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- 520. Le comité a examiné ce cas à sa réunion de novembre 1983, et a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir 230e rapport du comité, paragr. 619 à 659, approuvé par le Conseil d'administration à sa 224e session (novembre 1983).] Par la suite, le gouvernement a envoyé ses observations par une communication du 11 janvier 1984.
- 521. Le Chili n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas
- 522. Lorsque le comité a examiné le cas à sa session de novembre 1983, il a formulé les recommandations suivantes au sujet des allégations restées en suspens [voir 230e rapport, paragr. 659]:
- "Le comité déplore vivement les quatre morts et les violences physiques qui se sont produites le 14 juin 1983 (deuxième jour de protestation nationale)."
- "En même temps qu'il se déclare gravement préoccupé devant les allégations détaillées de tortures formulées par les plaignants, le comité prie le gouvernement de procéder au plus tôt à une enquête judiciaire indépendante sur les tortures alléguées (en particulier, en ce qui concerne Mme Maria Rozas et M. Sergio Troncoso - tous deux dirigeants syndicaux - et M. José Anselmo Navarrete - syndicaliste) en vue de faire la lumière sur les faits, d'établir les responsabilités et punir les coupables."
- "Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les dirigeants syndicaux licenciés (34 selon les plaignants) puissent réintégrer leurs postes au plus tôt, pour que l'entreprise CODELCO se désiste des actions en justice qu'elle a introduites en vue de faire destituer des dirigeants syndicaux de leurs fonctions, et pour que tous les travailleurs qui ont été congédiés pour des raisons syndicales soient réintégrés."
- "Le comité demande au gouvernement:
- i) de communiquer le résultat des enquêtes judiciaires relatives aux quatre morts et aux violences qui se sont produites le 14 juin 1983 (deuxième journée de protestation nationale);
- ii) d'envoyer ses observations sur les inculpations ou les détentions des douze dirigeants syndicaux et des cinq syndicalistes mentionnés à l'annexe I;
- iii) d'envoyer ses observations sur l'allégation relative à l'agression contre le local du Conseil national de coordination syndicale, avec vol de meublés et autres biens;
- iv) d'envoyer au plus tôt ses observations au sujet des récentes allégations concernant la séquestration, les tortures et les menaces de mort dont aurait fait l'objet, le 7 octobre 1983, M. Raúl Montecinos, dirigeant de la CTC, qui se trouverait actuellement hospitalisé;
- v) de communiquer le résultat des enquêtes judiciaires en cours sur les allégations de tortures, notamment en ce qui concerne Mme Maria Rozas, M. Sergio Troncoso (tous deux dirigeants syndicaux) et M. José Anselmo Navarrete;
- vi) d'indiquer les mesures prises pour faire cesser les actes de discrimination antisyndicale commis contre des dirigeants syndicaux et des travailleurs."
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 523. Le gouvernement déclare, au sujet des morts et des violences physiques qui se sont produites lors des événements du 14 juin 1983, qu'il regrette profondément ces faits affligeants qui sont imputables à la seule irresponsabilité de ceux qui, sans en mesurer les conséquences, et malgré l'expérience du mois de mai, ont recommencé à inciter la population à perturber l'ordre public. Les membres du Corps des carabiniers ont constitué la principale cible des actes de violence perpétrés par les manifestants qui ont causé un grand nombre de blessés graves, y compris par balles. Le gouvernement appelle une fois de plus l'attention sur le fait que ces actes de violence se sont produits dans la nuit du 14 juin 1983, après la journée normale de travail et dans des quartiers périphériques de la ville. Aucun dirigeant syndical ni aucun "syndicaliste" n'a pris part à ces événements qui n'ont pas eu non plus pour objet un motif syndical et sont donc assimilables aux faits délictueux définis dans la législation pénale ordinaire. En effet, exiger non seulement la démission du gouvernement, mais aussi inciter les parents à ne pas envoyer leurs enfants à l'école, à ne rien acheter dans les établissements commerciaux, à éteindre les lumières des maisons et à frapper sur des marmites et des casseroles à 20 heures, à ne pas utiliser les transports publics et à ne pas travailler ne constitue pas précisément des actes allant dans le sens de la promotion et de la défense des intérêts professionnels, et n'est pas non plus le produit d'un conflit du travail survenant dans le cadre de la négociation collective. Ces faits, qui se sont traduits par des agressions verbales et des voies de faits à l'encontre des membres du Corps des carabiniers, par l'installation de barricades et le prélèvement d'un "droit de passage" imposé aux automobilistes qui rentraient chez eux, par l'attaque et le saccage de locaux commerciaux, par le jet de pierres contre des véhicules et des établissements sanitaires, par des attentats contre des installations électriques, etc., n'ont certainement rien à voir avec la liberté syndicale.
