ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Definitive Report - Report No 302, March 1996

Case No 1820 (Germany) - Complaint date: 05-DEC-94 - Closed

Display in: English - Spanish

80. La plainte faisant l'objet du présent cas figure dans une communication de la Confédération allemande des syndicats (DGB) et du Syndicat des enseignants (GEW) du 5 décembre 1994. Le GEW a envoyé des renseignements complémentaires dans une communication du 10 mars 1995. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication du 14 août 1995.

  1. 80. La plainte faisant l'objet du présent cas figure dans une communication de la Confédération allemande des syndicats (DGB) et du Syndicat des enseignants (GEW) du 5 décembre 1994. Le GEW a envoyé des renseignements complémentaires dans une communication du 10 mars 1995. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication du 14 août 1995.
  2. 81. L'Allemagne a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 82. Dans leur communication du 5 décembre 1994, la Confédération allemande des syndicats (DGB) et le Syndicat des enseignants (GEW) déclarent qu'ils se sont adressés à plusieurs reprises au BIT au sujet de l'application des conventions nos 87 et 98 par l'Allemagne et que, en 1990, le comité a examiné une plainte présentée par ces organisations au sujet des restrictions au droit de grève des enseignants de la République fédérale d'Allemagne. Les organisations plaignantes indiquent que la situation n'a pas évolué et que, de ce fait, elles se voient dans l'obligation de présenter une nouvelle plainte en raison des restrictions imposées à leurs droits syndicaux, plus précisément en ce qui concerne le droit de négociation collective.
  2. 83. Les organisations plaignantes déclarent que le problème réside, concrètement, dans l'augmentation importante de la durée du travail des enseignants en République fédérale d'Allemagne (indépendamment du fait qu'ils aient la qualité de fonctionnaires publics (Beamte) ou d'"employés" (Angestellte), par décision unilatérale du gouvernement et sans que des négociations aient été menées avec les syndicats. Les organisations plaignantes signalent que la durée du travail des enseignants en République fédérale d'Allemagne est réglementée par les Länder, qui sont leurs employeurs, et que, entre 1992 et 1994, la durée du travail des enseignants des Länder ci-après, cités par les organisations en question, a augmenté dans diverses proportions: Bavière, Berlin, Brandebourg, Basse-Saxe, Rhénanie-Palatinat, Sarre, Saxe, Saxe-Anhalt, Schleswig-Holstein et Thuringe. Toujours selon ces organisations, quelque 400 000 enseignants ont été touchés par cette augmentation qui, dans la plupart des cas, aurait été d'une heure par semaine, ce qui équivaut à une augmentation globale de 4 pour cent.
  3. 84. Les organisations plaignantes indiquent quelles ont été les augmentations de la durée du travail décidées unilatéralement par les autorités des Länder suivants:
    • - Basse-Saxe: le 8 juin 1993, le gouvernement du Land a pris la décision d'augmenter la durée du travail et l'a fait connaître aux travailleurs, à leur syndicat et au public par un communiqué de presse officiel. Cette mesure est entrée en vigueur le 1er août 1994 en vertu d'une ordonnance. Il n'y a pas eu de négociations ni de discussions substantielles en la matière avec le Syndicat des enseignants;
    • - Sarre: au cours de sa 124e session ordinaire, tenue le 30 mars 1993, le Conseil des ministres a décidé que "en raison de l'augmentation du nombre d'élèves et afin que les exigences pédagogiques soient satisfaites, le ministère du Travail et des Sports a été prié, conformément à une résolution du Conseil des ministres du 16 février 1993, et sans préjudice du nombre actuel de samedis sans enseignement, d'augmenter la durée du travail des enseignants d'une heure par semaine, pour adapter cette durée à la durée moyenne en vigueur dans les anciens Länder, et ce compte tenu des caractéristiques propres aux différents établissements d'enseignement". Cette augmentation est entrée en vigueur au cours de l'année scolaire 1993-94. Il n'y a pas eu de négociations ni de discussions substantielles en la matière avec le Syndicat des enseignants;
    • - Saxe: la durée du travail des enseignants a été augmentée en vertu d'un amendement apporté par le ministère du Travail de ce Land aux dispositions administratives régissant la durée du travail des enseignants des établissements scolaires publics. Cette augmentation est entrée en vigueur le 20 août 1993. Il n'y a pas eu de négociations en la matière entre le gouvernement du Land et le syndicat, bien que celui-ci en ait fait la demande au gouvernement. Le 29 juin 1993, ce dernier a décidé officiellement qu'aucune négociation ne serait menée au sujet de l'augmentation obligatoire du temps de travail des enseignants;
    • - Saxe-Anhalt: la durée du travail des enseignants des établissements scolaires publics a été augmentée en vertu d'une ordonnance du gouvernement du Land en date du 31 août 1993. Cette mesure est entrée en vigueur le 1er août 1993, mais il était prévu qu'elle serait suspendue pour certaines catégories d'enseignants jusqu'au 31 juillet 1994. Il n'y a pas eu de négociations ni de discussions substantielles en la matière entre le gouvernement du Land et le syndicat, ni de communication officielle préalable concernant l'augmentation prévue;
    • - Bavière et Schleswig-Holstein: le temps de travail a été augmenté non seulement pour les enseignants, mais aussi pour l'ensemble des fonctionnaires. Cette mesure générale a été prise à la suite d'une procédure de consultation des fonctionnaires, qui n'est en fait qu'une simple audition et ne satisfait pas aux obligations stipulées dans la convention no 98. Les organisations plaignantes ajoutent que la procédure suivie a été la même dans les autres Länder (action unilatérale de la part du gouvernement du Land et absence de négociations ou de discussions substantielles).
