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Definitive Report - Report No 118, 1970

Case No 594 (India) - Complaint date: 19-MAY-69 - Closed

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  1. 31. La plainte et les informations complémentaires présentées dans le cas no 589 sont contenues dans trois communications adressées à MIT par la Fédération panindienne des cheminots et datées, respectivement, des 3 décembre 1968, 20 mars et 28 mai 1969.
  2. 32. La plainte présentée dans le cas no 594 figure dans une communication en date du 19 mai 1969, adressée à MIT par le Congrès syndical panindien (AITUC); elle est également signée par douze organisations ou fédérations affiliées à cet organisme, dont la Fédération panindienne des cheminots.
  3. 33. Le texte des plaintes et des informations complémentaires soumises par les plaignants a été transmis au gouvernement pour observations. Par une communication en date du 6 septembre 1969, le gouvernement a demandé au comité de lui signaler quels étaient les points sur lesquels il souhaitait recevoir des observations. A sa session de novembre 1969, le comité a prié le gouvernement de bien vouloir répondre à certaines allégations particulières formulées par les plaignants; le gouvernement a fourni ses observations par une communication en date du 11 février 1970, et des informations complémentaires par une lettre du 14 mai 1970.
  4. 34. L'Inde n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. A. Allégations des organisations plaignantes

A. A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 35. Il convient de rappeler que la plainte présentée par la Fédération panindienne des cheminots se réfère en partie à des questions générales, telles que le climat des relations entre le gouvernement et les associations ou syndicats du personnel du secteur public, mais elle contient surtout des allégations de violation des droits syndicaux.
  2. 36. La Fédération panindienne des cheminots allègue, pour l'essentiel, que le gouvernement s'est refusé à appliquer un accord passé avec les organisations du personnel de l'Etat, aux termes duquel les conflits doivent être résolus par la négociation et, au besoin, par l'arbitrage, afin de rendre superflu le recours à la grève. Selon la plainte, une grève d'avertissement de vingt-quatre heures a eu lieu le 19 septembre 1968, le gouvernement ayant refusé de soumettre à l'arbitrage une revendication portant sur la fixation de salaires minima. Pour sa part, le Conseil des chemins de fer aurait également refusé de soumettre à l'arbitrage les différends qui s'étaient accumulés depuis 1956, contrairement à ce qui était prévu dans un accord relatif à l'organisme permanent de négociation mis en place pour cette branche d'activité. La grève a été pacifique; elle avait pour objet d'exercer une pression sur les autorités pour qu'elles poursuivent l'étude de la question par la voie établie à cet effet. Huit personnes auraient perdu la vie par suite de l'intervention de la police dans la grève, et de nombreuses autres auraient été blessées ou auraient souffert de contusions. L'organisation plaignante indique les lieux où ces incidents se sont produits, en ajoutant des détails sur les mesures de suspension ou de renvoi prises envers de nombreux travailleurs, dont plusieurs ont également été arrêtés et poursuivis en justice.
  3. 37. La Fédération panindienne des cheminots affirme, en outre, que le gouvernement, en promulguant l'ordonnance de 1968 sur les services essentiels et l'ordonnance modifiée sur les chemins de fer, de même que le Conseil des chemins de fer en invoquant le règlement d'application des ordonnances se sont livrés à une intervention tendant à restreindre le droit, pour la fédération, d'organiser son administration et ses activités et de formuler son programme d'action. Elle ajoute que le retrait de la reconnaissance de la fédération a été décidé à titre de sanction et que des entraves ont été apportées à la liberté de réunion syndicale, ce qui équivaut à suspendre le fonctionnement de la fédération. Elle indique également que le gouvernement s'efforce de détruire le syndicalisme authentique et cite, à cet égard, l'invitation que le Conseil des chemins de fer aurait adressée aux trois syndicats de cheminots qui n'ont pas participé à la grève pour qu'ils désignent dix personnes aux fins de représenter les travailleurs affiliés à la fédération.
  4. 38. Dans la plainte du Congrès syndical panindien, il est dit que, prises ensemble, les organisations signataires représentent l'immense majorité des travailleurs syndiqués de l'Inde et il est rappelé que le gouvernement n'a encore ratifié ni la convention no 87 ni la convention no 98 de l'OIT, « malgré la demande unanime faite dans ce sens par toutes les sections du mouvement syndical ».
  5. 39. De manière générale, l'organisation plaignante allègue « la violation de ces deux conventions » et les ingérences croissantes du gouvernement dans le domaine syndical, le refus des droits de grève et de négociation collective, ainsi que les restrictions de plus en plus grandes mises à l'exercice de ces droits.
  6. 40. Les plaignants signalent que le gouvernement de l'Inde emploie des travailleurs dans divers services: chemins de fer (1,4 million), postes et télégraphes (500 000), production pour la défense, Département des travaux publics, aviation civile, fisc, comptabilité et administrations centrales. En d'autres termes, il s'agit non pas uniquement d'employés de bureau, mais aussi de millions de travailleurs industriels, affiliés à des syndicats groupés en fédérations.
  7. 41. Après avoir expliqué les motifs de la grève de septembre de la même manière, pour l'essentiel, que la Fédération panindienne des cheminots, le Congrès syndical panindien signale que l'appel à la grève était légal et pleinement justifié par l'attitude du gouvernement. Il ajoute que le 13 septembre 1968, après la clôture de la session du Parlement, le gouvernement a pris deux ordonnances qui rendaient illégale ladite grève, élargissaient la définition de la grève et prescrivaient des sanctions rigoureuses. La plainte mentionne également les morts, les blessures et les lésions provoquées par la police, les renvois, les suspensions et les autres mesures prises envers de nombreux travailleurs, ainsi que la perte, pour les grévistes, de leur ancienneté et des avantages qu'elle entraîne.