- 524. Le gouvernement se dit extrêmement préoccupé par le fait que cet aspect du cas démontre clairement que l'on cherche à détourner le comité de sa véritable fonction, celle pour laquelle il a été créé, en l'amenant à examiner des problèmes qui ne relèvent aucunement de la liberté syndicale, à s'occuper de questions qui échappent totalement à sa compétence et qui constituent une ingérence inadmissible dans les affaires intérieures d'un Etat.
- 525. Quant à la mise en accusation et/ou à la détention des douze dirigeants syndicaux et des cinq personnes cités dans l'annexe I du 230e rapport, le gouvernement fait savoir qu'il s'est non seulement désisté de l'action en justice qu'il a intentée contre Rodolfo Seguel pour infraction à la loi no 12927, de 1958, sur la sécurité de l'Etat, mais aussi de celle qu'il a engagée contre les autres dirigeants syndicaux du cuivre et les syndicalistes mentionnés à l'annexe I (cas no 1212) du 230e rapport et qui ont été traduits en justice avec M. Seguel. Les intéressés ne font pas l'objet d'un procès et il a été mis fin à la procédure judiciaire engagée contre eux en septembre 1983.
- 526. Quant à "l'agression du local du Conseil national de coordination syndicale, avec vol de meubles et autres biens", le gouvernement signale que le Code de procédure pénale (articles 42 et 156 à 183) dispose qu'il est interdit d'investir un édifice ou un lieu fermé, sauf dans les cas et dans les formes déterminés par la loi, par exemple la pénétration et la perquisition dans un lieu fermé quel qu'il soit, public ou privé, pour appréhender une personne ou saisir des livres, documents ou autres objets qui peuvent permettre de découvrir un délit ou de le prouver. En conséquence, le gouvernement rejette avec la plus grande énergie l'accusation d"'agression" du local de l'organisation susmentionnée. Le gouvernement n'accepte pas que l'on qualifie d"'agression" le fait que la police ait investi le local en question, conformément à la loi. Quant à l'allégation relative au "vol de meubles et autres biens", le gouvernement rejette cette accusation calomnieuse. Le Code de procédure pénale, en ses articles 114 et 115, mentionne les instruments, armes ou objets de toute sorte destinés à commettre un délit et stipule qu'ils seront saisis par le juge qui les mettra sous scellés et les versera au dossier. Ces objets seront rendus à la fin du procès au pénal, ou avant, si le juge estime inutile de les conserver. Pour ce qui est des objets saisis au domicile sis au no 67 de la rue Abdún Cifuentes, siège de l'entité de fait qui a pris le nom de "Coordinadora Nacional Sindical" (Conseil national de coordination syndicale), ils étaient les suivants: machines à écrire; ronéo; 100.000 brochures appelant à la "protestation" du 12 juillet 1983; 30.000 tracts donnant des instructions pour les actions à mener le 12 juillet 1983; des brochures, pancartes et affiches portant des inscriptions défavorables et offensantes à l'égard du gouvernement et une documentation, des ouvrages, et divers éléments de propagande antigouvernementale ont été mis à la disposition du tribunal le 11 juillet 1983. Les propriétaires de ces biens doivent s'adresser aux tribunaux de justice pour obtenir leur restitution. Le gouvernement rappelle qu'au Chili le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir exécutif.