  4. 85. En ce qui concerne la relation d'emploi et la fixation des conditions de travail des enseignants, les organisations plaignantes signalent que, dans les anciens Länder de l'ouest de la République fédérale d'Allemagne, les enseignants des établissements scolaires publics sont généralement des fonctionnaires et que, en vertu de la loi allemande sur la fonction publique, les fonctionnaires ne peuvent conclure de conventions collectives. Les rémunérations et les conditions de travail sont établies unilatéralement par l'employeur dans le cadre de lois et d'ordonnances, en l'absence de toute négociation ou discussion substantielles en la matière. Dans tous les Länder où l'augmentation de la durée du travail n'a concerné que les enseignants, aucun type de négociation ou de discussion n'a eu lieu entre les employeurs et le syndicat. Il en a été de même dans les Länder où, en règle générale, le temps de travail a été augmenté pour tous les fonctionnaires publics, la procédure d'audition prévue par la loi sur la fonction publique n'étant pas conforme aux dispositions de la convention no 98 en matière de négociations ou de discussions, même en dehors du cadre de la négociation collective prise dans son sens strict. La loi sur la fonction publique des Länder prévoit en règle générale que le ministère compétent doit accorder une audition aux confédérations syndicales avant la publication de "dispositions générales en vertu de la loi sur la fonction publique". Les organisations plaignantes ajoutent que différentes procédures sont utilisées pour ces auditions selon la loi et la pratique administrative, ce qui signifie spécifiquement que: i) l'audition ne doit nullement être considérée comme une négociation (toutes les tentatives des syndicats en vue d'aboutir à un accord ont été rejetées au motif que les questions soulevées sont de la compétence exclusive du Parlement et du gouvernement); et ii) à titre individuel, les syndicats n'ont même pas droit à une audition.
  5. 86. Les organisations plaignantes signalent que, dans les nouveaux Länder, les enseignants avaient jusqu'ici presque tous la qualité d'employés mais que leur durée de travail (à savoir les périodes d'enseignement obligatoire) n'est pas réglementée de façon indépendante par une convention collective, ce droit ayant été refusé jusqu'à présent aux syndicats. Selon ces organisations, les dispositions ci-après du Règlement spécial no 3 SR 2 lI de la convention collective fédérale sur les employés-Est (BAT) s'appliquent également aux enseignants travaillant en tant qu'employés dans les nouveaux Länder: "Les règlements applicables aux fonctionnaires le sont également à ces travailleurs. S'il n'y a pas de fonctionnaires, la durée du travail est fixée par le contrat de travail." Selon les organisations plaignantes, cela signifie que la durée hebdomadaire normale du travail - négociée collectivement - qui s'applique aux autres travailleurs du secteur public ne s'applique pas aux enseignants.
  6. 87. Enfin, les organisations plaignantes déclarent que la réglementation de la durée du travail (périodes d'enseignement obligatoire) est incontestablement une composante essentielle des conditions de travail des enseignants et que l'augmentation unilatérale du temps de travail de ceux-ci par les gouvernements des Länder va manifestement à l'encontre des obligations énoncées dans la convention no 98 et de l'interprétation de cet instrument donnée par les organes de contrôle compétents.
