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  1. 448. La plainte du Syndicat des employés des postes de Hong-kong (HKUPOE), du Syndicat des postiers de Hong-kong (HKPWU), de l'Association des surintendants des postes de Hong-kong (HKSPA) et de la Section des postiers de l'Association des fonctionnaires chinois de Hong-kong (HKCCSA), ci-après appelés "les plaignants", figure dans une communication datée du 16 octobre 1990. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication datée du 21 janvier 1991.
  2. 449. Le Royaume-Uni a ratifié la convention (no 84) sur le droit d'association (territoires non métropolitains), 1947, en ce qui concerne Hong-kong. Il a déclaré applicables à Hong-kong la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, avec modifications, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, sans modifications.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 450. Les plaignants soutiennent que le gouvernement de Hong-kong a transgressé les articles 7 et 8 de la convention no 151 en retardant les négociations collectives avec les quatre syndicats de postiers représentant la majorité des 4.500 travailleurs des postes à Hong-kong et en menaçant de licenciement les employés qui avaient l'intention de participer à un sit-in.
  2. 451. Lors d'une réunion à laquelle assistaient plus de 2.000 postiers le 28 septembre 1990, les membres décidèrent de tenir un sit-in de protestation à l'extérieur du bureau de poste principal, le 20 octobre de 8 heures à 12 heures, afin d'appuyer leurs revendications (réduction de la semaine de travail de 48 à 44 heures; augmentation de trois points du barème de départ pour tous les grades dans l'échelle salariale; amélioration des perspectives de promotion). Les syndicats concernés mènent une lutte en vue d'obtenir ces améliorations depuis dix ans, durant lesquels le gouvernement a fait traîner les choses.
  3. 452. Les dirigeants syndicaux ont eu une réunion avec le ministre des Postes mais sans résultat concret. Après cette réunion, le ministre des Postes leur a envoyé une lettre, datée du 12 octobre 1990, les avertissant que leurs actions "... pourraient donner lieu à l'imposition des sanctions prévues par les règlements sur la fonction publique et l'article XVI des Lettres patentes". L'article XVI des Lettres patentes se lit comme suit:
    • Le gouverneur peut, sous réserve de l'article XVI A et des instructions que Nous lui donnerons par l'intermédiaire de nos secrétaires d'Etat, s'il estime avoir des motifs suffisants de le faire, licencier ou suspendre de ses fonctions toute personne détenant un poste public dans la Colonie ou, sous les réserves ci-haut mentionnées, prendre toute autre mesure disciplinaire qu'il estime souhaitable.
    • C'était la première fois que les Lettres patentes étaient utilisées pour intimider des syndicats ayant manifesté leur intention d'exercer des moyens de pression. Ces menaces constituent une violation de l'article 8 de la convention no 151, que le Royaume-Uni a ratifiée et déclarée applicable à Hong-kong sans modifications.
  4. 453. Le ministre des Postes a ajouté dans sa lettre que la Commission permanente de la rémunération et des conditions d'emploi dans la fonction publique examinait alors la rémunération et les conditions de travail, et a invité les syndicats à attendre patiemment les résultats de l'étude en cours et à renoncer au sit-in prévu. Il a conclu en soulignant que le service postal est un service public important, et que le public et les médias verraient d'un mauvais oeil toute interruption causant des inconvénients aux clients privés et commerciaux, ce qui nuirait à la bonne image du service et de son personnel.
  5. 454. Les plaignants soutiennent en outre que le gouvernement n'a pas établi de mécanisme de conciliation et d'arbitrage pour le règlement des différends et n'a pris aucune mesure pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures permettant la négociation des conditions d'emploi entre les autorités publiques et les organisations d'agents publics, comme l'exige l'article 7 de la convention no 151. Ils demandent que les mesures appropriées soient prises contre le gouvernement de Hong-kong à cet égard.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 455. Le gouvernement déclare que les plaignants ont présenté depuis quelque temps déjà des revendications afin d'obtenir des augmentations salariales et une réduction des horaires de travail. Leurs demandes ont été discutées à plusieurs reprises avec la direction et ont été communiquées à la Commission permanente de la rémunération et des conditions d'emploi dans la fonction publique, qui effectue une étude globale sur la structure salariale de tous les fonctionnaires de Hong-kong. Les résultats de cette étude de la Commission permanente ont été publiés au début de l'année 1991.
