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- 342. La plainte de la Fédération syndicale mondiale (FSM) figure dans une lettre datée du 12 août 1981; celle-ci a fourni des informations complémentaires dans une communication datée du 21 septembre 1981. La plainte de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) figure dans une lettre datée du 2 septembre 1981; la Fédération américaine du travail et Congrès des organisations industrielles (AFL-CIO) l'a appuyée dans une communication datée du même jour. Dans cette même communication, l'AFL-CIO s'est dissociée expressément de la plainte de la FSM. Le gouvernement a répondu par des communications datées des 20 octobre et 5 novembre 1981.
- 343. Les Etats-Unis d'Amérique n'ont ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.
A. Allégations des plaignants
A. Allégations des plaignants
- 344. Dans sa lettre datée du 12 août 1981, la FSM allègue que, pendant la grève menée en août par les contrôleurs aériens, le gouvernement a licencié plus de 12.000 travailleurs, infligé une amende de 100.000 dollars par heure de grève aux syndicats et emprisonné les dirigeants syndicaux. Elle affirme en outre que 72 membres du syndicat font l'objet de "persécutions judiciaires" et que l'or, a fait appel à des contrôleurs militaires pour remplacer ceux qui étaient en grève. Dans sa lettre datée du 21 septembre 1981, la FSM ajoute que l'Administration fédérale de l'aéronautique (FAA) a retiré son certificat d'agent de négociation à l'Organisation des contrôleurs brevetés de la circulation aérienne (PATCO) pour fait de grève, mettant ainsi fin à son existence légale. Elle mentionne que les tribunaux ont inculpé 24 dirigeants syndicaux et prononcé plus de 40 injonctions, et que le gouvernement a mis des grévistes aux fers. Elle allègue enfin que le gouvernement demande désormais à tous les agents fédéraux de signer une clause par laquelle ils s'engagent à ne pas faire la grève, contrairement aux garanties établies dans les conventions de l'OIT sur les droits syndicaux. La FSM demande que les travailleurs licenciés soient réintégrés, que l'on mette fin aux mesures de répression et au harcèlement de la PATCO et que celle-ci soit de nouveau reconnue comme agent négociateur.
- 345. Dans sa lettre datée du 2 septembre 1981, la CISL allègue que le gouvernement a violé les conventions nos 87, 98 et 151 au cours du conflit qui l'a opposé à la PATCO. Il décrit les faits comme suit: le 22 juin 1981, la PATCO et la FAA ont signé un contrat provisoire qui devait être soumis à la ratification de la base; celle-ci l'a rejeté par 95 pour cent des voix et le syndicat a tenté de renégocier ses propositions initiales; devant le refus du gouvernement de reprendre sérieusement les négociations, plus de 12.000 salariés ont arrêté le travail le 3 août; ce même jour, le gouvernement a annoncé qu'il licencierait les grévistes qui n'auraient pas réintégré leur poste le 5 août au plus tard, date à laquelle il a commencé effectivement de mettre sa menace à exécution. Le 9 août, il a réaffirmé son intention de ne pas négocier avec la PATCO et n'a cessé depuis de rejeter les demandes de médiation et de conciliation.
- 346. La CISL déclare qu'en refusant de négocier avec le syndicat et de reconnaître celui-ci après le débrayage et avant que l'affaire ne soit régulièrement jugée, le gouvernement a déclaré ne plus reconnaître la PATCO comme agent négociateur, ce qui revient à une dissolution par voie administrative. Elle ajoute que l'Administration fédérale de l'aéronautique (seul organisme légalement habilité à négocier sur certaines questions de sécurité qui étaient incluses dans les demandes du syndicat) a refusé d'assister à toute séance de négociation tenue avant ou après le 22 juin et que le gouvernement, quant à lui, a refusé toute négociation après le 3 août. La CISL soutient qu'il s'agit là d'une violation du droit de négociation collective, aggravée encore par la déclaration d'intention du gouvernement selon laquelle il négocierait directement avec les salariés qui auraient repris le travail.