  8. 42. L'organisation plaignante ajoute que tous les syndicats qui ont lancé l'appel à la grève se sont vu retirer leur reconnaissance et ont été exclus de l'organisation consultative paritaire. Ces mesures ont été prises par voie d'arrêtés du gouvernement et ne peuvent être attaquées devant les tribunaux que pour vice de forme. Dans le secteur des postes et des télégraphes, trois « syndicats nationaux » ont été reconnus avant même d'avoir été constitués ou enregistrés conformément à la loi de 1926. La reconnaissance leur a été accordée pour « créer un organisme panindien ». Les dirigeants de ces syndicats, qui n'avaient pas d'affiliés à la date de leur reconnaissance, ont été non pas élus, mais désignés.
  9. 43. En ce qui concerne le secteur privé, l'AITUC signale que la loi sur le maintien des services essentiels habilite le gouvernement à inscrire, par voie d'arrêté, pratiquement n'importe quel service ou industrie sur la liste des services essentiels. A cet égard, le plaignant cite le texte de l'article 2 (1) de la loi. Avant l'adoption de celle-ci, le gouvernement avait déjà déclaré illégale la grève des enseignants de l'Himachal Pradesh, en application de l'ordonnance sur le maintien des services essentiels. Bien que le Parlement doive être informé des décisions de ce genre de l'exécutif et puisse les annuler, les plaignants indiquent que la notification faite par le gouvernement porte effet pendant quarante jours, période qui suffit à annuler ou écraser une grève.
  10. 44. Enfin, selon les plaignants, la loi de 1968 sur les banques (modifiée) prévoit, en son article 36 AD, des sanctions pour quiconque commet un acte tendant à saper la confiance des déposants dans les banques, et elle habilite donc le gouvernement à interdire les activités normales des syndicats.
  11. 45. Le Congrès syndical panindien demande à l'OIT de désigner une commission d'enquête chargée d'examiner ces allégations, afin que les mesures nécessaires soient prises pour remédier à la situation.
  12. 46. Dans sa communication du 6 septembre 1969, le gouvernement relève que les questions soulevées dans les allégations pourraient être examinées plus facilement si le Comité de la liberté syndicale précisait les points sur lesquels il souhaite recevoir les informations du gouvernement.
  13. 47. Dans sa communication en date du 11 février 1970, le gouvernement présente, avant de répondre sur les points que le comité avait précisés à sa session de novembre 1969, un exposé général sur la genèse de la question.
  14. 48. Le gouvernement signale qu'en 1966 il avait créé, après avoir consulté les représentants du personnel, un mécanisme de consultation mixte en vue de promouvoir l'établissement de relations harmonieuses et d'assurer la meilleure collaboration possible entre le gouvernement, en sa qualité d'employeur, et le personnel de ses services, sur les questions d'intérêt commun, ainsi que d'augmenter l'efficacité de l'administration publique. Tous les employés du gouvernement central, y compris le personnel des chemins de fer, des postes et des télégraphes ainsi que des établissements de la défense nationale, sont englobés dans le système de consultation et représentés au Conseil national; ils bénéficient en outre de la possibilité de mener des discussions ou des négociations aux échelons inférieurs. La compétence des conseils s'étend à toutes les questions concernant les conditions de service et de travail, le bien-être du personnel, l'amélioration du rendement et les normes de travail. Le système prévoit aussi, en cas de désaccord entre les représentants de l'administration et ceux du personnel, un arbitrage obligatoire portant exclusivement sur les questions relatives aux traitements et aux allocations, à la durée hebdomadaire du travail et aux congés, et cela pour le personnel d'une même catégorie ou d'un même grade.
  15. 49. Avant d'établir ce mécanisme, le gouvernement et les organisations d'employés avaient signé une déclaration commune d'intention, les parties s'engageant à mettre le système à l'épreuve pour une période minimum de cinq ans pendant laquelle tous les conflits seraient résolus par le mécanisme de consultation et d'arbitrage obligatoire.
  16. 50. Le gouvernement ajoute que le Conseil national et les conseils sectoriels se sont réunis périodiquement et ont pris des décisions sur plusieurs questions, telles que les voyages lors du congé, l'indemnité de logement ou les congés en cas d'hospitalisation, décisions qui ont été acceptées et appliquées par le gouvernement. En 1967, le personnel a présenté un cahier de revendications en dix points, concernant principalement le paiement d'un salaire minimum fondé sur le besoin et la fusion de l'indemnité de vie chère et de la rémunération de base. Le Conseil national a étudié longuement l'une et l'autre revendication, sans aboutir à un accord. Le personnel a demandé le recours à l'arbitrage. Le gouvernement ne s'y est pas opposé en ce qui concerne la seconde revendication; en revanche, il a considéré que la première était en dehors du champ d'application de l'arbitrage obligatoire, celui-ci ayant été établi uniquement pour les cas relatifs à une catégorie ou à un grade, tandis que la revendication d'un salaire minimum fondé sur le besoin avait une portée beaucoup plus large et couvrirait l'ensemble du personnel. Elle mettait également en jeu des questions d'ordre économique et social et elle ne pouvait pas être considérée isolément pour le seul personnel du gouvernement central, la grande masse des travailleurs de l'industrie et de l'agriculture étant laissée de côté; de plus, il conviendrait de prendre en considération le revenu national et l'état de l'économie du pays.
