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- 675. Dans une communication datée du 8 février 1993, le Conseil des syndicats de Nouvelle-Zélande (NZCTU) a présenté une plainte contre le gouvernement de la Nouvelle-Zélande au sujet de violations de la liberté syndicale. Il a envoyé des informations complémentaires et des éléments probants à l'appui de sa plainte dans des communications datées des 11 mars et 21 juin 1993. L'Internationale des services publics (ISP), l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation et des branches connexes (UITA), la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), la Fédération internationale des employés, techniciens et cadres (FIET) et la Fédération internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (FITBB) se sont associées à cette plainte dans des communications datées respectivement des 3 et 15 mars, 19 avril, 5 mai et 20 août 1993.
- 676. Le gouvernement a transmis ses observations sur ce cas dans une communication reçue le 14 septembre 1993. Il a fourni des renseignements complémentaires dans une communication datée du 12 octobre 1993.
- 677. La Nouvelle-Zélande n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
- 678. A sa réunion de novembre 1993, le comité a décidé d'ajourner l'examen du présent cas jusqu'en mars 1994, où il ne prendrait en considération que les informations reçues jusqu'en novembre 1993. Le comité a été informé que le Bureau a reçu récemment d'autres informations. Il a décidé d'examiner ce cas conformément à sa décision de novembre 1993.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 679. Dans sa plainte, le NZCTU allègue que la loi sur les contrats de travail (ci-après dénommée "la loi"), qui est entrée en vigueur le 15 mai 1991, contrevient aux dispositions des conventions nos 87 et 98 en ce qui touche la procédure de négociation collective et eu égard aux restrictions qu'elle instaure au droit de grève. Le NZCTU reconnaît qu'avant l'adoption de la loi le gouvernement et les centrales patronales et syndicales étaient d'avis qu'il fallait changer l'organisation des négociations en Nouvelle-Zélande, lesquelles étaient menées par catégorie professionnelle, pour tenir compte de l'ouverture et de la transformation rapide de l'économie. En réalité, c'étaient les modalités du changement qui étaient controversées, et le NZCTU s'est opposé à la loi aux motifs qu'elle n'instaurait pas un cadre législatif convenable pour l'exercice du droit d'organisation et de négociation collective.
- 680. Expliquant la genèse de la réforme législative, le NZCTU indique que le Parti national, lors des élections de 1990, avait axé sa campagne sur son engagement à faire abroger la loi sur les relations de travail et adopter des textes législatifs en vertu desquels les travailleurs seraient soumis à un régime contractuel, ce dès son entrée en fonctions. C'est ainsi que le projet de loi sur les contrats de travail a été soumis au Parlement le 19 décembre 1990. Or, le gouvernement a été avisé par le ministère du Travail, avant l'entrée en vigueur de la loi, que celle-ci n'était pas compatible avec le système de négociation collective envisagé dans la convention no 98. A cet égard, le NZCTU cite certains passages d'un rapport établi par le ministère le 3 avril 1991:
- Le projet de loi sur les contrats de travail ne va cependant pas jusqu'à privilégier les contrats collectifs par rapport aux contrats individuels. Il indique qu'il revient aux parties de trancher selon ce qui convient le mieux à leur situation. A cet égard, il est neutre.
- En réalité, l'idée directrice de l'article 4 de la convention no 98 est que la négociation collective, librement engagée, doit être encouragée. Le projet de loi sur les contrats de travail, en revanche, ne prodigue aucun encouragement en ce sens ni ne défend ce principe.
- 681. Le NZCTU déclare qu'une commission parlementaire, après avoir pris connaissance des documents soumis au sujet du projet de loi, a fait rapport le 23 avril 1991. Cent quatre-vingt-huit de ces communications étaient hostiles au projet de loi, 71 y étaient favorables. Bien que la commission parlementaire ait résumé les principaux motifs de rejet, elle n'en a pas tenu compte et n'a fait aucune recommandation concernant les motifs fondamentaux d'opposition au projet. Des modifications de forme ont été apportées au projet de loi, qui a été adopté le 15 mai 1991.
- 682. Le NZCTU énumère plus précisément les violations des dispositions des conventions nos 87 et 98 que la loi consacre dans la procédure de négociation collective. Il déclare tout d'abord que la loi a considérablement rétréci le champ des conventions collectives. Il fournit, dans une annexe jointe à sa plainte, des données qui montrent qu'à l'issue des négociations de 1989-90 des conventions collectives applicables à 721.000 travailleurs ont été conclues. Le cycle de négociations de 1990-91 a commencé après l'adoption de la loi, encore qu'elle ne fût pas encore entrée en vigueur; de ce fait, certains employeurs ont refusé de conclure des accords, en préférant attendre pour négocier dans le cadre de la loi. Le nombre de travailleurs protégés par des conventions collectives est ainsi tombé à 610.200. Enfin, d'après les estimations les plus récentes, le nombre de travailleurs couverts par des conventions collectives au 1er octobre 1992 était de 376.000. Ces données indiquent que le nombre de travailleurs ainsi couverts a diminué de 45 pour cent depuis les négociations de 1989-90. Cela révèle que la loi non seulement n'encourage ni ne promeut la négociation collective telle qu'elle est envisagée dans la convention no 98, mais en outre qu'elle est hostile et fait obstacle à la négociation collective.
- 683. En deuxième lieu, le NZCTU soutient que les contrats de travail collectifs conclus dans le cadre de la loi ne sont pas des conventions collectives telles que l'OIT les envisage, parce qu'ils ne sont pas nécessairement le fruit de véritables négociations collectives auxquelles les organisations de travailleurs sont parties prenantes. Les contrats de travail collectifs visés par la loi peuvent être conclus sans l'intervention d'une organisation de travailleurs représentative et sans que les travailleurs prennent part à une procédure d'approbation collective. A titre d'exemple, 28 pour cent des contrats de travail collectifs enregistrés dans la base de données Infometrics ont été négociés sans la participation d'organisations de travailleurs. Cela est contraire à l'article 4 de la convention no 98, qui dispose que la négociation collective est la "négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d'employeurs d'une part, et les organisations de travailleurs d'autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi".
- 684. Le NZCTU se réfère à des dispositions précises pour décrire le système de négociation instauré par la loi. L'alinéa a) de l'article 9 dispose que les travailleurs et les employeurs ont le droit de choisir entre négocier pour leur propre compte, par l'intermédiaire d'une organisation de travailleurs ou d'employeurs ou par le truchement de n'importe quel autre groupe ou de n'importe quelle autre personne. En vertu de l'alinéa b) de l'article 9, les contrats de travail peuvent être individuels ou collectifs. Les individus, les agents personnels ou les organisations peuvent négocier les deux types de contrat. La seule restriction opposable à un représentant est que l'autre partie peut faire objection au choix d'un représentant qui a certaines convictions criminelles (art. 11). La loi ne contient aucune disposition relative à la reconnaissance des organisations de travailleurs (ou d'employeurs) et ne fait pas mention d'organisations de travailleurs (ou d'employeurs) représentatives. Lorsque les travailleurs ou les employeurs choisissent de négocier par l'intermédiaire d'un représentant, ils doivent individuellement donner mandat à ce représentant (paragr. 1, art. 12). Lorsqu'un représentant a obtenu un mandat, l'autre partie doit reconnaître que la personne ainsi habilitée est le représentant (paragr. 2, art. 12). La reconnaissance donne au représentant le droit d'accès, conformément à l'article 14. Elle n'oblige nullement l'employeur à négocier de bonne foi avec ce représentant. Enfin, l'article 17 dispose qu'un agent négociateur peut devenir partie au contrat de travail collectif avec l'assentiment des deux parties - employeur et travailleurs. Il en résulte que les contrats de travail collectifs peuvent être conclus sans que ne se déroule un processus collectif de représentation, même lorsque les travailleurs ont mandaté un syndicat.
- 685. Le NZCTU soutient que ces contrats ne sont pas de véritables conventions collectives mais simplement des collections de contrats individuels. Il affirme qu'il existe de nombreux exemples d'employeurs ayant conclu des contrats de travail collectifs directement par cette méthode avec des travailleurs qui avaient mandaté un syndicat et l'avaient dûment habilité comme la loi l'exige. Il cite en particulier à cet égard le cas Adams contre Alliance Textiles Mill. Le Syndicat des travailleurs des produits laitiers et du textile avait des affiliés chez Redruth Alliance Textiles Mill. Le syndicat était en train de recueillir les procurations exigées par la loi afin de poursuivre les négociations entamées avant l'entrée en vigueur de la loi. Le directeur de l'usine a distribué un "contrat de travail collectif" à chaque travailleur. Certains travailleurs l'ont signé alors que les négociations se poursuivaient. Le directeur a demandé à chaque travailleur de retirer les pouvoirs qu'il avait donnés au Syndicat des travailleurs des produits laitiers et du textile avant de signer son contrat de travail collectif. Le NZCTU indique qu'il existe d'autres cas analogues (qu'il décrit plus avant en détail) attestant que des employeurs avaient négocié des contrats collectifs de cette manière et contourné les syndicats représentatifs habilités.
- 686. Le NZCTU allègue en outre que la procédure de négociation collective instituée par la loi est contraire au principe selon lequel les organisations d'employeurs comme les organisations de travailleurs doivent négocier de bonne foi et faire tout leur possible pour conclure un accord. Les ingérences et les discriminations dans la négociation collective sont devenues systématiques, ce qui est contraire aux articles 2 et 4 de la convention no 98 et aux articles 2 et 3 de la convention no 87. Le NZCTU prétend que les dispositions de la loi relatives à la discrimination antisyndicale n'ont pas été à même d'empêcher ces ingérences, et il analyse les dispositions pertinentes.
- 687. Les articles 6 et 7 interdisent les contrats et autres conventions ou accords qui entravent la liberté de s'affilier (ou de ne pas s'affilier) à un syndicat ou qui instituent des préférences sur la base de l'appartenance à un syndicat. L'article 8 interdit l'exercice de pressions abusives sur les travailleurs afin qu'ils s'affilient à un syndicat ou qu'ils cessent d'en faire partie, ou sur les représentants syndicaux afin qu'ils cessent d'intervenir au nom des affiliés qui les ont mandatés. Ces dispositions n'empêchent pas les initiatives visant à s'ingérer dans la relation entre les travailleurs et les syndicats dans un autre but que celui d'obtenir l'adhésion de travailleurs à un syndicat ou leur retrait d'un syndicat. Cela signifie que les employeurs sont libres d'intervenir auprès d'un travailleur ou de tenter de peser sur sa décision de mandater un syndicat, et d'infliger un traitement discriminatoire aux travailleurs qui ont mandaté un syndicat.
- 688. Le NZCTU évoque ensuite les dispositions qui donnent un droit de recours individuel aux travailleurs. Le paragraphe 1 de l'article 28 définit les types de discriminations donnant lieu à l'exercice d'un tel droit. Ce sont, entre autres, les discriminations exercées contre des travailleurs qui prennent part aux activités d'une organisation syndicale. Tous ces recours protègent les travailleurs victimes de discriminations dans l'emploi. Le paragraphe 2 de l'article 28 restreint davantage l'étendue de la protection contre les discriminations, en limitant le droit de recours aux travailleurs ayant joué un rôle actif au sein du syndicat. Ainsi, les travailleurs victimes de discriminations en raison de leur affiliation syndicale ou des pouvoirs dont ils ont investi un syndicat ne bénéficieraient pas, aux termes de cet article, d'un droit de recours individuel. L'article 30 définit les cas où la coercition visant l'affiliation à un syndicat donne lieu à l'exercice d'un tel droit. Cet article s'applique aux conventions qui rendent obligatoire l'affiliation ou la non-affiliation à un syndicat, ainsi qu'aux pressions abusives exercées sur les travailleurs pour qu'ils s'affilient à des organisations syndicales ou cessent d'en être membres, et sur les représentants syndicaux pour qu'ils cessent d'intervenir au nom des travailleurs. Là encore, rien ne protège contre les ingérences ou les discriminations en rapport avec l'habilitation des syndicats. Le seul article qui offre une protection contre les immixtions dans la décision d'un travailleur d'habiliter un syndicat à le représenter ou les pressions exercées sur lui en ce sens est l'article 57, qui interdit les comportements rudes et abusifs. De l'avis du NZCTU, le recours offert par l'article 57 est cependant très limité.
