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  1. 422. Dans une communication du 20 décembre 1991, le Congrès des syndicats (TUC) a présenté une plainte en violation de la convention no 98 contre le gouvernement du Royaume-Uni. Le gouvernement pour sa part a envoyé ses observations sur ce cas dans une communication du 14 février 1992.
  2. 423. Le Royaume-Uni a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 424. Dans sa communication du 20 décembre 1991, l'organisation plaignante soutient que la loi et la pratique britanniques contreviennent aux dispositions de l'article 1 de la convention no 98 en ce qu'elles n'assurent aucune protection effective contre la discrimination antisyndicale à l'embauche. A l'appui de ses allégations, le TUC évoque une série de cas où des travailleurs n'ont pu se faire engager ou ont été licenciés peu après leur engagement parce qu'ils figuraient sur une liste noire de militants syndicaux établie par la Ligue économique (Economic League), liste qui aurait été communiquée aux employeurs.
  2. 425. Selon le TUC, la Ligue économique est un organisme britannique dont les activités sont entourées de secret. On sait qu'elle est financée par des entreprises industrielles et financières qui souscrivent à l'établissement de listes noires. Les activités de la ligue ont fait l'objet d'un examen de la part d'une commission spéciale sur l'emploi de la Chambre des communes lors d'une enquête sur les pratiques d'embauche menée en 1989. Cette commission a recommandé l'adoption de mesures visant à interdire à la ligue d'établir des listes noires, mais le Secrétaire d'Etat à l'Emploi s'est contenté d'affirmer que les employeurs recourant à ce type de service devaient s'assurer de la valeur des informations reçues. Il a rejeté la proposition de la commission tendant à accorder aux candidats à l'embauche un droit de regard sur ces informations, qui se sont souvent révélées fausses. A l'heure actuelle, les personnes dont l'avenir professionnel est compromis par les informations fournies par la Ligue économique ne disposent d'aucun recours.
  3. 426. La loi de 1990 sur l'emploi n'offre aucune protection à ceux dont le gagne-pain est déjà menacé. Jusqu'en 1989, la Ligue économique a fiché au moins 22.000 personnes. Elle prétend maintenant n'avoir que 2.000 fiches, mais ce chiffre ne peut faire l'objet d'une vérification. En juin 1990, elle en a reconnu 10.000 devant la commission spéciale sur l'emploi. Des journalistes du Daily Mirror se sont procuré récemment la liste de 1989 et ont obtenu la preuve que la ligue gérait pour le compte des entreprises abonnées une liste noire sur laquelle figurait le nom de nombreux syndicalistes. La principale liste du fichier est la liste K, qui regroupe les renseignements relatifs aux travailleurs du bâtiment que l'on a refusé d'embaucher ou que l'on a licenciés après leur embauche sans raison apparente. Il y a parmi eux des ouvriers qualifiés qui n'ont pu trouver d'emploi depuis lors malgré la pénurie aiguë de main-d'oeuvre dans leur secteur d'activité.
  4. 427. L'organisation plaignante expose ensuite un certain nombre de cas, qui ne sont selon elle que des exemples parmi d'autres, dans lesquels il a été dit aux intéressés que, s'ils n'avaient pu trouver d'emploi, c'était parce qu'ils avaient été inscrits sur une liste noire par la Ligue économique.
  5. 428. M. Malvyn Barton était syndiqué et ses activités syndicales étaient parfaitement légitimes. Il n'avait jamais participé à une grève ou exercé de responsabilités syndicales. Il a pourtant a été inscrit sur la liste de la ligue comme militant et a été dans l'incapacité de trouver du travail de 1982 à 1988, en dépit d'excellentes références.
  6. 429. Alors qu'il travaillait à la déviation de Beverley dans la région de Humberside pour l'entreprise de construction Mowlem, M. Dennis Huggins a accepté, à la demande de ses collègues, de devenir leur délégué du personnel, poste qu'il n'avait jamais occupé auparavant. Son travail une fois achevé, il n'a pas pu en trouver d'autre. Après quatre mois, il a pris contact avec le responsable des relations professionnelles de Mowlem, qui lui a dit le tenir en haute estime et le considérer comme un bon délégué du personnel puisqu'il avait réussi à négocier une augmentation de salaire et une amélioration des conditions de travail pour ses mandants sans agiter la menace de la grève. Après avoir nié que M. Huggins eût été inscrit sur une liste noire, le responsable des relations professionnelles a vérifié la chose avec la Ligue économique, qui l'a informé que l'intéressé était suspect politiquement et que l'entreprise Mowlem l'avait inscrit sur la liste.