- 347. Selon la CISL, les dirigeants de la FAA conseillent aux syndiqués dont les contrats ont été résiliés de faire appel de cette décision à titre individuel, sans se faire représenter par leur syndicat; le gouvernement, quant à lui, déclare que ce sont des décisions administratives internes non officielles qui détermineront qui sera réintégré et conseille aux affiliés de la PATCO de témoigner contre elle pour éviter d'être licenciés; il profère des menaces de violence physique au cas où les syndicalistes dénonceraient les manoeuvres d'intimidation à leur syndicat. En outre, la CISL allègue que le gouvernement a lancé des poursuites judiciaires contre la PATCO devant près de 70 tribunaux dans tout le pays, plutôt que d'intenter un seul procès collectif, dans le but d'excéder les capacités de défense de l'organisation la CISL énumère entre autres actes allégués de discrimination antisyndicale: les actes d'accusation individuels déposés contre 75 adhérents de la PATCO, inculpés pour participation au débrayage; la requête du gouvernement (requête qu'il a nié avoir faite) visant à faire emprisonner les membres du bureau exécutif du syndicat pour n'avoir pas ordonné à ses membres la reprise du travail; l'imposition d'amendes excessives à la demande du gouvernement; l'emprisonnement, à l'initiative du gouvernement, de cinq membres de la PATCO, dont l'un a été mis aux fers; les brimades infligées aux travailleurs syndiqués par d'autres administrations publiques telles que le département du Logement et du Développement urbain, qui n'autorise plus ceux-ci à se prévaloir des facilités prévues pour le remboursement des prêts au logement; enfin, les tentatives du gouvernement pour interdire la constitution de piquets de grève non violents par le syndicat.
- 348. Enfin, la CISL allègue que l'interdiction du droit de grève pour le syndicat n'était pas compensée par des garanties suffisantes visant à sauvegarder les intérêts des travailleurs et que cette limitation est discriminatoire si l'on considère que les pilotes et d'autres groupes organisés dans le secteur du trafic aérien bénéficient de ce droit.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 349. Dans sa communication du 20 octobre 1981, le gouvernement explique que les participants aux négociations avec la PATCO, qui ont duré sept mois, comprenaient une douzaine de représentants de la FAA (le directeur des relations professionnelles représentant l'administrateur de la FAA), une douzaine de représentants de la PATCO, le directeur par intérim ainsi qu'un membre du Service fédéral de médiation et de conciliation (FMCS). Le gouvernement décrit ainsi les faits: en janvier 1981, la PATCO a présenté un ensemble de 99 propositions et la FAA 15 contre-propositions; près de la moitié des propositions de la PATCO étaient en dehors du domaine de compétence de la FAA (domaine limité, en vertu du titre 5 de l'U.S.C. 7103 a) (12,14) et du titre 5 de l'U.S.C. 7106, à la politique du personnel et aux conditions de travail). La FAA n'a toutefois pas écarté la possibilité de faire adopter une législation nouvelle qui lui permettrait de répondre aux demandes qu'elle ne pouvait, alors, négocier; au terme de discussions prolongées, les parties n'ont abouti à un accord que sur quatre propositions; la PATCO a quitté la table des négociations le 28 avril et présenté, au retour de sa convention annuelle, un ultimatum selon lequel elle déclencherait une grève si, le 22 juin au plus tard, la FAA n'avait pas trouvé un arrangement acceptable; le 22 juin, le président de la PATCO a annoncé avoir obtenu une "convention satisfaisant", mais le bureau exécutif et la base la rejetèrent; le 31 juillet, la PATCO a envoyé au gouvernement un préavis de grève de 67 heures pour régler le différend, mais elle a modifié ses propositions originales, les portant à une somme 17 fois supérieure à celle qui avait été décidée dans le règlement de juin; le secrétaire aux Transports a prié à plusieurs reprises la PATCO d'étendre son délai de grève, mais le représentant du FMCS lui-même n'est pas parvenu à la convaincre de présenter des réaménagements ou des propositions nouvelles concernant ledit règlement; le 3 août, la grève était déclenchée.
- 350. Selon le gouvernement, une fois la grève commencée, il a obtenu, auprès du tribunal compétent pour le district de Columbia, une ordonnance temporaire de sursis à l'exécution contre la PATCO, son président et dix autres délégués syndicaux visant à limiter les risques pour la sécurité publique dans les voies aériennes et à mettre fin à la grève le plus rapidement possible. L'ordonnance a été concédée parce que la loi américaine (titre 18 de l'U.S.C. 1918) interdit aux agents de l'administration fédérale de faire la grève et que ceux-ci s'étaient engagés par écrit à s'en abstenir. La PATCO ne s'est pas conformée à l'injonction du tribunal qui, le 10 août, lui a infligé les amendes pour désobéissance prévues dans son ordonnance, à savoir 1.000 dollars par jour pour le président du syndicat et une échelle mobile de 250.000 à 1.000.000 de dollars par jour pour le syndicat lui-même; toutefois, le tribunal s'est opposé aux autres mesures demandées par le gouvernement, à savoir l'emprisonnement du président. Le gouvernement signale qu'aux Etats-Unis un tribunal peut infliger des amendes sans tenir compte des ressources du défendeur. La PATCO ayant refusé d'obéir à cette ordonnance, le gouvernement en a conclu que le seul recours effectif consistait à demander des ordonnances de sursis à l'exécution contre les 12.000 contrôleurs grévistes auprès de tribunaux fédéraux locaux dans tout le pays; 100 ordonnances temporaires lui furent ainsi accordées. Le gouvernement explique que, dans deux affaires de désobéissance civile, les juges sont allés au-delà de ses demandes et ont condamné cinq membres à des peines de prison. Dans l'une des deux, conformément à l'usage courant de ce tribunal, le défendeur fut mis aux fers et emmené ainsi en prison. D'après le gouvernement, dans ces deux affaires, les défendeurs comparurent devant le tribunal où ils étaient assistés par un avocat et furent soumis à un choix: se conformer à l'ordonnance du tribunal ou aller en prison; tous choisirent la prison, mais ils furent libérés quelques jours plus tard à la demande du gouvernement. Celui-ci déclare qu'à la date du 7 octobre 1981, seuls 63 contrôleurs aériens avaient été inculpés pour violation de la loi interdisant la grève et 70 autres procès étaient en cours d'instruction.
