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Interim Report - Report No 326, November 2001

Case No 2116 (Indonesia) - Complaint date: 23-FEB-01 - Closed

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  • licenciements en masse de syndicalistes à la suite d’un mouvement
  • de grève; agression physique d’un dirigeant syndical
    1. 321 Dans des communications datées du 23 février 2001, l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) a présenté une plainte en violations de la liberté syndicale contre le gouvernement de l’Indonésie. Elle a fourni d’autres informations dans des communications datées des 16 et 22 mars 2001. L’UITA a formulé de nouvelles allégations dans des communications datées du 24 juillet et des 15 et 16 octobre 2001.
    2. 322 Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans des communications datées des 15 juin et 31 août 2001.
    3. 323 L’Indonésie a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 324. Dans sa communication du 23 février 2001, l’UITA déclare qu’elle présente au nom de l’organisation indonésienne qui lui est rattachée, à savoir le Syndicat des travailleurs indépendants de l’hôtel Shangri-la (SPMS), une plainte contre le gouvernement de l’Indonésie pour violations des conventions nos 87 et 98.
  2. 325. Plus précisément, l’UITA explique qu’en septembre 2000 le SPMS de Djakarta a entamé avec la direction des négociations sur la mise en place d’un système de pensions, l’octroi d’une indemnité annuelle et la répartition équitable d’un pourcentage des primes. Les négociations qui ont eu lieu avec la direction le 30 octobre et les 1er et 22 novembre ont été infructueuses.
  3. 326. Le 11 décembre 2000, la direction a déclaré qu’elle refusait la participation aux négociations prévues du président du syndicat et délégué élu, M. Halilintar Nurdin, et qu’elle avait l’intention de revenir sur la question qui avait fait l’objet d’un accord. Le 14 décembre, il y a eu un vote sur le principe de la mise en place d’un piquet de grève le 31 décembre 2000. Le 20 décembre, la direction a interdit tout affichage et toute distribution de tracts dans l’hôtel.
  4. 327. Le 22 décembre 2000, la direction a suspendu M. Halilintar Nurdin avant de le licencier et lui a interdit de pénétrer dans l’hôtel pour faire son travail. Les employés de l’hôtel se sont rassemblés dans le hall et ont signé une pétition contre cette décision. A 16 heures, la direction a décidé de transférer les clients vers d’autres hôtels de Djakarta; à 18 heures, elle annonçait la fermeture de l’hôtel et un lock-out qui s’appliquait à tout le personnel. Dans une communication du 10 janvier 2001, le syndicat a déclaré que la direction avait soudoyé un représentant du ministère du Travail pour faciliter le licenciement du président du syndicat, M. Halilintar Nurdin.
  5. 328. Le 26 décembre 2000, à 1 heure 15 du matin, environ 350 membres des forces de police ont attaqué les travailleurs en grève et, à la demande de la direction, ont fait évacuer l’hôtel par la force. Près de 20 syndicalistes, parmi lesquels le représentant de l’UITA en Indonésie, M. Hemasari Dharmabumi, ont été détenus au poste de police toute une journée.
  6. 329. Au début du mois de janvier 2001, la direction a envoyé à près de 400 syndicalistes une lettre leur expliquant que leur participation à la grève leur ferait perdre leur emploi, à moins qu’ils ne soient prêts à quitter le syndicat. La direction a refusé depuis lors de participer à des négociations quelles qu’elles soient.
  7. 330. Le 20 février 2001, M. Muhammed Zulrahman, trésorier du syndicat et employé de l’hôtel, a été hospitalisé à la suite d’une agression par le chef des gardes du corps de l’hôtel. La police a relâché l’un des agresseurs sans aucune inculpation. Le même jour, le gouverneur Sutiyosa, qui est responsable de l’administration de la ville de Djakarta, a annoncé qu’il mettrait à la disposition de l’hôtel des forces de sécurité spéciales si la direction parvenait à rouvrir l’hôtel avec des non-grévistes.