  17. 51. Le gouvernement déclare en outre que pour tenter d'éviter la grève il a invité des représentants du personnel à rencontrer un comité, composé des ministres de l'Intérieur, des Finances et du Travail, afin d'étudier le bien-fondé de la question et la possibilité de recourir à l'arbitrage. Les représentants de quelques organisations ont assisté à la réunion, mais les organisations du personnel n'ont pas accepté l'invitation et ont fait connaître ultérieurement leur intention de déclencher dans tout le pays, le 19 septembre 1968, une grève d'un jour du personnel du gouvernement central. Il était clair également que cette grève ne serait que le prélude à un mouvement d'une durée indéterminée, la Fédération panindienne des cheminots ayant lancé l'ordre de grève à partir du 31 décembre 1968. Dans ces conditions, le gouvernement de l'Inde a décidé, conformément à une déclaration faite antérieurement par le ministre de l'Intérieur, de prendre une ordonnance qui l'habilitait à interdire les grèves du personnel de ses services. L'ordonnance (qui a été promulguée alors que le Parlement n'était pas en session) a été remplacée par une loi du Parlement en décembre 1968. Le gouvernement a annoncé par la suite au Parlement que la loi allait être remplacée prochainement par une législation plus large, qui devait prévoir l'étude et le règlement des revendications et des réclamations du personnel grâce à des procédures de consultation et d'arbitrage obligatoires établies en vertu de la loi (ce qui n'est pas le cas du mécanisme actuel).
  18. 52. Le gouvernement ajoute que, redoutant les inconvénients et les dangers qui résulteraient pour des millions de voyageurs de la menace proférée par les cheminots d'arrêter les trains avant l'arrivée à destination et de faire asseoir des gens sur les voies, il a promulgué également l'ordonnance modificatrice de 1968 sur les chemins de fer, ordonnance qui, elle aussi, a été remplacée ensuite par une loi du Parlement.
  19. 53. En ce qui concerne les deux revendications précitées, le gouvernement indique qu'après de nouvelles tentatives de solution au Conseil national du système de consultation mixte et sur la base d'une recommandation acceptée par ledit conseil il a édicté, en janvier 1969, des décrets intégrant à certaines fins une partie de l'indemnité de vie chère à la rémunération. En ce qui concerne le salaire minimum fondé sur le besoin, la Commission nationale du travail a déposé son rapport depuis lors, l'une des recommandations prévoyant l'institution d'une commission des rémunérations, chargée d'étudier la question des salaires et des autres conditions de service; la Commission nationale du travail a fait observer que la fixation du salaire minimum fondé sur le besoin ainsi que la détermination de la capacité de l'Etat de payer un tel salaire devaient relever de la compétence de la Commission des rémunérations. Le gouvernement a accepté cette recommandation et annoncé sa décision d'établir la Commission des rémunérations afin d'étudier la question des salaires et des conditions de service de tout le personnel de l'Etat central.
  20. 54. Le gouvernement a communiqué le texte de divers documents mentionnés dans sa déclaration générale.
    • Allégations relatives à la grève de 1968 dans le secteur public
  21. 55. A sa session de novembre 1969, le comité a demandé au gouvernement de bien vouloir lui communiquer ses observations sur les allégations selon lesquelles l'intervention de la police dans une grève déclenchée par plusieurs organisations de personnel de l'Etat aurait causé la mort de diverses personnes, et de nombreux travailleurs auraient été renvoyés, suspendus, arrêtés ou traduits en justice, ou encore auraient été privés, à titre de sanction, des avantages de l'ancienneté pour le même motif (communications de la Fédération panindienne des cheminots en date des 3 décembre 1968 et 28 mai 1969, et communication de l'AITUC en date du 19 mai 1969).
  22. 56. Dans sa réponse, le gouvernement signale que l'ordonnance sur le maintien des services essentiels, promulguée le 13 septembre 1968, l'habilitait à interdire les grèves dans les services essentiels. Les arrêtés d'application de l'ordonnance ont interdit la grève aux employés du gouvernement central. Néanmoins, une partie du personnel, non seulement a suspendu le travail, mais encore a empêché, par la violence, d'autres employés de s'acquitter de leurs tâches. En plusieurs endroits les grévistes se sont efforcés d'entraver la marche des services publics essentiels afin de troubler la vie de la collectivité et ont tenté, en outre, de s'attaquer à la propriété de l'Etat. La police s'est vue obligée d'intervenir dans ces endroits pour empêcher les grévistes de se livrer à la violence et pour rétablir l'ordre et la légalité. Devant la résistance violente des intéressés, la police n'a pas eu d'autre choix que de charger les manifestants et d'employer les gaz lacrymogènes; dans un petit nombre de cas, les autorités dûment constituées ont ordonné d'ouvrir le feu ainsi qu'elles y étaient habilitées. En raison de la violence des grévistes, 90 policiers ont été blessés, tandis que 7 cheminots ont été tués, en trois lieux différents, et 145 personnes ont été blessées par des coups de feu tirés par la police.
  23. 57. Le gouvernement ajoute que, comme la grève avait été déclarée illégale en vertu de l'ordonnance, les employés qui avaient cessé le travail s'étaient rendus coupables de participation à une grève illégale. Bien que les grévistes aient été très nombreux, 9 996 seulement ont été arrêtés, dont 8 162 ont été suspendus et 106 licenciés. Conformément au règlement de service, l'absence sans autorisation constitue une interruption de l'emploi qui entraîne la perte de certains avantages. Presque tous les grévistes tombaient sous le coup de cette disposition. Bien que les mesures prises contre les grévistes aient été conformes à la loi et au règlement de service, le gouvernement, acquiesçant aux demandes du personnel, a réintégré par la suite 7 993 des employés suspendus; sur les 169 autres cas, plusieurs étaient en cours d'examen. Quant aux employés qui n'avaient pas participé à des violences, à des actes d'intimidation ou d'incitation à la violence, des mesures avaient été prises en vue de leur réintégration. En ce qui concerne la perte de certains avantages, les chefs de service ont été autorisés à « passer l'éponge » sur la faute que constitue l'abandon du travail pour cause de grève, après avoir observé la conduite des intéressés pendant une période déterminée.
