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Report in which the committee requests to be kept informed of development - Report No 292, March 1994

Case No 1615 (Philippines) - Complaint date: 18-DEC-91 - Closed

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  1. 313. Le comité a déjà examiné ce cas à sa session de mai 1992, lors de laquelle il a présenté au Conseil d'administration un rapport intérimaire. (Voir 283e rapport du comité, paragr. 401 à 421, approuvé par le Conseil d'administration à sa 253e session (mai-juin 1992).) Dans une communication du 8 octobre 1992, la FITBB a présenté de nouvelles allégations. Par une lettre datée du 29 janvier 1993, elle a fait parvenir des informations complémentaires.
  2. 314. A sa réunion de novembre 1993 (voir 291e rapport, paragr. 12), le comité a observé que, en dépit du temps écoulé depuis le dernier examen de ce cas, il n'avait toujours pas reçu du gouvernement les observations et informations sollicitées. Le comité a attiré l'attention du gouvernement sur le fait que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, il pourrait présenter un rapport sur le fond de l'affaire en instance, même si les informations et observations du gouvernement n'étaient pas reçues à temps. Depuis cet appel pressant, le gouvernement a envoyé une réponse partielle en date du 3 mars 1994.
  3. 315. Les Philippines ont ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 316. Les allégations restées en instance lors de la session de mai 1992 du comité concernent les questions suivantes: le droit des travailleurs temporaires de s'affilier au syndicat de leur choix et le cas particulier des travailleurs licenciés par une entreprise privée, l'entreprise Algon, qui se serait fondée sur la directive générale no 20 de 1977, qui impose la création d'une unité de négociation au niveau de la branche d'activité, pour justifier ces licenciements.
  2. 317. Lors de cette session, le comité avait formulé les recommandations suivantes (voir 283e rapport du comité, paragr. 421):
    • a) Le comité rappelle que les travailleurs sans distinction d'aucune sorte, qu'ils aient un statut permanent ou temporaire, doivent avoir le droit de constituer les syndicats de leur choix et de s'y affilier.
    • b) Le comité invite le gouvernement à prendre des mesures pour abroger expressément la directive générale no 20 dans son intégralité et à lui communiquer le texte d'abrogation.
    • c) Le comité demande au gouvernement de lui communiquer l'arrêt de la Cour suprême dans l'affaire Algon avec ses attendus dès qu'il sera rendu.

B. Nouvelles allégations de l'organisation plaignante

B. Nouvelles allégations de l'organisation plaignante
  1. 318. Dans sa communication du 8 octobre 1992, la FITBB déclare que, le 9 septembre 1992, la Cour suprême a rejeté l'appel formulé par le syndicat de l'entreprise Algon contre la décision, datée du 4 octobre 1989, de la Commission nationale des relations professionnelles (CNRP) qui avait estimé que la grève déclenchée par le personnel pour protester contre les licenciements opérés par Algon à l'encontre de certains travailleurs - Algon avait invoqué les dispositions de la directive générale no 20 pour justifier ces licenciements - était illégale puisque le syndicat n'avait pas déposé un préavis de sept jours requis et que la CNRP elle-même était en train d'enquêter sur les accusations de pratiques déloyales en matière de travail au moment de ladite grève. L'appel du syndicat devant la Cour suprême se fondait sur les arguments que la grève était légale puisque la tactique appliquée par l'employeur constituait une pratique déloyale en matière de travail et que la décision de la CNRP du 31 décembre 1989, d'après laquelle cinq des travailleurs licenciés n'étaient pas des travailleurs affectés à certains projets et que leur licenciement était donc illégal, devait s'appliquer à l'ensemble des travailleurs ayant participé à la grève, puisque le ministre du Travail avait déclaré que la directive générale no 20 était devenue inopérante et que tous les travailleurs devaient avoir le même droit de participer à des activités syndicales.
  2. 319. La FITBB indique qu'en vertu de la décision de la Cour suprême le syndicat de l'entreprise et ses membres sont toujours tenus de payer à l'entreprise des dédommagements de 3.232.128,32 pesos, ce qui pourrait amener celle-ci à confisquer l'ensemble des biens du syndicat ainsi que les biens personnels des dirigeants. D'après l'organisation plaignante, la décision de la Cour est fondée sur la directive générale no 20, ce qui va à l'encontre de la déclaration du gouvernement selon laquelle la directive a été abrogée par des textes législatifs plus récents et est contraire aux dispositions des conventions nos 87 et 98. La FITBB estime que la jurisprudence de la Cour entraîne la faillite potentielle des syndicats dans le secteur du bâtiment.
  3. 320. Dans sa communication du 29 janvier 1993, la FITBB indique que la Cour suprême a également rejeté, le 23 novembre 1992, la demande de révision de la décision du 9 septembre 1992 formulée par le syndicat de l'entreprise Algon.