  7. 88. Dans sa communication du 10 mars 1995, le Syndicat des enseignants (GEW) fait observer que, s'agissant des enseignants des nouveaux Länder, qui ont la qualité d'employés, il faut tenir compte du fait que la durée de leur travail est réglementée normalement par une convention collective, et que l'article du Règlement spécial applicable aux enseignants employés relevant de la BAT (convention collective fédérale sur les employés-Est) renvoie aux "dispositions applicables aux fonctionnaires publics exerçant des fonctions équivalentes à celles des employés". D'après l'organisation plaignante, cela signifie qu'il a été établi par une convention collective que les enseignants employés doivent être considérés comme des fonctionnaires publics exerçant des fonctions équivalentes. L'organisation plaignante précise que la convention collective a été signée par les syndicats compétents mais que ceci ne veut pas dire qu'ils peuvent décider que les réglementations visant les fonctionnaires en question peuvent être établies unilatéralement par les employeurs, sans participation substantielle des syndicats.
  8. 89. Les organisations plaignantes concluent en disant que la réglementation de la durée du travail est incontestablement une composante essentielle des conditions de travail des enseignants et qu'il ne fait aucun doute que l'exception prévue à l'article 6 de la convention no 98 concernant les fonctionnaires publics ne s'applique pas aux enseignants occupés dans la fonction publique.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 90. Dans sa communication du 14 août 1995, le gouvernement déclare qu'il s'oppose fermement à l'analyse juridique de ce cas quant au fond telle qu'elle a été faite par le GEW et la DGB, spécialement en ce qui concerne la conformité de la procédure de fixation de la durée du travail (et d'autres conditions de travail) pour les enseignants - et en particulier ceux qui sont fonctionnaires - avec la convention no 98 de l'OIT.
  2. 91. Le gouvernement fait observer tout d'abord qu'il est erroné d'examiner, comme l'a fait la DGB, la fixation de la durée du travail des enseignants "sans tenir compte du fait qu'ils aient le statut de fonctionnaires publics ou la qualité d'employés". D'après le gouvernement, conformément aux principes traditionnels de la fonction publique permanente énoncés au paragraphe 5 de l'article 33 de la loi fondamentale, les conditions de travail de tous les fonctionnaires d'Allemagne sont réglementées non pas par des conventions collectives, comme c'est le cas pour les travailleurs manuels et les employés du secteur privé et de la fonction publique, mais par la législation, ce qui a été confirmé par la Cour constitutionnelle fédérale. Toutefois, dans cette procédure, la participation des syndicats compétents est obligatoire, comme le disposent l'article 94 de la loi fédérale sur la fonction publique (BBG) (concernant l'administration fédérale) et l'article 58 de la loi cadre sur la fonction publique (BRRG) (concernant l'administration dans les Länder). (L'article 94 de la BBG dispose que les fédérations des syndicats compétents doivent participer à l'élaboration des réglementations générales pour les fonctionnaires publics. L'article 58 de la BRRG dispose que "lorsque les autorités supérieures des Länder élaborent des réglementations pour les fonctionnaires publics, les fédérations des syndicats compétents et des associations professionnelles doivent pouvoir participer à ce processus".)
  3. 92. Le gouvernement déclare qu'il a informé le BIT sur ces questions dans de nombreux rapports relatifs à l'application de la convention no 98 (en 1958, 1972 et 1978) et que, pendant 37 ans, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations n'a pas estimé bon de mettre en cause la compatibilité de la situation en Allemagne avec la convention. Il ajoute que ni la DGB ni le Syndicat allemand des employés (DAG), qui reçoivent régulièrement des exemplaires des rapports du gouvernement fédéral, n'ont jamais fait observer que la situation décrite pouvait ne pas être conforme aux dispositions de la convention et que, de fait, tout doute en la matière serait injustifié étant donné que l'article 6 de cet instrument dispose que ce dernier ne traite pas de la situation des fonctionnaires publics. Le gouvernement signale en outre que l'on s'est efforcé à plusieurs reprises de limiter la non-applicabilité de la convention à des catégories spécifiques de fonctionnaires publics, en arguant du fait que, dans sa version anglaise, l'article 6 fait référence aux "public servants engaged in the administration of the State" alors que, dans sa version française, il mentionne simplement et sans équivoque les "fonctionnaires publics".