  24. 58. Dans sa communication en date du 14 mai 1970, le gouvernement signale qu'en février 1970 87 employés étaient encore suspendus, mais qu'en mars il a été ordonné que tous les employés suspendus ou licenciés seraient réintégrés, sans préjudice des actions en justice ou des enquêtes administratives et disciplinaires en cours, qu'il ne serait pas tenu compte de l'interruption des services provoquée par l'absence injustifiée durant la grève et que, dorénavant, la participation d'un employé à ladite grève n'entrerait pas en ligne de compte aux fins de la confirmation dans l'emploi, d'un engagement quasi permanent ou d'une promotion.
  25. 59. Le comité a toujours appliqué le principe selon lequel les allégations relatives au droit de grève n'échappent pas à sa compétence dans la mesure où elles affectent l'exercice des droits syndicaux. Ce faisant, il a relevé que le droit de grève était généralement reconnu aux travailleurs et à leurs organisations en tant que moyen légitime de défense de leurs intérêts professionnels.
  26. 60. D'autre part, le comité a soutenu que si l'on peut admettre que, dans la fonction publique et les services essentiels, le droit de grève souffre des restrictions, il doit, dans ce cas, exister des garanties adéquates destinées à sauvegarder les intérêts des travailleurs ainsi privés d'un moyen essentiel de promouvoir leurs intérêts professionnels. De telles restrictions devraient donc s'accompagner de procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives, aux diverses étapes desquelles les intéressés devraient pouvoir participer.
  27. 61. En l'occurrence, il ressort des informations communiquées tant par les plaignants que par le gouvernement que la grève de vingt-quatre heures du 19 septembre 1968 a été déclenchée par des organisations du personnel du gouvernement central de l'Inde et qu'elle avait pour objet l'arrêt du travail conjointement dans les administrations publiques et dans d'autres services publics relevant de l'Etat, les transports ferroviaires par exemple. Dans ces conditions, elle devait nécessairement se traduire par l'interruption de services essentiels pour l'Etat et pour le public. La grève a été décidée lorsque le gouvernement n'a pas accepté de soumettre à l'arbitrage une revendication qui, à son avis, sortait du champ d'application du mécanisme établi antérieurement sur la base d'une déclaration commune d'intention des parties. Avant la date indiquée, des dispositions avaient été promulguées en vertu desquelles le gouvernement pouvait interdire la grève des agents de ses services, ce qu'il a fait effectivement afin, comme le gouvernement le signale, d'empêcher la grève en question.
  28. 62. Dans ces conditions, on ne saurait conclure, compte tenu du principe énoncé au paragraphe 60 ci-dessus et du fait qu'il y avait des mécanismes établis d'un commun accord entre les parties pour l'examen des différends, que l'interdiction par le gouvernement de la grève du personnel de ses services en général aurait constitué en soi une violation des droits syndicaux. Quant au reste, le comité prend note des informations fournies par le gouvernement sur la réintégration dans leur emploi de tous les grévistes qui avaient été suspendus ou licenciés.
  29. 63. A la lumière également de ce qui est dit au paragraphe 60, le comité estime devoir examiner d'autres aspects de la question. En premier lieu, il paraît opportun de déterminer si la situation antérieure à la grève s'est modifiée ou non en ce qui concerne les procédures de consultation et de règlement des conflits dans le secteur en cause, c'est-à-dire s'il y a eu des modifications du mécanisme qui avait été établi sur la base d'un accord entre le gouvernement et les associations de personnel. Conformément aux informations communiquées par le gouvernement, le Conseil national institué dans ce domaine paraît avoir poursuivi l'examen de la revendication relative à la fusion de l'indemnité de vie chère et de la rémunération de base, des mesures ayant déjà été prises, conformément à une recommandation dudit conseil au gouvernement, qui paraissent équivaloir à une acceptation partielle de la revendication. Pour ce qui est du salaire minimum de l'ensemble du personnel de l'Etat, la question a été soumise à un autre organisme - la Commission nationale du travail -, qui a recommandé la désignation d'une commission spéciale. Celle-ci serait chargée de déterminer le salaire minimum fondé sur le besoin et d'apprécier la capacité des pouvoirs publics de payer un tel salaire. Le gouvernement déclare qu'il a accepté cette recommandation et se propose de l'appliquer.
  30. 64. Sur la base des informations disponibles, il ne semble pas qu'une modification ait été apportée aux principes qui régissent le mécanisme paritaire mis en place pour la consultation et l'arbitrage en ce qui concerne des sujets déterminés; le gouvernement déclare à cet égard qu'il a l'intention de donner à ce mécanisme un fondement établi par une loi. Il convient de signaler, en passant, qu'avec le système actuel la commission d'arbitrage, qui est désignée en l'absence d'une entente au Conseil national ou dans les conseils sectoriels, comprend un membre choisi sur une liste de cinq noms proposés par l'administration, un membre choisi sur une liste analogue établie par les représentants du personnel au conseil et une personnalité indépendante qui la préside; sous réserve de l'autorité suprême du Parlement, les recommandations de la commission d'arbitrage lient les deux parties.
  31. 65. En ce qui concerne la commission spéciale que le gouvernement se propose de désigner pour la détermination des salaires minima de tout le personnel du secteur public, le comité appelle l'attention sur certains principes énoncés dans la recommandation (no 113) sur la consultation aux échelons industriel et national, 1960, qui préconisent la consultation et la collaboration entre les autorités publiques et les organisations professionnelles, afin, en particulier, de faire en sorte que les autorités sollicitent de façon appropriée les vues, les conseils et le concours de ces organisations à propos de questions telles que la préparation et la mise en oeuvre de la législation touchant leurs intérêts. Il est dit également dans la même recommandation qu'il conviendrait de favoriser cette consultation et cette collaboration par des mesures prises par les autorités publiques et propres à encourager lesdites organisations.