- 689. Le NZCTU affirme que certains employeurs reconnaissent qu'un syndicat a été habilité, puis le contournent afin de négocier directement avec les travailleurs. Ils exercent alors toutes sortes de pressions sur leurs salariés pour qu'ils signent, sans leurs représentants, les contrats de travail individuels ou collectifs établis par eux. Le NZCTU fait remarquer que ces pressions équivalent à une ingérence et évoque un certain nombre de cas d'ingérences de ce type. Trois exemples en sont repris ci-après. Dans le cas Ports of Auckland, une compagnie portuaire occupant des travailleurs affiliés au Syndicat des travailleurs portuaires et au Syndicat des travailleurs du front de mer a été mise en cause. L'entreprise avait commencé à se restructurer quelques années auparavant et souhaitait accélérer le processus, ce qu'elle a cherché à faire par le biais d'un projet de contrat de travail modifiant profondément le mode de rétribution des travailleurs. La compagnie, prenant contact individuellement avec les travailleurs, leur a laissé entendre que s'ils ne signaient pas le contrat, ils risquaient d'être licenciés. Les travailleurs qui ont signé le contrat ont perçu un salaire réduit (la réduction atteignant dans certains cas 40 pour cent), mais ont reçu au départ un versement unique d'un montant pouvant atteindre 10 pour cent de leurs gains du moment. La compagnie a demandé aux travailleurs de retirer, avant de signer le contrat, les pouvoirs qu'ils avaient conférés au Syndicat des travailleurs portuaires pour négocier en leur nom. Après que certains travailleurs eurent signé le contrat, le syndicat a été avisé de licenciements (les contrats auxquels les travailleurs demeuraient assujettis contenaient une disposition selon laquelle un préavis de six semaines devait être donné au syndicat en cas de licenciements potentiels). Le nombre de licenciements était égal au nombre des travailleurs qui n'avaient pas signé le contrat de l'entreprise, en insistant pour que celle-ci négocie avec leur syndicat. Le syndicat a porté l'affaire devant le Tribunal du travail en faisant valoir que la compagnie s'était immiscée dans l'octroi des pouvoirs dont il avait été investi par ses membres en leur demandant de les retirer et en menaçant de licenciement ceux qui ne signaient pas le contrat de l'entreprise. Le tribunal a débouté le syndicat de sa demande, en indiquant que la question de l'habilitation était sans rapport avec les contrats de travail et qu'elle n'était donc pas de son ressort.
- 690. De la même manière, dans le cas Alliance Textiles, l'employeur avait contacté individuellement les travailleurs syndiqués en leur demandant de retirer les pouvoirs conférés au syndicat pour négocier en leur nom et de signer des contrats non syndicaux qui offraient des primes. L'employeur a également payé les services d'un conseiller juridique extérieur que les travailleurs ont ainsi pu consulter au sujet de l'habilitation du syndicat. Le Tribunal du travail a estimé que la loi n'offrait pas de recours contre les manoeuvres de ce type visant à influencer les travailleurs. Le tribunal a estimé que, bien qu'il y ait eu une tentative d'influence de la part de l'employeur, elle ne visait pas à inciter les travailleurs à cesser d'appartenir au syndicat, et qu'en l'occurrence la loi n'offrait pas de recours. Le tribunal a en outre refusé d'appliquer l'article 57 de la loi, qui interdit les comportements rudes et abusifs. Il a souligné que cet article ne s'appliquerait que si des pressions, des contraintes ou des menaces très sérieuses étaient exercées. Il a également donné à entendre qu'il serait malaisé d'établir qu'il y avait eu un comportement rude et abusif si le contrat conclu n'était pas en lui-même rude et abusif.
- 691. Le cas Richmond mettait en cause Richmond Limited, une entreprise de traitement des viandes, qui avait procédé à des lock-out dans trois usines. Le NZCTU déclare que le travail étant saisonnier, les travailleurs ont été empêchés, en 1991, de reprendre le travail après la période de chômage technique tant qu'ils n'auraient pas accepté le nouveau dispositif contractuel. Le NZCTU présente ensuite les témoignages de 42 ouvriers affiliés au Syndicat des travailleurs de l'industrie de la viande de Nouvelle-Zélande qui travaillaient dans ces trois usines. Ces travailleurs déclarent que, peu après la reprise du travail en octobre 1991, les directeurs ou les contremaîtres de leurs usines respectives leur ont fait savoir qu'ils devraient signer le contrat de travail de l'entreprise applicable à leur usine, faute de quoi ils perdraient leur ancienneté ou l'entreprise considérerait qu'ils abandonnaient leur emploi. Les années précédentes, ils n'avaient rien eu à signer, étant entendu que leur emploi ne cessait pas à la fin de chaque saison. Ils recevaient habituellement une lettre indiquant la date à laquelle ils devaient reprendre le travail. En outre, il leur a été demandé cette année-là de signer un autre document annulant les pouvoirs conférés au syndicat en tant qu'agent négociateur. La plupart des ouvriers ont refusé de signer ce document, car ils avaient voté auparavant à une large majorité pour le maintien du syndicat dans ses fonctions d'agent négociateur pour leur compte et la négociation d'un accord à l'échelon de l'entreprise. La plupart d'entre eux avaient choisi le syndicat comme agent négociateur parce que, à l'instar de M. Peter Baird, ouvrier à l'usine d'Oringi de Richmond, ils pensaient que le syndicat représentait leur seule protection vis-à-vis de l'entreprise. "Il est délicat de négocier ses propres conditions d'emploi", indique cet ouvrier, "et je voulais que le syndicat le fasse à ma place et à celle de tous les autres travailleurs de l'usine. Il n'y en a pas beaucoup à l'usine qui sont capables de négocier leur propre contrat de travail. Voilà pourquoi l'entreprise a incité les gens à annuler les pouvoirs qu'ils avaient donnés au syndicat pour qu'il soit leur agent négociateur." Certains travailleurs, comme John William Henderson, de l'usine d'Oringi, ont noté bon nombre de changements dans le nouveau contrat de l'entreprise par rapport à la convention qui leur était jusque-là applicable, en dépit des assurances données par l'entreprise que les ouvriers reprendraient le travail cette saison-là aux mêmes conditions qu'antérieurement. Il a été indiqué à certains travailleurs, comme Ivena Joan Martin, de l'usine Pacific de Richmond, que l'entreprise ne voyait pas d'inconvénient à ce que les travailleurs désignent en tant qu'agents négociateurs personnels des responsables syndicaux de leur usine, mais qu'ils ne pouvaient désigner le Syndicat des travailleurs de l'industrie de la viande de Nouvelle-Zélande pour les représenter aux négociations. Certains travailleurs, comme Peter Haye, de l'usine d'Oringi, ont signé le contrat quelques semaines plus tard parce qu'ils "(avaient) besoin d'argent". Tous ceux qui ne l'ont pas fait ont décrit les épreuves qu'ils ont traversées sur les plans financier et psychologique pendant les lock-out instaurés dans les trois usines. Enfin, certains des travailleurs qui ont signé le contrat ont quitté le syndicat, soit parce qu'ils avaient le sentiment de ne pouvoir en demeurer membres après en avoir enfreint le règlement et les résolutions, soit parce qu'ils étaient du même avis que Ngai John James August, de l'usine d'Oringi, qui a déclaré "... à quoi bon payer 5 dollars par semaine de cotisation syndicale si on ne peut pas utiliser le syndicat comme agent négociateur?".
- 692. Le NZCTU estime que les dispositions de la loi relatives à la reconnaissance des représentants habilités sont contraires au paragraphe 2 de l'article 2 de la convention no 98, puisqu'elles permettent la reconnaissance d'agents négociateurs nommés par les employeurs ou dominés par eux. A cet égard, le NZCTU se réfère de nouveau à l'alinéa a) de l'article 9, qui dispose que lors de la négociation d'un contrat de travail les travailleurs peuvent mener les négociations pour leur propre compte ou choisir d'être représentés par une autre personne, par un groupe ou par une organisation. Il ajoute que les diverses enquêtes effectuées révèlent toutes un taux statistiquement important de négociations conduites avec des agents négociateurs ou des travailleurs désignés à l'échelon de l'entreprise. Il peut s'agir de travailleurs qui représentent des collègues, de travailleurs nommés par les employeurs ou d'autres agents recommandés par l'employeur. En pratique, on ne peut considérer, dans la grande majorité des cas, que ce type d'agent agit en toute indépendance, sans être influencé ou dominé par l'employeur. Le NZCTU cite deux exemples d'une telle domination. Chez Ohope Lodge Limited, le contrat de travail a été négocié et rédigé par un agent négociateur nommé par l'employeur, qui représentait également les travailleurs en cause. D'autre part, chez ACC (Accident Compensation Corporation), une entreprise gérée par l'Etat, des cadres intermédiaires étaient membres d'une association de cadres et d'agents de maîtrise subventionnée par l'employeur. Ce dernier a payé un agent négociateur afin qu'il négocie au nom de l'association.
- 693. En outre, les dispositions de la loi relatives à la reconnaissance des représentants des travailleurs font obstacle au droit d'organisation aux fins de la négociation collective tel qu'il est reconnu dans les articles 2 et 3 de la convention no 87. Le NZCTU fait valoir que l'obligation de prouver l'habilitation, conformément à la règle prescrite par la loi, est pesante et gêne les syndicats dans la pratique de la négociation collective. Les représentants habilités doivent officialiser les pouvoirs qu'ils détiennent de chacun de ceux qu'ils affirment représenter. Pour prendre une initiative au nom de ses membres, un syndicat doit être formellement habilité par tous ses membres sans exception. Certains employeurs sont allés jusqu'à exiger une liste des membres ayant habilité le syndicat, ou des copies des procurations, chaque fois que le syndicat entendait exercer l'un des droits de représentation. A titre d'exemple, la Commission des services étatiques a mis en circulation des documents initiaux pour la négociation exigeant des syndicats des services de santé publics qu'ils communiquent les noms de toutes les personnes qui les avaient mandatés et qu'ils mettent cette liste à jour chaque fois qu'un pouvoir était retiré durant les négociations. Le conseil de l'hôpital de Southland a demandé non seulement une liste des noms mais aussi une copie de chaque procuration.
- 694. Le NZCTU allègue que les contrats de travail collectifs conclus par l'intermédiaire d'organes non syndicaux ont restreint ou exclu les droits syndicaux, ce qui est contraire aux articles 3, 8 et 11 de la convention no 87. Les employeurs pouvant négocier des contrats de travail collectifs dans le cadre de la loi sans l'intervention d'organisations de travailleurs, ils sont en mesure d'exclure les droits syndicaux de ces contrats. L'enquête Heylen Teesdale Meuli, menée en 1992 pour le ministère du Travail - qui mesure l'ajustement du marché de l'emploi sous l'effet de la loi - le prouve. Cette enquête contient une analyse des modifications apportées aux droits de représentation dans les entreprises où des contrats de travail collectifs du nouveau type ont été conclus. Le NZCTU déclare que, dans le groupe des entreprises interrogées, le droit des syndicats de pénétrer sur les lieux de travail a été restreint ou supprimé dans 12 pour cent des cas, les noms des travailleurs syndiqués ne sont plus communiqués ou ne sont plus communiqués systématiquement aux syndicats dans 26 pour cent des cas, les cotisations syndicales ont été réduites ou ne sont plus déduites dans 25 pour cent des cas, et le temps alloué pour les réunions syndicales a été réduit dans 22 pour cent des cas.