  4. 93. Le gouvernement déclare que, avant de conclure que les termes différents utilisés se rapportent en réalité à des catégories de fonctionnaires différentes - selon qu'on lit l'une ou l'autre version de l'article en question -, il faut tout d'abord tenir compte du fait que, conformément à l'article 16 de la convention, les versions française et anglaise du texte font également foi. Il est donc impossible d'affirmer purement et simplement que telle ou telle des deux versions est celle qui s'impose. Le gouvernement ajoute que, conformément aux règles du droit international, telles qu'elles ont été énoncées par exemple dans la Convention de Vienne sur le droit des traités qui, bien qu'adoptée postérieurement à la convention no 98 de l'OIT, a codifié le droit international coutumier qui existait déjà quand cette convention a été rédigée, la question de savoir s'il peut exister un accord international au sujet de la validité de l'une ou de l'autre version doit être tranchée sur la base de critères spécifiques. Ces critères sont notamment le principe de la bonne foi, des accords ou pratiques postérieurs, d'autres normes applicables et en outre des travaux préparatoires. Quant à la question de savoir si c'est la version française ("fonctionnaires publics") ou la version anglaise ("public servants engaged...") de l'article 6 de la convention qui fait foi (si l'on admet que les versions anglaise et française ont des sens différents), il convient d'examiner certains des critères susmentionnés:
    • - accord postérieur: au sixième paragraphe du préambule de la convention no 151, il est fait mention dans la version française de "fonctionnaires publics"; en revanche, dans la version anglaise, il est question de "public servants", expression qui s'écarte du libellé de l'article 6 de la convention no 98;
    • - pratique postérieure: pendant 37 ans, la commission d'experts n'a pas critiqué les dispositions régissant les conditions de travail des fonctionnaires qui ne peuvent pas recourir à la négociation collective. Ceci laisse supposer qu'en évaluant cette pratique elle était guidée par l'idée que tant les termes anglais que les termes français impliquent que seules certaines catégories spécifiques de fonctionnaires publics doivent être exclues du champ d'application de la convention no 98 pour ce qui est de la détermination des conditions de travail par une convention collective. Cette opinion se fonde sur le sixième paragraphe du préambule de la convention no 151 où la nécessité d'adopter une nouvelle convention est justifiée, entre autres, par le fait que, selon les organes de contrôle, certains pays appliquent la convention no 98 d'une telle manière qu'ils excluent un groupe important de fonctionnaires publics. Le fait que cette situation ait été signalée comme une raison pour élaborer une nouvelle convention prouve que la Conférence internationale du Travail peut avoir regretté cette situation mais s'est trouvée dans l'impossibilité de la modifier dans le cadre de la convention no 98 (en vertu de l'article 6 de la convention). L'Allemagne n'a pas ratifié la convention no 151, et sa pratique pour déterminer les conditions d'emploi des fonctionnaires publics n'est peut-être pas compatible avec l'article 7 de cette convention;
    • - travaux préparatoires: au cours de la première discussion sur la convention no 98, la question de son application aux agents de la fonction publique n'a pas été soulevée. En revanche, la commission compétente de la Conférence a recommandé, d'une manière générale, que cette question soit examinée lors de la deuxième discussion. Le gouvernement signale que, dans le texte proposé à la 32e session de la Conférence, il avait été suggéré que les articles 1 à 5 ne s'appliquent pas aux "fonctionnaires au service des administrations publiques" ou "officials in the service of public administrations", et que les motifs détaillés de cette proposition sont exposés dans les termes suivants dans le rapport IV (2), paragr. 30: "De plus, ... dans la plupart des pays, les conditions de service des fonctionnaires sont fixées non par voie de négociation collective, mais par la loi, très souvent d'ailleurs après consultation des organisations syndicales de fonctionnaires." Selon le gouvernement, ceci correspond précisément à la situation des fonctionnaires en Allemagne, et la situation ainsi décrite était considérée comme compatible avec la convention qui était élaborée. Sur les 22 gouvernements qui ont exprimé une opinion sur la convention proposée, 17 ne se sont pas prononcés au sujet de l'article 6, ce qui implique qu'ils n'avaient pas d'objection à son propos, un l'a approuvé, deux l'ont désapprouvé, un a émis certaines réserves à son égard et un autre a remis en cause la notion d'"administrations publiques". Les débats ont été extrêmement difficiles et longs et, lors des discussions sur les catégories de personnes devant être visées, sept propositions ont été faites, dont celle qui a été adoptée. Il est intéressant de noter que, dans le texte français, on a utilisé constamment l'expression "fonctionnaires publics", alors que dans le texte anglais on a employé diverses expressions comme "public officials", "officials employed in government offices", "public servants", "officials", et finalement la formule qui a été adoptée: "public servants engaged in the administration of the State". Le gouvernement précise que, malgré les difficultés rencontrées pour arriver à un accord final, il ressort des documents que deux points ont reçu un appui considérable: 1) comme le dispose la convention no 87, la liberté syndicale ne devrait être déniée à aucune catégorie de fonctionnaires publics; 2) les autres droits garantis dans la convention, en particulier le droit de négociation collective, ne pourraient être déniés qu'aux fonctionnaires publics qui, en vertu de leur statut spécial, ont en tout cas le droit d'être protégés contre les actes de discrimination prohibés par la convention. Toujours d'après le gouvernement, on a eu la nette impression que l'expression française "fonctionnaires publics" reflétait bien ce consensus alors que, dans la version anglaise, il apparut nécessaire d'ajouter les termes "engaged in the administration of the State".