C. Réponse partielle du gouvernement

C. Réponse partielle du gouvernement
  1. 321. Dans sa réponse du 3 mars 1994, le gouvernement déclare à nouveau que, depuis longtemps, la directive générale no 20 n'est plus en vigueur et que le ministère du Travail et de l'Emploi a récemment adopté de nouvelles directives pour réglementer le secteur du bâtiment; celles-ci contiennent, entre autres, des dispositions garantissant aux travailleurs de ce secteur le droit de s'associer et de négocier collectivement.
  2. 322. En ce qui concerne le cas des travailleurs licenciés par l'entreprise Algon, le gouvernement indique que les faits démontrent que les deux parties opposées dans ce conflit ont pu faire recours devant la justice. Il estime également que la décision de la Commission nationale des relations professionnelles (CNRP) était sans aucun doute fondée sur la législation et sur des antécédents. Le fait que l'une des parties est d'avis que cette décision est erronée n'implique pas nécessairement que le gouvernement déploie tous les efforts possibles pour saper les droits des travailleurs et des syndicats. Au contraire, si une telle situation existait dans la pratique - comme veut le faire croire l'organisation plaignante -, l'affaire en question n'aurait jamais pu être portée devant la Cour suprême.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 323. Le comité regrette que le gouvernement, malgré le temps écoulé depuis le dernier examen de ce cas, et bien qu'il ait été invité à fournir des informations complètes à plusieurs reprises, y compris par un appel pressant, n'ait communiqué que des renseignements partiels.
  2. 324. Dans ces conditions, et conformément à la règle de procédure applicable (voir paragr. 17 du 127e rapport du comité, approuvé par le Conseil d'administration à sa 184e session), le comité se voit contraint de présenter un rapport sur le fond de cette affaire en l'absence de la totalité des informations qu'il espérait recevoir du gouvernement.
  3. 325. Le comité rappelle tout d'abord au gouvernement que le but de l'ensemble de la procédure instituée à l'OIT pour l'examen des allégations faisant état d'atteintes à la liberté syndicale est d'assurer le respect de celle-ci en droit comme en fait. Si cette procédure protège les gouvernements contre des accusations déraisonnables, ceux-ci doivent reconnaître de leur côté qu'il importe, pour leur propre réputation, qu'ils présentent, en vue d'un examen objectif, des réponses détaillées aux allégations formulées à leur encontre. (Voir premier rapport du comité, paragr. 31.)
  4. 326. Le comité note avec regret que, malgré les recommandations qu'il avait formulées lors de sa session de mai 1992, la directive générale no 20 ne semble pas avoir été abrogée expressément et dans son intégralité. Il note également que, d'après l'organisation plaignante, la Cour suprême, en septembre et novembre 1993, se serait fondée sur cette directive pour rejeter l'appel et la demande de révision introduits par le syndicat de l'entreprise Algon pour obtenir la déclaration de légalité de la grève déclarée par le syndicat de cette entreprise et la réintégration de tous les travailleurs licenciés. Le comité rappelle que la grève en question avait été déclenchée pour protester contre le licenciement d'un groupe de travailleurs de l'entreprise qui avait adhéré au syndicat de l'entreprise pour constituer une unité de négociation au niveau de l'entreprise, alors qu'en vertu de la directive no 20 les travailleurs affectés à des projets particuliers ne sont pas autorisés à constituer valablement des unités de négociation à ce niveau.
  5. 327. Il apparaît en outre au comité, bien que le gouvernement réitère dans sa dernière réponse qu'elle est ni applicable ni en vigueur, que la directive générale no 20 sert toujours de base juridique pour justifier les licenciements arbitraires dont ont fait l'objet des travailleurs du secteur du bâtiment. Dans ces conditions, le comité ne peut que rappeler que tous les travailleurs, sans distinction d'aucune sorte, doivent avoir le droit de constituer les organisations de leur choix et de s'y affilier, qu'il s'agisse de travailleurs permanents ou de travailleurs affectés à un projet pour une période temporaire, et demande au gouvernement de prendre des mesures pour garantir que la législation assure le respect de ce principe.
