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- 254. Le Comité a déjà examiné ce cas en novembre 1974 et a présenté à cette session un rapport intérimaire qui figure aux paragraphes 349 à 363 de son 147e rapport. Ce dernier a été approuvé par le Conseil d'administration à sa 194e session (novembre 1974).
- 255. La République arabe du Yémen n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 256. La FSM alléguait en particulier que les autorités détenaient en prison de nombreux syndicalistes, sans que ceux-ci bénéficient d'une procédure normale et sans que les tribunaux aient prononcé de jugement. Les autorités auraient même procédé à des exécutions et le plaignant citait les noms de MM. Abdul Gabar Abdul Hameed, Anver Ahmed Galeb, Mohamed Ad-Dahbali et Ali Kassim Saif. Selon la FSM, les autorités avaient encore arrêté, en juin 1973, toute la direction du syndicat des chauffeurs et elles exigeaient que ceux-ci démissionnent et renoncent à toute activité syndicale, en les menaçant de représailles en cas de refus. Vu la fermeté de ces syndicalistes, les autorités auraient exécuté sans jugement l'un d'entre eux, M. Ahmad Said Murchid. Elles auraient aussi exécuté M. Kassim Saif, dirigeant du syndicat des combustibles.
- 257. Le plaignant déclarait également que les arrestations se poursuivaient et qu'elles avaient frappé en particulier la majeure partie de la direction de la Fédération des syndicats du Yémen (FYTU), notamment M. Ahmad Abduh Ganim, ainsi que les membres - et en particulier les présidents - des comités administratifs du Syndicat de l'aviation, du Syndicat des travailleurs des transports, du Syndicat des travailleurs de l'électricité et du Syndicat des travailleurs du textile et des filatures.
- 258. Dans sa réponse, le gouvernement donnait l'assurance que les droits syndicaux et la liberté d'association étaient protégés dans son pays. Il déclarait que les personnes citées, qui avaient été emprisonnées et jugées, étaient des criminels de droit commun. Leur procès avait été public et impartial. Elles avaient été incarcérées et condamnées sévèrement parce qu'elles étaient coupables d'actes criminels et non pas parce qu'elles étaient syndiquées.
- 259. En novembre 1974, le Comité avait notamment insisté sur l'importance qu'il attache à ce que, dans tous les cas, y compris lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou criminels que le gouvernement considère comme étrangers à leurs activités syndicales, les personnes en question soient jugées promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. Le Comité avait signalé également que, dans de nombreux cas où les plaignants alléguaient que des travailleurs ou des dirigeants syndicaux avaient été arrêtés ou condamnés en raison de leurs activités syndicales et où les réponses des gouvernements se bornaient à réfuter de semblables allégations ou à indiquer que les arrestations avaient été opérées en raison d'activités subversives, pour des raisons de sécurité intérieure ou pour des crimes de droit commun, il s'est fait une règle de demander aux gouvernements en question des informations aussi précises que possible sur les mesures incriminées, en particulier en ce qui concerne les actions judiciaires entreprises et, notamment, le texte des jugements prononcés y compris leurs attendus.
- 260. Dans ces conditions, suivant en cela sa pratique courante, qui revêtait en l'occurrence une importance spéciale puisque des militants syndicaux avaient été exécutés, le Comité avait recommandé au Conseil d'administration de prier le gouvernement de bien vouloir fournir le texte des jugements, y compris leurs attendus, à la suite desquels les syndicalistes mentionnés dans la plainte avaient été condamnés à des peines de prison ou exécutés.
- 261. Le gouvernement a envoyé de nouvelles informations par une communication du 14 juin 1975. Il y souligne que les lois de procédure se présentent, dans son pays, sous une forme différente de celle en usage dans beaucoup d'autres Etats et que les jugements, rendus en bonne et due forme, sont libellés en termes juridiques spécifiques, difficilement traduisibles. C'est pourquoi, déclare-t-il, il n'a pas pu répondre complètement à la demande du Comité.