  5. 94. Ces observations entraînent les conséquences suivantes pour la situation en Allemagne: i) le fait que les fonctionnaires publics n'ont pas le droit de recourir à la négociation collective et que leurs conditions de travail sont fixées par le législateur avec la participation des syndicats est prévu par l'article 6 de la convention no 98; ii) cependant, les agents publics ("public employees"; voir l'article 2 de la convention no 151) qui ne sont pas des fonctionnaires publics ("public servants" (engaged in the administration of the State)) bénéficient du droit de négociation collective (en Allemagne ceci s'applique aux travailleurs manuels et aux employés au service de la fonction publique); iii) compte tenu du critère internationalement accepté pour l'interprétation, les termes de l'article 6 ne fournissent pas une base pour estimer qu'il ne s'applique pas à certaines catégories de fonctionnaires publics (aux enseignants fonctionnaires publics par exemple). En conséquence, le gouvernement rejette comme infondée la plainte selon laquelle la détermination par le législateur, en 1993, dans dix Länder, de la durée du travail des enseignants ayant le statut de fonctionnaires publics viole la convention no 98.
  6. 95. En outre, le gouvernement nie que la convention no 98 a été violée en ce qui concerne les enseignants ayant la qualité d'employés. L'application, à ce type de travailleurs, de dispositions sur le temps de travail en vigueur pour les fonctionnaires publics se fonde sur des clauses qui ont été convenues entre les parties dans le cadre de la négociation collective. Les parties ont en effet adopté des clauses spéciales en vue de déterminer la durée du travail des enseignants ayant la qualité d'employés. Le gouvernement précise que, en vertu du point no 3 SR 2 lI (applicable aux employés qui exercent les fonctions d'enseignants dans l'enseignement général et les collèges professionnels), les dispositions relatives à la durée du travail visant les fonctionnaires exerçant des fonctions équivalentes s'appliquent aux enseignants ayant la qualité d'employés. Les dispositions du point no 3 de la SR 2 lI BAT, entrées en vigueur le 1er mai 1994, portent sur les questions suivantes: i) articles 15, 15(a), 16, 16(a), 17, 34 et 35: durée du travail, compensation offerte aux personnes qui ne sont pas employées à temps complet, primes en fonction de la durée du travail, heures supplémentaires; ii) les articles 15, 15(a), 16, 16(a), 17, 34 (troisième phrase de l'alinéa 1 et alinéa 2 du paragraphe 1) et 35 ne s'appliquent pas. En revanche, les dispositions concernant les fonctionnaires exerçant des fonctions équivalentes doivent s'appliquer. Quand de tels fonctionnaires n'existent pas, la durée du travail doit être réglementée par le contrat de travail.
  7. 96. Le gouvernement signale que la version originale de la BAT du 23 février 1961 disposait déjà que la durée du travail applicable aux enseignants ayant le statut de fonctionnaires publics devait également s'appliquer aux enseignants ayant la qualité d'employés. Il signale en outre que le GEW a accueilli cette convention avec tant d'enthousiasme qu'il a signé, le 30 mars 1961, avec la "communauté de négociation (Tarifgemeinschaft) des Länder allemands" une convention collective complémentaire identique à la version originale de la BAT.
  8. 97. Le gouvernement déclare que les parties à la négociation collective n'ont pas limité le renvoi aux dispositions applicables aux fonctionnaires exerçant des fonctions équivalentes à la question de la durée du travail des enseignants, et qu'il existe dans la BAT d'autres renvois semblables pour tous les employés. Ainsi, jusqu'en 1982, l'indemnité de cherté de vie était fixée sur la base des règlements applicables aux traitements dans la fonction publique. En outre, des éléments essentiels de la relation de travail, comme le montant du salaire, furent laissés par accord mutuel à la législation.
  9. 98. Le gouvernement indique qu'il est possible, aux termes de la législation nationale, de convenir par la négociation collective que les dispositions relatives aux fonctionnaires publics exerçant des fonctions équivalentes s'appliquent également aux employés, et que cela a été confirmé par les plus hautes instances judiciaires nationales et n'est nullement contesté. Le gouvernement précise que, selon le Tribunal fédéral du travail (BAG), le terme "Bestimmungen" (dispositions) se réfère non seulement aux lois et ordonnances visant les fonctionnaires publics mais aussi aux dispositions administratives, ordonnances et décrets pertinents, ce qui inclut toutes les dispositions importantes s'appliquant aux fonctionnaires publics. En outre, selon la jurisprudence du BAG, les références qui traitent des dispositions applicables aux fonctionnaires sont admissibles et n'impliquent aucune délégation inadmissible de l'autorité législative. (Le Tribunal fédéral du travail (BAG) a déjà rendu une décision en ce sens le 9 juin 1982 au sujet du point no 3 de la SR lI BAT; il a signalé l'existence d'un lien étroit avec les dispositions concernant la durée du travail des enseignants fonctionnaires.) Le gouvernement ajoute que, conformément aux souhaits des parties à l'accord collectif, les employés devraient avoir le même statut juridique que les fonctionnaires et que, en ce qui concerne les obligations à remplir ainsi que l'étendue et la durée des services à fournir, les fonctionnaires et les employés devraient être liés par les mêmes principes et règles légales. En conséquence, non seulement il est juridiquement admissible de faire référence aux dispositions applicables aux fonctionnaires ayant des fonctions équivalentes, mais cette démarche est en outre justifiée par la jurisprudence.