- 695. D'après le NZCTU, la loi empiète sur le libre choix du niveau auquel les négociations se déroulent, et elle a été utilisée de manière illégitime par le gouvernement pour promouvoir les négociations à l'échelon de l'entreprise. Les restrictions du droit d'organisation instaurées par la loi, et notamment les restrictions du droit de grève lorsqu'il s'agit d'appuyer un contrat impliquant plus d'un employeur (voir paragr. 22), sont des obstacles à la conclusion de conventions collectives à l'échelon des branches d'activité. A cet égard, le NZCTU cite l'exemple du Syndicat des ingénieurs de Nouvelle-Zélande (NZEU). Le NZEU prévoyait de négocier, pour le secteur des industries mécaniques, un contrat associant plusieurs employeurs; il avait obtenu à cette fin les procurations nécessaires. Le syndicat a été empêché de négocier ce document au niveau central, que ce soit avec la Fédération des employeurs ou avec les groupements du secteur des industries mécaniques. Une action de revendication en faveur d'une négociation au niveau central était illégale au regard de la loi, et s'il avait entrepris une telle action, le syndicat aurait été tenu pour responsable des pertes subies par les employeurs à l'occasion de la grève. Le syndicat a donc été contraint de négocier - en acceptant le contrat de base du secteur - avec un groupe restreint d'employeurs de l'Ile du Sud, en incluant une clause en vertu de laquelle d'autres employeurs pourraient devenir parties au contrat. Il a ensuite dû négocier avec chacun des autres employeurs pour les faire figurer dans le contrat. Il lui a fallu suivre la même démarche dans l'Ile du Nord.
- 696. De plus, le gouvernement s'est activement immiscé dans les négociations menées entre les employeurs et les travailleurs des organismes étatiques dans le dessein d'empêcher la conclusion d'accords au niveau des secteurs, en publiant des instructions visant la conclusion d'accords au niveau des établissements. A titre d'exemple, l'Association du personnel auxiliaire des établissements postscolaires (TIASA) - qui est le syndicat représentatif du personnel des instituts universitaires de technologie - a conclu avec l'organe central des employeurs des instituts, l'Association des instituts universitaires de technologie de Nouvelle-Zélande (APNZ), un accord préliminaire en vue de la conclusion d'un contrat de travail collectif associant plusieurs employeurs. La Commission des services étatiques a cependant enjoint à l'APNZ de différer les négociations jusqu'à ce que le sous-comité des salaires du Conseil des ministres ait approuvé l'accord, car "... un contrat collectif impliquant plusieurs employeurs pour le personnel auxiliaire crée un précédent hautement indésirable". A la réunion du sous-comité du Conseil des ministres, le ministre du Travail a notamment déclaré ce qui suit "le gouvernement souhaite que les organismes financés par l'Etat concluent cette année des accords au niveau de l'établissement et il compte qu'ils le feront" et également "si cela ne se fait pas, cela aura une incidence sur les décisions futures relatives au financement". A la suite de quoi, le ministre a adressé à l'APNZ une lettre dans laquelle il donnait à entendre que le financement des instituts universitaires de technologie pourrait être modifié afin d'être en harmonie avec les objectifs du gouvernement concernant la négociation à l'échelon de l'établissement. Les employeurs des instituts universitaires de technologie ont publié un avis indiquant qu'ils ne pouvaient négocier que des contrats à l'échelon de l'établissement. Le NZCTU ajoute qu'étant donné que l'entreprise néo-zélandaise moyenne n'occupe que 7,6 travailleurs le fait de devoir négocier essentiellement au niveau de l'établissement entraîne de très grandes difficultés d'organisation pour le mouvement syndical dans le pays.
- 697. Enfin, le NZCTU affirme que la loi restreint largement le droit de grève. En vertu de l'article 63, les grèves sont illicites si: un contrat de travail collectif est en vigueur; elles se rapportent à un grief individuel, à un conflit ou à des questions relevant de la liberté syndicale; elles visent à appuyer un accord devant lier plusieurs employeurs; elles touchent un secteur essentiel, aucun préavis de grève n'ayant été donné. Les grèves qui n'entrent dans aucune des catégories ci-dessus ne sont licites que si elles se rapportent à la négociation d'un contrat de travail collectif (art. 64 1) b)) ou si elles sont fondées sur des motifs de sécurité ou d'hygiène (art. 71). Les travailleurs qui se mettent en grève illégalement ne sont pas protégés contres les préjudices économiques. Cela signifie que les syndicats et leurs membres peuvent être poursuivis pour conspiration en vue de s'ingérer dans les relations contractuelles, intimidation, incitation à la rupture d'un contrat ou obstruction illicite des activités commerciales, des affaires ou du travail (art. 73). Des poursuites à ces divers titres peuvent être entamées, en cas d'action indirecte, par l'employeur des travailleurs en grève ou par l'entreprise dont les produits ou les services sont boycottés dans le cadre d'une telle action. C'est dire qu'il existe des sanctions effectives contre les grèves déclenchées pour appuyer des contrats associant plusieurs employeurs, contre les grèves dont le propos est général ou qui visent des aspects de la politique économique et sociale, et contre les actions indirectes.
- 698. Le NZCTU déclare de nouveau qu'à son avis l'interdiction des actions de revendication en faveur d'accords associant plusieurs employeurs restreint la liberté des parties de choisir le niveau auquel elles souhaitent négocier leur contrat de travail collectif. Cela ressort de la diminution de 90 pour cent du nombre de conventions collectives conclues à l'échelon d'un secteur ou au niveau national depuis l'entrée en vigueur de la loi. Le fait qu'un employeur peut immédiatement faire opposition pour empêcher les grèves visant à appuyer des contrats impliquant plusieurs employeurs a empêché plusieurs syndicats d'entreprendre une action de revendication. En guise d'exemple, le NZCTU expose la mésaventure de l'Association des internes (RDA) qui représente les médecins auxiliaires des hôpitaux publics. La sentence arbitrale qui régissait leurs conditions d'emploi - tenue, au regard de la loi, pour un contrat de travail collectif - expirait en 1991. La RDA entendait négocier un contrat de travail collectif national pour remplacer celui qui venait à expiration. En août 1991, les conseils sanitaires locaux ont refusé de négocier au niveau national, et la RDA a publié des avis annonçant que les médecins auxiliaires se mettraient en grève en vue d'obtenir qu'un contrat collectif soit négocié à ce niveau. Les conseils sanitaires locaux ont adressé une requête au Tribunal du travail afin qu'il rende une ordonnance interdisant la grève. La RDA a retiré ses avis et renoncé à la grève. Elle y a été contrainte pour éviter les inévitables frais de justice si le tribunal rendait une ordonnance. De la même manière, le NZEU n'a pu appeler à une action de revendication pour appuyer la négociation d'un contrat collectif pour le secteur des industries mécaniques (voir paragr. 20 ci-dessus) et la TIASA n'a pu lancer un appel à la grève pour défendre son accord préliminaire en vue de la conclusion d'un contrat collectif à l'échelon national applicable aux instituts universitaires de technologie (voir paragr. 696 ci-dessus).
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 699. Avant de répondre expressément aux allégations du NZCTU, le gouvernement décrit le contexte social et politique et le système de relations professionnelles en vigueur en Nouvelle-Zélande, et il donne une vue d'ensemble de la législation du travail. Il déclare d'une manière générale qu'après la guerre la Nouvelle-Zélande a organisé son économie dans un cadre extrêmement protecteur: contrôle des importations, système financier fermé et octroi de subventions pour protéger les industries nationales et maintenir l'Etat-providence. La récente déréglementation de l'économie a été mise en train pour tenir compte des diverses pressions économiques qui s'exerçaient aux niveaux national et international. Parallèlement à cette déréglementation, des modifications ont été apportées au système - extrêmement réglementé - de relations professionnelles, afin d'assouplir le marché de l'emploi. Selon un usage établi de longue date, il existait en Nouvelle-Zélande un mécanisme de conciliation et d'arbitrage conçu pour équilibrer les intérêts du capital et du travail et éviter la désorganisation de l'industrie grâce à l'arbitrage obligatoire des conflits, auquel l'une ou l'autre partie pouvait avoir recours. Les syndicats étaient organisés par catégorie professionnelle, aussi les négociations étaient-elles systématiquement menées à l'échelon des professions. Ce système assurait, dans chaque groupe professionnel, un salaire et des conditions de travail minimum aux travailleurs dans tous les secteurs d'activité. Dans le cadre de l'opération de déréglementation entreprise en 1984, l'arbitrage obligatoire a été aboli cette année-là et le gouvernement a adopté, à partir de 1985, une politique de non-intervention dans les conflits.
- 700. Cette politique a été entérinée par la loi de 1987 sur les relations de travail, qui rendait les parties responsables des négociations et de l'exécution des accords. La loi de 1987 maintenait l'enregistrement des syndicats, qui assurait à ces derniers la représentation exclusive des travailleurs auxquels leurs règles d'affiliation s'appliquaient et le droit exclusif de négocier en leur nom avec les employeurs, et qui leur imposait certaines obligations dans leur administration interne. La procédure de l'enregistrement visait à encourager les syndicats à exercer leurs droits de manière plus efficace et responsable. Les règlements conclus par les syndicats et les employeurs pouvaient être enregistrés en tant que sentences arbitrales ou en tant que conventions. Les sentences arbitrales pouvaient (ce qui était d'ailleurs généralement le cas) comporter une clause concernant les "parties ultérieures", qui élargissait la protection générale à tous les travailleurs visés par la sentence arbitrale et à leurs employeurs. Il en résulte que les employeurs absents aux négociations n'avaient pas leur mot à dire quant au fait qu'ils étaient ou n'étaient pas couverts par la sentence. Les travailleurs étaient représentés aux négociations par les syndicats, mais la sentence était applicable à tous les travailleurs dont les fonctions correspondaient à celles qui y étaient décrites, qu'ils soient syndiqués ou non. Bien que la loi de 1987 sur les relations de travail ait apporté une certaine souplesse, il était largement reconnu que ce système favorisait le maintien de structures et de règlements inadaptés ne permettant pas de faire face aux pressions économiques inhérentes à l'exposition des entreprises néo-zélandaises à la concurrence internationale. Plusieurs groupes ont admis que de nouvelles modifications étaient nécessaires sur le marché de l'emploi. En 1988, le NZCTU a publié une brochure préconisant une orientation vers la négociation par secteur d'activité plutôt que par catégorie professionnelle. Les groupes d'employeurs ont fait valoir que la législation perpétuait les négociations dominées par les groupes professionnels, que les accords salariaux peu réalistes compromettaient la compétitivité des entreprises et engendraient le chômage. C'est dans ce contexte que le gouvernement a introduit la loi sur les contrats de travail.
- 701. Cette loi, qui est entrée en vigueur en mai 1991 et a remplacé une grande partie de la réglementation antérieure, instaure un cadre dans lequel l'association est de nature volontaire et les négociations sont libres, afin de permettre aux travailleurs et aux employeurs d'adopter des méthodes de travail souples, indispensables pour assurer la compétitivité de l'économie. Dans le cadre du nouveau régime, les règlements auxquels les négociations aboutissent ne sont applicables qu'aux parties qui ont activement participé aux négociations en question. L'effet le plus immédiat et le plus évident de la loi est donc qu'elle modifie profondément la structure des négociations. Le tableau ci-après donne une idée du changement intervenu, tel qu'il a été observé à la faveur de l'enquête Heylen Teesdale Meuli, menée en 1992 pour le gouvernement. Cette enquête porte sur les entreprises du secteur privé occupant au minimum quatre personnes. Le tableau indique le pourcentage - dans les 1.437 entreprises auprès desquelles l'enquête a été menée - de travailleurs auxquels les différents types de documents s'appliquaient en mai 1991, juste avant l'entrée en vigueur de la loi, et en août 1992, soit quinze mois plus tard.
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- Sentences arbitrales Accords au CTI et CTC CTI et contrats associant niveau de combinés plusieurs employeurs l'entreprise (en pourcentage)
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- Mai 1991 59 13 - 28
- Août 1992 8 35 5 52
- Note: CTI = contrats de travail individuels. CTC = contrats de travail collectifs.
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- Le tableau fait apparaître une diminution importante de la part relative des sentences arbitrales et autres types d'accords associant plusieurs employeurs - qui sont d'application générale - au profit des conventions applicables à une seule entreprise et des contrats de travail individuels. Si l'on regroupe les deux premières colonnes, on constate un recul de la négociation collective (dont la part est passée de 72 à 43 pour cent). L'évolution de la structure des négociations est conforme au propos de la loi, à savoir que les négociations doivent être menées au niveau qui convient à l'entreprise en cause et que les parties doivent pouvoir choisir le genre de contrat qu'elles souhaitent négocier. Il est manifeste qu'un grand nombre d'employeurs et de travailleurs choisissent de négocier au niveau de l'entreprise.