- 351. Le gouvernement ajoute que l'Association des transports aériens (ATA) a engagé, de sa propre initiative, des poursuites judiciaires contre la PATCO pour désobéissance à une injonction privée de 1970 interdisant toute nouvelle grève. La PATCO s'efforce de faire annuler cette injonction, mais elle n'y est pas parvenue à ce jour et le tribunal de district compétent pour le district oriental de New-York lui a infligé une amende de 100.000 dollars par heure (soit deux fois le montant demandé par l'ATA) pour toute la durée de la grève et une amende supplémentaire de 25.000 dollars par, jour: quand les jugements prononcés eurent atteint 4,5 millions de dollars d'amendes, le juge a cessé d'imposer cette peine.
- 352. Le gouvernement déclare qu'un troisième type d'action fut lancé le 3 août: les grèves contre le gouvernement étant considérées comme une pratique déloyale en matière de relations professionnelles (titre 5 de l'U.S.C. 7116 b) (7)), la FAA déposa une plainte pour ce motif auprès de l'Office fédéral des relations professionnelles (FLRA) - organisme indépendant quasi judiciaire du gouvernement fédéral qui réglemente les relations professionnelles dans le secteur public fédéral. Elle demandait que l'on retire à la PATCO son statut exclusif de reconnaissance. Les 10 et 11 août, des audiences eurent lieu devant le juge président administratif du FLRA, en présence de toutes les parties, qui étaient assistées par des avocats. Après que le juge eut recommandé la révocation, le FLRA au complet entendit les plaidoiries; le 9 octobre 1981, l'affaire n'avait pas encore été tranchée. Le gouvernement signale qu'il peut être fait appel de la décision du FLRA devant la cour d'appel. Le 3 août, le FLRA avait également obtenu, à la demande de la FAA, une ordonnance temporaire de sursis à l'exécution contre la PATCO.
- 353. D'après le gouvernement, le 9 août, la PATCO porta plainte devant le FLRA pour pratique déloyale en matière de relations professionnelles, alléguant que la FAA avait refusé de négocier de bonne foi; toutefois, la demande fut rejetée le 25 août et la PATCO fut déboutée de son appel le 21 septembre.
- 354. Le gouvernement déclare que la loi fédérale interdit spécifiquement aux salariés qui ont l'intention de recourir à la grève d'accepter tout emploi dans l'administration publique (titre 5 de l'U.S.C. 7311); aussi, la PATCO et tous les contrôleurs individuels avaient-ils été maintes fois avertis que ceux qui participeraient à une grève illégale courraient le risque d'être licenciés. Quand la grève commença, le Président des Etats-Unis, de sa propre initiative, accorda aux grévistes un délai de grâce de 48 heures pour reprendre le travail et le Département des transports publics interpréta ce délai aussi libéralement que possible. Le 6 août, la FAA commença d'envoyer des lettres d'intention de licencier aux grévistes et, au terme du délai de réponse de sept jours, expédia des avis de licenciement, informant les salariés de leur droit de faire appel dans les vingt jours suivants auprès du Service de protection des systèmes de mérite (MSPB) qui transmet le recours soit à la cour des réclamations, soit à la cour d'appel. Les contrôleurs qui fourniraient une raison valable pour leur absence pendant la grève pourront être réintégrés à leur poste par la FAA ou le MSPB. C'est pourquoi le gouvernement considère que le licenciement des grévistes n'était pas injustifié.