- 527. Pour ce qui est des prétendues tortures dont auraient fait l'objet Mme Maria Rozas et MM. José Anselmo Navarrete et Sergio Troncoso, le gouvernement indique que ces allégations sont fondées sur des informations contenues dans un document établi par des personnes qui manquent totalement d'objectivité, d'impartialité et d'indépendance, document grossier et insultant à l'égard d'un Etat Membre que le gouvernement rejette dans sa totalité. Le gouvernement estime que les informations fournies concernant les allégations de tortures, qui auraient nécessité l'hospitalisation dans un état grave des personnes mentionnées, ne sont pas suffisamment précises. En conséquence, le gouvernement exprime sa grave préoccupation devant les accusations vagues et fausses formulées par le plaignant qui, au cours d'une visite de quatre jours dans le pays, effectuée en qualité de touriste, s'est permis de juger et de condamner un Etat Membre. Le gouvernement rappelle que la Constitution politique de 1980, dans son article 19, paragraphe 1, qui traite du droit à la vie et à l'intégrité physique et psychique, interdit la mise en oeuvre de toute procédure illégitime, et donne droit de recours à quiconque se trouve privé de ce droit, garanti par la Constitution, ou est gêné ou menacé dans son exercice légitime. Le gouvernement n'a pas connaissance de ce que l'un des intéressés ait recouru devant la Cour d'appel compétente pour faire respecter le droit et s'assurer sa protection, en usant du droit de recours susmentionné.
- 528. Quant à l'allégation relative "à la séquestration, aux tortures et aux menaces de mort dont aurait fait l'objet, le 7 octobre 1983, M. Raúl Montecinos, qui se trouverait actuellement hospitalisé", le gouvernement indique qu'il a réussi à réunir les informations suivantes:
- - Le samedi 8 octobre 1983, aux alentours de 0 h 30, alors que M. Raúl Montecinos Rosales passait par le Pasaje Anibal Pinto, face au no 38 (arrêt no 17 de l'avenue Vicuña Mackenna), il fut intercepté par quatre inconnus dont l'un l'aurait frappé d'un coup de poing à l'œil gauche lui occasionnant des lésions bénignes.
- - Des agents du Corps des carabiniers du Sous-commissariat de La Florida, en procédant aux premières investigations concernant ce cas, afin de préciser les faits, ont pu localiser Mme Maria Angélica Figueroa González, qui habite près du lieu en question, et qui a entendu les appels au secours de Montecinos et a demandé les services d'une ambulance à l'Hôpital "Sotero del Rio", établissement dans lequel l'intéressé a été ultérieurement transféré.
- - Au Centre d'assistance, l'agent des carabiniers de service a reçu la plainte déposée en l'occurrence et a cité le plaignant à comparaître devant le tribunal de police locale de La Florida à l'audience du mardi 11 octobre 1983 à 10 heures pour confirmer sa plainte pour lésions bénignes et fournir davantage d'informations. Le procès-verbal de police du Sous-commissariat de la Florida porte le no 3030.
- - Le rapport du registre médical d'urgence no 85137 de l'unité d'urgence de l'Hôpital "Sotero del Río" donne comme diagnostic probable l'état d"'ébriété" de l'intéressé et fait état d'un "hématome bipariétal". Il y est dit en outre que l'intéressé n'a pas été soumis à un test d"'alcoolémie" et que le diagnostic provisoire est celui d'une lésion "bénigne". Le registre indique encore que l'intéressé est arrivé en ambulance, no 511, et que son examen a été effectué à 1 h 58 du matin, le 8 octobre 1983.
- 529. Compte tenu de ces informations, le gouvernement rejette catégoriquement l'accusation selon laquelle M. Montecinos aurait été détenu sur ordre du gouvernement ou par des membres de la police.