  10. 99. Le gouvernement indique que, sur la base des dispositions contenues dans le point no 3 SR2 lI BAT, ont été décidées certaines réductions dans la durée du travail hebdomadaire des enseignants ayant la qualité d'employés depuis qu'il est entré en vigueur pour la première fois en 1961, et qu'aucune négociation n'a été nécessaire sur ce point. Les réductions ont été automatiques et ont été réalisées en même temps que celles qui concernaient les fonctionnaires exerçant des fonctions équivalentes, et ceci dans l'intérêt des syndicats intéressés. Le gouvernement ajoute que, dans un certain nombre de Länder, on a augmenté récemment une seule fois la durée du travail des enseignants, à la suite de nombreuses réductions de leurs horaires. Ceci a été fait conformément aux voeux des parties à la négociation, ainsi qu'il ressort des accords salariaux stipulés au point no 3 de la SR 2 lI BAT. Cette augmentation n'a pas dépassé les limites de la durée du travail en vigueur en 1961 qui formait la base des décisions des parties. Par exemple, en Bavière, citée par les organisations plaignantes (qui est l'un des Länder dans lesquels la durée du travail des enseignants a été souvent réduite et augmentée une seule fois), la durée hebdomadaire du travail dans l'enseignement s'établit de la manière suivante: en avril 1961, 30 heures dans le primaire et dans le secondaire; actuellement, 28 heures dans le primaire et 27 heures dans le secondaire; en avril 1961, dans les collèges, 24 heures pour le personnel scientifique et 28 heures pour le personnel technique et celui chargé de l'enseignement artistique; actuellement, 23 heures pour le personnel scientifique et 27 heures pour le personnel technique et celui chargé de l'enseignement artistique.
  11. 100. Dans la mesure où la BAT se réfère, au sujet de la durée du travail, aux dispositions applicables aux fonctionnaires exerçant des fonctions équivalentes, il n'est pas possible de négocier collectivement sur cette question. Le gouvernement indique que la convention est définitive car elle n'autorise pas les parties à la négociation collective, à des niveaux géographiques inférieurs, à traiter du temps de travail des enseignants. Si les syndicats veulent négocier sur cette question, ils doivent en premier lieu faire en sorte que le règlement en vigueur soit rendu inopérant, ce qui serait possible par exemple en dénonçant la disposition pertinente de la convention. En résumé, le gouvernement déclare que les dispositions relatives à la durée du travail des enseignants fonctionnaires peuvent aussi s'appliquer à ceux qui ont la qualité d'employés et que cette approche répond parfaitement aux souhaits des parties à la négociation collective, qui ont été clairement exprimés dans les conventions collectives.
  12. 101. Enfin, le gouvernement déclare que la durée du travail des enseignants est réglementée par une convention collective au sens de la convention no 98 et que: a) la détermination de la durée du travail pour les enseignants ayant le statut de fonctionnaires par des lois ou des règlements administratifs, des ordonnances et des décrets (et non par une convention collective) est conforme à la convention no 98; et b) l'application des dispositions concernant la durée du travail établies pour les enseignants ayant le statut de fonctionnaires à ceux qui ont la qualité d'employés est fondée sur une convention collective. Il s'ensuit que les obligations énoncées dans la convention no 98 sont remplies, et que les plaintes de la DGB et du GEW sont infondées.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 102. Le comité note que les allégations présentées dans ce cas concernent l'augmentation par les autorités des heures de travail des enseignants (qu'ils aient la qualité de fonctionnaires publics ou d'employés) dans divers Länder (Etats) sans que les intéressés aient eu la possibilité de recourir à la négociation collective.