  32. 66. Le comité recommande au Conseil d'administration d'appeler l'attention du gouvernement sur l'importance de ces principes et exprime l'espoir qu'il en sera tenu compte au sujet du fonctionnement de la commission spéciale.
  33. 67. En second lieu, il ressort des informations fournies aussi bien par les plaignants que par le gouvernement qu'à la suite de l'intervention des forces de police durant la grève plusieurs cheminots ont été atteints mortellement par des armes à feu et que de nombreuses personnes ont été blessées. Le comité rappelle que, dans d'autres cas ayant trait à des pertes de vies humaines, il avait indiqué qu'il attachait une importance toute particulière à la nécessité de procéder à des investigations complètes sur les circonstances du fait allégué, et cela au moyen d'une enquête spéciale menée immédiatement en toute indépendance et suivie de la procédure légale ordinaire, de façon à déterminer la responsabilité des mesures prises par les forces de police et à apprécier la justification de ces mesures. En l'occurrence, le comité fait observer que le gouvernement a fourni des explications selon lesquelles l'intervention des forces de police a été motivée par des actes de violence de la part des grévistes et déclaré que lesdites forces avaient agi en vertu d'ordres des autorités compétentes. Le comité recommande au Conseil d'administration de prendre note de cette déclaration du gouvernement.
  34. 68. En raison de ce qui précède, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de décider, pour les motifs mentionnés au paragraphe 62, que l'interdiction, par le gouvernement, de la grève déclenchée par les employés du secteur public ne constituait pas une violation de la liberté syndicale;
    • b) de prendre note des informations fournies par le gouvernement, selon lesquelles tous les employés suspendus ou licenciés en raison de la grève ont été réintégrés;
    • c) de prendre note de la déclaration du gouvernement, selon laquelle l'intervention des forces de police avait été motivée par des actes de violence de la part des grévistes et que lesdites forces avaient agi en vertu d'ordres des autorités compétentes;
    • d) d'appeler l'attention du gouvernement sur les principes mentionnés au paragraphe 65 ci-dessus et d'exprimer l'espoir qu'il en sera tenu compte au sujet du fonctionnement de la commission spéciale chargée d'examiner la question des salaires minima du personnel de l'Etat.
      • Allégations relatives à des sanctions infligées à des associations de personnel
    • 69. Le comité avait prié le gouvernement de bien vouloir lui communiquer ses observations sur les allégations formulées par l'AITUC, selon lesquelles les syndicats qui avaient lancé l'appel à la grève s'étaient vu retirer leur reconnaissance et avaient été exclus de l'organisme consultatif paritaire à titre de sanction.
  35. 70. A ce propos, le gouvernement relève que l'obligation de régler tes différends sans recourir à des grèves, à des violences, à l'intimidation et à la coercition est implicitement prescrite dans la déclaration d'intention relative à la création du mécanisme paritaire. En lançant l'ordre de grève illégale et en recourant à l'intimidation et à la violence au cours du mouvement, certaines associations, comme la Fédération panindienne des cheminots et la Fédération nationale du personnel des postes et des télégraphes, ont perdu le droit d'être reconnues connue membres de l'organisme paritaire. En conséquence, la reconnaissance du statut syndical leur a été retirée par les services compétents.
  36. 71. Le gouvernement ajoute que la question a fait l'objet d'un nouvel examen et que des directives ont été édictées en septembre et en octobre 1969, selon lesquelles les fédérations, les syndicats ou les associations dont la reconnaissance avait été supprimée en raison de leur participation à ladite grève bénéficieraient d'une reconnaissance « nouvelle et provisoire ». Il a été décidé, en outre, que ces organisations seraient également reconnues aux fins de la participation au système de consultation mixte, à la condition d'y avoir participé avant le retrait de leur reconnaissance. Conformément à cette décision, la Fédération panindienne des cheminots et la Fédération nationale du personnel des postes et des télégraphes ont été reconnues de nouveau. La reconnaissance est « provisoire » seulement au sens qu'elle durera jusqu'à l'adoption de nouvelles règles en la matière, une fois que la législation de caractère général, mentionnée ci-dessus, relative au fondement du mécanisme paritaire aura été adoptée.
  37. 72. Dans ces conditions, compte tenu de la déclaration du gouvernement, selon laquelle les organisations de personnel se sont vu reconnaître de nouveau leur capacité de négocier, organisations qui paraissent jouir de nouveau des mêmes droits qu'avant la grève, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
    • Allégations relatives à l'application de deux ordonnances
  38. 73. Le gouvernement avait été prié de bien vouloir communiquer ses observations au sujet des allégations selon lesquelles l'ordonnance de 1968 sur le maintien des services essentiels et l'ordonnance modificatrice sur les chemins de fer avaient pour objet de restreindre les droits syndicaux (communication de l'AITUC) et qu'elles avaient été appliquées à la Fédération panindienne des cheminots afin d'entraver ses activités et de l'empêcher d'exercer son droit de réunion (communication de la Fédération panindienne des cheminots en date du 20 mars 1969).
  39. 74. Le gouvernement répond que l'ordonnance de 1968 sur le maintien des services essentiels a été prise afin de lui conférer les pouvoirs nécessaires en cas de crise nationale grave résultant d'une menace de grève dans tout le pays, grève qui viserait notamment à désorganiser les services de transport et, de ce fait, à troubler profondément la vie de la collectivité. L'ordonnance a été remplacée par une loi du Parlement en décembre 1968. De même, l'ordonnance modificatrice de 1968 sur les chemins de fer a été édictée le 14 septembre de cette année-là pour faire face aux cas où les cheminots cesseraient d'assurer la marche des trains, afin d'éviter les graves conséquences qui pourraient en résulter pour la vie de nombreux usagers, ainsi qu'en prévision d'obstruction des voies pour entraver le bon fonctionnement des services des chemins de fer. Il a été exposé clairement, lors du débat au Parlement, que l'ordonnance n'avait pas pour but de restreindre les droits syndicaux des travailleurs. Cette ordonnance, elle aussi, a été remplacée par une loi du Parlement qui est entrée en vigueur le 20 décembre 1968.