- 530. Le gouvernement affirme, une fois encore, qu'il estime inadmissible que des faits qui relèvent du délit commun puissent faire l'objet d'une démarche de plainte en violation de la liberté syndicale pour le simple fait que leur auteur ou la personne qui en est victime jouit de la condition de dirigeant syndical. Le gouvernement regrette de constater, une fois de plus, que ces imputations fausses et calomnieuses démontrent clairement que l'on cherche à détourner le comité de la véritable fonction pour laquelle il a été créé, en l'amenant à examiner des questions qui ne relèvent en rien de la liberté syndicale, qui ne ressortissent pas à sa compétence et qui constituent une ingérence inadmissible dans les affaires intérieures d'un Etat.
- 531. Par ailleurs, le gouvernement refuse les conclusions et recommandations contenues aux paragraphes 652, 653, 654 et 659 d). Le gouvernement déclare que l'on ne peut lui demander d'intervenir dans la gestion des entreprises en imposant la réintégration de travailleurs licenciés ou en demandant aux entreprises de se désister des actions en justice qu'elles ont le droit légitime d'introduire devant les tribunaux de justice. Il ne peut accepter que l'on considère le licenciement d'un travailleur comme un acte de violation de la liberté syndicale, moins encore lorsqu'il y a eu intervention des tribunaux dans cette décision. Le gouvernement rejette l'imputation selon laquelle les dirigeants syndicaux et les travailleurs licenciés ont été victimes de mesures de discrimination antisyndicale, motivées par le fait qu'ils auraient encouragé des mouvements de protestation. Le gouvernement indique qu'il respecte le droit de tous les Chiliens à exprimer des opinions contraires à celles du gouvernement et à protester, sous réserve qu'ils le fassent dans l'ordre et la tranquillité. Cependant, le gouvernement fait observer que les "manifestations" de protestation n'ont pas été engendrées par le "mouvement syndical" mais par certains dirigeants liés à des secteurs politico-partisans. Les manifestations, comme on l'a expliqué, ont dégénéré en actes de violence, de perturbation de l'ordre public et en attentats contre le régime du gouvernement établi.
- 532. Selon le gouvernement, la Corporation nationale du cuivre, entreprise gérante des centres de travail de Chuquicamata, El Salvador, Andina et El Teniente, a indiqué qu'au mois d'octobre 1983 la situation était la suivante:
- - En ce qui concerne les demandes de destitution des dirigeants syndicaux, en date du 17 mai dernier, il a été demandé aux tribunaux de justice compétents de destituer les dirigeants syndicaux des divisions de Chuquicamata, El Salvador, Andina et El Teniente, qui sont mentionnés dans l'annexe II (cas no 1212) du 230e rapport du comité. Pour ce faire, la CODELCO-Chili a invoqué le droit que lui confère l'article 29 du décret-loi no 2756 de 1979, en relation avec l'article 15 du décret-loi no 2200 de 1978. La demande présentée par l'entreprise afin que les tribunaux de justice règlent la situation ne peut être considérée comme une atteinte à la liberté syndicale, étant donné qu'elle a été amenée à prendre cette mesure parce que, sans qu'il y ait eu de différend du travail d'aucune sorte avec ses travailleurs, représentés par les dirigeants en question, ces derniers ont appelé à un arrêt illégal des activités pour des motifs extra-professionnels. Quant à la liste de dirigeants syndicaux touchés par cette mesure de destitution, l'entreprise s'est désistée, le 6 octobre 1983, de la demande de destitution qui touchait les dirigeants de la division d'Andina, MM. Sergio Neira et José Pérez, respectivement président du Syndicat industriel - division d'Andina et dirigeant national de la Confédération des travailleurs du cuivre.