  2. 456. Le 29 septembre 1990, les syndicats ont informé le ministre des Postes qu'ils tiendraient un sit-in de quatre heures le 20 octobre, afin d'appuyer leur mouvement. Dans une lettre du 12 octobre aux présidents des quatre syndicats, le ministre des Postes les a exhortés à la patience et à envisager de renoncer à leurs moyens de pression. En l'occurrence, les syndicats ont décidé d'annuler le sit-in mais ont organisé une manifestation de protestation, le 4 novembre, devant l'édifice du gouvernement.
  3. 457. Le gouvernement soutient que des mesures appropriées à la situation de Hong-kong ont été adoptées afin de promouvoir et d'encourager le développement d'un mécanisme de consultation et de négociation volontaire pour la détermination des conditions d'emploi des fonctionnaires. Ce mécanisme fonctionne à la fois au niveau central et à l'échelon des ministères. Les questions générales relatives aux conditions d'emploi de tous les fonctionnaires sont traitées par la Commission permanente de la rémunération et des conditions d'emploi de la fonction publique et par la Commission permanente sur la rémunération et les conditions d'emploi des services assujettis à la discipline, qui fournissent un avis indépendant et impartial sur ces questions. Au sein des ministères, des comités consultatifs officiels ont été établis et permettent aux fonctionnaires, individuellement ou par l'intermédiaire de leurs syndicats, de discuter avec la direction des questions présentant un intérêt commun. En ce qui concerne le Service des postes de Hong-kong, plus de 20 représentants des employés siègent au comité consultatif qui se réunit chaque mois avec la direction, afin de discuter des questions relatives à l'exploitation et des conditions de travail du personnel. Conformément à l'article 8 de la convention, le gouvernement de Hong-kong a pour politique de résoudre les différends survenant dans la fonction publique au moyen d'un dialogue franc et direct entre la direction et le personnel.
  4. 458. Par ailleurs, le gouvernement conteste que le recours aux règlements de la fonction publique et à l'article XVI des Lettres patentes puisse constituer une violation de la convention no 151. Lorsqu'il y a une interruption du service, l'administration a la responsabilité d'invoquer les règlements de la fonction publique afin d'assurer le maintien des services publics. Les Lettres patentes définissent le cadre fondamental de l'administration du territoire. L'article XVI fonde les pouvoirs du gouverneur exercés par l'intermédiaire du secrétaire à la Fonction publique, permettant d'établir et de gérer la fonction publique. Il n'est pas utilisé pour dissuader les syndicats d'exercer des moyens de pression.
  5. 459. Décrivant ensuite les derniers faits survenus, le gouvernement déclare qu'après la manifestation de protestation du 4 novembre le HKPWU et la Section des postiers du HKCCSA ont informé le ministre des Postes que leurs membres refuseraient d'effectuer des heures supplémentaires du 29 novembre au 1er décembre. Le HKUPOE a également déclaré que ses membres refuseraient de faire des heures supplémentaires du 29 novembre au 6 décembre. Le ministre des Postes a tenu d'autres réunions avec les syndicats le 28 novembre, leur a expliqué à nouveau toutes les mesures positives qui avaient été ou étaient prises par le ministère en regard des diverses revendications présentées par les syndicats, et les a une fois de plus exhortés à envisager de renoncer à leurs moyens de pression. Après la réunion, le HKUPOE a demandé à ses membres de mettre fin à tout moyen de pression et d'attendre les résultats de l'étude globale effectuée par la Commission permanente. Le HKPWU et la Section des postiers du HKCCSA ont persisté dans leur refus d'effectuer des heures supplémentaires, mais ils ont néanmoins clairement indiqué qu'aucun autre moyen de pression ne serait exercé avant la publication des résultats de l'étude globale. Cela démontre que les mécanismes actuellement en place pour le règlement des différends et la détermination des conditions d'emploi fonctionnent bien. Le gouvernement suggère donc que les allégations des syndicats de postiers sont manifestement non fondées. La direction des postes continuera à maintenir un dialogue régulier avec les syndicats en ce qui concerne l'exploitation, la rémunération et les conditions d'emploi.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 460. Cette plainte soulève deux problèmes: les remarques faites par le ministre des Postes sur les mesures qui pourraient être prises contre les travailleurs qui avaient exprimé l'intention d'exercer des moyens de pression et les allégations relatives à l'absence d'un mécanisme approprié de négociation collective et de règlement des différends dans la fonction publique.