- 702. Le gouvernement aborde ensuite les points précis soulevés par le NZCTU. Bien que ce dernier reconnaisse qu'avant l'adoption de la loi les partenaires sociaux s'accordaient à penser qu'il fallait changer l'organisation des négociations, le NZCTU n'a pas accepté la loi en tant que moyen approprié d'administrer les relations professionnelles. Le gouvernement affirme que la loi est un mécanisme satisfaisant dans le nouveau contexte, car elle octroie aux entreprises la liberté dont elles ont besoin pour adopter des méthodes de travail souples de manière à soutenir la concurrence sur les marchés intérieurs comme sur les marchés internationaux. Il importe en particulier que les entreprises puissent négocier à tout niveau (notamment au niveau de l'entreprise) propice à l'instauration des conditions de travail qui répondent aux besoins des parties. C'est pourquoi le système a été modifié de façon à ce que les parties prennent elles-mêmes directement en charge les négociations. Le gouvernement souligne néanmoins que la loi permet tout à la fois les négociations collectives et les négociations individuelles, et que les groupements de travailleurs, notamment les syndicats auparavant enregistrés conformément à la loi sur les relations de travail, peuvent être les représentants habilités par les travailleurs si ces derniers en décident ainsi.
- 703. Passant à l'allégation selon laquelle la commission parlementaire qui a pris connaissance des documents soumis au sujet du projet de loi n'a pas tenu compte de la majorité de ces communications, qui étaient hostiles au projet de loi, le gouvernement répond que la commission parlementaire ne tient pas ce type de communications pour un référendum. Elle examine tous les documents soumis et formule ses recommandations au Parlement sur le bien-fondé des arguments et des motifs présentés.
- 704. S'agissant de l'allégation selon laquelle la loi a considérablement rétréci le champ des conventions collectives, le gouvernement indique qu'à vrai dire le champ d'application des règlements collectifs a régressé pour plusieurs raisons. La principale cause immédiate est la suppression de la possibilité de négocier une clause concernant les parties ultérieures, qui élargissait la portée de la sentence arbitrale à tous les travailleurs dont les fonctions correspondaient à celles qui y étaient décrites. Les sentences arbitrales enregistrées conformément à la loi sur les relations de travail ont été tenues pour des contrats collectifs lorsque la loi sur les contrats de travail est entrée en vigueur. La loi dispose qu'à l'expiration d'un contrat collectif les travailleurs sont couverts par un contrat individuel fondé sur le contrat collectif applicable, jusqu'à ce qu'un nouveau contrat collectif soit négocié. A mesure que les sentences arbitrales sont venues à expiration, un nombre important de travailleurs ont automatiquement été assujettis à un contrat de travail individuel.
- 705. D'après le gouvernement, il y avait en même temps, depuis quelques années, un déplacement latent vers la négociation à l'échelon de l'entreprise. Lorsque les restrictions ont été supprimées par la loi, un nombre beaucoup plus important d'employeurs et de travailleurs ont tiré parti de la liberté nouvelle de négocier à ce niveau. Certains ont choisi de négocier collectivement, d'autres individuellement, la loi offrant le choix à cet égard. En outre, le nombre de contrats individuels est, dans une certaine mesure, le reflet provisoire du fait que les travailleurs, à l'expiration des sentences arbitrales, conventions ou contrats collectifs, sont assujettis à des contrats de travail individuels. Cela n'implique pas que certains d'entre eux ne négocieront pas de nouveaux contrats collectifs en temps voulu. En raison de ce rejaillissement provisoire, les données relatives à la structure des négociations tendent à exagérer l'incidence de la négociation individuelle.
- 706. De plus, les chiffres sur lesquels le NZCTU s'appuie pour montrer le rétrécissement du champ de la négociation collective portent sur une période de deux ans qui commence bien avant la mise en vigueur de la loi. Raymond Harbridge, du Centre des relations professionnelles de l'Université Victoria de Wellington, affirme que ce sont les négociations de 1989-90 qui doivent servir d'année de base, parce que cela a été le dernier cycle de négociation "normal" avant la mise en vigueur de la loi. Le choix d'une période de deux ans pour montrer les changements apportés aux procédures habituelles de négociation est trompeur, car il donne à penser que les comportements en matière de négociation ont changé à cause des nouvelles dispositions législatives dans un contexte par ailleurs stable. Or les difficultés rencontrées antérieurement pour la conclusion de certains règlements relevant des sentences arbitrales et la reconnaissance de ce fait par le gouvernement précédent donnaient à penser que le champ d'application des négociations collectives avait déjà commencé à régresser avant que la loi ne soit mise en vigueur. Lors des négociations de 1990-91, le nombre de travailleurs concernés par les négociations collectives était déjà tombé de 721.000 à 610.000, soit une diminution d'environ 15 pour cent. Ce nombre a de nouveau diminué de 30 pour cent l'année suivante, d'après les données de Harbridge. Il est fallacieux d'affirmer que le cycle de négociation de 1989-90 était "normal", puis de donner à entendre que la diminution totale étalée sur deux ans est uniquement imputable à la loi.
- 707. Enfin, le gouvernement rejette l'affirmation du NZCTU selon laquelle la loi est hostile à la négociation collective. La loi, qui offre la possibilité de négocier collectivement ou individuellement, permet aux travailleurs de choisir d'être représentés par un syndicat, par une personne ou par un groupe de représentants de travailleurs. Afin de garantir une représentation adéquate, les représentants doivent être formellement habilités à représenter les travailleurs en cause, et les employeurs doivent reconnaître les représentants habilités aux fins des négociations. Les cas portés devant le Tribunal du travail, comme celui d'Alliance Textiles, ont établi que les travailleurs avaient le droit de décider de la manière dont ils voulaient être représentés et de changer d'avis si bon leur semblait, que leur décision soit fondée sur les informations fournies ou que l'employeur les ait persuadés de prendre une telle décision. Les représentants autorisés ont le droit de pénétrer sur le lieu de travail à des heures raisonnables pour débattre des questions liées aux négociations. Les contrats de travail collectifs peuvent s'appliquer à un ou plusieurs employeurs et à tout groupe déterminé de travailleurs occupés par ces employeurs, ce qui permet le déroulement de négociations à différents niveaux. En outre, ces contrats collectifs s'imposent aux parties. La négociation collective est protégée par l'article 23 de la loi, qui dispose que les parties peuvent convenir par écrit de modifier un contrat collectif. Le Tribunal du travail a confirmé à plusieurs reprises que les contrats ne pouvaient être modifiés unilatéralement par une partie. Le gouvernement estime par conséquent que la loi permet le déroulement de négociations collectives libres en donnant des garanties suffisantes pour que les parties aient effectivement le droit de choisir leur représentant et de négocier la structure des négociations.
- 708. A propos de l'argument avancé par le NZCTU selon lequel les contrats de travail collectifs conclus dans le cadre de la loi ne sont pas des conventions collectives telles que l'OIT les envisage, parce qu'ils ne sont pas nécessairement le fruit de véritables négociations collectives auxquelles les organisations de travailleurs sont parties prenantes, le gouvernement explique qu'en vertu de la législation antérieure les règlements relevant des sentences arbitrales étaient négociés par un petit groupe de syndicats et d'organisations patronales et que les syndicats, et non les travailleurs, étaient parties aux sentences arbitrales. Tous les droits, ainsi que l'aptitude à assurer l'exécution des sentences, émanaient des syndicats. A présent, cependant, la loi a officialisé le régime contractuel et supprimé toute ambiguïté quant à l'existence de contrats, qu'ils soient individuels ou collectifs. Ce faisant, elle rend chaque employeur et chaque travailleur responsable des négociations. Il importe par conséquent que les travailleurs soient capables de décider par eux-mêmes de leur représentation. Les syndicats continuent néanmoins de jouer un rôle de premier plan dans les négociations collectives pour un grand nombre de travailleurs. Dans la majorité des contrats collectifs, notamment ceux qui s'appliquent à un grand nombre de travailleurs, le représentant habilité est un syndicat, auparavant enregistré conformément à la loi sur les relations de travail. Les données de l'enquête Heylen Teesdale Meuli montrent que 57 pour cent des travailleurs du secteur privé assujettis à des contrats collectifs applicables à quatre travailleurs ou plus étaient représentés par un syndicat.
- 709. En même temps, une proportion importante des contrats de travail collectifs de moindre envergure est négociée par des représentants individuels ou des groupes de représentants de travailleurs. Ces représentants sont désignés par les travailleurs et habilités à les représenter dans les négociations. L'exercice du droit de choisir d'autres représentants témoigne du degré de responsabilité à présent assumé par les travailleurs pour leurs négociations. La loi, pour la première fois en Nouvelle-Zélande, offre aux travailleurs la possibilité de participer activement aux négociations collectives. En outre, si le gouvernement admet avec le NZCTU que sur les 457 contrats de travail collectifs enregistrés dans la base de données Infometrics 129 (soit 28,2 pour cent) ont été négociés sans l'intervention de syndicats, il fait remarquer que ces contrats ne s'appliquaient qu'à 13 pour cent de tous les travailleurs visés par les 457 contrats figurant dans la base de données. Là encore, cela montre que les syndicats tendent à représenter les travailleurs dans les contrats de grande envergure. C'est une preuve supplémentaire que les travailleurs des petites entreprises ont été et demeurent mal représentés par les syndicats. Ces travailleurs participent à présent plus directement aux négociations qu'ils ne le pouvaient sous le régime des sentences arbitrales.
- 710. A propos de l'exemple, cité par le NZCTU, du cas Adams contre Alliance Textiles, dans lequel le directeur de Redruth Alliance Textiles Mill a demandé aux travailleurs de retirer les pouvoirs qu'ils avaient donnés au Syndicat des travailleurs des produits laitiers et du textile, le gouvernement reconnaît qu'il y a eu des cas où l'employeur, après avoir reconnu le représentant syndical habilité, a essayé d'amener les travailleurs à négocier directement avec lui. Dans les cas qui ont été portés devant le Tribunal du travail, celui-ci a en général estimé que l'employeur doit reconnaître le représentant autorisé des employés et, s'il négocie, doit le faire avec ce représentant. Toutefois, si l'employeur a reconnu le représentant autorisé et qu'il respecte le droit des travailleurs de continuer de s'en remettre à ce représentant, rien ne l'empêche d'essayer de faire changer les travailleurs d'avis en les amenant à retirer les pouvoirs dont ils ont investi le représentant et à négocier directement avec lui. Le tribunal a souligné que cette action de persuasion ne devait pas aller jusqu'à des pressions abusives. Dans ce cas particulier, le tribunal a mentionné, comme preuve que l'employeur avait reconnu que le syndicat était habilité à représenter les travailleurs, le fait que l'employeur a demandé aux travailleurs de retirer les pouvoirs qu'ils avaient donnés au syndicat avant de signer le contrat. Les travailleurs étaient en droit de changer d'avis au sujet de leur représentation, et l'employeur s'est assuré qu'ils l'avaient fait avant de signer le contrat. Le gouvernement ajoute que ce jugement a été porté en appel, mais que la décision n'est pas encore rendue.
- 711. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle les ingérences et les discriminations dans la négociation collective sont devenues systématiques depuis que la loi est en vigueur, le gouvernement souligne que la loi établit un cadre dans lequel les parties peuvent choisir de négocier collectivement, et que plusieurs de ses dispositions restreignent la capacité des employeurs de s'ingérer dans les décisions des travailleurs concernant l'association et la représentation. La jurisprudence qui en est venue à constituer un prolongement de la législation en matière de relations de travail renforce également la protection octroyée par les textes législatifs. De nombreuses décisions ont notamment été rendues dans le domaine particulier de ce qui constitue, au regard de la nouvelle loi, des tactiques de négociation légitimes. D'une manière générale, le Tribunal du travail a déterminé que la loi reconnaissait aux parties aux négociations le droit d'essayer de se convaincre et de s'influencer mutuellement. Cela peut inclure les tentatives visant à amener les travailleurs à changer d'avis et à négocier directement avec l'employeur après qu'ils ont habilité un représentant. Ce principe n'implique pas, contrairement à ce que prétend le NZCTU, que les employeurs peuvent "s'ingérer" dans la relation entre les travailleurs et les syndicats. Une tentative visant à amener les travailleurs à prendre la décision d'habiliter un syndicat à les représenter dans les négociations ne constitue pas une ingérence. De la même manière, si les travailleurs ont été amenés à changer d'avis et à négocier directement avec l'employeur, le fait que les avantages du contrat qu'ils ont signé leur soient offerts ne constitue pas une discrimination. En même temps, aucune partie cherchant à influencer l'autre ne peut aller jusqu'à exercer une influence indue ou à adopter un comportement rude et abusif de telle sorte que la liberté syndicale de l'autre partie se trouve menacée.