- - Quant au licenciement ultérieur de divers dirigeants des divisions d'Andina, d'El Salvador et d'El Teniente, mentionnés dans l'annexe II (cas no 1212) du 230e rapport du comité, l'entreprise fait usage de l'article 22 du décret-loi no 2200 de 1978, en relation avec l'article 15 du même texte de loi. Cela dit, l'article 22 stipule expressément que, dans le cas des travailleurs investis d'une charge syndicale et qui se trouvent dans les circonstances définies dans l'article 15 déjà cité, la protection prévue par les lois n'intervient pas; en conséquence, il n'est pas nécessaire de demander l'autorisation préalable des tribunaux de justice pour adopter les mesures pertinentes, cela, bien entendu, sans préjudice de la faculté des travailleurs de réclamer contre l'illégalité du licenciement. Lorsque le jugement leur est favorable, ils recouvrent leur poste de travail, leur condition de dirigeant syndical et la protection prévue par la loi. Les intéressés ont réclamé contre cette décision de l'entreprise, demandant l'annulation des licenciements. Une procédure est actuellement en cours devant les tribunaux. L'entreprise a fait savoir qu'elle respecterait la décision que prendraient en définitive les tribunaux. Les intéressés ont expressément demandé aux tribunaux de leur conserver leur qualité de dirigeants syndicaux durant la procédure en cours. Selon un jugement récent de la Cour d'appel de Rancagua, confirmé par la Cour suprême de justice, les dirigeants syndicaux peuvent, jusqu'à ce qu'un jugement soit rendu pour savoir s'ils bénéficient ou non de la protection prévue par les lois, voter et se présenter à une réélection en qualité de dirigeants du syndicat (le gouvernement envoie copie du jugement).
- 533. Le gouvernement indique que, comme en ce qui concerne la destitution, dans ce cas encore, les motifs qui ont amené l'entreprise à prendre les mesures en question ne tenaient pas à des différends du travail, mais découlaient d'actions extra-professionnelles. Comme dans les quatre divisions, on avait renouvelé, juste avant les événements qui ont motivé la mesure, les contrats collectifs, il ne restait aucun différend du travail en suspens.
- 534. Le gouvernement indique que la liste qui figure à l'annexe II (cas no 1212) du 230e rapport du comité comporte deux inexactitudes: la première concerne le licenciement mentionné sous b) de la rubrique Zone d'El Salvador, Syndicat no 1 de Llanta, de M. Roberto Carvajal Mieres, alors qu'il est encore sous contrat. La seconde concerne le licenciement mentionné sous b) de la rubrique Zone d'El Teniente, Syndicat industriel de Sewell et Mina, de M. Leonel Abarca Quinteros, alors que l'intéressé est actuellement sous contrat et exerce les fonctions de président dudit syndicat. Par ailleurs, les dirigeants syndicaux Sergio Neira et José Pérez du Syndicat industriel de la division d'Andina, mentionnés sous b) Zone d'Andina, se sont désistés, le 6 octobre 1983, de leur demande en nullité de leur licenciement.
- 535. Enfin, le gouvernement fait également savoir que l'entreprise a réintégré 95 pour cent des travailleurs licenciés, à la suite des travaux menés par les commissions spéciales constituées au sein de la division.
- 536. Par ailleurs, le gouvernement indique que la prétendue "manifestation pacifique" du 14 juin 1983 n'a pas été organisée par les principales organisations syndicales du pays. En effet, elle s'apparentait à des mouvements politiques dont font partie des ex-parlementaires et des dirigeants de partis politiques. Le contexte dans lequel cette manifestation s'est déroulée et les résultats auxquels ont abouti les soi-disant "journées de protestation pacifique" ne peuvent donc objectivement être considérés comme s'étant inscrits dans un contexte syndical. Tirer une conclusion aussi légère serait méconnaître la jurisprudence que le comité a lui-même établie.