  2. 461. En ce qui concerne la première question, le comité estime que le contenu de la lettre envoyée le 12 octobre 1990 par le ministre des Postes constituait une menace contre les travailleurs qui avaient exprimé leur intention de participer à un sit-in, afin d'exercer des pressions dans leurs négociations avec l'employeur. Même si, semble-t-il, aucune mesure administrative ou disciplinaire n'a été prise aux termes des règlements sur la fonction publique ou de l'article XVI des Lettres patentes, le simple fait qu'une telle menace existait pouvait constituer une forte mesure dissuasive pour les travailleurs concernés, surtout si l'on tient compte de la formulation large et discrétionnaire de l'article XVI, qui prévoit des sanctions sévères: "Le gouverneur peut ... licencier ou suspendre de ses fonctions toute personne détenant un poste public dans la Colonie ou ... peut prendre toute autre mesure disciplinaire qu'il juge souhaitable." Le comité considère que l'utilisation que le gouvernement a faite des Lettres patentes est contraire aux principes de la liberté syndicale.
  3. 462. Le comité et les autres organes de contrôle de l'OIT ont toujours considéré que le droit de grève dans ses différentes formes (y compris le sit-in), pourvu qu'il soit exercé de façon pacifique, constitue l'un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et défendre leurs intérêts économiques et sociaux (Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 1983, paragr. 362, 363 et 367). Il s'ensuit que les restrictions ou les interdictions du droit de grève ne sont justifiées que dans un nombre de cas limités: fonctionnaires ou autres travailleurs des services essentiels au sens strict du terme - à savoir les services dont l'interruption pourrait mettre en péril la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans une partie ou dans la totalité de la population (Recueil, loc. cit., paragr. 387), et à condition que les travailleurs aient accès à des procédures appropriées, tels la conciliation et l'arbitrage, aux diverses étapes desquelles les intéressés puissent participer, que les décisions arbitrales soient obligatoires pour les deux parties et qu'elles soient exécutées rapidement et intégralement, afin de sauvegarder pleinement les intérêts des travailleurs ainsi privés d'un moyen essentiel de défendre leurs intérêts professionnels.
  4. 463. Dans sa lettre du 12 octobre 1990 aux dirigeants syndicaux, le ministre des Postes a souligné que le service postal est un important service public, dont l'interruption causerait des inconvénients aux clients privés et commerciaux et nuirait à la bonne image du service et de son personnel. Le comité rappelle à cet égard les commentaires qu'il a faits récemment dans un cas relatif à une grève des postes: "... le comité ne peut voir comment l'on pourrait affirmer que les services postaux constituent véritablement des services essentiels au sens strict du terme. Certes, les entreprises éprouveront des problèmes et subiront des pertes durant une grève postale et devront même à l'occasion mettre des employés en chômage technique. Particulièrement touchées par ce genre d'arrêt de travail sont les sociétés, telles les entreprises de vente par correspondance qui dépendent étroitement, voire exclusivement, du courrier. De la même façon, certaines personnes qui reçoivent leur chèque d'assurance chômage, de pension de vieillesse, d'allocations familiales ou de prestations sociales subiront sans aucun doute des inconvénients. Quoi qu'il en soit, pour aussi regrettables que soient ces conséquences, elles ne sauraient justifier une limitation des droits fondamentaux garantis par les conventions nos 87 et 98, à moins qu'elles n'atteignent une telle gravité qu'elles mettent en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans une partie ou dans la totalité de la population ..." (268e rapport, base no 1451 (Canada), paragr. 98).
