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Definitive Report - Report No 320, March 2000

Case No 2054 (Argentina) - Complaint date: 09-SEP-99 - Closed

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  1. 133. La plainte figure dans une communication du Syndicat des travailleurs de Lockheed Aircraft Argentina S.A. (SITLA) datée du 9 septembre 1999. Le gouvernement a répondu dans une communication en date du 21 janvier 2000.
  2. 134. L'Argentine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

A. Allégations du plaignant
  1. 135. Dans sa communication de septembre 1999, le Syndicat des travailleurs de Lockheed Aircraft Argentina S.A. (SITLA) précise qu'il a qualité d'association syndicale "simplement enregistrée" et compte 413 membres qui l'ont autorisé à faire prélever les cotisations syndicales sur leur feuille de paie. Le plaignant ajoute que, le 14 septembre 1998, le ministère du Travail a refusé d'autoriser l'employeur à prélever ces cotisations, décision confirmée par l'arrêté no 478 du 19 juillet 1999 qui précise que le prélèvement des cotisations syndicales en vertu de l'article 38 de la loi no 23551 est un droit exclusif des associations syndicales "dotées du statut syndical" et non de celles "simplement enregistrées".

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 136. Dans sa communication du 21 janvier 2000, le gouvernement déclare que, dans le présent cas, l'organisme syndical fait appel du refus du ministère du Travail en ce qui concerne le prélèvement par un employeur des cotisations syndicales; or la loi applicable, no 23551, prescrit que seules les organisations syndicales dotées du statut syndical peuvent recourir à ce système. En vertu de cette loi et compte tenu du fait que le demandeur est simplement inscrit et n'a pas de personnalité juridique, sa requête a été rejetée (copie est jointe des démarches relatives à cette question faites par la Direction nationale des associations syndicales). Ce qui précède ne peut aucunement être considéré comme une atteinte à la liberté syndicale ou aux conventions internationales invoquées par l'organisation plaignante. A ce sujet, il convient de rappeler que la République argentine n'a pas ratifié à ce jour la convention no 135. Il n'y a donc aucune contradiction par rapport aux critères établis à plusieurs reprises par les organes de contrôle de l'OIT puisque "le simple fait que la législation d'un pays fasse une distinction entre les organisations syndicales les plus représentatives et les autres n'est pas critiquable en soi" et que "semblable distinction ne doit pas avoir pour conséquence de priver les organisations syndicales, qui n'ont pas été reconnues comme les plus représentatives, des moyens essentiels de défense des intérêts professionnels de leurs membres ni du droit d'organiser leurs activités et de formuler leur programme d'action comme le prévoit la convention no 87". Les organisations syndicales dotées du statut syndical ont donc le droit et la possibilité de demander des cotisations syndicales à leurs membres et de les percevoir afin de financer leurs activités. Par ailleurs, si l'article 38 de la loi no 23551 consacre l'obligation pour l'employeur d'agir en tant qu'agent de prélèvement lorsque l'organisation est dotée du statut syndical, cette disposition ne lui interdit pas d'intervenir à ce titre s'il obtient l'assentiment des membres d'une organisation simplement enregistrée. La loi mentionnée ne s'éloigne nullement de la lettre ou de l'esprit de la convention no 87 puisque la législation nationale garantit toujours aux travailleurs la possibilité de s'affilier, ou non, à une organisation syndicale donnée, et voit dans la fonction d'agent de prélèvement de l'employeur un simple moyen administratif destiné à éviter une évasion des cotisations.
  2. 137. Le gouvernement souligne qu'en République argentine la division républicaine des pouvoirs de l'Etat est pleinement respectée en vertu de quoi il appartient au pouvoir législatif (Congrès national) de légiférer et au pouvoir judiciaire (Cour suprême de justice de la nation et autres tribunaux inférieurs) de veiller à la constitutionnalité de la législation, le tout sans aucune interférence du pouvoir exécutif. De même, les garanties constitutionnelles sont protégées par le nouvel article 42 de la Constitution nationale (révisée en 1994) qui dispose que "toute personne peut invoquer une action rapide d'amparo, pour autant qu'il n'existe pas d'autres moyens judiciaires plus appropriés, contre tout acte ou omission de la part des autorités publiques ou de particuliers qui lèsent, limitent, altèrent ou menacent, de façon arbitraire ou illégale, les droits et garanties sanctionnés par la présente Constitution, un traité ou une loi, ou est susceptible de ce faire. Si tel est le cas, le juge peut déclarer l'inconstitutionnalité de la norme sur laquelle se base l'acte ou l'omission causant un préjudice". Grâce à cette disposition, toute personne physique ou morale estimant qu'il y a atteinte aux droits concernant la liberté syndicale peut recourir à cette action judiciaire prévue par la Constitution pour obtenir réparation du préjudice.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 138. Le comité note que, dans le présent cas, l'organisation plaignante critique le refus opposé par le ministère du Travail, dans deux arrêtés, d'autoriser un employeur à prélever des cotisations syndicales de la feuille de paie de ses salariés affiliés à un syndicat. Le gouvernement déclare que la législation ne prévoit cette obligation pour l'employeur que pour les organisations "dotées du statut syndical" (les plus représentatives) et non pour celles - comme l'organisation plaignante - qui sont "seulement enregistrées".