  7. 430. En 1979, M. David Harrison avait participé à Liverpool à un dur conflit du travail à la suite duquel tous les grévistes avaient été licenciés, l'entreprise elle-même étant fermée. L'employeur avait affirmé au bureau de la Ligue économique à Warrington que M. Harrison et certains de ses collègues avaient participé de manière particulièrement active au conflit et qu'il déconseillait aux autres entreprises de les engager. Par la suite, alors qu'il était employé par une petite entreprise de construction qui travaillait en sous-traitance pour l'entreprise Tarmac plc., M. Harrisson devait découvrir que son nom, qui figurait sur la liste des travailleurs proposés pour effectuer le travail sous-traité, était le seul à avoir été refusé par Tarmac. On lui fit alors savoir qu'il figurait sur une sorte de liste noire professionnelle et il fut averti d'avoir à éclaircir l'affaire, faute de quoi il serait licencié. Les cas ci-dessus figurent dans le livre de Hollingsworth et Tremayne intitulé "The Economic League: The Silent McCarthyism".
  8. 431. M. John Barlow, maçon, est secrétaire local du Syndicat de la construction UCATT, pour lequel il effectue des activités syndicales normales. A plusieurs reprises, il a été licencié quelques heures à peine après avoir été embauché. Il figure sur la liste K de la Ligue économique depuis plus de dix ans. Son cas a été cité dans le Daily Mirror de septembre 1991.
  9. 432. M. Brian Dorton, monteur en charpentes métalliques, était membre du Syndicat unifié du génie civil (Amalgamated Engineering Union). En 1983, il a postulé à un emploi dans une entreprise qui recherchait désespérément des personnes possédant ses qualifications. Il fut engagé mais, la veille du jour où il devait commencer à travailler, la personne qui l'avait reçu l'appela au téléphone pour lui dire que l'entreprise avait changé d'avis, estimant qu'il présentait un risque. En 1986, il posa sa candidature comme conducteur d'engin sur le chantier d'une prison en construction à Thamesmead, dans le sud-est de Londres; pourtant, alors qu'on lui avait dit que l'entrepreneur avait besoin d'urgence d'un conducteur et bien qu'il habitât sur place, il ne fut pas engagé. En juillet de la même année, M. Dorton se rendit de nouveau sur le chantier où le responsable lui dit avoir reçu l'ordre de ne l'engager sous aucun prétexte en raison de ses activités syndicales passées. En 1988, M. Dorton postula un emploi de monteur en charpentes métalliques dans une entreprise travaillant en sous-traitance pour Wimpey. On lui dit que le maître d'oeuvre n'accepterait jamais de l'engager pour le chantier de la prison de Thamesmead du fait qu'il figurait sur une liste noire. Ce cas fut également cité dans le Daily Mirror et évoqué au cours d'un débat parlementaire.
  10. 433. Au cours du même débat, Mme Maria Fyfe, député de Glasgow Maryhill, a voulu ajouter au projet de loi sur l'emploi une nouvelle disposition visant à interdire les organismes établissant des listes noires. Elle a exposé le cas de Larry Coleman, syndicaliste de Douvres qui avait postulé 22 fois en vain un emploi auprès du groupe d'entreprises Trans-Manche Link. Il avait décidé de réunir les autres candidats malheureux à un poste similaire; une centaine de personnes avaient assisté à la réunion, dont beaucoup d'anciens mineurs du Kent qui avaient participé à la grève de 1984 et qui avaient perdu leur emploi par suite de la fermeture des puits. Mme Fyfe fit remarquer que, bien que TML ait nié avoir le moindre lien avec la Ligue économique et avoir consulté des listes noires, le responsable des relations professionnelles et un autre cadre du groupe avaient assisté à une réunion de la ligue en décembre 1987, à une époque où TML embauchait de nombreux travailleurs. Par ailleurs, Mme Fyfe avait écrit à toutes les personnes dont le nom figurait sur la liste noire d'une entreprise de construction établie par la ligue, liste qui lui avait été communiquée de manière anonyme. La plupart de ceux qui lui avaient répondu avaient finalement choisi de se recycler ou avaient été au chômage avant leur retraite.