  2. 103. Le comité constate que, d'après les observations des organisations plaignantes au sujet de la fixation des conditions de travail (dont la durée du travail) des enseignants, ceux dont les relations professionnelles sont régies par la loi allemande sur la fonction publique (fonctionnaires publics) ne peuvent pas conclure de conventions collectives et leurs conditions de travail sont fixées unilatéralement par des lois et des ordonnances. Ces organisations précisent qu'aux termes de la loi sur la fonction publique les autorités doivent accorder une audition aux syndicats lorsqu'elles promulguent des dispositions générales, mais que cette audition ne peut être considérée comme une négociation et que les syndicats n'ont pas droit individuellement à une audition. En outre, le comité note que les enseignants ayant la qualité d'employés jouissent du droit de négociation collective, mais que leur durée de travail n'est pas régie par une convention collective indépendante et qu'ils relèvent de la convention collective générale sur les employés (BAT), aux termes de laquelle les enseignants employés doivent être traités comme les fonctionnaires publics exerçant des fonctions équivalentes. Enfin, le comité constate que, au dire des plaignants, cette convention (BAT) a été signée par les syndicats compétents mais que cela ne veut pas dire que ceux-ci ont la faculté de convenir que les réglementations applicables aux fonctionnaires publics peuvent être établies unilatéralement par les employeurs sans participation syndicale.
  3. 104. Pour ce qui est de l'allégation relative à l'application des dispositions concernant la durée du travail des fonctionnaires publics (du secteur de l'enseignement) aux enseignants ayant la qualité d'employés conformément aux dispositions de la convention collective fédérale sur les employés (BAT) (ce qui implique une augmentation unilatérale du temps de travail dans divers Länder), le comité note que le gouvernement signale: 1) que les dispositions relatives à la durée du travail des fonctionnaires publics s'appliquent aux enseignants ayant la qualité d'employés, comme convenu par les parties par voie de négociation collective et stipulé dans la convention BAT; 2) qu'il existe dans cette convention de nombreux renvois aux dispositions applicables aux fonctionnaires à propos non seulement de la durée du travail mais aussi de diverses autres questions (par exemple l'indemnité de cherté de vie prévue à l'article 29 de la BAT); 3) que, en vertu de la législation allemande, il est possible de convenir, par la négociation collective, que les dispositions en vigueur pour les fonctionnaires publics exerçant des fonctions équivalentes doivent s'appliquer également aux employés; et 4) que si les syndicats (d'employés) désirent négocier collectivement la question de la durée du travail ils devront dénoncer la disposition pertinente de la convention.
  4. 105. Le comité observe à cet égard que les organisations plaignantes confirment que les syndicats compétents sont convenus, dans le cadre d'une convention collective, que les enseignants ayant la qualité d'employés doivent être traités comme les fonctionnaires publics exerçant des fonctions équivalentes. Tout en notant que le gouvernement indique qu'il est possible de dénoncer des dispositions de la convention collective susmentionnée (BAT) - ce qui, d'après les informations dont on dispose, ne s'est pas encore produit - le comité observe que les parties intéressées ont négocié librement la teneur de cet instrument, même si les plaignants se déclarent insatisfaits de ses dispositions. Le comité note également que, selon le gouvernement, la durée hebdomadaire du travail des enseignants a été réduite à plusieurs reprises et qu'aucune négociation avec les employés n'a été nécessaire à cette fin. Dans ces conditions, les parties qui représentaient les secteurs en question ayant recouru librement à la négociation et y ayant souscrit librement, et les employés connaissant d'avance le système unilatéral en vigueur pour la fixation des conditions de travail (y compris la durée du travail) des fonctionnaires publics, le comité estime qu'il n'y a pas eu violation des principes de la négociation collective libre et volontaire.
  5. 106. S'agissant de l'allégation relative à l'impossibilité pour les enseignants fonctionnaires publics de négocier collectivement et à l'augmentation unilatérale de leur durée de travail qui en a résulté dans divers Länder, le comité relève les déclarations du gouvernement selon lesquelles: i) conformément aux principes traditionnels de la fonction publique, les conditions de travail de tous les fonctionnaires publics d'Allemagne ne sont pas fixées par des conventions collectives mais par le législateur; ii) les organisations syndicales compétentes doivent être associées à l'élaboration des règlements généraux, conformément aux dispositions de l'article 94 de la loi fédérale sur la fonction publique; iii) l'article 6 de la convention no 98 dispose que celle-ci ne traite pas de la situation des fonctionnaires publics commis à l'administration de l'Etat et que cette expression utilisée dans le texte anglais diffère du texte français (le gouvernement se réfère notamment aux travaux préparatoires sur la convention no 98 et rappelle les discussions qui se sont déroulées à propos de la détermination du champ d'application aux personnes employées dans la fonction publique).
  6. 107. A cet égard, il appartient au comité de déterminer si le système légal applicable aux fonctionnaires en matière de négociation collective est compatible avec les principes généraux de la liberté syndicale énoncés par les organes de contrôle de l'OIT, en particulier par le Comité de la liberté syndicale.