  2. 139. A ce sujet, le comité note que, dans les considérations de l'arrêté administratif no 478 du 19 juillet 1999, il est dit ce qui suit:
    • ... de même il fait savoir que, même si ces 413 membres ont autorisé le prélèvement de la cotisation syndicale, ils sont jusqu'à présent obligés de la verser directement pour les raisons déjà signalées.
    • Attendu que, en ce qui concerne les dommages déjà décrits, il convient de préciser que l'article 38 de la loi nationale relative aux associations syndicales no 23551 prévoit expressément que: "les employeurs seront tenus de prélever de la feuille de paie les montants qui correspondent aux cotisations ou toute autre somme due par les travailleurs aux associations syndicales dotées du statut syndical".
    • Attendu que, ainsi que le précise le texte précédent, le droit de prélever des cotisations est accordé exclusivement dans le cas des associations syndicales dotées du statut syndical et que, de ce fait, une interprétation plus ample s'étendant aux associations syndicales simplement enregistrées manque de tout fondement juridique ...
  3. 140. A ce sujet, le comité partage l'opinion de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations qui est reproduite ci-après:
    • S'agissant des dispositions de la législation reconnaissant aux associations syndicales dotées du statut syndical plusieurs privilèges (la représentation des intérêts collectifs autres que la négociation collective (art. 31), la faculté de percevoir les cotisations syndicales par retenue sur les salaires (art. 38), l'exonération d'impôts et autres taxes (art. 39) et la protection spéciale de ses représentants (art. 48 et 52), la commission insiste sur le fait que ce cumul de privilèges risque d'influer indûment sur le choix, de la part des travailleurs, de l'association à laquelle ils entendent s'affilier. Elle note à cet égard que, selon les indications du gouvernement, les travailleurs affiliés à des associations syndicales dotées du statut syndical représentent 91 pour cent des travailleurs syndiqués, contre 9 pour cent de travailleurs affiliés à des associations simplement enregistrées. De l'avis de la commission, l'écart entre les unes et les autres quant au nombre d'affiliés pourrait être interprété comme la manifestation de l'intérêt, pour les travailleurs, d'adhérer à des organisations aptes à déployer une activité syndicale authentique, comme c'est le cas d'associations syndicales dotées du statut syndical, grâce à la nature et au nombre des privilèges que leur confèrent les articles 31, 38 et 39 de la loi, au préjudice des organisations simplement enregistrées, lesquelles, au sens de l'article 23 de la loi, ne peuvent représenter, à la requête de l'autre partie, que les intérêts individuels de leurs seuls affiliés.
    • La commission rappelle à nouveau que la qualité de plus grande représentativité ne devrait pas avoir pour effet d'accorder à l'organisation concernée des privilèges allant au-delà d'une priorité en matière de représentation aux fins de la négociation collective, de la consultation par les gouvernements, ou encore de la désignation de délégués auprès d'organismes internationaux En d'autres termes, la commission convient, avec le Comité de la liberté syndicale, qu'il ne faudrait pas que la distinction opérée aboutisse à priver les organisations syndicales non reconnues comme appartenant aux plus représentatives des moyens essentiels de défense des intérêts professionnels de leurs membres et du droit d'organiser leur gestion et leur activité et de formuler leur programme d'action, conformément aux articles 3 et 10 de la convention. (Voir paragr. 309 du Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 1996.)
    • La commission rappelle également que, lorsque la législation confère à des syndicats reconnus, qui sont de fait les plus représentatifs, certains privilèges relatifs à la défense des intérêts professionnels en vertu desquels ils sont les seuls à être en mesure d'agir utilement, l'octroi de tels privilèges ne doit pas être subordonné à des conditions qui influeraient indûment, par leur nature, sur le choix, par les travailleurs, de l'organisation à laquelle ils entendent s'affilier. (Voir rapport de la commission d'experts, BIT, rapport III, partie 1A, 1999, pp. 215 à 216.)
  4. 141. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour que, en matière de prélèvement des cotisations syndicales de la feuille de paie, la législation ne fasse pas de discrimination entre les organisations syndicales simplement enregistrées et celles qui sont dotées du statut syndical.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 142. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:
    • Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour que, en matière de prélèvement des cotisations syndicales sur la feuille de paie, la législation ne fasse pas de discrimination entre les organisations syndicales simplement enregistrées et celles qui sont dotées du statut syndical.
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