  40. 75. Selon le gouvernement, le fait que les syndicats et les associations qui n'avaient pas participé à la grève continuent à bénéficier de la reconnaissance et que même les organisations auxquelles la reconnaissance avait été retirée en bénéficient de nouveau prouve que le gouvernement de l'Inde n'a jamais eu l'intention d'empêcher ou d'entraver les activités syndicales authentiques du personnel de ses services, ni de s'immiscer dans lesdites activités. Le gouvernement ajoute que ni l'ordonnance sur le maintien des services essentiels, ni l'ordonnance modificatrice sur les chemins de fer n'ont restreint le droit de réunion pacifique que la législation du pays confère aux travailleurs.
  41. 76. Le gouvernement a communiqué le texte des deux ordonnances qui, selon ses indications, ont été remplacées par des lois du Parlement. Pour l'essentiel, la première, après avoir défini les « services essentiels » et autorisé le gouvernement à y interdire les grèves, dispose que les grèves déclenchées dans les services spécifiés dans les ordonnances pertinentes sont illégales et rend passible de sanctions quiconque déclenche une telle grève ou y participe, incite autrui à y participer, donne son appui à une telle grève de toute autre façon ou, en connaissance de cause, contribue à son financement. La seconde porte insertion de deux articles nouveaux dans la loi de 1890 sur les chemins de fer de l'Inde. Ces articles prévoient des sanctions pénales en cas d'abandon de matériel roulant sans autorisation entre deux gares et rend passibles de telles sanctions les cheminots ou toute autre personne qui empêcheraient ou tenteraient d'empêcher le passage des trains ou d'autre matériel roulant.
  42. 77. Le comité considère que les allégations consistent en affirmations générales sur la restriction des droits syndicaux au moyen des deux ordonnances précitées, affirmations qui n'ont pas été étayées par des éléments de preuve plus précis, et, tenant compte des informations fournies par le gouvernement, recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
    • Allégations relatives à la formation de syndicats parallèles
  43. 78. Le comité avait prié le gouvernement de bien vouloir lui communiquer ses observations sur les allégations selon lesquelles le gouvernement aurait encouragé la création de syndicats parallèles dans le secteur des postes et des télégraphes et les aurait reconnus (communication de l'AITUC) et que, pour sa part, le Conseil des chemins de fer aurait invité trois syndicats qui n'avaient pas participé à la grève à désigner les représentants de tous les travailleurs affiliés à la Fédération panindienne des cheminots (communication de celle-ci en date du 28 mai 1969).
  44. 79. Le gouvernement indique qu'après la grève illégale la Fédération des employés des postes et des télégraphes et ses syndicats adhérents ont fait l'objet d'une mesure de retrait de reconnaissance. En même temps, à la suite de la décision prise lors d'une assemblée officieuse tenue à Nagpur les 28 et 29 septembre 1968, à laquelle ont assisté des membres du personnel du Département des postes et des télégraphes partisans de syndicats démocratiques à gestion autonome, trois nouveaux syndicats de postiers ont été formés. Ces trois syndicats prétendaient grouper 20 pour cent du personnel des postes et des télégraphes. Comme le gouvernement souhaitait vivement que les communications entre l'administration et le personnel ne fussent pas interrompues après le retrait de la reconnaissance de la Fédération nationale du personnel des postes et des télégraphes, il a accordé une reconnaissance provisoire, sur une base spéciale, aux nouveaux syndicats, qui étaient représentatifs.
  45. 80. D'autre part, le gouvernement signale que la Fédération panindienne des cheminots et six des syndicats qui lui sont affiliés, qui avaient participé à la grève illégale, s'étaient vu retirer leur reconnaissance, perdant ainsi leurs droits et leurs privilèges en matière de négociation avec le Conseil des chemins de fer. Trois syndicats affiliés à la fédération, qui avaient refusé de participer à la grève, ont conservé leur reconnaissance. Mais il s'agissait d'organisations locales qui n'étaient pas en mesure de négocier avec le Conseil des chemins de fer à l'échelon national. Il avait été décidé, par conséquent, afin de maintenir un bon climat de relations professionnelles dans les chemins de fer, que ces trois syndicats pourraient être sollicités de former temporairement un organisme ad hoc pour négocier avec le Conseil des chemins de fer. Cependant cette décision n'a jamais été appliquée, étant donné que la reconnaissance avait été accordée de nouveau dans l'intervalle à la Fédération panindienne des cheminots, ce qui lui donnait la possibilité de négocier avec le conseil.
  46. 81. En l'occurrence, en ce qui concerne le secteur des postes et des télégraphes, il paraîtrait y avoir une contradiction entre les affirmations (les plaignants et celles du gouvernement. Les premiers soutiennent que le gouvernement avait poussé à la création des trois nouveaux syndicats et les avait reconnus immédiatement « avant même qu'ils aient été constitués ou enregistrés, conformément à la loi de 1926 » et quand bien même ils n'avaient ni représentants élus ni affiliés (voir paragr. 42 ci-dessus), le gouvernement indiquant pour sa part que les nouveaux syndicats, constitués en un congrès « extra-officiel », avaient un caractère représentatif. En ce qui concerne les chemins de fer, le gouvernement paraît reconnaître que les autorités avaient décidé de demander aux trois syndicats de constituer « un organisme » pour pouvoir négocier au niveau national avec le Conseil des chemins de fer. Dans l'un et l'autre cas, le gouvernement souligne que la reconnaissance aux fins de négociation au nom des travailleurs du secteur intéressé avait été 'accordée à titre provisoire. En dépit de cette dernière observation e comité déduit des informations que, dans l'un des cas au moins, les droits de représentation de la totalité du personnel du secteur en cause paraissent avoir été conférés à des organisations d'une représentativité restreinte à l'échelon national.
