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Report in which the committee requests to be kept informed of development - Report No 331, June 2003

Case No 2162 (Peru) - Complaint date: 27-SEP-01 - Closed

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  1. 643. La plainte figure dans des communications de la Fédération nationale des travailleurs de l’industrie du papier, des industries chimiques et similaires du Pérou (FENATPAQUISP) datées du 27 septembre et du 9 novembre 2001. Cette organisation a fourni des informations complémentaires par une communication datée du 8 décembre 2001.
  2. 644. Le gouvernement a envoyé ses observations par une communication du 22 janvier 2003.
  3. 645. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

A. Allégations du plaignant
  1. 646. Dans des communications du 27 septembre et du 9 novembre 2001, la Fédération nationale des travailleurs de l’industrie du papier et des industries chimiques et similaires du Pérou (FENATPAQUISP) allègue que le 25 mai 2001, le syndicat des travailleurs de «Manufacturera de Papeles y Cartones del Perú SA – Planta Chillón» a présenté aux autorités du travail le dossier de sa constitution, en stricte conformité avec la législation. Le 29 mai 2001, à la demande de l’entreprise, une réunion a eu lieu avec le comité exécutif du syndicat et, dans sa grande générosité, l’entreprise a même offert un espace pour installer une vitrine murale. Cependant, à la grande surprise de tous les travailleurs, le jour suivant, 30 mai 2001, les dirigeants et les organisateurs du syndicat ont été empêchés, de manière unilatérale, d’entrer sur leur lieu de travail, et 15 lettres notariées de licenciement ont été sélectivement envoyées, notamment à six membres du comité exécutif du syndicat (qui compte sept personnes).
  2. 647. L’organisation plaignante fait savoir que, dans le cadre des procédures judiciaires lancées par les licenciés (qui, conformément à l’article 31 du décret no 25593, jouissent de l’immunité syndicale prévue par la loi «depuis la présentation de la demande d’enregistrement (du syndicat) et jusqu’à trois mois après»), l’entreprise a avancé le faux argument selon lequel elle n’était pas au courant de la constitution du syndicat et que les licenciements répondaient à des motifs économiques, alors qu’en fait le capital de l’entreprise était passé de 122 à 132 millions de nouveaux sols entre le 8 septembre 1999 et le 26 juillet 2002.
  3. 648. L’organisation plaignante allègue par ailleurs que non seulement l’entreprise fait pression sur les travailleurs et exerce sur eux une répression, mais encore qu’elle leur fait subir un chantage au licenciement pour qu’ils démissionnent du syndicat, comme en témoignent les lettres datées du 5 juillet 2001 par lesquelles trois travailleurs ont effectivement démissionné.
  4. 649. Par ailleurs, l’organisation plaignante allègue des actes d’ingérence de la part de l’entreprise dans les affaires internes du syndicat. Elle fait savoir par exemple qu’après le licenciement des six dirigeants syndicaux l’assemblée du syndicat a élu des sous-secrétaires et a présenté un projet de négociation collective. C’est alors que l’entreprise a fait pression sur les dirigeants élus pour qu’ils démissionnent du syndicat; en fait, tous les élus ont démissionné (comme on peut le constater dans les lettres de démission qui présentent toutes le même libellé et ont été tapées sur la même machine). Par ailleurs, l’entreprise a rejeté le projet de négociation collective, commettant ainsi un nouvel acte antisyndical et prouvant sa mauvaise foi.