- 355. En réponse à l'allégation précise de la FSM concernant le droit de grève, le gouvernement estime qu'il donne des garanties adéquates pour sauvegarder les intérêts des travailleurs fédéraux qui ne bénéficient pas de ce droit: deux représentants du Service fédéral de médiation et de conciliation (FMCS) (organe indépendant institué pour aider les parties à des différends du travail dans les branches d'activité touchant le commerce à régler ces différends par la voie de la conciliation et de la médiation), ont assisté à toutes les négociations sur la demande et avec l'assentiment des deux parties; la PATCO a toujours été en mesure, pendant les négociations, de présenter un "appel sur la négociabilité" à l'Autorité fédérale en matière de relations professionnelles (FLRA) (5 U.S.C. 7117), en lui demandant d'annuler le refus du gouvernement de négocier sur des revendications syndicales spécifiques que le gouvernement considère comme n'étant pas négociables de par la loi, mais la PATCO n'a pas fait usage de ce droit; la PATCO aurait pu également en tout temps présenter un recours en vue d'un règlement par l'arbitrage obligatoire par l'intermédiaire du Comité fédéral chargé de trouver une solution en cas d'impasse (5 U.S.C. 7119) - organisme établi au sein du FLRA pour prêter assistance lorsque les négociations sont dans l'impasse sur des questions qui ont déjà été définies comme étant négociables et lorsque les parties ont épuisé tous les autres moyens de régler les différends, c'est-à-dire les arrangements facultatifs, le Service fédéral de médiation et de conciliation ou toute autre médiation par une tierce partie.
- 356. En ce qui concerne l'allégation de la FSM selon laquelle 72 syndicalistes font l'objet de "persécutions judiciaires", le gouvernement insiste sur le fait que les 70 membres de la PATCO qui sont encore poursuivis pour avoir violé les ordonnances temporaires de suspension du mouvement de grève bénéficient de toutes les garanties d'une procédure régulière et que cela ne peut en aucune manière être considéré comme une "persécution".
- 357. En ce qui concerne l'allégation de la FSM au sujet du recours à des contrôleurs militaires, le gouvernement déclare que les effectifs militaires, après la convocation initiale de 150 personnes, ont été portés à 370 le 7 août et qu'il y a actuellement 800 militaires occupés comme personnel de soutien dans les aéroports civils. Il estime que l'utilisation de contrôleurs militaires en cas d'urgence est entièrement conforme au principe de la liberté syndicale selon lequel, en cas de grève illégale dans des services essentiels, le gouvernement peut déployer du personnel de ce genre dans l'intérêt du bien-être et de la sécurité du public.
- 358. En réponse à l'allégation de la CISL relative à la dissolution du syndicat par voie administrative, le gouvernement rappelle le principe selon lequel la dissolution ou le retrait de la reconnaissance d'un syndicat ne peuvent avoir lieu que par voie judiciaire et uniquement s'il existe une disposition qui permet de reporter la mise en vigueur de l'ordonnance portant retrait de reconnaissance jusqu'au moment où toutes les possibilités de recourir auprès des organes judiciaires ont été épuisées. Il déclare que la PATCO a soulevé cette question du retrait de reconnaissance de facto dans son accusation de pratiques déloyales en matière d'emploi présentée au FLRA, accusation qui a tout d'abord été rejetée par le directeur régional de cet organisme, puis par le Conseil général. Au dire du gouvernement, jusqu'à ce qu'un retrait de reconnaissance formel et définitif soit ordonné, la PATCO est en mesure d'exercer ses droits de représentant des contrôleurs aériens salariés et jouit encore du statut de représentant à titre exclusif aux fins de la négociation. De plus, il signale que la demande de retrait de reconnaissance de la PATCO est soumise à la procédure ordinaire, à savoir une instruction devant le FLRA dont la décision peut faire l'objet d'un recours auprès de la cour d'appel. En ce qui concerne le prétendu refus de négocier soulevé par la CISL, le gouvernement indique que l'administrateur de la FAA était représenté par le directeur des relations professionnelles de cet organisme à toutes les sessions de négociation, ce représentant ayant les pleins pouvoirs pour conclure un accord avec la PATCO. En fait, cette personne figure parmi les signataires de l'accord du 22 juin. En ce qui concerne le refus de négocier après le début de la grève illégale, le gouvernement prétend que cette mesure n'était pas antisyndicale parce que la PATCO disposait des garanties appropriées pour compenser l'absence du droit de grève.