- 537. Le gouvernement réaffirme, une fois de plus, qu'il n'a jamais recouru à des actes discriminatoires à l'encontre de la liberté syndicale, de sorte qu'il lui serait difficile de prendre des mesures pour mettre fin à un état de fait qui n'a jamais existé.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 538. Le comité note que le gouvernement, dans différentes parties de sa réponse, conteste la compétence du comité pour connaître de certaines questions posées par les plaignants qui, selon le gouvernement, n'ont aucun rapport avec la liberté syndicale et constituent une ingérence inadmissible dans les affaires intérieures d'un Etat. Le gouvernement s'est référé, en particulier, aux allégations relatives au décès de certaines personnes et aux violences physiques qui seraient survenus durant la journée de protestation nationale du 14 juin 1983, ainsi qu'aux présumées "séquestration" tortures et menaces de mort" dont aurait fait l'objet le dirigeant syndical Raúl Montecinos. Le comité rejette entièrement la déclaration du gouvernement selon laquelle il examine des questions qui ne relèvent pas de sa compétence et qui constituent une ingérence dans les affaires intérieures d'un Etat. Le comité a toujours insisté sur le fait que le but de l'ensemble de la procédure instituée est d'assurer le respect des libertés syndicales en droit comme en fait. Cette procédure protège en outre les gouvernements contre des accusations injustifiées, raison pour laquelle ils doivent reconnaître l'importance qu'il y a à ce qu'ils présentent des réponses détaillées aux allégations formulées contre eux. [Voir, par exemple, 1er rapport, paragr. 31, et 208e rapport, cas no 957 (Guatemala), paragr. 284.] Pour déterminer s'il y a eu ou non violation des droits syndicaux, le comité se fonde uniquement sur l'examen le plus objectif possible des informations fournies par les plaignants et par les gouvernements.
- 539. Le comité tient à signaler que les allégations en question, telles qu'elles ont été formulées par les plaignants [voir 230e rapport, paragr. 622 et 629], si elles correspondaient à la réalité, pourraient impliquer une violation des droits syndicaux. C'est pourquoi le comité était et est habilité, conformément à la procédure en vigueur, à examiner lesdites allégations ainsi que le :5 observations du gouvernement et, s'il l'estime approprié, à demande e des informations supplémentaires. Le comité tient à souligner que, en ce qui concerne les aspects du cas auxquels le gouvernement se réfère, il n'a formulé aucune conclusion définitive dans son 230e rapport, mais qu'il a simplement demandé des informations supplémentaires as-, gouvernement.
- 540. Le comité note également que, à propos de sa recommandation relative à la réintégration des dirigeants syndicaux et de s travailleurs et au désistement de l'entreprise CODELCO de ses demandes de destitution des dirigeants syndicaux, le gouvernement déclare que l'on ne peut lui recommander d'intervenir dans la gestion de s entreprises en leur imposant la réintégration de travailleurs licenciés ou en leur demandant de se désister des demandes judiciaires qu'elles ont le droit légitime de déposer devant les tribunaux de justice. A cet égard, le comité tient à rappeler que, depuis toujours) il ne fait pas de distinction entre les allégations formulées à', l'encontre des gouvernements et celles formulées à l'encontre des employeurs, mais qu'il a cherché à déterminer, dans chaque cas particulier, si le gouvernement avait garanti ou non le libre exercice des droits syndicaux sur son territoire. [Voir 16e rapport, cas no 107 (Birmanie), paragr. 52; 180e rapport, cas no 550 (Guatemala), paragr. 303; et 139e rapport, cas no 721 (Inde), paragr. 509.] Par conséquent, dans les cas où le comité a relevé l'existence de mesures de discrimination antisyndicale imputables à l'administration d'une entreprise quelle qu'elle soit, il a demandé au gouvernement concerné de mettre fin à ces mesures et, le cas échéant, de prendre les mesures nécessaires pour rétablir la situation dans laquelle se trouvaient au départ les personnes concernées.