  11. 434. L'organisation plaignante conclut qu'en tolérant, voire en encourageant activement une telle discrimination antisyndicale, la vie professionnelle de nombreux travailleurs a été brisée, ce qui témoigne une fois de plus de l'attitude systématiquement hostile et agressive du gouvernement envers les activités syndicales légitimes garanties par les conventions de l'OIT.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 435. Le gouvernement déclare que la Ligue économique est un organisme créé en 1919 dont le but déclaré est de "militer en faveur de la démocratie, de la liberté individuelle et de la libre entreprise". La ligue déclare s'acquitter de sa mission par les moyens suivants: publication de documents visant à développer les connaissances et études économiques, ainsi que l'étude des relations professionnelles et des questions sociales; dénonciation des activités des groupes antidémocratiques et révolutionnaires d'extrême droite et d'extrême gauche; fourniture aux entreprises industrielles et commerciales de services consultatifs en matière de relations professionnnelles, surtout pour les aider à contrer l'agitation professionnelle d'inspiration politique. La ligue fournit à ses abonnés des informations confidentielles sur les candidats à un emploi. Elle déclare tirer ses revenus de la vente de ses publications et des avis qu'elle donne aux entreprises en matière d'embauche, et affirme qu'elle ne soutient aucun parti politique et qu'elle n'est soutenue par aucun d'entre eux. L'Office de la protection des données a confirmé que la ligue est actuellement enregistrée conformément aux dispositions de la loi sur la protection des données.
  2. 436. Le gouvernement estime qu'il est important que les employeurs puissent obtenir des renseignements confidentiels sur les candidats à un emploi. Il insiste cependant sur le fait que ceux qui fournissent ces informations comme ceux qui les utilisent doivent tout mettre en oeuvre pour s'assurer de leur exactitude. A cet égard, il a accueilli favorablement l'engagement de la Ligue économique à fournir sur demande à toute personne les informations qu'elle détient sur son compte. Il souligne par ailleurs que rien n'indique que la ligue agisse illégalement. En outre, contrairement à ce qu'affirme le TUC, les organismes qui diffusent de fausses informations sur les personnes encourent des sanctions pénales. Le droit civil britannique offre des moyens de recours à ceux qui, dans un cas précis, estiment que les informations fournies à un employeur sont inexactes.
  3. 437. Par ailleurs, le gouvernement considère la législation britannique comme pleinement conforme aux dispositions de l'article 1 de la convention no 98. L'article 1 de la loi de 1990 sur l'emploi dispose que le fait pour un travailleur d'être syndiqué ne doit pas nuire à ses chances d'embauche. Pour garantir ce principe, la loi considère comme illégal le refus d'un employeur d'engager une personne sous prétexte qu'elle est ou qu'elle n'est pas syndiquée ou bien qu'elle refuse de se syndiquer ou qu'elle refuse de renoncer à son affiliation syndicale. La loi affirme donc le principe selon lequel nul ne peut se voir refuser un emploi en raison de son appartenance ou de sa non-appartenance à un syndicat.
  4. 438. En ce qui concerne la discrimination fondée sur les activités syndicales passées, si un employeur affirme ne pas s'opposer à l'embauche de travailleurs syndiqués mais refuse d'engager tel ou tel travailleur parce qu'il a assisté dans le passé à des réunions syndicales et s'y est exprimé, il y a tout lieu de croire que les tribunaux du travail jugeront ces activités conformes aux principes fondamentaux du syndicalisme, et que l'article 1 de la loi s'appliquera. En tout état de cause, toute personne qui estime que l'un de ses droits garantis par l'article 1 de la loi de 1990 n'a pas été respecté (par exemple que l'on a refusé de l'engager en raison de son appartenance syndicale) peut se pourvoir devant un tribunal du travail à qui il appartient de trancher les faits de la cause.
  5. 439. Si un tribunal juge illégal le refus d'embauche fondé sur l'appartenance syndicale, il rendra une sentence dans ce sens. Il peut aussi accorder au plaignant une indemnité à la charge de l'employeur et/ou recommander à celui-ci de prendre des mesures propres à réparer les dommages causés au plaignant par le refus d'embauche illégal. Il peut par exemple recommander - mais non ordonner - à l'employeur d'attribuer un poste vacant au plaignant. Il évalue et accorde les indemnités selon les mêmes principes que pour les cas de violation des obligations légales, ce qui veut dire qu'il peut tenir compte du préjudice moral. Si le défendeur ne se conforme pas, sans raisons valables, à la recommandation qui lui est faite, le tribunal peut augmenter l'indemnité accordée ou en accorder une s'il ne l'a pas encore fait. Le montant de cette indemnité, y compris de toute indemnité supplémentaire accordée en cas de non-respect d'une recommandation, est soumis à un plafond actuellement fixé à 10.000 livres.