- 712. S'agissant de l'allégation selon laquelle la procédure de négociation collective instituée par la loi est contraire au principe selon lequel les organisations d'employeurs comme les organisations de travailleurs doivent négocier de bonne foi, le gouvernement déclare que, bien que la loi ne requière pas expressément la négociation de bonne foi, les dispositions relatives à la négociation collective et à la liberté syndicale assurent aux employeurs et aux travailleurs un rôle efficace dans les négociations. Le Tribunal du travail a rejeté l'allégation selon laquelle on pouvait considérer que la loi néo-zélandaise exigeait la négociation de bonne foi. Dans le cas Alliance Textiles, le syndicat s'est référé à des lois canadiennes qui, dans le cadre de la négociation de bonne foi qu'elles imposent, exigent qu'il n'y ait aucune ingérence des employeurs dans la procédure d'engagement des négociations, de désignation des représentants ou de négociation et de ratification des propositions de règlement par les travailleurs. Le tribunal a toutefois contesté l'existence de telles prescriptions dans le contexte de la Nouvelle-Zélande, en déclarant que la loi n'exige pas de l'employeur qu'il demeure strictement neutre lorsque ses intérêts fondamentaux sont en jeu.
- 713. Le gouvernement aborde ensuite les cas particuliers mentionnés par le NZCTU à propos de la procédure de négociation collective. Dans le cas Ports of Auckland, le Syndicat des travailleurs portuaires a mis en doute la validité des préavis de licenciements émis par l'entreprise, car il était convaincu qu'ils visaient à faire pression sur les travailleurs afin qu'ils signent le contrat de travail. Le Tribunal du travail a pourtant estimé que le risque de licenciement était réel, et qu'il aurait pu être évité si les changements visés dans le contrat avaient été apportés. Dans le cas Alliance Textiles, l'employeur, bien que le syndicat ait été mandaté par les travailleurs pour les représenter, avait contacté individuellement les travailleurs et en avait incité un grand nombre à signer le contrat de travail collectif. Le syndicat y a vu une atteinte à la liberté syndicale. Le tribunal a cependant rejeté cette allégation au motif que l'employeur n'était pas tenu de cesser de converser avec les travailleurs simplement parce qu'ils avaient habilité un agent à négocier en leur nom. L'employeur était en droit d'essayer d'amener les travailleurs à ne pas choisir un représentant donné et de préconiser le choix d'un autre syndicat, pourvu qu'il n'exerce pas à cette fin de pressions abusives. Enfin, dans le cas Richmond, lié à des allégations de lock-out illicites dans trois usines de l'entreprise Richmond Limited, les trois juges du Tribunal du travail étaient divisés sur la question de savoir s'il y avait eu un lock-out, étant donné que le travail est saisonnier et que les travailleurs ont été empêchés de reprendre le travail tant qu'ils n'avaient pas signé le nouveau contrat de travail propre à l'usine, par opposition à un contrat à l'échelon de l'entreprise. Le juge principal, qui était d'avis qu'il y avait eu un lock-out, a cependant estimé que celui-ci n'empiétait pas sur la liberté syndicale, l'entreprise ayant continué de traiter avec le syndicat. On pouvait considérer que l'entreprise exerçait son droit de négocier des contrats de travail propres aux usines et que le lock-out avait pour but d'appuyer son intention. De l'avis du gouvernement, ce cas renforce les autres décisions du Tribunal du travail qui posent que si les employeurs ne doivent pas s'ingérer dans la relation entre les travailleurs et leur syndicat des tactiques passablement énergiques, notamment des lock-out et des démarches directes auprès des travailleurs, sont légitimes dans le cadre de la procédure de négociation. Les lettres émanant de travailleurs fournies par le NZCTU montrent que l'entreprise a pris directement contact avec les travailleurs. Elles n'indiquent cependant pas que l'entreprise a privé les travailleurs de leur droit de contacter le syndicat ou de prendre contact les uns avec les autres et de demeurer affiliés au syndicat.
- 714. Eu égard à l'allégation selon laquelle la loi permet la reconnaissance d'agents négociateurs nommés par les employeurs ou dominés par eux, le gouvernement fait valoir que la loi permet aux travailleurs de désigner la personne, le groupe ou l'organisation de leur choix pour les représenter dans les négociations en vue de l'adoption d'un contrat de travail. L'enquête Heylen Teesdale Meuli a établi que 28 pour cent des travailleurs assujettis à des contrats de travail collectifs étaient représentés par une autre entité qu'un syndicat. Ce groupe se répartissait entre des représentants individuels (13 pour cent des cas), des groupes de travailleurs désignés (10 pour cent des cas) et d'autres entités (5 pour cent des cas). Huit pour cent des travailleurs considérés n'étaient pas représentés. La diversification du mode de représentation des travailleurs correspond au propos de la loi, à savoir que le dispositif de négociation doit être adapté aux besoins de l'entreprise et de son personnel. Le gouvernement ajoute que le NZCTU souhaite maintenir le mode de représentation réglementé qui a toujours eu cours en Nouvelle-Zélande, lequel n'est pas praticable dans un contexte où la liberté syndicale est non contraignante. Se référant aux deux exemples dans lesquels, d'après le NZCTU, l'agent négociateur aurait été désigné ou payé par les employeurs, le gouvernement indique qu'il ne dispose pas d'informations indépendantes sur ces cas. Il va sans dire que, les travailleurs étant entièrement libres de choisir leur représentant, la possibilité existe qu'ils acceptent les représentants proposés par l'employeur. S'ils ne sont pas satisfaits du représentant, les travailleurs ont toujours la possibilité, dans le cadre de la procédure d'habilitation et de ratification, de rejeter et le représentant et le règlement proposé.
- 715. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle les dispositions de la loi relatives à la reconnaissance des représentants des travailleurs font obstacle au droit d'organisation aux fins de la négociation collective, et l'obligation de prouver l'habilitation, conformément à la règle prescrite par la loi, est pesante et gêne les syndicats dans la pratique de la négociation collective, le gouvernement soutient que la loi assure la liberté syndicale, de sorte que n'importe quel groupe peut constituer une organisation de travailleurs selon la définition contenue dans l'article 2. L'article 12 exige de tout représentant - organisation, groupe ou personne - qu'il soit formellement habilité à représenter le ou les travailleur(s) ou l'employeur, et de l'autre partie qu'elle reconnaisse les pouvoirs dont il est investi. La loi ne précise pas la manière dont l'habilitation doit se faire, laissant aux parties le soin d'en décider. L'article 16 dispose que les travailleurs ou les employeurs et leur représentant doivent convenir d'une procédure de ratification du règlement dans les trois mois précédant les négociations. Ces dispositions assurent la protection des travailleurs en garantissant leur aptitude à demeurer maîtres de la négociation de leur contrat. Elles n'établissent pas de règles quant aux procédures à suivre: il revient aux employeurs et aux travailleurs et à leurs représentants de les fixer d'un commun accord. Ces dispositions sont infiniment moins pesantes que les dispositions détaillées relatives à l'enregistrement des syndicats et aux procédures de négociation qui étaient applicables en vertu de la loi sur les relations de travail.
- 716. Le gouvernement envisage ensuite l'allégation du NZCTU selon laquelle la Commission des services étatiques a imposé aux services de santé publics des règles pesantes pour se faire habiliter à représenter les travailleurs dans les négociations contractuelles. Il souligne que la commission n'était pas partie aux négociations dans les services de santé publics et qu'elle n'était donc pas en mesure d'imposer une règle particulière aux syndicats. Les quatorze conseils sanitaires locaux étaient, en tant qu'employeurs, directement responsables de la conduite de leurs négociations dans le cadre des pouvoirs que la commission leur avait délégués pour le cycle de négociations. Des conseils ont été prodigués par la commission aux conseils sanitaires locaux sous la forme de suggestions concernant la procédure qui pourrait être suivie pour s'acquitter de l'obligation d'établir les pouvoirs pour les négociations. Ces conseils se fondaient sur des accords conclus avec les syndicats dans d'autres branches du secteur étatique. La méthode suggérée pour les employeurs occupant des effectifs importants ou moyennement importants consistait à demander une liste des noms, une formule de procuration, une déclaration attestant que les personnes dont les noms figuraient sur la liste avaient signé la formule, et l'engagement du syndicat à fournir, sur demande, la procuration remise par n'importe laquelle de ces personnes. En pratique, cette méthode a été adoptée par la majorité des employeurs et des syndicats du secteur. Le gouvernement reconnaît que dans le cas du conseil sanitaire local de Southland, mentionné par le NZCTU, l'employeur a imposé une autre méthode d'habilitation (en demandant une copie de chaque procuration plutôt que la liste des noms et un exemplaire de la formule de procuration). Cette méthode a suscité une controverse entre les parties, mais en définitive il s'est avéré qu'elle ne faisait pas obstacle à la procédure de négociation. Le conseil de Southland a été le deuxième des quatorze conseils à négocier avec succès un contrat de travail collectif lors de ce cycle de négociations.
- 717. Le gouvernement estime que certains droits particuliers, dont le NZCTU prétend qu'ils ont été restreints du fait que certains contrats de travail collectifs sont conclus par l'intermédiaire d'agents non syndicaux (à savoir le droit de pénétrer sur les lieux de travail, le droit pour les syndicats d'avoir communication des noms des travailleurs syndiqués, la déduction des cotisations syndicales et le temps alloué pour les réunions syndicales), ne sont pas indispensables dans la perspective des activités des organisations de travailleurs telles qu'elles sont énoncées dans l'article 3 de la convention no 87. Les représentants autorisés sont habilités par la loi à pénétrer sur le lieu de travail pour débattre des questions liées aux négociations. Le gouvernement ajoute que la portée de ce droit d'accès a été clarifiée par le Tribunal du travail dans l'affaire NZ Nurses Union contre Argyle Hospital Ltd. et récemment renforcée par la Cour du travail dans l'affaire Service Workers' Union of Actearea Inc. contre Southern Pacific Hotel Corporation (NZ) Ltd. and others. Par ailleurs, les droits mentionnés par le NZCTU peuvent être négociés par les parties. Bien que certains de ces droits fussent énoncés dans la loi sur les relations de travail, de telles dispositions juridiques ne sont pas appropriées dans le cadre non contraignant de la loi, où les travailleurs peuvent choisir leur mode de représentation et où les contrats de travail peuvent être individuels ou collectifs.
- 718. Passant à l'allégation selon laquelle la loi empiète sur le libre choix du niveau auquel les négociations se déroulent et a été utilisée de manière illégitime par le gouvernement pour promouvoir les négociations à l'échelon de l'entreprise, le gouvernement affirme que la loi donne aux employeurs et aux travailleurs toute latitude pour négocier le type de contrat qui leur sera applicable. Si le nombre de contrats impliquant plus d'un employeur a diminué, ce recul découle en partie du principe consacré par la loi selon lequel les contrats de travail ne s'appliquent qu'à ceux qui ont accepté d'y être assujettis. En outre, en dépit de la restriction, inscrite dans la loi, des grèves en faveur de l'adoption de contrats associant plusieurs employeurs, les négociations collectives peuvent se dérouler au niveau d'un secteur d'activité, ce qui d'ailleurs se produit. A cet égard, le gouvernement déclare que le Syndicat des ingénieurs de Nouvelle-Zélande (NZEU) est partie à de nombreux contrats impliquant plusieurs employeurs. D'après le NZCTU, le NZEU n'a pas été en mesure de lancer un appel à la grève à propos de la question des négociations avec plusieurs employeurs pour le contrat collectif destiné au secteur des industries mécaniques. Le NZEU a pourtant réussi à négocier deux contrats pour ce secteur, l'un pour l'île du Nord et l'autre pour l'île du Sud, ainsi que plusieurs autres contrats impliquant plusieurs employeurs. En mai 1992, soit un an exactement après l'entrée en vigueur de la loi, 17 pour cent des membres du NZEU étaient couverts par ce type de contrat.