  8. 331. L’UITA affirme qu’en dépit des nombreuses requêtes du syndicat, ni le ministère du Travail, ni le tribunal du travail ne sont intervenus concrètement pour protéger les droits de liberté syndicale et de négociation collective des travailleurs. Selon l’UITA, le gouvernement indonésien aurait failli à son obligation de veiller au respect de la législation indonésienne en matière de liberté syndicale et de protection des syndicalistes, notamment pour ce qui est du recours au lock-out en tant que moyen de règlement des conflits collectifs, et du licenciement collectif de plus de 400 salariés pour appartenance syndicale. Elle dénonce également le recours aux forces de police gouvernementales pour aider l’employeur et pour briser le mouvement de protestation collectif des employés.
  9. 332. Dans sa communication du 16 mars 2001, l’UITA fait référence à une lettre datée du 15 mars 2001 qu’elle a envoyée au Président indonésien. Dans cette lettre, l’UITA se dit extrêmement préoccupée par la réouverture annoncée de l’hôtel Shangri-la de Djakarta le 17 mars 2001. L’UITA demande au Président d’offrir ses bons offices pour essayer de persuader la direction de l’hôtel Shangri-la de différer cette réouverture. Elle explique qu’une telle mesure, qui peut être ressentie comme une véritable provocation, ne peut que compliquer encore la situation actuelle. La réouverture de l’hôtel au moment même où les travailleurs qui ont fait l’objet d’un lock-out continuent à exercer leur droit légitime de protester contre le déni de leurs droits fondamentaux ne peut qu’exacerber le climat de tension et de crise qui y règne actuellement.
  10. 333. L’UITA souligne que la situation à l’hôtel Shrangri-la suscite beaucoup d’intérêt au sein de la communauté internationale. Dans le cas où la direction de l’hôtel ne serait pas prête à différer la réouverture, le risque de voir la tension monter de manière spectaculaire est bien réel, ainsi qu’un risque de violence à l’égard de ceux qui choisiraient d’exercer leur droit légitime de protestation. L’UITA souligne que dans ce cas le gouvernement indonésien serait nécessairement tenu pour entièrement responsable de toute violence qui serait exercée par les forces de sécurité étatiques ou privées contre ces travailleurs. Elle invite donc instamment le Président à se porter garant des droits des travailleurs en lock-out et à qui on refuse l’accès à leur emploi. Elle demande également au Président de s’assurer que ces travailleurs bénéficient bien d’une protection pour le cas où l’on chercherait à les empêcher par la force d’exercer pleinement leurs droits.
  11. 334. Dans sa communication du 22 mars 2001, l’UITA affirme que les efforts de médiation du gouvernement n’ont pas été suivis d’effet de la part de la direction de l’hôtel. Selon l’UITA, la direction de l’hôtel a en fait saboté les négociations tripartites avec le ministère de l’Emploi et des Transmigrations en refusant de transmettre au syndicat (SPMS) une invitation aux négociations envoyée par le ministère. Ce n’est que le mardi 20 mars 2001 que cette invitation a été transmise au SPMS par l’hôtel, alors que les discussions avaient été fixées pour le mercredi 14 mars 2001. L’UITA affirme que la direction de l’hôtel avait certainement reçu la lettre à transmettre au syndicat avant le 14 mars, et considère que la direction a cherché à la dissimuler.
  12. 335. L’UITA ajoute que le SPMS comporte près de 500 employés de l’hôtel qui ont été licenciés après avoir organisé une grève à la suite de laquelle la direction a fermé l’hôtel pour près de trois mois. L’hôtel a réouvert ses portes le samedi 17 mars 2001. Entre temps, la question des licenciements des travailleurs affiliés au SPMS a été soumise pour arbitrage à la Commission centrale de règlement des conflits du travail, un organisme approuvé par l’Etat qui n’a pas encore communiqué sa décision. Selon l’UITA, seuls 232 membres du SPMS auraient accepté une indemnité de licenciement et officiellement démissionné de l’hôtel, tandis que 273 autres membres continueraient à réclamer leur réintégration.