  6. 440. Par ailleurs, en vertu de l'article 23 de la loi de 1978 sur la protection de l'emploi (codification), un salarié qui estime que son employeur a pris des mesures (exception faite du congédiement) à son encontre en raison de son appartenance ou de sa non-appartenance à un syndicat, ou encore en raison de ses activités syndicales, peut se pourvoir devant un tribunal du travail. Les mesures en question ne sont pas définies par la loi, mais peuvent consister par exemple en un refus discriminatoire d'accorder une promotion ou en des menaces de licenciement ou de suppression d'emploi. Si le tribunal juge la plainte fondée, il fera une déclaration à ce sujet. Il peut aussi accorder une indemnité correspondant à la nature et à la gravité de la violation des droits du salarié et du préjudice subi. Cette indemnité n'est soumise à aucun plafond.
  7. 441. Le gouvernement estime que les dispositions de la loi de 1990 sur l'emploi sont pleinement conformes aux prescriptions de l'article 1, paragraphe 2 a), de la convention no 98. Il estime par ailleurs que l'article 1 de la loi de 1990 protège efficacement les travailleurs contre les refus d'embauche fondés sur leur appartenance syndicale passée. Il affirme également que les articles 23 et 58 de la loi de 1978 portant codification de la protection de l'emploi, qui protège les salariés contre le licenciement et autres mesures qui pourraient être prises à leur encontre en raison de leur appartenance ou de leurs activités syndicales passées, sont pleinement conformes aux prescriptions de l'article 1, paragraphe 2 b), de la convention.
  8. 442. Le gouvernement conclut donc que les cas cités par le TUC ne prouvent nullement que la législation britannique contrevienne à la convention no 98. Bien au contraire, il faut souligner que l'article 1 de la loi de 1990 accorde un droit nouveau qui n'avait jamais existé auparavant en droit britannique. En légiférant pour protéger les salariés contre les refus d'embauche fondés sur l'appartenance syndicale, ce qu'aucun gouvernement n'avait fait avant lui, le gouvernement considère que, loin d'avoir violé les dispositions de la convention, il élargit au contraire leur application d'une façon remarquable.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 443. Le comité note que ce cas concerne des allégations selon lesquelles le gouvernement du Royaume-Uni violerait les dispositions de la convention no 98 en autorisant les employeurs à vérifier si le nom de travailleurs apparaît sur une "liste noire" établie et tenue à jour par un organisme privé, la Ligue économique. Le gouvernement a répondu que les employeurs doivent pouvoir obtenir des informations confidentielles qu'ils jugent appropriées sur leurs futurs salariés et ajoute que la législation britannique offre une protection et des recours suffisants en ce domaine.
  2. 444. Tout d'abord, le comité souhaite manifester sa préoccupation face à ces graves allégations. Il note que, selon l'organisation plaignante, plusieurs travailleurs (qui ne constitueraient que quelques exemples d'une situation plus générale) se seraient vu refuser un emploi ou auraient été licenciés peu après leur embauche parce que leur nom aurait figuré sur la liste "K" ou une autre liste établie par la Ligue économique. Parmi les travailleurs cités dans la plainte, certains auraient été avertis directement par l'employeur ou l'un de ses représentants qu'ils figuraient sur une liste noire en raison de leurs activités syndicales passées et qu'ils ne pouvaient donc être engagés; d'autres auront été informés de façon moins directe. Si elles s'avéraient fondées, ces allégations constitueraient de graves violations des principes de la liberté syndicale énoncés dans la convention no 98. Le comité estime en outre que ces allégations sont d'autant plus préoccupantes que le traitement de ces listes par les moyens informatiques permettrait de les diffuser largement et exposerait les travailleurs visés à de possibles actes de discrimination antisyndicale et d'atteintes à la vie privée sur une très large échelle.
  3. 445. A cet égard, le comité note que les activités de la Ligue économique ont été examinées en 1989 par une commission spéciale de la Chambre des communes sur l'emploi, qui a recommandé l'adoption de mesures tendant à interdire à cet organisme d'établir des listes noires. Le comité demande au gouvernement de donner suite à ces recommandations et d'informer le comité à cet égard.
  4. 446. Le comité relève que la réponse du gouvernement mentionne que la Ligue est enregistrée conformément à la loi sur la protection des données selon l'office de protection des données. Le comité demande au gouvernement de fournir le texte de cette loi.