- 719. Le gouvernement soutient ensuite que l'allégation selon laquelle la loi a été utilisée "de manière illégitime" par le gouvernement pour s'immiscer activement dans les négociations, menées entre les employeurs et les travailleurs des organismes étatiques dans le dessein d'empêcher la conclusion d'accords avec plusieurs employeurs au niveau des secteurs, - et l'exemple cité par le NZCTU pour étayer cette allégation - révèlent une interprétation fondamentalement erronée de la conduite des relations professionnelles dans le secteur public. Bien que le secteur public et le secteur privé s'appuient sur la même base législative - la loi - pour les négociations, un cadre réglementaire distinct a été préservé pour le secteur public eu égard à l'intérêt collectif que le gouvernement porte aux organes étatiques qu'il finance et qui, par conséquent, lui rendent des comptes. Ce cadre réglementaire est fourni par la loi de 1988 sur le secteur étatique, en vertu de laquelle la Commission des services étatiques est chargée de négocier, en consultation avec les employeurs, les contrats de travail collectifs applicables dans les services publics, les services de santé et les services éducatifs. Bien que la commission ait, dans une large mesure, délégué ses pouvoirs en matière de négociation dans le secteur postscolaire (universités, instituts universitaires de technologie et écoles normales), les directeurs des établissements postscolaires sont tenus de consulter la commission avant de signer un contrat de travail collectif. Dans ce cadre réglementaire, le principal canal institutionnel par lequel le gouvernement gère ses intérêts d'employeur lors de la fixation des salaires est le sous-comité des salaires du secteur étatique du Conseil des ministres. Le sous-comité est une instance où sont examinées et approuvées les stratégies mises au point par les employeurs pour les négociations salariales. Dans le cas précis cité par le NZCTU - celui des instituts universitaires de technologie -, le principe de négociations à l'échelon de l'établissement a été appuyé par les employeurs en cause; le point en litige était le rythme souhaitable du passage des anciennes structures de négociation aux nouvelles et la volonté du gouvernement de supporter les coûts qu'entraînerait un report de la réforme. En l'occurrence, les employeurs ont décidé de conduire les négociations au niveau de l'établissement et non de les reporter. Cette décision a été prise par les employeurs en cause et non par le gouvernement. Bien que le processus ayant abouti à cette décision ait comporté des échanges de vues entre les représentants des employeurs et les ministres, il n'y a aucune raison de taxer ces échanges d'ingérences illégitimes du gouvernement. Enfin, le gouvernement conteste tant l'exactitude que la complétude des notes prises par l'un des représentants des employeurs à la réunion tenue par l'APNZ avec le sous-comité du Conseil des ministres, sur lesquelles le NZCTU fonde sa plainte.
- 720. En ce qui concerne la question des difficultés d'organisation des petits syndicats, le gouvernement indique que l'information donnée par le NZCTU, selon laquelle l'entreprise moyenne en Nouvelle-Zélande occupe 7,6 travailleurs, est exacte. Toutefois, bien que l'immense majorité des entreprises (90,5 pour cent) occupe moins de dix personnes, 51,9 pour cent des travailleurs sont occupés dans les 1,5 pour cent d'entreprises qui occupent 50 personnes et plus, et 71,5 pour cent d'entre eux le sont dans des entreprises de plus de dix personnes. Il en résulte que les stratégies actuelles des syndicats, qui concentrent leur action dans les grandes entreprises, entre autres dans les chaînes, peuvent permettre d'atteindre un grand nombre de travailleurs, même s'il ne leur est pas possible d'être présents dans les petites entreprises. Etant donné la liberté de choix laissée aux travailleurs quant à leur mode de représentation, les salariés d'un grand nombre de petites entreprises ont indiqué qu'ils préféraient se représenter eux-mêmes.
- 721. Eu égard à l'allégation selon laquelle la loi restreint sévèrement le droit de grève, le gouvernement répond que les dispositions relatives aux grèves permettent le déclenchement d'une grève licite pour appuyer des négociations en vue de l'adoption d'un contrat collectif, si aucun contrat de travail collectif ne s'applique aux travailleurs qui prennent part à la grève. La participation à une grève licite assure la protection contre des poursuites judiciaires. La continuité de service des travailleurs en grève est protégée, de sorte que les avantages liés au service ne sont pas perdus. Les grèves sont illicites si elles ont trait à des contentieux et à des conflits personnels, parce qu'il existe des procédures appropriées pour les régler par le truchement du Tribunal du travail, que tous les travailleurs peuvent saisir. Dans les secteurs essentiels, les grèves visant l'adoption d'un contrat collectif sont licites à condition qu'un préavis de grève suffisant soit donné.
- 722. Bien que la loi restreigne le droit de déclencher une grève en faveur de la conclusion d'un contrat de travail collectif liant plus d'un employeur, cette restriction vise à protéger la liberté de choix des employeurs et des travailleurs par rapport à la négociation de la structure de négociation. Elle ne touche pas les grèves en faveur de négociations une fois qu'il a été décidé d'associer à celles-ci plusieurs employeurs. De plus, bien que le NZCTU prétende que la restriction qui frappe les grèves ayant trait au champ d'application des contrats associant plusieurs employeurs s'est traduite par une diminution, depuis l'entrée en vigueur de la loi, du nombre de conventions collectives conclues à l'échelon d'un secteur ou au niveau national, le gouvernement ne pense pas que la diminution du nombre des contrats associant plusieurs employeurs soit uniquement imputable à la restriction qui touche les grèves. Cette diminution peut être d'emblée attribuée à la suppression de la possibilité de négocier une clause concernant les parties ultérieures. En réalité, la cause profonde en est la tendance générale à mener les négociations à l'échelon de l'entreprise. En ce qui concerne l'exemple de l'Association des internes, le gouvernement estime que le NZCTU l'a simplifié à l'extrême, dans la mesure où il ne saisit pas bien les principaux enjeux du conflit. Le préavis de grève donné aux conseils sanitaires locaux n'indiquait pas, comme le prétend le NZCTU, qu'il s'agissait d'une grève en faveur d'un contrat collectif national. En réalité, les avis annonçant la grève ont été promptement retirés dans certains conseils, parce que des accords avaient été conclus au niveau de l'établissement sur les questions à traiter dans le cadre des négociations locales. Le conflit a été caractérisé par une ambiguïté sur la question de savoir si le syndicat souhaitait des contrats nationaux ou régionaux. L'enjeu principal, tel qu'il a été décrit par le syndicat au moment du préavis de grève, était le maintien des programmes de formation, et c'est un accord sur la procédure à suivre à cet égard qui a abouti au retrait des préavis de grève.
- 723. Enfin, le gouvernement déclare que la loi n'indique pas expressément que les grèves, dont le propos est général ou qui visent des aspects de la politique économique et sociale et les actions indirectes, sont licites ou illicites. Il n'en reste pas moins que seules les grèves licites sont protégées contre les poursuites judiciaires. Le Tribunal du travail décide en analysant chaque cas particulier si les grévistes sont tenus à réparation des dommages causés. Le gouvernement estime qu'il existe d'autres moyens efficaces d'exprimer ses opinions sur les questions politiques et sociales. La liberté d'expression et de réunion pacifique sont expressément protégées par la loi sur la déclaration des droits, et les manifestations se déroulent d'ordinaire dans le calme et sans que les autorités n'interviennent. En outre, les consultations au moyen de documents pour examen et de communications sont inscrites dans le cours normal de l'élaboration des politiques à tous les niveaux de l'administration, et la procédure de la commission parlementaire permet des apports publics au processus législatif dans le cas de la plupart des textes de lois.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 724. Le comité note que les allégations relatives à ce cas portent sur diverses violations des principes de la liberté syndicale et de la négociation collective en raison de l'entrée en vigueur, en mai 1991, de la loi sur les contrats de travail. Le gouvernement estime que l'esprit et l'application dans la pratique de la loi sont compatibles avec la liberté syndicale. Les deux parties soumettent divers documents à l'appui de leurs arguments respectifs: enquêtes, statistiques, jurisprudence, écrits émanant de syndicats et d'entreprises et témoignages écrits.
- 725. L'organisation plaignante fait tout d'abord valoir qu'une commission parlementaire a pris connaissance des mémoires relatifs au projet de loi, dont 188 étaient hostiles au projet et 71 y étaient favorables. La commission parlementaire n'a cependant pas tenu compte de la majorité des documents soumis qui étaient hostiles au projet de loi. Le gouvernement répond que la commission parlementaire ne tient pas ce type de mémoires pour un référendum. Cependant, il déclare aussi que les consultations au moyen de mémoires sont inscrites dans le cours normal de l'élaboration des politiques à tous les niveaux de l'administration, et la procédure de la commission parlementaire permet des apports publics au processus législatif dans le cas de la plupart des textes de loi. Le comité souligne que le principe de la consultation ou de la collaboration entre les pouvoirs publics et les organisations d'employeurs et de travailleurs aux échelons industriel et national mérite qu'on y attache la plus haute importance.
- 726. L'organisation plaignante allègue ensuite que la loi n'encourage pas la négociation collective, puisque les contrats de travail collectifs conclus dans le cadre de la loi ne sont pas nécessairement le fruit de véritables négociations collectives auxquelles les organisations de travailleurs sont parties prenantes. Le comité note que si la création d'une organisation de travailleurs (définie à l'article 2 comme "tout groupe, société, association ou autre groupement de travailleurs, quelle que soit la manière dont il se définit et qu'il ait ou non la personnalité juridique, dont les objets sont, exclusivement ou partiellement, la promotion des intérêts professionnels des travailleurs qui en font partie") ne fait l'objet d'aucune restriction, la loi ne contient aucune disposition expresse concernant la reconnaissance des organisations de travailleurs aux fins de la négociation collective et ne fait pas mention d'organisations de travailleurs représentatives. En effet, l'alinéa a) de l'article 9 dispose que les travailleurs et les employeurs peuvent choisir de négocier pour leur propre compte ou d'être représentés par toute autre personne, tout groupe ou toute organisation de leur choix, et le paragraphe 1 de l'article 12 exige de tout représentant - qu'il s'agisse d'une personne, d'un groupe ou d'une organisation - qu'il établisse formellement les pouvoirs dont il est investi pour représenter le ou les employeurs et le ou les travailleurs parties aux négociations visant l'adoption d'un contrat de travail. Le comité rappelle l'importance qu'il attache au droit de négociation des organisations représentatives, qu'elles soient enregistrées ou non, et rappelle au gouvernement que les employeurs, y compris les autorités publiques agissant en tant qu'employeur, devraient reconnaître, aux fins de la négociation collective, les organisations représentatives des travailleurs qu'ils occupent. (Recueil, op. cit., paragr. 588 et 617.)
- 727. L'organisation plaignante affirme en outre que la diminution du nombre de travailleurs couverts par des conventions collectives depuis les négociations de 1989-90 est une preuve supplémentaire que la loi privilégie la négociation individuelle par rapport à la négociation collective. Le comité note que le gouvernement ne conteste pas les chiffres fournis à cet égard par l'organisation plaignante. En revanche, le gouvernement conteste le fait que les négociations de 1989-90 doivent servir d'année de base car, en ce cas, la diminution de 45 pour cent du nombre de travailleurs visés par les négociations collectives porterait sur une période de deux ans ayant commencé bien avant la mise en vigueur de la loi. Toutefois, même si les négociations de 1990-91 devaient être prises comme année de base, le comité constate que le nombre de travailleurs visés par les négociations collectives a de nouveau diminué de 30 pour cent pendant cette période. Le gouvernement attribue ce recul à plusieurs facteurs. Il déclare tout d'abord qu'il y avait depuis quelques années un déplacement latent vers la négociation à l'échelon de l'entreprise et que, lorsque les restrictions antérieures ont été supprimées par la loi, un nombre beaucoup plus important d'employeurs et de travailleurs ont tiré parti de la liberté nouvelle de négocier à ce niveau. Le comité est d'avis qu'une conséquence de la nouvelle législation a été de tirer parti de la liberté nouvelle de négocier au niveau individuel plutôt que collectif et qu'il en a également résulté une baisse dans la couverture de la négociation collective.