  7. 108. Plus précisément, au sujet de la question de savoir si les enseignants ayant le statut de fonctionnaires publics, dont les relations professionnelles sont régies par la loi sur la fonction publique, doivent bénéficier du droit de négociation collective conformément aux principes de la liberté syndicale et de la négociation collective, le comité a pris dûment note des nombreux arguments détaillés que le gouvernement a présentés à l'appui de l'idée qu'il n'existe pas de motifs suffisants, sur la base de la convention no 98, pour exclure les enseignants ayant le statut de fonctionnaires publics de l'exception prévue à l'article 6 de cet instrument. A ce propos, le comité souhaite rappeler l'opinion de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations (voir Etude d'ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 200) selon laquelle il ne peut être envisagé que des catégories importantes de travailleurs qui sont employés par l'Etat puissent être privées des avantages de la convention du seul fait qu'elles sont formellement assimilées à certains fonctionnaires publics commis à l'administration de l'Etat et dont les activités sont propres à cette administration (par exemple les fonctionnaires des ministères et autres organismes gouvernementaux comparables). De l'avis du comité, ces fonctions ne sont pas assimilables à celles des enseignants. Par ailleurs, le comité a fait observer à plusieurs reprises, à la lumière des principes de la liberté syndicale, qu'il est souhaitable de promouvoir le recours à la négociation collective volontaire par des mesures appropriées aux conditions nationales, en vue de régler les conditions d'emploi du personnel enseignant (voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, troisième édition, 1985, paragr. 601), et il a indiqué clairement qu'il importe de promouvoir dans le secteur de l'enseignement des procédures de négociation collective au sens de l'article 4 de la convention no 98. (Voir 244e rapport, cas no 1349 (Malte), paragr. 205.)
  8. 109. Le comité est conscient des obligations qu'implique l'assujettissement des fonctionnaires à un régime statutaire, des principes de légalité et de réserve découlant de ce régime et de l'impossibilité, dans le système légal en vigueur en Allemagne, de conclure pour les fonctionnaires des conventions collectives comme celles qui existent dans le secteur privé ou pour les autres salariés de la fonction publique. Toutefois, il souligne qu'à son avis les enseignants n'exécutent pas des tâches incombant à des fonctionnaires commis à l'administration de l'Etat, ce type d'activités étant en fait également menées dans le secteur privé. Dans ces conditions, le comité souligne qu'il importe que les enseignants à statut de fonctionnaires publics puissent bénéficier des garanties prévues par la convention no 98.
  9. 110. Le comité comprend donc que, dans le cadre du régime statutaire de la fonction publique (où la décision appartient en dernière instance au Parlement qui adopte les lois en la matière), il puisse être nécessaire que la négociation collective se déroule selon des modalités particulières et, à cet égard, la convention no 98 que l'Allemagne a ratifiée ainsi que d'autres instruments comme les conventions nos 151 et 154 permettent une certaine souplesse. Cette souplesse vise, ainsi que l'a signalé la commission d'experts, une vaste gamme de conditions de travail (concrètement, la commission d'experts a fait état, dans sa récente étude d'ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, de la réduction du temps de travail ou d'autres aménagements, de la modulation des augmentations salariales en fonction des niveaux de rémunération et des modalités d'étalement des revalorisations). Il devrait ainsi être possible, dans le cadre général du régime statutaire établi par la Constitution et la législation allemandes, et tout en préservant les compétences du pouvoir législatif en matière budgétaire, de trouver des formules qui garantissent non seulement une simple consultation des enseignants à statut de fonctionnaires publics mais aussi la possibilité de négociations collectives pour ces personnes. Bien que la convention no 151 n'ait pas été ratifiée par l'Allemagne, le comité estime que l'article 7 de cette convention pourrait utilement servir de point de référence dans le cas présent. Cet article 7 dispose que:
    • Des mesures appropriées aux conditions nationales doivent, si nécessaire, être prises pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures permettant la négociation des conditions d'emploi entre les autorités publiques intéressées et les organisations d'agents publics, ou de toute autre méthode permettant aux représentants des agents publics de participer à la détermination desdites conditions.
    • Le comité prie donc le gouvernement de tenir compte de ces considérations et de prendre des mesures qui, tout en étant compatibles avec le système légal allemand et en tenant compte de l'article 7 de la convention no 151, permettent aux enseignants en question le droit à la négociation collective.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 111. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
    • Le comité prie le gouvernement de prendre des mesures qui, tout en étant compatibles avec le système légal allemand et en tenant compte de l'article 7 de la convention no 151, permettent aux enseignants à statut de fonctionnaires publics le droit à la négociation collective.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer