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Definitive Report - Report No 309, March 1998

Case No 1828 (Venezuela (Bolivarian Republic of)) - Complaint date: 05-APR-95 - Closed

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404. La plainte figure dans une communication de la Fédération des syndicats de pilotes de ligne professionnels du Venezuela (FESPAVEN) datée du 5 avril 1995. La FESPAVEN a envoyé des informations complémentaires par une communication en date du 27 mai 1996.

  1. 404. La plainte figure dans une communication de la Fédération des syndicats de pilotes de ligne professionnels du Venezuela (FESPAVEN) datée du 5 avril 1995. La FESPAVEN a envoyé des informations complémentaires par une communication en date du 27 mai 1996.
  2. 405. Le gouvernement a transmis ses observations sur les allégations dans une communication en date du 20 mai 1997.
  3. 406. A sa réunion de juin 1997, le comité a décidé de demander des informations supplémentaires à la fédération plaignante afin de pouvoir se prononcer sur la recevabilité de la plainte. Cependant, aucune information n'a été reçue de la fédération plaignante à cet égard.
  4. 407. Le Venezuela a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

A. Allégations de l'organisation plaignante
  1. 408. Dans ses communications des 5 avril 1995 et 27 mai 1996, la Fédération des syndicats de pilotes de ligne professionnels du Venezuela (FESPAVEN) déclare que la réglementation juridique des relations de travail dans les compagnies d'aviation comme Avensa, qui occupent des pilotes et des hôtesses de l'air, correspond aux normes établies par la loi organique du travail. Chaque membre du personnel est lié à la compagnie d'aviation par un contrat de travail individuel et jouit en outre des avantages des conventions collectives, lesquelles ont pu être établies grâce à l'existence de syndicats regroupant les différentes catégories de travailleurs. Or Avensa a constitué une entreprise -- avec ses propres actionnaires et son propre président -- dénommée Servivensa, qui paraît être une filiale d'Avensa créée dans l'intention retorse de bafouer les droits des travailleurs. Il convient de souligner que cette entreprise a été constituée avec un capital de 100 000 bolívares, ce qui est étrange pour une compagnie d'aviation. Et surtout, ce qui est encore plus curieux, elle ne n'a pas de personnel navigant. Pour que ses avions puissent circuler, il faut à chaque fois mettre en branle un dispositif de trois entreprises commerciales, jusqu'à ce que l'on atteigne les travailleurs du transport aérien.
  2. 409. L'organisation plaignante explique que Servivensa (entreprise créée par Avensa) obtient son personnel navigant auprès d'une compagnie pourvoyeuse de "main-d'oeuvre" dénommée SAJG.SA ; cependant, SAJG.SA ne dispose pas elle-même de personnel navigant, mais détient une liste de prestataires de services (aviateurs, personnel de cabine), qui ne sont pas non plus des travailleurs du transport aérien, mais des sociétés qui rassemblent des pilotes et des chefs de cabine, à la fois actionnaires et travailleurs. Ce dernier point est capital pour comprendre ce qui se passe réellement: le pilote ou le steward qui souhaite travailler chez Servivensa (ou naviguer sur des avions de cette compagnie) doit constituer une société, de sorte que lorsqu'il monte à bord il est, en apparence, envoyé par une société (la sienne) à SAJG.SA, laquelle l'envoie à Servivensa.
  3. 410. D'après l'organisation plaignante, ceci a pour conséquence que Servivensa prétend ne pas avoir de relations de travail avec son personnel navigant. Par conséquent, elle ne verse pas les prestations légales, son personnel n'a pas à être affilié au régime de sécurité sociale obligatoire et les journées de travail peuvent avoir une durée illimitée. De même, les travailleurs ne sont pas considérés comme tels, mais comme des entreprises commerciales et, partant, ils ne peuvent ni se syndiquer ni négocier collectivement. Ils doivent payer leurs uniformes, supporter les frais des nuits passées hors de leur domicile, ne sont pas couverts par une assurance, etc. Leur rémunération est un genre de forfait. De la sorte, la convention collective en vigueur est remplacée par des contrats commerciaux individuels, et l'Association syndicale des pilotes d'Avensa (ASPA) ainsi que l'Association des hôtesses de l'air syndiquées d'Avensa (ADAS) sont éliminées.
  4. 411. Tout ceci s'accompagne de pressions en tous genres de la part des représentants d'Avensa afin d'obliger les pilotes à constituer un front pour remplacer les comités directeurs de l'ASPA et de l'ADAS par des personnes de confiance d'Avensa, qui assumeront la transition vers l'embauche individuelle. Ainsi, le 15 février 1995, le gérant de la sécurité de l'entreprise, accompagné d'un groupe de pilotes et d'hôtesses de l'air jouissant de la confiance de l'employeur, s'est rendu en empruntant des véhicules de la compagnie à une assemblée tenue conjointement par l'ASPA et l'ADAS à Caracas. Le représentant de l'employeur a déclaré sans vergogne à l'assistance que l'entreprise n'acceptait pas de négocier avec les directions syndicales légitimement constituées, puis a immédiatement quitté la salle et contraint un groupe d'affiliés à faire de même en les menaçant de licenciement et de mesures discriminatoires s'ils appuyaient le syndicat.
  5. 412. Selon l'organisation plaignante, cette politique contraire aux intérêts des travailleurs a déjà réussi à neutraliser le mouvement syndical moyennant l'aval d'un comité directeur de l'ASPA; elle permet à Avensa de faire ce qu'elle veut sans que les autorités n'interviennent. Pour le moment, les comités directeurs de l'ASPA se sont transformés en employeurs en créant une organisation dénommée ASPA Rent Crew, qui offre sans vergogne les services de quelques pilotes, lesquels accompliraient selon eux le service sans donner lieu à des obligations au regard du travail et en marge de la gestion syndicale et de la négociation collective. En ce cas, les dirigeants syndicaux se placent en dehors du champ d'application de la loi organique du travail. Cette gestion favorise l'employeur.
  6. 413. L'organisation plaignante mentionne, à titre d'exemple, le cas éloquent des commandants de bord Vicente Grisanti et Herrman Alexandre, dont le nombre d'heures de vol a été réduit et qui reçoivent à présent un salaire de base mensuel sans les augmentations salariales auxquelles donne lieu le pilotage par lui-même, parce qu'ils n'acceptent pas la politique de l'entreprise et qu'ils s'opposent à la dégradation du droit collectif. Depuis la mi-décembre 1995, ces pilotes ne peuvent mener leurs activités syndicales parce que la situation anormale qui sévit chez Avensa les en empêche, et ils peuvent encore moins diriger l'ASPA, les circonstances ne le permettant plus. Ces pilotes sont membres de la FESPAVEN et ont insisté pour que la législation du travail soit appliquée et ont refusé de se transformer en sociétés anonymes.
  7. 414. Enfin, l'organisation plaignante envoie un rapport d'une commission spéciale de la Chambre des députés, de février 1995, concernant les questions dont il est fait état, où il est signalé en particulier que pour éviter l'application des conventions collectives en vigueur le groupe Avensa-Servivensa a remplacé l'engagement de ses travailleurs par une relation de travail qui consiste à obliger les équipages d'une compagnie d'aviation (Servivensa) à constituer des entreprises commerciales. Selon ce rapport, le système de travail en vigueur chez Servivensa entraîne une régression des conditions de travail, car il remplace l'engagement dans le cadre de la convention collective par une convention individuelle entre l'employeur et le travailleur.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 415. Dans sa communication en date du 20 mai 1997, le gouvernement envoie un rapport du conseiller juridique du ministère du Travail concernant la nature juridique de la prestation personnelle de service des pilotes et hôtesses au sein de l'entreprise Servivensa. Le rapport indique qu'il existe une pratique de simulations ayant pour principal objectif d'éviter l'application de la loi du travail et de la sécurité sociale, en concluant des contrats autres que des contrats de travail (généralement civils ou commerciaux) ou en obligeant les travailleurs à créer des entreprises par lesquelles ils agissent. Le droit du travail a des mécanismes efficaces afin de démanteler de telles pratiques. L'absence de contrainte exercée par Servivensa sur les pilotes et les hôtesses afin de conclure les contrats commerciaux mentionnés ne dénature pas les conclusions indiquées. Selon le rapport, la constitution de Servivensa -- filiale d'Avensa -- avec l'objectif d'exécuter les mêmes activités que cette dernière entreprise, opérant sur les mêmes trajets et offrant le support technique sur ces vols, et la conclusion de contrats de travail de nature commerciale simulée constituent une pratique antisyndicale efficace. Ainsi, les actionnaires d'Avensa, agissant à travers Servivensa, garantissent l'exécution des activités de transport aérien de personnes et de biens, sans que ces activités ne soient visées par la législation du travail et de la sécurité sociale. Cette procédure, en outre d'éviter l'exercice d'activités syndicales au sein de cette dernière entreprise, porte atteinte à la négociation collective efficace et ignore l'existence même de l'organisation syndicale au sein d'Avensa.