- 359. En ce qui concerne l'allégation de la CISL selon laquelle les surveillants de la FAA prennent contact avec les membres de la PATCO et les menacent, et interviennent donc dans les affaires du syndicat, le gouvernement déclare qu'aucune preuve n'a été fournie à l'appui de cette accusation. Il soutient que toute personne a le droit de présenter de telles allégations à la FLRA, mais que personne ne l'a fait jusqu'à présent. Il signale en outre que les syndicalistes ont été renvoyés aux termes de procédures strictement définies par la loi et peuvent être réintégrés par le Service de protection des systèmes de mérite, et non par des décisions internes et informelles de l'administration qui sont interdites. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle le gouvernement cherche à excéder les capacités de défense du syndicat, il signale qu'il n'a entrepris de poursuites civiles contre les grévistes individuels que parce que la PATCO a ignoré l'ordonnance temporaire de suspension du mouvement de grève donné le 3 août. Il déclare que la PATCO a demandé à la cour de joindre les causes, mais qu'aucune décision n'a été rendue jusqu'à présent. Le gouvernement s'est opposé à la demande de la PATCO parce que, actuellement, les cas intéressent essentiellement la réglementation du système de piquets de grève dans chaque installation par des anciens salariés de la FAA, ce qui est une question de caractère local. En ce qui concerne les cas d'inculpation pénale, le gouvernement indique que la loi des Etats-Unis interdit la jonction des causes criminelles. A ce propos, le gouvernement rejette l'allégation selon laquelle il a cherché à interdire tous les piquets de grève et il déclare qu'en cas de grève illégale le système de piquets de grève non violents peut, de par la loi, être réglementé par les tribunaux de district.
- 360. En ce qui concerne l'allégation de la CISL au sujet d'une discrimination antisyndicale exercée par d'autres organismes gouvernementaux, le gouvernement explique que le département du logement et du Développement urbain, le 20 août, a annoncé que les anciens contrôleurs aériens seraient considérés, pour les questions de prêt au logement, s'ils en faisaient la demande, en fonction des mêmes critères que n'importe quelle autre personne qui demanderait à bénéficier d'un dégrèvement de ce genre. Toutefois, il a noté également que les contrôleurs en grève ne pourraient pas satisfaire toutes les conditions étant donné que "la participation à une grève illégale ne peut pas être envisagée comme des circonstances échappant au pouvoir d'un individu" qui l'aurait empêché de payer ses hypothèques.
- 361. Enfin, le gouvernement rejette la plainte de la CISL selon laquelle les contrôleurs du trafic aérien devraient être exemptés des restrictions légales au droit des agents fédéraux de faire la grève parce que d'autres groupes organisés dans ce secteur jouissent de ce droit. Il relève que les pilotes et d'autres groupes de ce genre ne sont pas des agents du gouvernement et que toute modification concernant le droit de grève des contrôleurs du trafic aérien devrait être apportée par le Congrès, et non par l'exécutif.
- 362. Dans une lettre du 5 novembre 1981, le gouvernement envoie de nouvelles informations concernant la procédure entamée à l'égard de la PATCO. Selon le gouvernement, le 22 octobre 1981, l'Office fédéral des relations professionnelles, composé de trois membres, a décidé de maintenir la recommandation de son juge, président administratif, et la PATCO a fait appel de cette recommandation. Dans le même temps, elle a introduit une demande en référé pour la suspension de l'annulation décidée par l'office concernant son statut de reconnaissance exclusive, suspension qui aurait été accordée par le tribunal jusqu'au 27 octobre. Le tribunal a indiqué qu'une commission de trois juges est chargée d'entendre cette affaire le plus rapidement possible. Le gouvernement déclare, en outre, que les demandes introduites par la PATCO pour un examen conjoint des actions judiciaires à son encontre ont été refusées le 20 octobre 1981.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 363. Le présent cas concerne des allégations selon lesquelles, pendant la grève des contrôleurs du trafic aérien qui a commencé en août 1981, le gouvernement a violé les conventions de l'OIT sur la liberté syndicale de la manière suivante: le gouvernement n'a pas fourni des garanties suffisantes pour compenser l'interdiction légale du droit de grève des agents fédéraux; il a commis plusieurs actes antisyndicaux (actions pénales et civiles; imposition d'amendes excessives; emprisonnement de cinq syndicalistes qui faisaient la grève, l'un étant même enchaîné; licenciement de plus de 12.000 grévistes, mesures d'intimidation et de discrimination contre les syndicalistes); il a utilisé des contrôleurs militaires pour remplacer les grévistes; il a refusé de négocier avec le Syndicat des contrôleurs du trafic aérien, ce qui pourrait être considéré comme équivalant à une dissolution par voie administrative, et il a retiré le certificat d'agent négociateur au syndicat.
- 364. Le comité estime que la nature du cas se caractérise principalement par le fait que la législation des Etats-Unis interdit les grèves des agents fédéraux, les contrôleurs du trafic aérien étant inclus dans cette catégorie puisqu'ils sont employés par l'Administration fédérale de l'aéronautique (FAA), organisme qui dépend du département fédéral des Transports. Les articles pertinents de la loi sur les relations professionnelles dans le service fédéral et du Code pénal disposent:
- Article 7311 (LRPSF)
- Aucune personne ne peut accepter ou détenir un emploi dans le gouvernement des Etats-Unis ou dans le gouvernement du district de Columbia si:
- [... ]
- 3) elle participe à une grève, ou revendique le droit de faire la grève, contre le gouvernement des Etats-Unis ou contre le gouvernement du district de Columbia;
- 4) elle est membre d'une organisation de salariés du gouvernement des Etats-Unis ou de personnes occupées par le gouvernement du district de Columbia qu'elle sait revendiquer le droit de grève contre le gouvernement des Etats-Unis ou contre le gouvernement du district de Columbia.
- Article 1918 (CP):
- Toute personne qui viole la disposition de l'article 7311 du titre 5, selon laquelle aucune personne ne peut accepter ou détenir un emploi dans le gouvernement des Etats-Unis ou dans le gouvernement du district de Columbia si:
- [... ]
- 3) elle participe à une grève, ou revendique le droit de faire la grève contre le gouvernement des Etats-Unis ou contre le gouvernement du district de Columbia;
- 4) elle est membre d'une organisation de salariés du gouvernement des Etats-Unis ou de personnes occupées par le gouvernement du district de Columbia qu'elle sait revendiquer le droit de faire la grève contre le gouvernement des Etats-Unis ou le gouvernement du district de Columbia,
- sera punie d'une peine d'amende de 1.000 dollars au maximum ou d'une peine d'emprisonnement qui ne dépassera pas une année et un jour, ou encore des deux peines.
- 365. Le comité souhaite rappeler qu'il a déjà indiqué, dans le passé, que, bien que l'action directe - telle que le droit de grève par les travailleurs et leurs organisations - soit généralement reconnue comme un moyen légitime de défendre leurs intérêts professionnels, ce droit pouvait être limité, voire interdit, dans la fonction publique ou dans les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait en danger la vie ou les conditions normales d'existence de tout ou partie de la population. Le comité a, par exemple, estimé que, d'après ce critère, le secteur des hôpitaux est un service essentiel. Dans un autre cas, par exemple, le comité a estimé qu'il n'était pas établi de façon convaincante que l'Office de la monnaie, le Service des imprimeries d'Etat et les monopoles d'Etat des alcools, du sel et du tabac constituaient des services réellement essentiels, d'après le critère énoncé. Le comité a dans ce cas estimé que, bien que l'on puisse affirmer que des arrêts de travail provoqués par les travailleurs intéressés puissent gêner le public, il ne paraissait pas possible de considérer qu'ils pourraient causer un préjudice grave au public. Appliquant ce critère aux conditions particulières du présent cas, le comité considère que le refus de services des contrôleurs du trafic aérien pouvait mettre en danger l'existence ou le bien-être d'un très grand nombre de passagers et du personnel navigant. Il est en conséquence d'avis que l'exclusion de cette catégorie particulière d'agents de la fonction publique du droit de grève ne constitue pas une violation des principes de la liberté syndicale.
- 366. Néanmoins, le comité a toujours estimé que, lorsque le droit de grève a été restreint ou supprimé dans certaines entreprises ou services considérés comme essentiels, les travailleurs devraient bénéficier d'une protection adéquate de manière à compenser les restrictions qui auraient été imposées à leur liberté d'action, par exemple par des procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives. Le comité souhaite rappeler à cet égard la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, qui déclare, à l'article 8, que le règlement des différends survenant à propos de la détermination des conditions d'emploi sera recherché, d'une manière appropriée aux conditions nationales, par voie de négociation entre les parties ou par une procédure donnant des garanties d'indépendance et d'impartialité, telles que la médiation, la conciliation ou l'arbitrage, instituée de telle sorte qu'elle inspire la confiance des parties intéressées. Le comité note que dans le présent, cas, au dire du gouvernement, les contrôleurs du trafic aérien bénéficiaient de garanties suffisantes par la présence continue du directeur en exercice et d'un collaborateur du Service fédéral de médiation et de conciliation pendant toutes les négociations, que ces contrôleurs avaient le droit de présenter un "appel sur la négociabilité" auprès de l'Office fédéral des relations professionnelles et qu'ils disposaient aussi du droit de demander un arbitrage obligatoire en s'adressant au comité fédéral chargé de trouver une solution en cas d'impasse, comité qui relève du FLRA. Le gouvernement signale que le syndicat n'a fait usage d'aucune de ces procédures, mais qu'il a présenté une accusation de pratiques déloyales en matière d'emploi auprès du FLRA, en alléguant que le gouvernement avait refusé de négocier en bonne foi, accusation qui a été rejetée en première instance et en appel.