  47. 82. Le comité estime que si la législation nationale établit des mécanismes pour la représentation des intérêts professionnels de toute une catégorie de travailleurs, cette représentation devrait appartenir normalement à l'organisation majoritaire de ladite catégorie, et que les pouvoirs publics devraient s'abstenir de toute intervention qui risquerait de rendre vain ce principe.
  48. 83. Dans ces conditions, le comité, sous réserve de ce principe et étant donné que la Fédération nationale du personnel des postes et des télégraphes ainsi que la Fédération panindienne des cheminots sont de nouveau reconnues par les autorités et habilitées à représenter le personnel pour négocier avec elles à l'échelon national, recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
    • Allégations relatives à la définition légale des « services essentiels »
  49. 84. Le comité a demandé au gouvernement de bien vouloir formuler ses observations à l'égard des allégations selon lesquelles les nouvelles dispositions législatives permettaient au gouvernement d'englober pratiquement tout service ou activité dans la liste des services essentiels, comme le prouverait le cas du personnel enseignant de l'Himachal Pradesh (communication de l'AITUC).
  50. 85. Le gouvernement indique que l'ordonnance sur l'entretien des services essentiels l'habilite à interdire les grèves dans les services essentiels définis comme tels dans l'ordonnance en question. Conformément à cette ordonnance, dont le gouvernement a communiqué le texte, est réputé « service essentiel »: tout service postal, télégraphique ou téléphonique; tout service ferroviaire ou autre service destiné au transport par terre, eau ou air de personnes ou marchandises; tout service relatif au fonctionnement et à l'entretien des aérodromes ou au fonctionnement, à la réparation et à l'entretien des aéronefs; tout service relatif au chargement et au déchargement, à la manutention et au magasinage de marchandises dans les ports; tout service relatif aux opérations de transit douanier de marchandises et d'usagers ou à la prévention de la contrebande; tout service dans les établissements d'émission et d'imprimerie de monnaie nécessaires à la sécurité publique; tout service dans un établissement de la défense nationale dépendant du gouvernement central; tout service relevant de la compétence de l'Union indienne et ne figurant pas parmi les services ci-dessus énumérés. En vertu d'une clause faisant suite à cette liste, est censé appartenir à la même catégorie tout autre service destiné à des activités au sujet desquelles le pouvoir législatif incombe au Parlement et que le gouvernement, moyennant notification dans la gazette officielle, désigne comme service essentiel. Le gouvernement peut avoir recours à cette mesure lorsqu'il estime que la grève dans un service d'utilité publique serait nuisible à son entretien, à la sécurité publique ou à l'approvisionnement et aux services nécessaires à la vie collective, ou serait susceptible d'entraîner pour cette dernière des privations graves.
  51. 86. Le gouvernement fait état de la disposition (actuellement contenue dans une loi) en vertu de laquelle toute notification faite conformément à ce qui est exposé in fine du paragraphe précédent sera soumise au Parlement immédiatement si on est en période de session parlementaire ou le premier jour du début de la session prochaine, la notification devenant caduque après une période de quarante jours à partir de la date de sa présentation au Parlement, à moins qu'avant l'expiration de ce délai une résolution approuvant la notification n'ait été adoptée par les deux chambres du Parlement.
  52. 87. Le gouvernement indique qu'en conséquence toute inclusion d'une industrie dans la catégorie des services essentiels doit être au préalable dûment approuvée par le Parlement dans les plus brefs délais possible.
  53. 88. Le gouvernement ajoute que le personnel enseignant des territoires de l'Union indienne (l'Himachal Pradesh étant un de ces territoires) relève de l'Union indienne et est inclus dans la liste des services essentiels au titre de l'ordonnance de 1968; toute grève de ce personnel est, par conséquent, interdite en vertu de la notification promulguée suite à l'ordonnance du 13 septembre 1968. Aucune notification séparée n'a donc été édictée en ce qui concerne les enseignants de l'Himachal Pradesh.
  54. 89. Le comité, dans le paragraphe 60 ci-dessus, a estimé que, sous réserve de certaines conditions de sauvegarde des intérêts des travailleurs qui se verraient privés du droit de grève en tant que moyen pour faire valoir leurs revendications professionnelles, l'interdiction ou la restriction de la grève dans la fonction publique ou dans les services essentiels n'est pas nécessairement contraire à la liberté syndicale.
  55. 90. Le comité désire néanmoins souligner qu'en se référant aux services essentiels il entend utiliser ce terme dans son sens strict. En effet, il a indiqué qu'il ne paraîtrait pas approprié que toutes les entreprises publiques soient placées sur le même pied en ce qui concerne les restrictions apportées au droit de grève, sans que la législation distingue entre celles qui sont vraiment essentielles, parce que l'interruption de leur fonctionnement pourrait être nuisible au public, et celles qui ne sont pas essentielles d'après ce critère. Dans un cas, le comité a constaté que la législation reconnaissait au gouvernement une grande latitude en ce qui concerne la définition des activités devant être considérées comme services publics qui, dans des cas déterminés, peuvent ne pas coïncider avec ceux qui pourraient être considérés comme des services essentiels. En conséquence, le comité a recommandé au Conseil d'administration, étant donné les répercussions que l'interdiction de la grève peut avoir sur l'exercice des droits syndicaux, de suggérer au gouvernement intéressé la possibilité d'envisager une modification de la disposition en question afin que la grève ne puisse être interdite que dans des cas déterminés, limités aux services considérés strictement comme essentiels.