  5. 464. Par conséquent, le comité considère qu'en menaçant de mesures de rétorsion les travailleurs qui avaient alors uniquement exprimé leur intention de participer à un sit-in, afin de défendre leurs intérêts économiques et sociaux légitimes, l'employeur a commis une ingérence dans le droit fondamental qu'ont les travailleurs d'organiser leur gestion et leurs activités et de formuler leurs programmes d'action, contrairement à l'article 3 de la convention no 87. Le comité demande au gouvernement de s'abstenir à l'avenir de formuler ce genre de menaces contre les travailleurs et leurs organisations ayant le droit de grève.
  6. 465. S'agissant du deuxième point en litige, soit les allégations relatives à l'absence de mécanisme approprié de négociation collective, le gouvernement soutient que les conditions d'emploi des fonctionnaires sont examinées au niveau central (Commission permanente de la rémunération et des conditions d'emploi dans la fonction publique) et au sein des divers ministères (en l'occurrence, le Comité consultatif départemental). Les plaignants soutiennent en revanche que le gouvernement n'a pas établi de mécanisme de conciliation ou d'arbitrage pour régler les différends, et qu'il n'a pris aucune mesure pour promouvoir le plein développement de la négociation entre les autorités et les organisations d'agents publics. De façon plus spécifique, les plaignants soutiennent que, durant les dix dernières années, le gouvernement a fait traîner les négociations sur ces questions.
  7. 466. Le comité rappelle l'importance qu'il attache aux principes selon lesquels employeurs et syndicats doivent négocier de bonne foi en s'efforçant d'arriver à un accord, et que des relations professionnelles satisfaisantes dépendent essentiellement de l'attitude qu'adoptent les parties l'une à l'égard de l'autre et de leur confiance réciproque. (Recueil, loc. cit., paragr. 590.) De plus, l'article 8 de la convention no 151 dispose que le règlement des différends sera recherché "... par voie de négociation entre les parties ou par une procédure donnant des garanties d'indépendance et d'impartialité, telle que la médiation, la conciliation et l'arbitrage, instituée de telle sorte qu'elle inspire la confiance des parties intéressées". Cet élément de confiance fait manifestement défaut dans la présente affaire, puisque les plaignants soutiennent qu'ils ont demandé depuis dix ans des améliorations à leurs conditions de travail, mais sans résultat.
  8. 467. Toutefois, le comité ne possède pas tous les renseignements nécessaires sur cet aspect de l'affaire, tant en ce qui concerne le cadre législatif applicable (c'est-à-dire la question de savoir si les dispositions relatives au règlement des différends sont ou non conformes à la convention no 151 et aux autres conventions sur la liberté syndicale) que les résultats des négociations de 1990 pour les travailleurs des postes (le gouvernement a déclaré que les résultats de l'étude de la Commission permanente avaient été publiés au début de 1991, mais le comité n'a pas été informé du point de vue des syndicats sur le contenu de cette étude). Le comité demande aux deux parties de fournir des informations supplémentaires sur ces deux aspects.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 468. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité considère que l'utilisation que le gouvernement a faite des Lettres patentes est contraire aux principes de la liberté syndicale. Il estime par ailleurs qu'en menaçant de mesures de rétorsion les travailleurs qui avaient exprimé leur intention d'exercer des moyens de pression afin d'appuyer leurs revendications économiques et sociales légitimes, le gouvernement s'est ingéré dans le droit qu'ont les travailleurs d'organiser leur gestion et leurs activités et de formuler leurs programmes d'action, contrairement à l'article 3 de la convention no 87. Le comité demande au gouvernement à s'abstenir à l'avenir de formuler de telles menaces.
    • b) Le comité demande aux deux parties de fournir des renseignements supplémentaires sur les dispositions juridiques relatives au règlement des différends dans la fonction publique, et sur les résultats de l'étude des conditions de travail dans la fonction publique publiée au début de 1991 par la Commission permanente.
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