- 367. Le comité a examiné les dispositions pertinentes de la loi sur les relations professionnelles dans l'administration fédérale (chapitre 71, titre 5, US Code). Il note que ces dispositions énoncent en particulier que le FMCS fournira les services et l'assistance nécessaires aux administrations et aux représentants exclusifs pour trouver une solution en cas d'impasse des négociations et qu'il appartient au FMCS lui-même de déterminer dans quelles circonstances et sous quelle forme il dispensera cette assistance; il note aussi que, lorsque les services du FMCS ne parviennent pas à sortir les négociations de l'impasse, l'une ou l'autre des parties peut demander à la commission fédérale chargée de trouver une solution en cas d'impasse d'examiner la question et que les parties peuvent aussi convenir d'adopter une procédure d'arbitrage obligatoire concernant l'impasse dans les négociations, si cette procédure est approuvée par la commission (5 U.S.C. 7119)1. Le comité a pris note également de la disposition selon laquelle, si une administration participant à des négociations collectives avec un représentant exclusif allègue que l'obligation de négocier de bonne foi ne s'applique pas à une question particulière, le représentant exclusif peut, dans un délai de quinze jours, former un recours contre cette allégation auprès du FLRA (5 U.S.C. 7117).
- 368. Le comité estime que, dans le cas d'espèce, la prescription selon laquelle le FMCS doit fournir les services et l'assistance nécessaires aux partenaires à la négociation afin de trouver une issue aux négociations dans l'impasse a été satisfaite par la présence continue tout au long des négociations des deux représentants du FMCS. Le fait que les négociations entre la FAA et la PATCO ont finalement échoué ne change rien à cet égard. En outre, d'après les renseignements dont dispose le comité, il apparaît que la PATCO n'a mis à profit aucune des procédures susmentionnées, à, savoir appel auprès du FLRA concernant le bien-fondé des négociations, renvoi de l'affaire à la commission fédérale chargée de trouver une solution en cas d'impasse ou recours à l'arbitrage obligatoire. Tout en reconnaissant que le recours à l'arbitrage obligatoire n'était possible qu'avec l'accord de la FAA et avec l'approbation de la commission susmentionnée, le comité ne peut que: noter que rien n'empêchait la PATCO de proposer le recours à l'arbitrage. Dans ces conditions, le comité ne se trouve pas en mesure d'appuyer l'allégation qu'il n'existe pas de procédures adéquates pour défendre les intérêts des travailleurs ne bénéficiant pas du droit de grève.
- 369. S'agissant des allégations relatives aux mesures prises contre le syndicat et contre des syndicalistes individuellement pendant la grève, le comité note l'explication du gouvernement selon laquelle les autorités judiciaires ont imposé des amendes (l'un des cas cités est une mesure privée n'ayant rien à voir avec le gouvernement) et ont emprisonné brièvement cinq syndicalistes pour refus d'obéir aux décisions du tribunal obtenues par le gouvernement. Il note la déclaration du gouvernement selon laquelle les licenciements ont été effectués conformément à la législation en vigueur et peuvent faire l'objet d'un recours auprès des autorités judiciaires. Il note enfin que le gouvernement estime que les allégations d'intimidation et d'ingérence ne sont pas fondées et que l'exemple allégué de discrimination antisyndicale dans le programme public de protection contre les risques liés à l'hypothèque est erroné dans les faits. Vu la grande variété et l'extrême sévérité des mesures prises contre les contrôleurs du trafic aérien en grève, le comité rappelle qu'il a fait observer précédemment que l'imposition de sanctions excessivement sévères à l'égard des fonctionnaires en raison de leur participation à une grève n'est pas de nature à favoriser des relations professionnelles harmonieuses. Il prie le gouvernement d'étudier la possibilité et de l'informer de toute mesure prise ou envisagée en vue de réengager les contrôleurs licenciés, d'annuler ou de réduire les amendes imposées et il exprime l'espoir qu'aucun contrôleur ne sera privé des facilités prévues pour le remboursement des prêts au logement en raison seulement de sa participation à la grève des contrôleurs du trafic aérien.