  6. 328. Le comité souligne également que le droit aux libres négociations collectives pour tous les salariés ne bénéficiant pas des garanties d'un statut de fonctionnaires publics est un droit syndical fondamental et constitue un élément essentiel de la liberté syndicale. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 581 et 583.) De l'avis du comité, la directive générale no 20 entrave le droit syndical et de négociation collective des travailleurs affectés à un projet pour une période temporaire, en ce qu'elle leur interdit de se regrouper au niveau de l'entreprise ou de la société en vue d'y constituer une unité de négociation et ne leur offre que la possibilité, par le biais de l'autorisation d'adhérer au syndicat agréé de l'industrie du bâtiment, de négocier au sein de l'unité de négociation au niveau de la branche d'activité.
  7. 329. Notant que, selon le gouvernement, le ministère du Travail et de l'Emploi a adopté de nouvelles directives pour réglementer le secteur du bâtiment et que celles-ci contiennent des dispositions garantissant aux travailleurs de ce secteur le droit de s'associer et de négocier collectivement (contrairement à ce que le gouvernement déclare, une copie de ces directives n'avait pas été jointe à sa réponse), le comité demande à nouveau au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger formellement la directive générale no 20. Il prie le gouvernement de lui communiquer le texte d'abrogation ainsi qu'une copie des nouvelles directives susmentionnées.
  8. 330. Pour ce qui est du cas particulier des travailleurs licenciés par l'entreprise Algon, le comité regrette ne pas disposer des jugements rendus par la Cour suprême dans cette affaire. Notant toutefois que ces jugements portent sur la question centrale de savoir si la grève déclenchée par les travailleurs était légale, le comité considère qu'une grève ne saurait être déclarée illégale que lorsqu'elle a été déclenchée en violation de restrictions ou d'interdictions qui sont elles-mêmes conformes aux principes de la liberté syndicale.
  9. 331. Toujours à ce sujet, le comité regrette que le gouvernement se borne à déclarer qu'il estime que la décision de la Commission nationale des relations professionnelles était sans aucun doute fondée sur la législation et sur des antécédents, et que le fait que l'une des parties est d'avis que cette décision est erronée n'implique pas nécessairement que le gouvernement déploie tous les efforts possibles pour saper les droits des travailleurs et des syndicats. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement que soit menée une enquête impartiale au sujet des événements qui se sont déroulés au sein de l'entreprise Algon et, au cas où il serait prouvé que le licenciement des travailleurs temporaires - licenciement contre lequel le syndicat de l'entreprise a protesté par une grève - a été motivé par la tentative des travailleurs concernés de constituer une unité de négociation au sein de l'entreprise, que les mesures nécessaires soient prises par l'organisme compétent pour que les indemnités appropriées leur soient versées. Il prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 332. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour garantir que la législation assure le respect du principe selon lequel tous les travailleurs, sans distinction d'aucune sorte, doivent avoir le droit de constituer les organisations de leur choix et de s'y affilier, qu'il s'agisse de travailleurs permanents ou de travailleurs affectés à un projet pour une période temporaire.
    • b) Soulignant que le droit aux libres négociations collectives pour tous les salariés ne bénéficiant pas des garanties d'un statut de fonctionnaires publics est un droit syndical fondamental et constitue un élément essentiel de la liberté syndicale, le comité demande à nouveau instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger formellement la directive générale no 20. Il prie le gouvernement de lui communiquer le texte d'abrogation ainsi qu'une copie des nouvelles directives que le ministère du Travail et de l'Emploi aurait adoptées pour réglementer le secteur du bâtiment et qui contiendraient des dispositions garantissant aux travailleurs de ce secteur le droit de s'associer et de négocier collectivement.
    • c) Pour ce qui est du cas particulier des travailleurs licenciés par l'entreprise Algon, le comité demande au gouvernement que soit menée une enquête impartiale au sujet des événements qui se sont déroulés au sein de l'entreprise et, au cas où il serait prouvé que le licenciement des travailleurs temporaires - licenciement contre lequel le syndicat de l'entreprise a protesté par une grève - a été motivé par la tentative des travailleurs concernés de constituer une unité de négociation au sein de l'entreprise, que les mesures nécessaires soient prises par l'organisme compétent pour que les indemnités appropriées leur soient versées. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
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