  5. 650. Dans une communication du 8 décembre 2001, l’organisation plaignante fait savoir que le 19 octobre 2001, un gérant de l’entreprise a remis au ministère du Travail 29 lettres notariées de démission du syndicat. Ce fait met en évidence l’ingérence directe de l’entreprise dans les affaires syndicales. En outre, l’administration de l’entreprise a intensifié le comportement antisyndical dont elle avait fait preuve en faisant pression d’une manière permanente sur les syndicalistes pour qu’ils démissionnent du syndicat; elle les convoque pour les menacer dans les termes suivants: ou ils démissionnent ou ils sont licenciés. Devant l’imminence de la perte de leur emploi, les syndicalistes choisissent de démissionner.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 651. Le gouvernement renvoie aux commentaires de l’entreprise «Manufacturera de Papeles y Cartones del Perú SA» selon lesquels: 1) entre juillet et octobre 2001, les travailleurs qui ont envoyé leur lettre de démission au syndicat auquel ils appartenaient ont envoyé également une copie de cette lettre à l’entreprise; 2) l’entreprise nie absolument avoir fait ingérence directe dans l’organisation syndicale; 3) elle n’a exercé aucune pression sur les travailleurs syndiqués pour qu’ils renoncent à être affiliés au syndicat; 4) par ailleurs, depuis l’an 2000, l’entreprise traverse une grave crise économique à cause de laquelle, le 10 juin 2002, elle a été déclarée insolvable par INDECOPI. Par conséquent, toutes les dettes afférentes à la main-d’œuvre, antérieures à cette date, devront être présentées à l’assemblée des créanciers et un représentant de la main-d’œuvre a déjà été choisi pour se rendre devant cette assemblée.
  2. 652. Le gouvernement estime que, dans le présent cas, si on procède à un examen approfondi des faits, la plainte devrait être déclarée infondée. Il rappelle que, dans son article 28, la Constitution politique indique que l’Etat reconnaît le droit d’association, de négociation collective et de grève et qu’il garantit leur exercice démocratique. Cet article 1) garantit la liberté syndicale; 2) encourage la négociation collective et les formes de solutions pacifiques des conflits du travail. La convention collective fait force de loi dans le cadre de la concertation; 3) réglemente le droit de grève et veille à ce que ce dernier soit exercé compte tenu de l’intérêt social et en précise les exceptions et limitations. De même, l’article 2 de la loi no 25593, qui est la loi des relations collectives de travail, dispose que l’Etat reconnaît aux travailleurs le droit de s’organiser sans autorisation préalable en vue de l’étude, du développement, de la protection et de la défense de leurs droits et de leurs intérêts et en vue du progrès social, économique et moral des membres de l’organisation. Cette norme protège les membres des organisations syndicales de toute coercition exercée par l’employeur. A cet égard, l’article 3 indique que l’affiliation à un syndicat est libre et volontaire. Il est interdit d’assujettir l’emploi d’un travailleur à son affiliation, sa non-affiliation ou à sa démission d’un syndicat, et de l’obliger à faire partie d’un syndicat ou de l’empêcher de le faire. Par ailleurs, l’article 4 dit que l’Etat, les employeurs et les représentants des uns et des autres doivent s’abstenir de toute action tendant à contraindre, à limiter ou à réduire, de quelque manière que ce soit, le droit d’organisation des travailleurs, d’intervenir de quelque manière que ce soit dans la création, l’administration ou le soutien aux organisations syndicales qu’ils constituent». De même, l’alinéa a) de l’article 29 du décret suprême no 003-97-TR, texte unique du décret législatif no 728, loi sur la productivité et la compétitivité des travailleurs, déclare nul et non avenu le licenciement effectué pour motif d’affiliation à un syndicat ou participation à des activités syndicales. Ainsi, les actes de licenciement qui affectent la liberté syndicale sont frappés de nullité. Par conséquent, le dernier paragraphe de l’article 34 de cette même loi indique qu’en cas de licenciement nul et non avenu, si la plainte du travailleur est déclarée fondée, il sera réintégré à son poste de travail, à moins que le jugement n’opte pour l’indemnité prévue par l’article 38.
  3. 653. En ce qui concerne les lois précitées, le gouvernement ajoute que l’autorité administrative du travail contrôle leur application par le biais de l’inspection du travail, qui peut avoir lieu sur simple dénonciation d’un travailleur qui s’estime lésé.