  13. 336. Dans sa communication du 24 juillet 2001, l’UITA fournit des précisions sur le conflit à l’hôtel Shangri-la et joint des lettres et d’autres documents en soutien de ses allégations. L’UITA soutient en premier lieu que les motifs avancés par la société pour justifier le licenciement de M. Halilintar Nurdin, président du SPMS, constituent une simple excuse cachant en réalité un objectif plus ambitieux, soit la destruction du syndicat indépendant constitué à l’hôtel Shangri-la de Djakarta. Le gouvernement, par le biais du ministère de la Main-d’œuvre et des Migrations, a appuyé cette tentative de destruction du syndicat par la direction de l’hôtel. Le fait que le ministère ait autorisé la société à licencier des centaines de travailleurs membres du SPMS afin de l’aider à détruire le syndicat constitue une preuve supplémentaire de cette attitude antisyndicale. Cela ressort également des nombreux témoignages de travailleurs qui ont été victimes d’intimidation lorsqu’ils ont été convoqués pour s’enregistrer afin d’être réembauchés, puisqu’ils ont été contraints de signer une déclaration de désaffiliation du SPMS (l’UITA produit une déclaration assermentée attestant que ces événements ont bien eu lieu).
  14. 337. L’UITA soutient également que la grève des travailleurs n’était pas illégale. Des représentants de chaque section ont participé à la manifestation spontanée dans l’après-midi du 22 décembre 2000, dont le but était de protester contre la suspension et le licenciement de M. Halilintar Nurdin. Etant donné que seuls les délégués syndicaux étaient présents sur les lieux, la protestation n’a pas réuni tous les membres du SPMS, qui étaient alors en service; pour la même raison, la protestation n’avait pas pour but de paralyser toutes les activités de l’hôtel. La grève déclenchée en raison du refus de la direction de négocier devait avoir lieu le 31 décembre 2000, comme indiqué dans le préavis dûment donné par le SMPS aux autorités compétentes. En réalité, la direction avait prévu la tenue de cette réunion de protestation spontanée par les membres du syndicat en réponse au licenciement de leur président, puisqu’elle avait augmenté le nombre de gardiens de sécurité et demandé la présence de militaires et de policiers, et ce dès le début de la matinée du 22 décembre 2000. La majorité des membres du SPMS ont continué à exécuter leurs fonctions habituelles, jusqu’à ce qu’ils soient renvoyés chez eux, ou licenciés le 23 décembre 2000, la direction ayant annoncé que l’hôtel était temporairement fermé (lock-out). Plusieurs heures après la protestation spontanée des travailleurs, une réunion de commémoration de l’anniversaire de l’indépendance de la Corée du Sud, organisée par l’ambassade de ce pays, se tenait toujours sur les lieux, de 19 heures à 21 h 30.
  15. 338. L’UITA conteste également le fait que les travailleurs auraient occupé le hall de l’hôtel. Une occupation consiste à prendre de force le contrôle d’une chose ou d’un endroit. Dans la manifestation, les travailleurs n’ont pas pris de force le contrôle du hall de l’hôtel. Il n’y a eu aucune tentative pour faire sortir des gens de force, mais il y a eu tentative d’empêcher des gens d’entrer dans le hall de l’hôtel. A partir du 23 décembre, les travailleurs étaient les seuls présents dans le hall de l’hôtel non pas parce qu’ils avaient contraint les gens de partir mais bien parce que la direction avait fait évacuer le hall ainsi que tout le reste de l’hôtel (lock-out). L’évacuation des clients de l’hôtel par la direction s’est faite au détriment des travailleurs puisque ces derniers ont vu leur pouvoir de négociation, qui visait initialement à forcer leur employeur à négocier de façon équitable, considérablement réduit.
  16. 339. L’UITA conteste en outre que l’action de protestation des travailleurs a causé la cessation des activités de l’hôtel. La direction de l’hôtel a eu recours au lock-out le 23 décembre 2000. La fermeture temporaire de l’hôtel par la direction a été accompagnée de mesures d’évacuation de tous les clients de l’hôtel, de l’annulation de certains événements déjà prévus ainsi que du renvoi à la maison ou du licenciement temporaire du personnel qui travaillait encore ce jour-là. Afin de protéger l’accès à l’hôtel contre des personnes tentées de profiter de la situation (vol ou pillage), le 24 décembre 2000, les travailleurs, grâce au personnel de sécurité de l’hôtel, ont bloqué l’entrée principale de l’hôtel par mesure de sécurité. Lorsque l’entrée de l’hôtel a été fermée par le personnel de sécurité, l’hôtel était déjà vide et ne fonctionnait pas suite au lock-out décidé par la direction le jour précédent.