  2. 416. Le gouvernement déclare qu'un représentant patronal, auquel avait été octroyé un droit de parole, avec l'assentiment de ASPA et ADAS, était présent à l'Assemblée syndicale à laquelle se réfère FESPAVEN. Dans ces circonstances, il ne peut être question d'ingérence de la part de l'employeur, même s'il a pu, en exerçant son droit de parole, faire des commentaires qui pourraient s'avérer préjudiciables aux organisations syndicales. Dans ce cas, les représentants syndicaux ont pu -- s'ils l'ont estimé approprié -- réfuter les commentaires prononcés.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 417. Le comité observe que dans le présent cas l'organisation plaignante allègue: 1) que les contrats de travail des pilotes et du personnel navigant d'Avensa et la convention collective sont remplacés par des contrats individuels à caractère commercial, ce qui sape la négociation collective et les syndicats ASPA et ADAS; 2) que des représentants de l'entreprise Avensa se sont ingérés dans des réunions syndicales afin de faire pression sur les affiliés pour conclure des contrats commerciaux individuels et accepter une direction syndicale favorable aux objectifs d'Avensa; 3) que deux pilotes qui n'acceptent pas le système d'engagement individuel mentionné auraient été victimes de mesures discriminatoires. Le comité a pris note de la réponse du gouvernement.
  2. 418. Le comité rappelle que l'Association syndicale des pilotes d'Avensa (ASPA) et l'Association des hôtesses de l'air syndiquées d'Avensa (ADAS), affiliées à l'organisation plaignante (FESPAVEN), avaient présenté la plainte conjointement avec la FESPAVEN, mais qu'elles l'ont retirée par la suite ainsi qu'il est indiqué dans leurs communications respectives datées des 8 février et 23 janvier 1996. Dans ces conditions, avant de décider d'examiner le cas quant au fond, le comité avait estimé qu'il devait déterminer si la FESPAVEN continuait à avoir un intérêt direct pour les questions qu'elle avait soumises au comité (voir Procédure pour l'examen des plaintes en violation de la liberté syndicale, paragr. 34) alors que ses organisations affiliées se sont retirées de la procédure, compte tenu notamment du fait que la FESPAVEN indiquait que les comités directeurs de l'ASPA et de l'ADAS "se sont transformés en employeurs en créant une organisation dénommée ASPA Rent Crew". Le comité observe que le Bureau a demandé à la FESPAVEN, dans une communication du 27 juin 1997, de lui faire savoir si l'ASPA et l'ADAS demeurent ses affiliées et de spécifier toutes les organisations syndicales qu'elle regroupe, ainsi que le nombre de pilotes et d'hôtesses de l'air qu'elle représente. Le comité observe également que la fédération plaignante n'a pas fourni les informations qui lui avaient été demandées.
  3. 419. Dans ces conditions, bien que le gouvernement reconnaisse dans sa réponse l'existence de pratiques antisyndicales et contraires à la négociation collective, le comité estime que, la fédération plaignante n'ayant pas fourni les informations supplémentaires qui lui étaient demandées pour pouvoir se prononcer sur la recevabilité de la plainte, il n'est pas en mesure, dans ces conditions, de poursuivre l'examen du présent cas.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 420. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à décider qu'il n'est pas en mesure de poursuivre l'examen du cas.
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