- 728. D'après le gouvernement, une autre raison de ce recul est que la loi dispose qu'à l'expiration d'un contrat collectif les travailleurs sont couverts par un contrat individuel jusqu'à ce qu'un nouveau contrat collectif soit négocié. A mesure que les sentences arbitrales enregistrées conformément à la législation antérieure sont venues à expiration, un nombre important de travailleurs ont automatiquement été assujettis à un contrat de travail individuel. Le gouvernement estime que cet effet est provisoire et qu'il n'y a pas de raison de croire que certains de ces travailleurs ne négocieront pas de nouveaux contrats collectifs. Le comité note cependant l'affirmation du gouvernement selon laquelle "la loi a officialisé le régime contractuel ... Ce faisant, elle rend chaque employeur et chaque travailleur responsable des négociations" et qu'elle insiste sur la liberté de choix. Le comité prend également note de l'allégation de l'organisation plaignante - non réfutée par le gouvernement -, selon laquelle les contrats de travail collectifs visés par la loi peuvent être conclus sans que les travailleurs prennent part à une procédure d'approbation collective et sans l'intervention d'une organisation de travailleurs représentative, même lorsque les travailleurs ont mandaté un syndicat. Il relève que dans l'affaire Adams contre Alliance Textiles Mill, le directeur a distribué un "contrat de travail collectif" à chaque travailleur et demandé à chacun d'eux de retirer les pouvoirs qu'il avait donnés au syndicat avant de signer son contrat. Le gouvernement admet que dans ce cas, comme dans d'autres cas où l'employeur avait réussi à contourner le représentant syndical habilité, le Tribunal du travail n'a pas estimé que les agissements de l'employeur étaient en contradiction avec la loi. Le comité demande au gouvernement de fournir des informations supplémentaires sur les décisions des tribunaux et leurs conséquences. Le comité exprime sa préoccupation du fait que l'importance accordée à la responsabilité individuelle pour la négociation dans la loi et dans la pratique qui s'ensuit pourrait être au détriment de la négociation collective. Il attire l'attention du gouvernement sur le rôle des organisations de travailleurs dans la négociation collective et sur le principe selon lequel la négociation entre les employeurs ou leurs organisations et les organisations de travailleurs devrait être encouragée et promue.
- 729. Eu égard aux raisons exposées ci-dessus, le comité estime que la loi prise dans son intégralité n'encourage ni ne favorise la négociation collective. Il demande donc au gouvernement de prendre les mesures législatives voulues pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation de procédures de négociation volontaire entre les employeurs ou leurs organisations et les organisations de travailleurs en vue de régler les conditions d'emploi au moyen de conventions collectives, conformément aux principes de la liberté syndicale et de la négociation collective. Le comité suggère au gouvernement de tenir compte à cet égard des dispositions pertinentes de la recommandation (no 163), sur la négociation collective, 1981, qui énumère divers moyens de promotion de la négociation collective, y compris la reconnaissance des organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs aux fins de la négociation collective (alinéa a) du paragraphe 3).
- 730. S'agissant de l'allégation selon laquelle les ingérences et les discriminations dans la négociation collective sont devenues systématiques dans le cadre de la loi, le comité note que dans divers cas qui lui ont été présentés par les deux parties il a été demandé aux travailleurs de signer individuellement des contrats de travail collectifs, et en même temps de retirer au syndicat le mandat d'agent négociateur qu'ils lui avaient confié. Le comité observe par ailleurs que, selon la jurisprudence, ces tentatives de "persuasion" de la part de l'employeur étaient parfaitement légitimes, puisque la loi n'oblige pas l'employeur à demeurer strictement neutre lorsque ses intérêts fondamentaux sont en jeu. Il demande au gouvernement de fournir des informations supplémentaires sur le point de savoir si ceci correspond toujours à la situation. Le comité estime que les tentatives d'un employeur visant à négocier des contrats collectifs en cherchant à persuader les salariés de retirer les autorisations données aux syndicats pourraient influencer indûment le choix des travailleurs et miner la position du syndicat, rendant ainsi plus difficile la négociation collective, ce qui est contraire au principe selon lequel la négociation collective doit être encouragée.
- 731. Le comité observe en outre que si la loi assure une protection contre les ingérences et les discriminations fondées sur l'appartenance à un syndicat, elle n'offre qu'une protection clairement insuffisante contre les agissements visant à s'immiscer dans la décision d'un travailleur de mandater un syndicat et à user de mesures discriminatoires contre un travailleur parce qu'il a ainsi mandaté un syndicat. D'après les éléments fournis par l'organisation plaignante, il apparaît clairement au comité que les employeurs peuvent en pratique s'immiscer dans les affaires internes des organisations de travailleurs en essayant d'influer sur la décision des travailleurs de mandater un syndicat, usant de mesures discriminatoires contre les travailleurs qui ont mandaté leur syndicat et qui refusent d'annuler leur autorisation. Dans les trois usines de l'entreprise Richmond, par exemple, les travailleurs ont été contactés individuellement et menacés de perdre leur ancienneté ou leur emploi s'ils ne retiraient au syndicat le mandat qu'ils lui avaient confié.
- 732. En conséquence, le comité est d'avis que la protection contre les ingérences et les discriminations fondées sur l'affiliation syndicale est insuffisante dans le contexte de la Nouvelle-Zélande si elle ne s'accompagne pas d'une protection contre les ingérences et les discriminations fondées sur l'octroi d'un mandat de représentation à un syndicat. Le comité note dans ce contexte que les éléments de preuve fournis par l'organisation plaignante, qui émane de travailleurs des trois usines de Richmond ayant retiré le mandat d'agent négociateur qu'ils avaient confié au syndicat et franchi la ligne des piquets de grève, à la suite d'une tentative de "persuasion" de leur employeur. Tous ces travailleurs (ainsi que ceux qui n'avaient pas retiré leur autorisation) ont eu le sentiment qu'ils ne pouvaient demeurer membres du syndicat, soit parce qu'ils en avaient enfreint le règlement - en vertu duquel ceux qui violaient les résolutions syndicales étaient susceptibles d'être expulsés du syndicat -, soit parce qu'ils ne voyaient pas pourquoi ils continueraient de payer des cotisations syndicales pour un syndicat qui n'allait plus négocier pour eux. Le comité considère que les ingérences et les discriminations fondées sur l'habilitation d'un syndicat équivalaient certainement à des ingérences et à des discriminations fondées sur l'affiliation à un syndicat. A cet égard, le comité tient à rappeler les principes selon lesquels nul ne devrait faire l'objet de discrimination dans l'emploi en raison de son affiliation ou de ses activités syndicales légitimes (Recueil, op. cit., paragr. 538) et que la législation doit établir d'une manière expresse des recours et des sanctions contre les actes d'ingérence et de discrimination antisyndicale des employeurs à l'égard des organisations de travailleurs, afin d'assurer l'efficacité pratique des principes de la liberté syndicale. (Recueil, op. cit., paragr. 577 et 543.) Constatant que la loi n'accorde pas une protection suffisante aux travailleurs contre les actes d'ingérence et de discrimination exercés en raison des mandats de représentation confiés à un syndicat, et que l'absence d'une telle protection implique que la protection contre les ingérences et les discriminations fondées sur l'affiliation à un syndicat ou les activités syndicales est inefficace dans la pratique, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que la loi établisse d'une manière expresse des recours et des sanctions contre les actes d'ingérence et de discrimination exercés en raison des mandats de représentation confiés à un syndicat.
- 733. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle la loi permet la reconnaissance d'agents négociateurs nommés par les employeurs ou dominés par eux, le comité note que d'après une enquête effectuée en 1992 pour le gouvernement, 28 pour cent des travailleurs assujettis à des contrats de travail collectifs étaient représentés par une autre entité qu'un syndicat, et 8 pour cent d'entre eux n'étaient pas représentés du tout. D'après le gouvernement, cette diversification du mode de représentation correspond à l'esprit de la loi, à savoir que le dispositif de négociation doit être adapté aux besoins de l'entreprise et de son personnel. Tout en prenant note de l'argument du gouvernement selon lequel les travailleurs étant entièrement libres de choisir leur représentant, la possibilité existe qu'ils acceptent les représentants proposés par l'employeur, mais qu'ils peuvent rejeter ces représentants s'ils n'en sont pas satisfaits, le comité relève les deux exemples donnés par l'organisation plaignante d'agents négociateurs nommés ou payés par l'employeur, qui ont négocié pour les travailleurs chez Ohope Lodge Ltd., et pour l'association des cadres de la société Accident Compensation Corporation. Le comité rappelle à cet égard l'importance de l'autonomie des parties à la négociation collective. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 581.) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la loi interdise expressément que les négociations soient menées au nom des travailleurs ou de leurs organisations par des agents négociateurs nommés ou contrôlés par les employeurs ou leurs organisations.
- 734. S'agissant de l'allégation selon laquelle l'obligation de faire la preuve d'un mandat de représentation, conformément à la règle prescrite par la loi, est pesante et gêne les syndicats dans la pratique de la négociation collective, le comité note que le paragraphe 1 de l'article 12 oblige tout représentant - organisation, groupe ou personne - à établir qu'il est mandaté pour représenter tout travailleur ou employeur aux négociations en vue de l'adoption d'un contrat de travail. Bien que la loi ne précise pas les modalités de cette preuve, laissant aux parties le soin d'en décider, le comité remarque qu'en pratique les employeurs peuvent demander aux travailleurs de mandater individuellement leur syndicat s'ils choisissent de négocier par son intermédiaire. Le gouvernement lui-même déclare que dans les services de santé publics la méthode adoptée par la majorité des employeurs occupant des effectifs moyens ou importants consistait à demander une liste des noms, une formule de procuration, une déclaration attestant que les personnes dont les noms figuraient sur la liste avaient signé la formule, et l'engagement du syndicat de fournir, sur demande, la procuration remise par n'importe laquelle de ces personnes. Le conseil sanitaire local de Southland est allé encore plus loin en demandant une copie de chaque procuration.
- 735. Le comité a indiqué dans des cas précédents que la reconnaissance par un employeur des principaux syndicats représentés dans son entreprise ou du plus représentatif d'entre eux constitue la base même de toute procédure de négociation collective des conditions d'emploi au niveau de l'établissement (Recueil, op cit., paragr. 618) et que les autorités compétentes devraient être habilitées à procéder à une vérification objective de toute demande d'un syndicat prétendant représenter la majorité des travailleurs d'une entreprise. Si l'on constate que le syndicat intéressé est majoritaire, les autorités devraient prendre des mesures de conciliation appropriées en vue d'obtenir la reconnaissance par l'employeur de ce syndicat aux fins de négociation collective. (Recueil, op. cit., paragr. 620.) Le comité constate dans le présent cas que non seulement la loi n'établit aucune procédure pour la reconnaissance d'une organisation de travailleurs représentative aux fins de la négociation collective, mais qu'elle oblige un syndicat à faire la preuve du mandat que lui ont confié tous les travailleurs qu'il affirme représenter dans les négociations en vue de l'adoption d'un contrat de travail. Le comité est d'avis que cette exigence est excessive et contraire aux principes de la liberté syndicale dans la mesure où elle peut être appliquée de manière à constituer un empêchement pour une organisation de travailleurs de représenter ses membres. Ce comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que cette disposition soit abrogée.