  17. 340. L’UITA allègue enfin que les travailleurs n’ont pas causé le moindre dommage aux installations de l’hôtel, ni cassé les portes en verre de l’établissement. La société n’a jamais porté plainte officiellement à la police à cet égard. Les portes en verre ont en fait été cassées par la police aux petites heures du matin du 26 décembre 2000, lorsque des centaines de policiers se sont engouffrés dans l’hôtel à 1 h 15 et ont attaqué les travailleurs pour les emmener au poste de police central de Djakarta (l’UITA fournit à cet égard le témoignage d’un gardien de sécurité de l’hôtel). La police a également causé d’autres dommages lorsqu’elle a fouillé l’hôtel et effectué ce qu’elle a qualifié de «nettoyage en règle», endommageant du même coup les casiers personnels des employés de l’hôtel (l’UITA fournit la plainte écrite du SPMS au sujet de dommages causés aux casiers des employés). Selon l’UITA, la direction savait pertinemment que les dommages, notamment aux casiers des employés, n’ont pas été causés par les travailleurs. Ainsi, elle a versé aux employés démissionnaires une indemnité de 300 000 roupies chacun, en guise de dédommagement pour les casiers (l’UITA fournit copie des reçus donnés à cet égard).

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 341. Dans ses communications des 15 juin et 31 août 2001, le gouvernement fait parvenir les observations suivantes. Il explique, pour commencer, que le SPMS (Nouveau syndicat des travailleurs du tourisme) avait été créé à l’hôtel Shangri-la, à Djakarta, et que son président était M. Halilintar Nurdin. Ce syndicat et la direction avaient réussi à conclure une convention collective de travail qui règle, entre autres, les questions de primes, de pourboires et de système de pensions. Le SPMS est devenu le SPM (Syndicat des travailleurs indépendants) tout en gardant M. Halilintar Nurdin comme président.
  2. 342. Le 7 septembre 2000, ce syndicat a entamé des négociations avec la direction en vue du renouvellement de la convention collective, qui devait expirer en décembre 2001. Selon la loi no 21 de 1954 sur les conventions collectives, les négociations en vue du renouvellement de la convention collective doivent avoir lieu au moins trois mois avant sa date d’expiration. Les négociations en vue de l’amélioration de la convention sont liées à l’existence du règlement no 2 de 1999 du ministère de la Main-d’œuvre sur les pourboires, qui stipule que la répartition des pourboires doit se fonder sur «l’ancienneté». Le mot ancienneté n’est pas expliqué. Par conséquent, pour les travailleurs, ce mot signifie durée du service.
  3. 343. Le gouvernement ajoute qu’avant les négociations entre la direction et les travailleurs une aide au sujet de la signification de cette disposition a été donnée par le biais d’une invitation qui a été lancée en direction des fonctionnaires et médiateurs du bureau de district du Département de la main-d’œuvre de Djakarta pour qu’ils s’entendent sur ce règlement. A cette réunion d’orientation ont participé deux personnes qui travaillaient au Grand Hyatt Hôtel et au Regent Hôtel. Ces deux personnes connaissaient M. Halilintar Nurdin mais elles n’étaient pas invitées à cette réunion par la direction. La présence de ces deux personnes a créé une situation de désordre qui a suscité le mécontentement d’autres travailleurs au sujet de l’explication donnée sur les dispositions en question.
  4. 344. De plus, le 8 décembre 2000, lors d’une réunion du syndicat, M. Halilintar Nurdin a humilié le directeur général de l’hôtel Shangri-la et sa secrétaire. Cette humiliation est prouvée par une déclaration signée par un certain nombre de personnes ayant participé à la réunion. Le 11 décembre 2001, il y a eu une réunion entre la direction et M. Halilintar Nurdin, qui était accompagné d’un certain nombre de membres exécutifs du SPMS. Le but de cette réunion était d’obtenir des éclaircissements sur l’humiliation infligée par M. Halilintar Nurdin, une telle action étant qualifiée de violation de l’article 18, paragraphe 1, point f), du règlement no 150/Men/2000 du ministère de la Main-d’œuvre sur le licenciement, l’octroi d’une période d’ancienneté, les indemnités de licenciement et les dédommagements mais aussi des dispositions de la convention collective de travail du Shangri-la.