  5. 447. En ce qui concerne plus précisément la discrimination antisyndicale, le comité rappelle que, dans de nombreux cas de cette nature qu'il a eu à traiter, le comité a estimé que les gouvernements doivent, le cas échéant, prendre des mesures pour garantir que les travailleurs sont protégés contre des actes, y compris le licenciement, qui peuvent entraîner ou ont pour objet une discrimination antisyndicale en matière d'emploi à l'égard des travailleurs. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 3e édition, 1985, paragr. 542.)
  6. 448. Plus spécifiquement, le comité a exprimé l'opinion que les pratiques de "listes noires" de dirigeants ou de militants syndicaux mettent gravement en péril le libre exercice des droits syndicaux et que, d'une manière générale, les gouvernements devraient prendre des mesures sévères à l'égard de telles pratiques (Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 3e édition, 1985, paragr. 564.). Il a également rappelé que, lorsqu'un gouvernement s'est engagé à garantir, par des mesures appropriées, le libre exercice des droits syndicaux, cette garantie, pour être réellement efficace, devrait, s'il est besoin, être assortie notamment de mesures comportant la protection des travailleurs contre les actes de discrimination antisyndicale en matière d'emploi (cas no 1420, 259e rapport, paragr. 234, approuvé par le Conseil d'administration à sa session de novembre 1988).
  7. 449. Il appartient donc au comité de déterminer si, en droit ou en pratique, la législation permet une protection adéquate des travailleurs contre les actes de discrimination antisyndicale en matière d'emploi.
  8. 450. Le comité observe que la législation britannique offre effectivement certaines voies de recours contre les actes de discrimination antisyndicale. Par exemple, l'article 1 de la loi de 1990 sur l'emploi permet aux travailleurs qui affirment s'être vu refuser un emploi en raison de leur appartenance syndicale de se pourvoir devant un tribunal de travail qui peut leur accorder une indemnité et recommander à l'employeur de leur attribuer un poste vacant; si l'employeur ne suit pas cette recommandation, le montant de l'indemnité peut être porté à un maximum de 10.000 livres. Par ailleurs, l'article 23 de la loi de 1978 sur la protection de l'emploi (codification) permet un recours similaire lorsque des mesures sont prises contre des salariés en raison de leur appartenance syndicale, sauf s'il s'agit d'un licenciement; dans ce cas, l'indemnité n'est soumise à aucun plafond. On ne peut donc soutenir que la législation britannique n'offre aucun recours contre les actes de discrimination antisyndicale; cependant, le caractère approprié et l'efficacité de ces recours constituent une question distincte qui ne peut être tranchée qu'à partir des faits.
  9. 451. De l'avis du comité, les voies de recours offertes par la législation britannique seraient de nature à prévenir les actes de discrimination antisyndicale mentionnés à l'article 1 de la convention no 98 pour autant que les travailleurs soient informés des motifs à l'origine de ces mesures. Des doutes peuvent exister en revanche, quant à l'efficacité de ces procédures dans les cas - sans doute nombreux - où les travailleurs se heurtent à des difficultés pratiques pour établir la nature réelle de leur licenciement ou du refus d'embaucher qui leur est opposé. Il conviendrait donc, pour qu'il puisse se prononcer en toute connaissance de cause, que le comité obtienne des informations plus précises sur les cas spécifiques mentionnés par l'organisation plaignante. Le comité demande donc au gouvernement et à l'organisation plaignante de fournir des informations supplémentaires à ce sujet, et notamment d'indiquer si les travailleurs en question ou d'autres travailleurs ont intenté des poursuites judiciaires en vertu de l'article 1 de la loi de 1990 sur l'emploi ou de l'article 23 de la loi de 1978 portant codification de la protection de l'emploi; dans l'affirmative, il souhaiterait être tenu informé des décisions rendues et de leurs attendus.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 452. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité exprime sa préoccupation face aux allégations présentées par l'organisation plaignante et rappelle que les pratiques de "listes noires" de dirigeants et militants syndicaux mettent gravement en péril le libre exercice des droits syndicaux et que, d'une manière générale, les gouvernements devraient prendre des mesures sévères à l'égard de telles pratiques.
    • b) Le comité demande au gouvernement de fournir le texte de la loi sur la protection des données.
    • c) Le comité demande au gouvernement de donner suite aux recommandations de la Commission de l'emploi de la Chambre des communes et de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
    • d) Le comité demande au gouvernement et à l'organisation plaignante de fournir des informations supplémentaires sur les cas spécifiques mentionnés dans les allégations, et notamment d'indiquer si les travailleurs en question ou d'autres travailleurs ont intenté des poursuites judiciaires. Dans l'affirmative, le comité leur demande d'être tenu informé des décisions rendues et de leurs attendus.
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