- 370. Quant au recours aux contrôleurs militaires, le comité prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle cette mesure de caractère strictement temporaire était nécessaire pour minimiser le danger que la grève pouvait présenter pour la sécurité publique des transports aériens et pour mettre fin à la grève aussi rapidement que possible. Dans le présent cas, le comité a déjà déclaré que la cessation des services des contrôleurs du trafic aérien pourrait mettre en danger l'existence ou le bien-être d'un très grand nombre de passagers des transports aériens et du personnel de vol. Il estime en outre que le recours à des contrôleurs militaires à titre de mesure d'urgence pour préserver la sécurité des passagers des transports aériens était en l'occurrence la seule possibilité offerte au gouvernement autre que celle de la fermeture totale du trafic aérien. Le comité ne peut donc soutenir l'allégation selon laquelle les mesures prises par le gouvernement à cet égard constituent une violation des principes de la liberté syndicale. Il note la déclaration du gouvernement selon laquelle les mesures en question sont de caractère strictement temporaire, il exprime l'espoir que la situation redeviendra normale dans un proche avenir et demande au gouvernement de l'informer de toutes mesures prises dans cette direction.
- 371. Au sujet des allégations concernant la dissolution de la PATCO par voie administrative et du retrait de son certificat d'agent négociateur, le comité note que les procédures de retrait du certificat sont encore en instance devant les autorités judiciaires compétentes. Il souhaite demander des informations au gouvernement sur les résultats des procédures. Le comité souhaite néanmoins rappeler à l'attention du gouvernement le principe selon lequel les employeurs, y compris les autorités gouvernementales agissant en tant qu'employeur, devraient reconnaître, aux fins de négociation collective, les organisations représentatives des travailleurs. Il exprime l'espoir que le gouvernement sera à cet égard en mesure de réengager un dialogue avec la PATCO.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 372. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver les conclusions suivantes:
- Le comité estime que la cessation des services des contrôleurs du trafic aérien pourrait mettre en danger la vie et la sécurité d'un grand nombre de passagers des transports aériens et du personnel de vol. Il estime donc que l'exclusion de cette catégorie particulière de salariés du droit de grève ne constitue pas une violation des principes de la liberté syndicale.
- Le comité estime que le recours à des contrôleurs militaires du trafic aérien à titre de mesure d'urgence pour préserver la sécurité des passagers des transports aériens était en l'occurrence la seule possibilité offerte au gouvernement, autre que celle de la fermeture totale du trafic aérien. Il ne peut donc pas appuyer l'allégation que cette mesure du gouvernement constitue une violation des principes de la liberté syndicale. Il note la déclaration du gouvernement selon laquelle les mesures en question sont de caractère strictement temporaire, il exprime l'espoir que la situation redeviendra normale dans un proche avenir et il demande au gouvernement de l'informer de tout fait nouveau dans cette direction.
- Le comité rappelle l'importance qu'il attache au principe selon lequel, lorsque le droit de grève est restreint ou interdit dans la fonction publique ou dans les services essentiels au sens strict du terme, une protection adéquate, par exemple une conciliation et un arbitrage impartiaux et rapides, devrait être accordée aux travailleurs intéressés pour compenser cette restriction à leur liberté d'action. Ayant examiné les dispositions pertinentes de la loi sur les relations professionnelles dans l'administration fédérale (chapitre 71, titre 5, US Code), le comité n'est pas en mesure d'appuyer l'allégation qu'il n'existe pas de procédure satisfaisante pour préserver les intérêts des travailleurs ne bénéficiant pas du droit de grève.
- Le comité relève la sévérité des diverses mesures prises contre les contrôleurs du trafic aérien. Il est d'avis que l'imposition de sanctions excessivement sévères à l'égard des fonctionnaires en raison de leur participation à une grève n'est pas de nature à favoriser des relations professionnelles harmonieuses. Il demande au gouvernement d'étudier la possibilité et de l'informer de toute mesure prise ou envisagée en vue de réengager les contrôleurs licenciés, d'annuler ou de réduire les amendes imposées et il exprime l'espoir qu'aucun contrôleur ne sera privé des facilités prévues pour le remboursement des prêts au logement en raison seulement de sa participation à la grève des contrôleurs du trafic aérien.
- En ce qui concerne le retrait de reconnaissance de la PATCO en tant qu'agent négociateur, le comité note que les procédures sont encore en instance devant les autorités judiciaires compétentes et prie le gouvernement de l'informer du résultat de ces procédures. Il rappelle à cet égard l'importance qu'il attache au principe selon lequel les employeurs, y compris les autorités gouvernementales agissant en tant qu'employeur, devraient reconnaître, aux fins de négociation collective, les organisations représentatives de leurs salariés. Il exprime donc l'espoir que le gouvernement sera à cet égard en mesure de réengager un dialogue avec la PATCO.