  5. 345. Le 12 décembre 2000, la direction a trouvé une affiche faite par M. Halilintar Nurdin. Cette affiche montrant l’image d’une bombe, elle a été considérée comme un acte d’intimidation par la direction. Toutefois, M. Halilintar Nurdin a continué à participer en tant que président du syndicat aux réunions qui ont suivi, les 22 et 23 décembre 2000, au moment même où se tenait une grève et une autre réunion du bureau de district du Département de la main-d’œuvre. La direction ne l’a jamais empêché de participer aux réunions entre la direction et le SPMS sur les questions d’emploi.
  6. 346. La direction a cependant décidé le 22 décembre 2000 de suspendre M. Halilintar Nurdin de ses fonctions à l’hôtel en raison des violations sérieuses de certaines dispositions de la convention collective de travail. Elle lui reproche notamment d’avoir:
    • — incité d’autres employés à faire grève en plaçant une affiche qui a un rôle d’intimidation;
    • — invité des personnes qui n’étaient pas des employés du Shangri-la à une réunion d’orientation sans en informer la direction au préalable;
    • — humilié le directeur général et sa secrétaire par la déclaration qu’il a faite le 8 décembre 2000;
    • — accompli des actes dérangeants qui ont suscité un sentiment de mécontement et de méfiance parmi les employés du Shangri-la et qui ont troublé la paix du travail.
  7. 347. Le gouvernement souligne que la suspension en question repose sur l’article 47.2.3 de la convention collective de travail en vigueur à l’hôtel Shangri-la, qui stipule que tout employé du Shangri-la qui viole sérieusement les dispositions de la convention et des règlements en vigueur en matière d’emploi peut être licencié sans autre. Le même jour (22 décembre 2000), près de 500 employés affiliés au SPMS se sont mis en grève et ont manifesté à l’hôtel Shangri-la. Les grévistes ont occupé l’hôtel, fermé toutes les entrées de l’hôtel et fouillé toutes les personnes qui pénétraient dans l’hôtel ou qui en sortaient. Ces actes ont effrayé les clients. La direction a fermé l’hôtel du 22 au 26 décembre 2000 à cause de ces actions.
  8. 348. Le gouvernement dément par ailleurs l’information selon laquelle des fonctionnaires du Département de la main-d’œuvre auraient reçu pour 5 500 000 roupies de pots-de-vin. Cette somme a en fait été envoyée à M. Nefo Dradjati, directeur du Département des ressources humaines du Shangri-la, à titre d’indemnité de licenciement à l’attention de M. Nuril Fuadi, dont l’affaire était traitée par la Commission régionale de règlement des conflits du travail le 1er septembre 2000. Certains disaient que son affaire se solderait
    • par une d’indemnité de licenciement. Le montant de cette indemnité a été fixé à 5 500 000 roupies. Toutefois, M. Nuril Fuadi ayant fait appel devant une Cour supérieure, cette indemnité n’a pas encore été versée. Aucun des fonctionnaires du Département de la main-d’œuvre n’a reçu de l’argent.
  9. 349. Le gouvernement explique l’évacuation des travailleurs par les forces de police par le fait que les employés affiliés au SPMS avaient occupé l’hôtel. La police a mené une enquête parce qu’elle soupçonnait certains d’avoir commis une action criminelle dans l’hôtel. Entre-temps, près de 20 membres du SPMS et le représentant de l’UITA en Indonésie, Mme Hemasari Dharmabumi, ont été appréhendés et incarcérés pendant une journée dans le simple but d’obtenir des informations sur la chronologie de l’action criminelle suspectée.