- 541. En ce qui concerne les morts et les violences physiques qui ont eu lieu le 14 juin 1983 (deuxième journée de protestation nationale), le comité prend note de ce que, selon le gouvernement, "la prétendue protestation pacifique" du 14 juin 1983 n'a pas été organisée par les principales organisations syndicales du pays (comme l'affirment les plaignants), mais par des mouvements politiques auxquels appartiennent des ex-parlementaires et des dirigeants de partis politiques. Le comité prend également note du fait que, dans ses réponses antérieures [voir 230e rapport, paragr. 633], le gouvernement a déclaré qu'aucun dirigeant syndical n'a pris part en tant que tel aux événements survenus le 14 juin 1983 qui n'avaient pas d'objectif syndical, et que les personnes qui sont mortes ou qui ont été blessées à cette occasion n'étaient pas des dirigeants syndicaux et n'étaient pas en train de mener des activités syndicales. Dans ces conditions, le comité ne peut que constater la contradiction qui existe entre les allégations et la réponse du gouvernement pour ce qui concerne la nature, les caractéristiques et les objectifs de la journée de protestation nationale du 14 juin 1983.
- 542. Pour ce qui est de la mise en accusation et/ou de la détention des douze dirigeants et des cinq syndicalistes mentionnés dans l'annexe I (cas no 1212) du 230e rapport, le comité prend note de ce que le gouvernement s'est désisté non seulement de l'action qu'il a intentée contre M. Rodolfo Seguel pour infraction à la loi no 12927 de 1958 sur la sécurité de l'Etat, mais également de celle qu'il a engagée contre les autres dirigeants syndicaux et syndicalistes mentionnés dans l'annexe I susmentionnée.
- 543. Pour ce qui est de l'allégation relative à l'agression contre le local du Conseil national de coordination syndicale (CNS), avec vol de meubles et autres biens, le comité prend note des déclarations du gouvernement et, en particulier, de ce que, parmi les objets saisis, figuraient divers éléments de propagande antigouvernementale. Le comité prie le gouvernement d'indiquer si la perquisition effectuée par la police - qui, selon le gouvernement, est conforme à la loi - a été faite en vertu d'un mandat judiciaire, et de fournir des précisions sur la nature, les caractéristiques et les objectifs de la "protestation" du 12 juillet 1983 dont il serait question dans une partie des documents de propagande saisis.
- 544. Quant à l'allégation relative à la séquestration, aux tortures et aux menaces de mort dont aurait fait l'objet, le 7 octobre 1983, le dirigeant syndical Raúl Montecinos qui se trouverait encore hospitalisé, le comité prend note de ce que le gouvernement rejette catégoriquement l'accusation selon laquelle l'intéressé aurait été arrêté sur ordre du gouvernement ou par des membres de la police. Le comité observe que, selon le gouvernement, ce qui se serait réellement passé c'est que le 8 octobre 1983 M. Montecinos a été intercepté par quatre inconnus dont l'un l'aurait frappé d'un coup de poing à l'œil gauche, lui occasionnant des lésions bénignes. Compte tenu des explications fournies par le gouvernement et du fait qu'une plainte a été déposée en l'occurrence devant l'autorité judiciaire, le comité estime que cette allégation, qui ne semble pas présenter d'aspects syndicaux, n'appelle pas un examen plus approfondi.
- 545. Quant aux allégations relatives aux tortures infligées à Maria Rozas, José Anselmo Navarrete et Sergio Troncoso, le comité prend note de ce que le gouvernement n'a pas connaissance que l'un ou l'autre des intéressés ait engagé un recours devant la Cour d'appel en application du droit de recours que la législation confère à quiconque se trouve privé du droit constitutionnel à la vie et à l'intégrité physique et psychique ou est gêné ou menacé dans son exercice légitime. Le comité prend note également du fait que le gouvernement rejette entièrement les informations contenues dans le document sur lequel les allégations sont fondées. Néanmoins, s'agissant des allégations relatives à l'intégrité physique des dirigeants syndicaux, le comité insiste pour qu'il soit procédé à une enquête visant à élucider pleinement les faits et à établir les responsabilités. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de cette enquête.