- 262. Il a été prouvé, poursuit-il, qu'Ali Kassim Saif, Abdul Gabar Abdul Hameed, Anwer Ahmad Galeb et Mohamed Ad-Dahbali étaient membres d'une bande de saboteurs, avaient commis des meurtres, transporté des explosifs et des armes et commis d'autres actes de brigandage. Ils furent arrêtés par la sûreté le 16 avril 1973, en possession de nombreux documents, explosifs et armes. D'autres saboteurs furent découverts en même temps. Après avoir été interrogés, tous admirent leurs crimes. Ils comparurent devant la Cour de sûreté de l'Etat où ils furent reconnus coupables et condamnés à mort. Le jugement fut approuvé par le Président du Conseil de la République. Le jugement, ajoute le gouvernement, a retenu les délits suivants: avoir été en possession de nombreuses armes, bombes, explosifs, etc. et les avoir utilisés contre les citoyens et contre l'Etat; avoir conduit des bandes de saboteurs dans la province de Taiz; avoir fait exploser de la dynamite à deux reprises près d'un cinéma, détruisant un véhicule dans le premier cas; avoir laissé une charge de dynamite à retardement au rez-de-chaussée de la demeure du Président du Conseil de la République et avoir réalisé beaucoup d'autres opérations criminelles. Trois de ces quatre personnes, continue le gouvernement, étaient des soldats déserteurs. Quant à Ali Kassim Saif, il avait en particulier tué un soldat de la police militaire et blessé un autre.
- 263. Le gouvernement dément absolument l'arrestation des dirigeants du syndicat des chauffeurs et précise que cette organisation exerce toujours ses activités. Il dément également l'exécution de MM. Ahmed Said Murchid et Kassim Saif, indiquant qu'aucun mal ne leur a été fait.
- 264. M. Ahmad Abduh Ganim, déclare encore le gouvernement, est lieutenant dans l'armée. Il a été arrêté pour avoir été impliqué dans des activités qui troublaient la tranquillité publique, violaient la Constitution et les lois militaires. Il a comparu devant un tribunal et a été condamné à une peine de prison. En ce qui concerne les autres dirigeants syndicaux (voir paragraphe 257), le gouvernement affirme que tout ce qui a été dit au sujet de MM. Ahmad Nooman, Abdul. Rahman Saleh, Abdullah Ahmad Mugbena et Mohammad Al-Tai est sans fondement et que ces personnes travaillent toutes au Yémen.
- 265. Le gouvernement souligne, en conclusion, que le jugement précité de la Cour de sûreté de l'Etat montre bien que les condamnations reposent sur des actes criminels et n'ont aucun rapport avec les activités syndicales il rappelle que la Constitution et la législation nationales garantissent et renforcent la liberté complète des syndicats fondés sur des bases saines.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 266. Le comité note que, selon le gouvernement, plusieurs des syndicalistes auxquels se réfère la plainte n'ont pas fait l'objet des mesures alléguées. Par contre, MM. Ali Kassim Saif, Abdul Gabar Abdul Hameed, Anwer Ahmed Galeb et Mohamed Ad-Dahbali ont été exécutés; bien que les textes des jugements n'aient pas été communiqués, le gouvernement indique que ces condamnations ont été prononcées pour des faits totalement étrangers à des activités syndicales.
- 267. M. Ahmad Abduh Ganim a été, de son côté, condamné à une peine de prison pour des atteintes graves à la tranquillité et à l'ordre publics. Le gouvernement n'a cependant pas fourni de précisions sur les faits qui ont conduit à cette condamnation.
- 268. Le comité n'a pas reçu non plus d'informations sur d'autres dirigeants de la Fédération des syndicats du Yémen ainsi que sur les membres des comités administratifs du Syndicat de l'aviation, du Syndicat des travailleurs des transports, du Syndicat des travailleurs de l'électricité et du Syndicat des travailleurs du textile et des filatures, qui auraient été arrêtés. Le gouvernement donne seulement des indications sur les présidents de ces syndicats qui, d'après lui, travaillent tous au Yémen.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 269. Dans ces conditions, étant donné la gravité du cas, le comité recommande au Conseil d'administration:
- a) de demander au gouvernement de fournir les textes, dans leur langue originale, des jugements prononcés contre les personnes exécutées et contre M. Ahmad Abduh Ganim;
- b) de demander au gouvernement de communiquer des informations sur la situation actuelle des dirigeants autres que les présidents, au sujet desquels le gouvernement a déjà fourni des informations, de la Fédération des syndicats du Yémen et des syndicats de l'aviation, des transports, de l'électricité ainsi que du textile et des filatures;
- c) de demander aux plaignants de communiquer leurs commentaires sur la déclaration du gouvernement selon laquelle MM. Ahmed Said Murchid et Kassim Saif n'ont pas été exécutés et qu'aucun mal ne leur a été fait, étant entendu que le gouvernement aura la possibilité de présenter ses observations sur ces commentaires;
- d) de prendre note de ce rapport intérimaire, étant entendu que le comité présentera un nouveau rapport quand il aura obtenu les informations demandées ci-dessus.