  10. 350. Le gouvernement fait ensuite référence à un courrier qui aurait été envoyé par la direction à un certain nombre de membres du SPMS pour leur enjoindre de quitter leur syndicat. Selon le gouvernement, au début du mois de janvier 2001, la direction aurait envoyé une lettre aux employés qui avaient participé à la grève illégale et à la manifestation et l’occupation de l’hôtel pour leur dire qu’ils avaient commis une violation sérieuse des dispositions de la convention collective de travail et que leurs cas seraient traités par le bureau de district du Département de la main-d’œuvre.
  11. 351. En revanche, les gardes de la sécurité de l’hôtel n’ont en aucun cas agressé M. Zulharman le 20 février 2001. Ce qui s’est passé c’est que M. Zulharman s’est battu avec une personne dont l’identité n’a pas été dévoilée et qui n’avait absolument rien à voir avec les événements qui se sont produits à l’hôtel Shanghri-la.
  12. 352. Le gouvernement précise que l’affaire de l’hôtel Shangri-la s’est soldée par une demande de licenciement de 580 travailleurs venant de la direction. Cette demande de licenciement concerne les cas de 420 travailleurs et de 159 travailleurs soumis à la Commission centrale de règlement des conflits du travail, et le cas d’une personne (M. Halilintar Nurdin) soumis à la Commission régionale de règlement des conflits du travail. Ces deux commissions ont autorisé l’employeur à licencier les travailleurs qui n’avaient pas encore démissionné de leur propre initiative parce qu’elles estimaient que l’occupation du hall pouvait troubler les activités de l’hôtel et même occasionner des pertes pour l’employeur tant sur le plan moral que sur le plan matériel. Si la commission régionale a estimé que les actions commises par M. Halilintar en sa qualité de dirigeant syndical pouvaient être considérées comme un délit grave, la commission centrale a estimé quant à elle que les actions des travailleurs qui étaient de sa compétence ne pouvaient pas être considérées comme tels, et qu’ils avaient droit de ce fait à des indemnités de licenciement et d’ancienneté ainsi qu’à un dédommagement au titre des dispositions du règlement ministériel en vigueur.
  13. 353. En conclusion, le gouvernement déclare qu’il s’efforce d’améliorer le climat des relations professionnelles, notamment en élaborant trois projets de lois, dont l’un (la loi de 2000 sur les syndicats) a déjà été promulgué. Le projet de loi sur le règlement des conflits du travail est actuellement en discussion au Parlement. Le gouvernement s’efforce également d’améliorer la composition de la commission centrale. Toutefois, l’Indonésie étant encore dans une période de transition, il y a beaucoup d’obstacles à ce processus d’amélioration. Pour finir, le gouvernement précise qu’il enverra en temps voulu sa réponse aux nouvelles allégations formulées par l’UITA dans sa communication du 24 juillet 2001.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 354. Le comité note que les allégations formulées dans ce cas concernent les licenciements massifs de membres du Syndicat des travailleurs indépendants de l’hôtel Shangri-la (SPMS), une organisation affiliée à l’organisation plaignante, à la suite du mouvement de grève mené par des employés de l’hôtel. Les allégations ont également trait à une intervention violente des forces de police visant à briser le mouvement de grève et à évacuer les grévistes du hall de l’hôtel, qui se serait soldée par l’arrestation et la détention d’une vingtaine de syndicalistes. Les allégations concernent enfin l’agression physique dont le trésorier du SPMS aurait été victime par le chef des gardes du corps de l’hôtel et la relaxe par la police de l’un de ses agresseurs sans aucune inculpation.
  2. 355. S’agissant de l’allégation concernant les licenciements massifs de membres du SPMS à la suite du mouvement de grève mené à l’hôtel Shangri-la en décembre 2000, le comité note que, d’après la communication la plus récente de l’organisation plaignante, près de 500 employés de l’hôtel auraient été licenciés. Le comité fait remarquer que, d’après le gouvernement, la direction de l’hôtel Shangri-la aurait adressé aux commissions centrale et régionale de règlement des conflits du travail une demande de licenciement pour 580 travailleurs impliqués dans le mouvement de grève et que ces deux commissions auraient autorisé l’employeur à licencier ceux parmi ces travailleurs qui n’avaient pas encore démissionné de leur propre initiative. Le comité note également que, d’après le gouvernement, les travailleurs qui ont été licenciés l’ont été parce que leurs actions ont été considérées comme des délits, mais des délits mineurs, ce qui leur donnait droit à une indemnité de licenciement, à une commission et à un dédommagement.
