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- 385. La plainte figure dans une communication de la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT), datée du 20 février 1992. La CUT a fait parvenir de nouvelles allégations dans une communication en date du 18 juin 1992. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication du 28 septembre 1992.
- 386. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 387. Dans sa communication du 20 février 1992, la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT) allègue que la loi no 50 de 1990 a généralisé la pratique des contrats de travail de courte durée et que, du fait de cette insécurité manifeste, le droit d'organisation des travailleurs n'est plus garanti, car ces derniers, en se syndiquant, courent le risque que leur contrat de travail ne soit pas renouvelé. Il est également fréquent que les employeurs licencient les travailleurs qui exercent leur droit syndical, comme cela s'est produit dans les entreprises MULTIPLAST (40 licenciements), INDUNAL (45 licenciements) et WACKENHUT (70 licenciements), fassent pression sur les travailleurs pour qu'ils cessent d'appartenir à un syndicat, comme chez GOODYEAR, ou obligent les travailleurs à s'affilier à des syndicats inféodés à la direction de l'entreprise, par exemple à la raffinerie de sucre San Carlos de Tuluá (Valle).
- 388. L'organisation plaignante ajoute que, en vertu de la loi no 60 et de ses décrets d'application (notamment le décret no 1660 de 1991) et dans le dessein de réduire les effectifs de la fonction publique, le gouvernement a mis en place, dans de nombreux organismes étatiques et entreprises publiques, des programmes de "retraite avec prime de départ" qui ont déjà touché et toucheront encore des milliers de travailleurs qui ont le choix soit de prendre volontairement leur retraite avec une compensation économique, soit d'accepter un licenciement moyennant indemnisation.
- 389. Pour ce qui est du droit de grève, l'organisation plaignante ajoute que, contrairement aux dispositions de la nouvelle Constitution nationale, le gouvernement s'arroge le droit de décider quels sont les services publics essentiels, parmi lesquels il inclut les banques et le secteur financier, le secteur sanitaire, la sécurité sociale, les télécommunications, l'énergie - dont l'électricité -, les ports, les transports, les aqueducs et les égouts, l'enseignement, les services de l'Etat en général et même certains hôtels. Sur cette base, le gouvernement a déclaré illégales des grèves dans ces secteurs, avec les licenciements qui en ont résulté.
- 390. S'agissant du droit de négociation collective, l'organisation plaignante indique que lorsqu'aucun accord n'intervient dans les conflits du secteur étatique et dans de nombreux différends du secteur privé le gouvernement finit par convoquer un tribunal d'arbitrage obligatoire. De même, dans le secteur public, le droit de négociation collective est reconnu aux "travailleurs officiels" (qui détiennent un contrat de travail) mais non aux "employés publics" (dont la situation relève d'un statut), ces derniers étant en outre privés du droit de grève. Par ailleurs, la loi no 60 de 1990 dispose qu'aucun organisme étatique ne peut accorder de hausses salariales supérieures à celles qu'a arrêtées le gouvernement. En ce sens, l'article 18 du décret no 2914 de 1991 dispose que "les représentants légaux et les directoires ou conseils de direction des entreprises industrielles et commerciales de l'Etat et des sociétés d'économie mixte soumises au régime des entreprises industrielles et commerciales de l'Etat devront, avant de conclure des conventions collectives prévoyant des hausses salariales supérieures à celles qu'a décrétées le gouvernement national pour les fonctionnaires, solliciter l'autorisation du Conseil supérieur de la politique fiscale (CONFIS) ou de l'instance qui en tient lieu ...". L'organisation plaignante ajoute que si, exceptionnellement, une convention collective est conclue, le gouvernement la modifie, comme cela s'est produit dans l'entreprise étatique Puertos de Colombia, où le gouvernement, en vertu du décret no 35 de 1992, a modifié les clauses relatives aux pensions et à la retraite.
- 391. Dans sa communication du 18 juin 1992, l'organisation plaignante allègue que, contrairement à l'article 56 de la Constitution nationale, les consultations ne sont pas utilisées comme mécanisme de règlement des conflits, et elle sollicite les conseils techniques du BIT dans la discussion du projet de statut du travail présenté au Congrès de la République.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 392. Dans sa communication du 28 septembre 1992, le gouvernement déclare que, dans l'exposé des motifs de la loi no 50 de 1990, le motif principal invoqué est la nécessité d'adapter le marché de l'emploi à la politique d'ouverture et de restructuration de l'appareil productif, laquelle implique l'établissement d'une législation du travail actualisée de nature à favoriser la relance de l'économie et à stimuler les investissements et les producteurs dans les secteurs de base de l'économie, comme l'industrie, les services, le commerce et l'agriculture.