  56. 91. Dans le cas présent; le comité constate que la législation établit une liste nominative de services gouvernementaux qui comprend également d'autres activités ne comportant apparemment pas un caractère essentiel analogue, telles que, dans des circonstances normales, les travaux dans les ports en général, les travaux de réparation des aéronefs ainsi que tout service de transport, et que le gouvernement a faculté, par ailleurs, d'étendre cette liste.
  57. 92. Dans ces conditions le comité recommande au Conseil d'administration de signaler à l'attention du gouvernement l'importance que revêtent les principes et considérations énoncés aux paragraphes 89 et 90 ci-dessus, et de suggérer au gouvernement l'opportunité, qu'il y aurait d'examiner les réformes nécessaires pour mettre sa législation en harmonie avec lesdits principes et considérations.
    • Allégations relatives à un article de la loi sur les banques
  58. 93. Enfin, à sa session de novembre 1969, le comité a demandé au gouvernement de bien vouloir communiquer ses observations à l'égard des allégations relatives à l'article 36 AD de la loi de 1968 portant modification de la législation sur les banques, disposition qui, selon les plaignants, confère au gouvernement le pouvoir d'interdire les activités normales des syndicats (communication de l'AITUC).
  59. 94. En communiquant le texte de l'article en question, le gouvernement signifie que l'allégation est sans fondement. En effet, l'article incriminé interdit l'accès ou la sortie licites de personnes des bureaux ou locaux où se poursuivent les opérations d'une banque, ou de se livrer à des manifestations violentes entravant ou visant à entraver les activités normales d'une banque ou de commettre des actes susceptibles de porter atteinte à la confiance des déposants dans une compagnie bancaire.
  60. 95. Le gouvernement expose diverses considérations relatives aux caractéristiques de l'activité bancaire et à la responsabilité qui lui incombe d'en assurer le fonctionnement normal durant les heures d'ouverture au public. Le gouvernement ajoute que les dispositions de l'article invoqué par les plaignants ne sauraient être considérées comme constituant une restriction de l'exercice, dans l'ordre et après avertissement correspondant, d'un quelconque droit syndical. L'article n'interdit que les actes clairement indésirables, compte tenu de l'intérêt supérieur du public. Il est d'application générale et ne vise pas seulement les employés de banque. Le gouvernement signale également que deux recours contre la constitutionnalité de l'article ont été rejetés par la Cour suprême de Madras aux termes d'un jugement dont le libellé est joint aux observations du gouvernement. En réfutant les arguments des demandeurs, la cour a conclu qu'il n'y avait pas violation des droits des personnes. Dans une communication en date du 14 mai 1970, le gouvernement indique son intention d'abroger ultérieurement l'article 36 AD de la loi. En mars 1970, le gouvernement s'est engagé devant le Parlement à présenter prochainement un projet à cet effet.
  61. 96. Estimant que les plaignants n'ont pas apporté des éléments de preuve à l'appui de leurs allégations, et compte tenu des explications fournies par le gouvernement, notamment de l'information relative à sa décision d'abroger l'article en question, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que cet aspect du cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 97. En ce qui concerne le cas dans son ensemble, le comité recommande au Conseil d'administration:
  2. 1) à l'égard des allégations relatives à la grève dans le secteur public du mois de septembre 1968:
    • a) de décider, pour les motifs exposés au paragraphe 62, que l'interdiction par le gouvernement de la grève déclarée par les employés du secteur public ne constitue pas une violation de la liberté syndicale;
    • b) de noter l'information fournie par le gouvernement selon laquelle tous les employés mis à pied ou licenciés en raison de la grève ont déjà été réintégrés;
    • c) de noter la déclaration du gouvernement selon laquelle l'intervention de la police aurait été motivée par des actes de violence commis par les grévistes, et les forces de la police auraient agi conformément aux ordres reçus des autorités compétentes;
    • d) d'attirer l'attention du gouvernement sur les principes de la recommandation (no 113) concernant la consultation aux échelons industriel et national, 1960, mentionnés au paragraphe 65 ci-dessus, et d'exprimer l'espoir qu'il sera tenu compte de ces principes à propos du fonctionnement de la commission spéciale qui examinera la question des salaires minima des employés gouvernementaux;
  3. 2) à l'égard des allégations relatives aux sanctions appliquées à des associations d'employés, vu la déclaration du gouvernement selon laquelle la capacité de négociation a été de nouveau reconnue aux organisations intéressées, lesquelles paraissent jouir des mêmes droits dont elles bénéficiaient avant la grève, de décider qu'il serait sans objet de poursuivre l'examen de cet aspect du cas;
  4. 3) à l'égard des allégations relatives à la création de syndicats parallèles, de décider, sous réserve du principe énoncé au paragraphe 82 ci-dessus, pour les motifs exposés au paragraphe 83, qu'il serait sans objet de poursuivre l'examen de cet aspect du cas;
  5. 4) à l'égard des allégations relatives à l'application de deux ordonnances, de décider, pour les motifs exposés au paragraphe 77, que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi;
  6. 5) à l'égard des allégations relatives à la définition des « services essentiels », de signaler à l'attention du gouvernement l'importance qu'il attache aux principes et considérations exposés aux paragraphes 89 et 90 ci-dessus, et de suggérer au gouvernement l'opportunité qu'il y aurait d'examiner les réformes nécessaires afin de mettre la législation en harmonie avec lesdits principes;
  7. 6) à l'égard des allégations relatives à l'article 36 AD de la loi sur les banques, de décider, pour les motifs exposés au paragraphe 96, que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
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