  3. 356. Le comité croit comprendre, à partir des informations dont il dispose, que les 580 membres du SPMS licenciés par la direction de l’hôtel Shangri-la l’ont été en raison de leur participation au mouvement de grève fin décembre 2000. Aucun des éléments dont il dispose ne lui donne à penser que ce mouvement de grève était illégal. L’industrie hôtelière n’est pas un service essentiel au sens strict du terme et dans lequel les grèves pourraient être interdites. En outre, les arguments invoqués par les commissions de règlement des conflits du travail, à savoir que l’occupation du hall de l’hôtel par des syndicalistes en grève aurait perturbé les activités de l’hôtel et aurait occasionné à l’employeur des pertes aussi bien matérielles que morales, ne constituent pas, aux yeux du comité, des motifs suffisants pouvant justifier le licenciement des syndicalistes concernés. A cet égard, le comité attire l’attention du gouvernement sur le principe selon lequel le licenciement d’un travailleur pour fait de grève, qui est une activité syndicale licite, constitue une grave discrimination en matière d’emploi et est contraire à la convention no 98. Quand des syndicalistes ou des dirigeants syndicaux sont licenciés pour avoir exercé leur droit de grève, le comité ne peut s’empêcher de conclure qu’ils sont sanctionnés pour leur activité syndicale et font l’objet d’une discrimination antisyndicale. [Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 591 et 592.] Par ailleurs, il n’apparaît pas qu’une protection suffisante contre les actes de discrimination antisyndicale visés par la convention no 98 soit accordée par une législation permettant en pratique aux employeurs, à condition de verser l’indemnité prévue par la loi pour tous les cas de licenciements injustifiés, de licencier un travailleur si le motif réel en est son affiliation ou son activité syndicale. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 707.] A cet égard, le comité note que, selon l’organisation plaignante, seulement 232 membres du SPMS auraient officiellement démissionné de leurs fonctions à l’hôtel, tandis que 273 autres continueraient de réclamer leur réintégration. Notant que le gouvernement n’a pas fait parvenir ses observations à cet égard, le comité lui demande de préciser le nombre des membres du SPMS ayant été licenciés qui réclament leur réintégration dans leurs fonctions à l’hôtel Shangri-la; il demande également au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour obtenir la réintégration de ces personnes dans leurs fonctions si elles le souhaitent.
  4. 357. Pour ce qui est de l’allégation selon laquelle l’intervention policière susmentionnée du 26 décembre 2000 se serait soldée par l’arrestation et l’incarcération d’une vingtaine de syndicalistes, y compris le représentant de l’UITA en Indonésie, le comité note que, selon le gouvernement, 20 membres du SPMS et le représentant de l’UITA en Indonésie ont bien été appréhendés et incarcérés pour une journée dans le simple but d’obtenir des informations sur la chronologie des actions criminelles présumées qui se seraient produites à l’hôtel. Le comité ne voit pas quelles activités criminelles avaient bien pu être commises par des syndicalistes qui occupaient le hall d’un hôtel dont les clients et les employés avaient tous été évacués par la direction quelques jours auparavant. A cet égard, le comité rappelle au gouvernement que l’arrestation et la détention de dirigeants syndicaux et de syndicalistes dans l’exercice d’activités syndicales légitimes, même si c’est pour une courte période, constituent une violation des principes de la liberté syndicale. En outre, les mesures privatives de liberté prises contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités syndicales, même s’il ne s’agit que de simples interpellations ou interrogatoires de courte durée, constituent un obstacle à l’exercice des droits syndicaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 70 et 77.]