- 393. Le gouvernement ajoute que la réforme de la législation du travail s'étend à certains aspects fondamentaux touchant les droits individuels et collectifs, compte tenu essentiellement des conventions internationales ratifiées par le gouvernement national dans le dessein de modifier profondément les relations entre les travailleurs et les employeurs, et fait remarquer que les changements introduits ne peuvent constituer un retour en arrière pour les travailleurs, car il s'agit non seulement de protéger les droits acquis, mais aussi d'améliorer les relations professionnelles, en rationalisant les institutions pour promouvoir la sécurité des travailleurs, en encourageant la création de nouvelles unités de production et en stimulant la création d'emplois productifs sur une grande échelle.
- 394. Le gouvernement déclare également qu'il a respecté les principes énoncés dans la Constitution nationale de 1991, en particulier les droits et libertés des travailleurs, car il s'est efforcé de contribuer au règlement des conflits du travail aux niveaux national et régional (comme dans le cas d'Avianca, où le ministère du Travail, étant intervenu directement dans les négociations, a obtenu la suspension de la procédure de licenciement collectif). Dans les cas prévus par la loi, la convocation des tribunaux d'arbitrage s'est effectuée dans la légalité. Le gouvernement ajoute qu'en ce qui concerne les programmes de retraite avec indemnité compensatrice dans le secteur public, prévus par le décret no 1660 de 1991 (portant réglementation de la loi no 60 de 1990), ledit décret a été déclaré inconstitutionnel par l'arrêt du 13 août 1992.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 395. Le comité prend note des déclarations du gouvernement à propos des contrats de travail de courte durée qui auraient été généralisés en vertu de la loi no 50 et des milliers d'emplois qui auraient été perdus du fait de la loi no 60 et de ses décrets d'application (notamment le décret no 1660), lesquels ont donné et donneront encore lieu à des programmes de rationalisation dans le secteur public. Le comité note en particulier que, d'après le gouvernement, la loi no 50 vise à relancer l'économie, les investissements et la création d'emplois, et que le décret no 1660 a récemment été déclaré inconstitutionnel.
- 396. Le comité est conscient qu'une restructuration du secteur public et/ou une plus grande flexibilité dans le domaine du travail ne constituent pas en soi une violation de la liberté syndicale. Toutefois, il est indéniable que ces changements entraînent des conséquences importantes dans le domaine social et syndical, en particulier en raison de la plus grande précarité d'emploi qui peut en résulter. De l'avis du comité, il serait donc nécessaire que les organisations d'employeurs et de travailleurs soient consultées sur la portée et les modalités des mesures décidées par les autorités.
- 397. Le comité invite en conséquence le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour que, dans le cadre de la commission permanente tripartite prévue par la nouvelle Constitution nationale (article 56), des discussions soient engagées avec les partenaires sociaux afin que, notamment, la politique suivie par le gouvernement en matière de restructuration n'entraîne pas de conséquences dommageables sur l'exercice des droits syndicaux.
- 398. Enfin, le comité regrette que le gouvernement n'ait pas répondu de manière détaillée aux autres allégations (licenciements et ingérences antisyndicales; existence de dispositions et de pratiques restrictives en matière de grèves, de négociations collectives et d'arbitrage obligatoire; assujettissement de la négociation collective dans le secteur public à la politique économique du gouvernement; et notamment modification d'une convention collective dans l'entreprise Puertos de Colombia par voie de décret). Le comité demande au gouvernement d'y répondre sans délai.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 399. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité invite le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour que des discussions soient engagées avec les partenaires sociaux afin que, notamment, la politique suivie par le gouvernement en matière de restructuration n'entraîne pas de conséquences dommageables sur l'exercice des droits syndicaux.
- b) Le comité regrette que le gouvernement n'ait pas répondu de manière détaillée aux autres allégations (licenciements et ingérences antisyndicales; existence de dispositions et de pratiques restrictives en matière de grèves, de négociations collectives et d'arbitrage obligatoire; assujettissement de la négociation collective dans le secteur public à la politique économique du gouvernement; et notamment modification d'une convention collective dans l'entreprise Puertos de Colombia par voie de décret). Le comité demande au gouvernement d'y répondre sans délai.