnes libérées ont été exilées. En conséquence, tout en regrettant que le gouvernement du Venezuela n'ait pas cru possible de fournir au Comité dès informations comparables à celles présentées par d'autres gouvernements dans des circonstances analogues, le Comité estime qu'il y a lieu pour lui de maintenir les conclusions consignées dans son sixième rapport et approuvées par le Conseil d'administration à sa 121ème session (Genève, mars 1953), conclusions par lesquelles il décidait d'attirer l'attention du gouvernement sur l'opportunité " de réexaminer les cas des dirigeants syndicaux qui seraient encore détenus en vertu de la législation d'exception, afin d'assurer qu'aucune personne né soit privée, sans avoir bénéficié des garanties d'une procédure judiciaire régulière, de sa liberté en raison dé son affiliation syndicale ou de son activité syndicale licite ".
- Plaintes à propos desquelles le gouvernement n'a présenté aucune observation
- 97 La plainte de l'Union internationale des travailleurs des docks et entrepôts, datée du 15 novembre 1954 et communiquée au gouvernement le 12 mars 1955, allègue qu'un certain nombre dé dirigeants syndicaux, dont MM. Jesús Faria, Luis Emiro Arrieta, Alicedes Hurtado et Federico Rondón (ce dernier ayant déjà été mentionné dans la plainte de la F.S.M examinée plus haut), auraient été emprisonnés en raison de leurs activités syndicales légitimes. A ce jour, le gouvernement n'a présenté aucune observation sur cette plainte. Etant donné que la plainte en question se rapporte également à la détention de syndicalistes, le Comité considère qu'il convient à son égard de reprendre les conclusions qu'il a formulées au paragraphe 96 ci-dessus.
- 98 La plainte de la Fédération des travailleurs péruviens du pétrole, datée du 2 octobre 1954, avait demandé le rétablissement dé la liberté syndicale au Venezuela, afin que la cinquième session de la Commission du pétrole (Caracas, avril-mai 1955) puisse avoir lieu dans un climat de liberté. Etant donné qu'à sa 129ème session (Genève, mai-juin 1955), le Conseil d'administration a pris note du rapport présenté par ses représentants à cette réunion, le Comité n'a pas jugé opportun d'examiner plus avant la question.
- 99 En ce qui concerne enfin la plainte de la Confédération internationale dès syndicats chrétiens contenue dans deux lettres en date des 2 juin et 29 septembre 1955 et communiquée au gouvernement par une lettre en date du 24 novembre 1955, dans laquelle l'organisation dont elle émanait présentait diverses allégations relatives à des ingérences gouvernementales dans les activités syndicales, à la suppression de syndicats et à des mesures d'intimidation exercées contre des dirigeants et militants syndicaux, le Comité n'a reçu du gouvernement aucune observation sur la base de laquelle il lui aurait été possible d'examiner cette plainte.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 100. A la lumière des faits et des circonstances rappelés plus haut, le Comité considère qu'il a accompli la tâche qui lui incombait, à savoir de faire un examen préliminaire de la question, et il la transmet maintenant au Conseil d'administration afin qu'il examine les mesures à prendre et l'opportunité de transmettre éventuellement la question à la Commission d'investigation et de conciliation.
- Genève, le 1er juin 1956. (Signé) Roberto AGO, Président.