- 546. Le comité prend note des déclarations du gouvernement au sujet de la recommandation du comité relative aux licenciements de dirigeants syndicaux et de travailleurs du secteur du cuivre et aux demandes de destitution de dirigeants syndicaux déposées en justice par l'entreprise CODELCO. Le comité prend note de ce que, selon la réponse du gouvernement, les demandes de destitution de dirigeants syndicaux des divisions de Chuquicamata, d'El Salvador, d'Andina et d'El Teniente introduites par la Corporation nationale du cuivre et le licenciement de dirigeants des trois dernières divisions mentionnées étaient conformes aux dispositions en vigueur et ont été motivés par le fait que, bien qu'il n'y ait aucun différend du travail, ces dirigeants ont appelé à un arrêt illégal des activités pour des raisons extra-professionnelles. Les contrats collectifs venant d'être renouvelés dans les quatre divisions en question, il n'y avait aucun problème du travail en suspens.
- 547. Le comité prend note, par ailleurs, de ce que l'entreprise CODELCO-Chili s'est désistée le 6 octobre 1983 de la demande de destitution des dirigeants syndicaux de la division d'Andina, MM. Sergio Neira et José Pérez, et de ce que ces derniers se sont I désistés, le même jour, de leur demande en nullité de la mesure de licenciement dont ils ont fait l'objet. Le comité observe également que, contrairement à ce qu'avaient indiqué les plaignants, les dirigeants syndicaux Roberto Carvajal Mieres et Leonel Abarca Quinteros n'ont pas été licenciés. Le comité prend note, en outre, de ce que l'entreprise CODELCO-Chili, faisant suite aux décisions des commissions spéciales créées dans la division d'Andina, a réintégré 95 pour cent des travailleurs licenciés.
- 548. Dans ces circonstances, tout en observant que le gouvernement a indiqué que les demandes de destitution et les licenciements des dirigeants syndicaux ont été motivés par un arrêt illégal des activités pour des raisons extra-professionnelles, puisque les contrats collectifs respectifs venaient d'être revus, le comité espère que, compte tenu du grand nombre de dirigeants syndicaux concernés, le gouvernement entamera des négociations avec l'entreprise CODELCO-Chili en vue de la réintégration des dirigeants syndicaux licenciés et du désistement de l'entreprise des actions en destitution qu'elle a engagées à l'encontre de dirigeants syndicaux. Le comité prie le gouvernement de l'informer de tout résultat auquel il aboutira à cet égard, ainsi que des conclusions auxquelles parviendront les commissions spéciales que l'entreprise CODELCO-Chili a consenti à former pour étudier la réintégration des travailleurs licenciés.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 549. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:
- a) Le comité prend note de ce que le gouvernement s'est désisté de l'action qu'il a engagée pour infraction à la loi no 12927 relative à la sécurité de l'Etat contre les dirigeants syndicaux et syndicalistes auxquels le comité s'est intéressé.
- b) Le comité prie le gouvernement d'indiquer si la perquisition par la police du local de la CNS (qui, selon le gouvernement, était conforme à la loi) a été effectuée en vertu d'un mandat judiciaire, et de fournir des précisions sur la nature, les caractéristiques et les objectifs de la "protestation" du 12 juillet 1983, dont il était question dans les documents de propagande qui ont été saisis.
- c) Le comité insiste pour qu'il soit procédé à une enquête sur les allégations relatives aux tortures infligées à Maria Rozas, Sergio Troncoso (tous deux dirigeants syndicaux) et José Anselmo Navarrete (syndicaliste), en vue d'élucider pleinement les faits et de déterminer les responsabilités. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de cette enquête.
- d) Le comité espère que le gouvernement entamera des négociations avec l'entreprise CODELCO-Chili en vue de la réintégration des dirigeants syndicaux du secteur du cuivre qui ont été licenciés et du désistement par l'entreprise des actions en destitution qu'elle a engagées à l'encontre des dirigeants syndicaux. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout résultat auquel il aboutira à cet égard, ainsi que des conclusions des commissions spéciales que l'entreprise CODELCO-Chili a consenti à former pour étudier la réintégration des travailleurs licenciés.