  5. 358. S’agissant de l’agression dont M. Muhammed Zulharman, trésorier du syndicat, aurait été victime de la part de l’un des gardes du corps de l’hôtel et de la relaxe par la police de l’un de ses agresseurs sans inculpation, le gouvernement affirme que les gardes de l’hôtel n’ont pas agressé M. Zulharman le 20 février 2001. Selon le gouvernement, M. Zulharman s’est battu avec une personne dont l’identité n’a pas été dévoilée et qui n’avait absolument rien à voir avec les événements qui se sont produits à l’hôtel Shangri-la. Le comité note néanmoins que le gouvernement ne nie pas que M. Zulharman a été agressé et qu’il a dû être hospitalisé pour cette raison. A cet égard, le comité rappelle que les droits des organisations de travailleurs et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et qu’il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. En outre, lorsque se sont produites des atteintes à l’intégrité physique ou morale, le comité a considéré qu’une enquête judiciaire indépendante devrait être effectuée sans retard, car cette méthode est particulièrement appropriée pour éclaircir pleinement les faits, déterminer les responsabilités, sanctionner les coupables et prévenir la répétition de telles actions. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 47 et 53.] Par conséquent, le comité invite le gouvernement à faire effectuer sans retard une enquête judiciaire indépendante sur l’agression physique dont M. Zulharman a été victime le 20 février 2001 pour éclaircir pleinement les faits, déterminer les responsabilités, sanctionner les coupables et prévenir la répétition de telles actions. Il demande au gouvernement de le tenir informé des résultats d’une telle enquête.
  6. 359. S’agissant de l’allégation selon laquelle la direction aurait soudoyé un représentant du ministère du Travail afin de faciliter le licenciement du président du syndicat, M. Halilintar Nurdin, le comité note que le gouvernement réfute catégoriquement cette allégation. Le comité souhaite en conséquence obtenir davantage de précisions de la part du gouvernement et de l’organisation plaignante sur cette question.
  7. 360. Afin de se prononcer sur ce cas en toute connaissance de cause, le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir une copie de la convention collective de travail (CCT) en vigueur au moment du conflit à l’hôtel Shangri-la, ainsi que les commentaires des organisations nationales d’employeurs et de travailleurs impliquées dans ce conflit.
  8. 361. Notant enfin que le gouvernement n’a pas répondu aux nouvelles allégations de l’organisation plaignante contenues dans des communications datées du 24 juillet et des 15 et 16 octobre 2001, le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir ses observations à ce sujet sans tarder.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 362. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande au gouvernement de préciser le nombre de membres du Syndicat des travailleurs indépendants de l’hôtel Shangri-la (SPMS) qui ont été licenciés à la suite de leur participation au mouvement de grève et qui réclament leur réintégration dans leurs fonctions à l’hôtel Shangri-la. Il demande également au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour obtenir la réintégration de ces personnes dans leurs fonctions si elles le souhaitent.
    • b) Le comité rappelle au gouvernement que l’arrestation et la détention de dirigeants syndicaux et de syndicalistes dans l’exercice d’activités syndicales légitimes, même si c’est pour une courte période, constituent une violation des principes de la liberté syndicale, et que les mesures privatives de liberté prises contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités syndicales, même s’il ne s’agit que de simples interpellations ou interrogatoires de courte durée, constituent un obstacle à l’exercice des droits syndicaux.
    • c) Le comité invite le gouvernement à faire effectuer sans retard une enquête judiciaire indépendante sur l’agression physique dont M. Muhammed Zulharman, trésorier du SPMS, a été victime le 20 février 2001 pour éclaircir pleinement les faits, déterminer les responsabilités, sanctionner les coupables et prévenir la répétition de telles actions. Il demande au gouvernement de le tenir informé des résultats d’une telle enquête.
    • d) Le comité demande au gouvernement ainsi qu’à l’organisation plaignante de fournir des précisions additionnelles concernant l’allégation de corruption entourant le licenciement de M. Halilintar Nurdin, président du SPMS.
    • e) Afin de se prononcer sur ce cas en toute connaissance de cause, le comité demande au gouvernement de fournir une copie de la convention collective de travail (CCT) en vigueur au moment du conflit à l’hôtel Shangri-la, ainsi que tout commentaire des organisations nationales de travailleurs et d’employeurs impliquées dans ce conflit.
    • f) Le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir sans retard ses observations sur les nouvelles allégations présentées par l’organisation plaignante dans ses communications des 24 juillet, 15 et 16 octobre 2001.
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