- 736. Le comité prend également note de l'allégation de l'organisation plaignante selon laquelle la possibilité que la loi donne aux employeurs de négocier des contrats de travail collectifs sans l'intervention d'organisations de travailleurs leur permet d'exclure certains droits syndicaux de ces contrats, à savoir le droit de pénétrer sur les lieux de travail, la déduction des cotisations syndicales, le droit pour les syndicats de se faire communiquer les noms des travailleurs syndiqués et le temps alloué pour les réunions syndicales. S'agissant du droit d'accès aux lieux de travail, le comité rappelle le principe général selon lequel les représentants des travailleurs devraient disposer des facilités nécessaires à l'exercice de leurs fonctions, y compris le droit de pénétrer dans les lieux de travail. (Recueil, op. cit., paragr. 143). Le comité constate que dans le présent cas les représentants habilités ont le droit, en vertu de l'article 14 de la loi, de pénétrer sur le lieu de travail pour débattre des questions liées aux négociations. Le comité observe en outre que ce droit d'accès a été précisé par le Tribunal du travail dans l'affaire NZ Nurses Union contre Argyle Hospital Ltd. Ce droit n'est pas strictement limité aux périodes de négociations ou juste avant celles-ci, mais peut être exercé pour débattre d'éventuelles négociations futures en vue de la conclusion de tout contrat de travail. Ce droit ne peut être dénié par un avis d'intrusion émis conformément à la loi de 1980 sur les intrusions. Le comité estime par conséquent que le droit de pénétrer sur les lieux de travail est garanti de manière satisfaisante par la loi et renforcé par la jurisprudence. S'agissant de la déduction des cotisations syndicales, le comité fait observer que dans des cas précédents il a estimé que les problèmes liés aux clauses de sécurité syndicale devaient être résolus sur le plan national, conformément à la pratique et au système de relations professionnelles de chaque pays. (Voir 284e rapport, cas no 1611 (Venezuela), paragr. 338-339, et 290e rapport, cas no 1612 (Venezuela), paragr. 27.) Le comité fait en outre observer que le droit pour les syndicats de se faire communiquer les noms des travailleurs syndiqués et celui de disposer de temps libre pour les réunions syndicales sont des questions qui peuvent être négociées par les parties.
- 737. L'organisation plaignante allègue ensuite que la loi empiète sur le libre choix du niveau des négociations, parce qu'elle interdit les grèves exercées pour appuyer la négociation d'un contrat impliquant plus d'un employeur, ce qui constitue un obstacle à la conclusion de conventions collectives au niveau d'un secteur. Le NZCTU donne trois exemples d'organisations de travailleurs qui, selon lui, n'ont pas pu déclencher une action de revendication pour appuyer la négociation de contrats collectifs au niveau national ou à l'échelon d'un secteur. Le NZCTU allègue en outre que la diminution de 90 pour cent du nombre de conventions collectives conclues à l'échelon d'un secteur ou au niveau national depuis l'entrée en vigueur de la loi prouve que cette interdiction restreint la liberté des parties de choisir le niveau de négociation. Le gouvernement ne pense pas, quant à lui, que la diminution du nombre des contrats concernant plusieurs employeurs soit uniquement imputable à la restriction qui touche les grèves. Il prétend que cette diminution peut être d'emblée attribuée à la suppression de la possibilité de négocier une clause d'extension, et que la cause profonde en est la tendance générale à mener les négociations à l'échelon de l'entreprise. Au demeurant, en dépit de l'interdiction des grèves exercées pour appuyer la négociation de contrats concernant plusieurs employeurs, les négociations collectives peuvent se dérouler, et se déroulent en fait, à l'échelon d'un secteur d'activité. Quoi qu'il en soit, le comité considère que l'alinéa e) de l'article 63, qui interdit les grèves qui concernent le problème de l'application des contrats collectifs à plus d'un employeur, est contraire aux principes de la liberté syndicale en matière de droit de grève, et que les travailleurs et leurs organisations devraient pouvoir déclencher une action de revendication à l'appui de tels contrats.
- 738. S'agissant de l'allégation selon laquelle le gouvernement s'est activement immiscé dans les négociations menées entre les employeurs et les travailleurs des organismes étatiques dans le dessein d'empêcher la conclusion d'accords à l'échelon des secteurs, le comité note que selon l'organisation plaignante la commission des services étatiques a enjoint à l'organe central des employeurs des instituts universitaires de technologie, l'Association des instituts universitaires de technologie de Nouvelle-Zélande (APNZ), de différer les négociations relatives à un accord préliminaire en vue de la conclusion d'un contrat concernant plusieurs employeurs, avec l'Association du personnel auxiliaire des établissements postscolaires (TIASA) - le syndicat représentatif des travailleurs des instituts universitaires de technologie - jusqu'à ce que le sous-comité des salaires du Conseil des ministres ait approuvé l'accord. Après la réunion du sous-comité du Conseil des ministres, le ministre du Travail de l'époque a adressé à l'ANPZ une lettre dans laquelle il donnait à entendre que le financement des instituts universitaires de technologie serait modifié afin d'être en harmonie avec les objectifs du gouvernement concernant la négociation à l'échelon de l'établissement, à la suite de quoi les employeurs des instituts universitraires de technologie ont publié un avis indiquant qu'ils ne pouvaient négocier que des contrats à ce niveau. Le gouvernement maintient cependant que la décision de conduire les négociations à l'échelon de l'établissement a été prise par les employeurs en cause et non par le gouvernement, et conteste l'exactitude des notes prises par l'un des représentants des employeurs à la réunion tenue par l'APNZ avec le sous-comité du Conseil des ministres. Le comité considère que, bien que le gouvernement ait donné son avis aux employeurs du secteur public quant à la manière de conduire les négociations avec leurs travailleurs, la décision de conduire les négociations à l'échelon de l'établissement a été prise par les employeurs en cause.
- 739. S'agissant de l'allégation selon laquelle la loi restreint sévèrement le droit de grève, le comité note que l'alinéa f) de l'article 63 interdit les grèves dans un secteur essentiel si aucun préavis de grève n'est donné. Le comité note en outre que la liste des services essentiels donnée dans la Troisième Annexe va au-delà de la définition donnée par le comité des services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. (Recueil, op. cit., paragr. 394.) Toutefois, étant donné que cette restriction du droit de grève astreint simplement à l'observation d'un préavis et ne constitue pas une interdiction totale des grèves, et que les conditions de préavis énoncées à l'article 69 sont raisonnables, le comité ne considère pas que la restriction instaurée par la loi au droit de grève dans un secteur essentiel est incompatible avec les principes de la liberté syndicale.
- 740. Le comité constate cependant que seules les grèves licites sont protégées en cas de poursuites judiciaires, bien que la loi n'indique pas expressément que les grèves qui visent des aspects généraux de la politique économique et sociale, ni que les actions indirectes sont licites ou illicites. Le comité attire l'attention du gouvernement sur le principe énoncé à cet égard par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, à savoir que les organisations syndicales devraient avoir la possibilité de recourir à des grèves de protestation, notamment en vue d'exercer une critique à l'égard de la politique économique et sociale des gouvernements. Cependant, les grèves de nature purement politique n'entrent pas dans le champ d'application des principes de la liberté syndicale. (Etude d'ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1983, paragr. 216.) En conséquence, le droit de grève ne devrait pas être restreint aux seuls différends de travail susceptibles de déboucher sur une convention collective particulière: les travailleurs et leurs organisations doivent pouvoir manifester, le cas échéant, dans un cadre plus large, leur mécontentement éventuel sur des questions économiques et sociales touchant aux intérêts de leurs membres. (Recueil, op. cit., paragr. 388.)
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 741. Vu les conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité souligne que le principe de la consultation ou de la collaboration entre les pouvoirs publics et les organisations d'employeurs et de travailleurs aux échelons industriel et national mérite qu'on y attache de l'importance.
- b) Notant que la loi ne contient aucune disposition expresse concernant la reconnaissance des organisations de travailleurs représentatives aux fins de la négociation collective, le comité rappelle l'importance qu'il attache au droit de négociation des organisations représentatives, qu'elles soient enregistrées ou non, et rappelle au gouvernement que les employeurs, y compris les autorités publiques agissant en tant qu'employeur, devraient reconnaître, aux fins de négociation collective, les organisations représentatives des travailleurs qu'ils occupent.
- c) Le comité note que, dans des cas où l'employeur a réussi à ignorer le syndicat représentatif autorisé, le tribunal du travail n'a pas considéré les agissements de l'employeur comme contraires à la loi. Le comité demande au gouvernement de fournir des informations supplémentaires sur les décisions des tribunaux et leurs conséquences.
- d) Le comité attire l'attention du gouvernement sur le rôle des organisations de travailleurs à la négociation collective et sur le principe selon lequel il faut encourager et promouvoir la négociation entre les employeurs ou leurs organisations et les organisations de travailleurs.
- e) Considérant que, prise dans son intégralité, la loi sur les contrats de travail n'encourage ni ne favorise la négociation collective, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures législatives voulues pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation de procédures de négociation volontaire entre les employeurs ou leurs organisations et les organisations de travailleurs en vue de régler les conditions d'emploi au moyen de conventions collectives.
- f) Le comité note que la jurisprudence a établi que les tentatives d'un employeur de persuader les travailleurs de retirer l'autorisation d'un syndicat comme agent négociateur sont parfaitement acceptables puisque la loi n'exige pas de l'employeur de rester strictement neutre quand ses intérêts fondamentaux sont affectés. Il demande au gouvernement de fournir des informations supplémentaires sur le point de savoir si ceci correspond toujours à la situation. Le comité estime que les tentatives d'un employeur visant à négocier des contrats collectifs en cherchant à persuader les salariés de retirer les autorisations données à un syndicat, pourraient influencer indûment le choix des travailleurs et miner la position du syndicat, rendant ainsi plus difficile la négociation collective, ce qui est contraire au principe de promotion de la négociation collective.
- g) Constatant que la loi n'offre pas de protection suffisante aux travailleurs contre les actes d'ingérence et de discrimination des employeurs liés à l'habilitation d'un syndicat et que l'absence d'une telle protection implique fréquemment que la protection contre les ingérences et les discriminations fondées sur l'affiliation à un syndicat ou les activités syndicales est inefficace dans la pratique, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin que la loi établisse expressément les recours et sanctions contre les actes d'ingérence et de discrimination exercés en raison des mandats donnés par les travailleurs à un syndicat.
- h) Rappelant l'importance de l'autonomie des parties à la négociation collective, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures législatives voulues pour interdire expressément que les négociations soient menées au nom des travailleurs ou de leurs organisations par des agents négociateurs nommés ou dominés par les employeurs ou leurs organisations.
- i) Le comité est d'avis que l'exigence contenue dans la loi selon laquelle un syndicat doit prouver le mandat que lui ont confié tous les travailleurs qu'il affirme représenter aux négociations en vue d'un contrat de travail collectif est excessive et contraire aux principes de la liberté syndicale dans la mesure où elle peut être appliquée de manière à constituer un empêchement pour les organisations de travailleurs de représenter leurs membres. Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que cette disposition soit abrogée.
- j) Le comité estime que le droit de pénétrer sur les lieux de travail est garanti de manière satisfaisante par la loi et renforcé par la jurisprudence. Il considère que les problèmes liés aux clauses de sécurité syndicale devraient être résolus sur le plan national, conformément à la pratique et au système de relations professionnelles de chaque pays. Il considère en outre que le droit pour les syndicats de se faire communiquer les noms des travailleurs syndiqués et celui de disposer de temps libre pour les réunions syndicales sont des questions qui peuvent être négociées par les parties.
- k) Le comité considère que l'interdiction, inscrite dans la loi, des grèves qui concernent le problème de l'application du contrat collectif à plus d'un employeur est contraire aux principes de la liberté syndicale en matière de droit de grève et que les travailleurs et leurs organisations devraient pouvoir déclencher une action de revendication en faveur de tels contrats.
- l) Le comité ne considère pas que la restriction instaurée par la loi au droit de grève dans un secteur essentiel soit incompatible avec la liberté syndicale.
- m) Le comité attire l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel les organisations syndicales devraient avoir la possibilité de recourir à des grèves de protestation, notamment en vue d'exercer une critique à l'égard de la politique économique et sociale des gouvernements. Cependant, les grèves de nature purement politique n'entrent pas dans le champ d'application des principes de la liberté syndicale. En conséquence, le droit de grève ne devrait pas être restreint aux seuls différends de travail susceptibles de déboucher sur une convention collective particulière: les travailleurs et leurs organisations doivent pouvoir manifester, le cas échéant, dans un cadre plus large, leur mécontement éventuel sur des questions économiques et sociales touchant aux intérêts de leurs membres.
- n) Le comité demande en outre aux plaignants et au gouvernement de fournir toute autre information qu'ils estimeraient pertinente au sujet de l'application pratique de la loi.
- o) Enfin, le comité constate la grande complexité du présent cas et la nécessité d'obtenir des informations détaillées supplémentaires pour procéder à un examen définitif de l'affaire en toute connaissance de cause. Il estime donc qu'il serait très utile qu'un représentant du Directeur général se rende sur place en mission de contacts directs en vue de recueillir ces informations auprès des parties intéressées. En conséquence, le comité demande au gouvernement de consentir à l'envoi d'une telle mission.