  4. 654. De même, les travailleurs ont toute latitude pour entamer une poursuite judiciaire s’ils estiment avoir été lésés dans leurs droits en matière de travail. C’est pourquoi il est important de préciser qu’il est nécessaire que ce soit le pouvoir judiciaire qui se prononce en ce qui concerne les plaintes dont il aurait été saisi par les travailleurs.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 655. Le comité observe que les allégations concernent: 1) le licenciement de 15 syndicalistes (dont six dirigeants syndicaux) du syndicat des travailleurs de «Manufacturera de Papeles y Cartones del Perú SA – Planta Chillón» quelques jours après la constitution du syndicat; 2) des menaces de licenciement à l’encontre des travailleurs affiliés qui ne démissionneraient pas du syndicat (plus de 29 travailleurs ont démissionné) et l’exercice de pressions, également en vue de leur démission, à l’encontre de six dirigeants qui ont remplacé les dirigeants licenciés (démissions que l’entreprise a obtenues); 3) le refus de l’entreprise de négocier un projet de convention collective. Le comité prend note des informations transmises par le gouvernement relatives aux dispositions juridiques et aux mécanismes qui assurent une protection contre les actes contraires à la liberté syndicale et qui, dans ce cas, doivent être étudiés par le pouvoir judiciaire.
  2. 656. En ce qui concerne l’allégation relative au licenciement des 15 syndicalistes (y compris les six dirigeants syndicaux) quelques jours après la constitution d’un syndicat, le comité prend note du fait que l’entreprise indique qu’à la suite d’une crise économique elle a été déclarée officiellement insolvable en juin 2002. Cependant, le comité fait remarquer que ces licenciements datent de mai 2001 et que le gouvernement se contente de signaler qu’il existe des recours judiciaires dans la législation. Le comité exprime par conséquent sa préoccupation devant la gravité des allégations concernant des licenciements antisyndicaux, et il souhaite attirer l’attention sur le principe selon lequel nul ne doit être licencié ou faire l’objet d’autres mesures préjudiciables en matière d’emploi, en raison de son affiliation syndicale ou de l’exercice d’activités syndicales légitimes, et il importe que tous les actes de discrimination en matière d’emploi soient interdits et sanctionnés dans la pratique. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 1996, paragr. 696.] Le comité observe que les travailleurs licenciés ont engagé des procédures judiciaires et il espère que lesdites procédures aboutiront très prochainement et que si les personnes concernées ne peuvent être réintégrées dans leur poste de travail (notamment parce que l’entreprise ne peut poursuivre ses activités) elles seront indemnisées entièrement, et il demande au gouvernement de le tenir informé des jugements qui seront rendus.
  3. 657. En ce qui concerne les menaces alléguées de licenciement des travailleurs affiliés n’ayant pas démissionné du syndicat (plus de 29 travailleurs ont démissionné), et les pressions alléguées (également pour qu’ils démissionnent) exercées à l’encontre des six dirigeants syndicaux qui ont remplacé les dirigeants licenciés (démissions que l’entreprise a obtenues), le comité prend note du fait que l’entreprise dément tout exercice de pression à l’encontre des travailleurs affiliés pour qu’ils démissionnent, et compte tenu du caractère contradictoire des deux versions, il demande au gouvernement d’entreprendre d’urgence une enquête à cet égard; au cas où la véracité de ces faits serait confirmée, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour appliquer les sanctions prévues par la législation et pour empêcher que de tels actes ne se répètent. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  4. 658. Enfin, en ce qui concerne l’allégation relative au refus de l’entreprise de négocier un projet de convention collective, le comité observe que l’entreprise se trouve, à la suite d’une crise économique, dans une situation ayant conduit à l’institution d’une assemblée des créanciers. Le comité demande au gouvernement, si l’entreprise est en mesure de poursuivre ses opérations, de prendre les mesures nécessaires pour encourager et promouvoir la négociation collective en son sein.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 659. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des jugements qui seront rendus en ce qui concerne le licenciement de syndicalistes dans l’entreprise «Manufacturera de Papeles y Cartones del Perú SA – Planta Chillón», quelques jours après la constitution du syndicat, et il espère que si les personnes concernées ne peuvent être réintégrées dans leur poste de travail (notamment parce que l’entreprise ne peut poursuivre ses activités) elles seront indemnisées entièrement.
    • b) Le comité demande au gouvernement qu’il soit procédé de toute urgence à une enquête sur les menaces alléguées de licenciement des travailleurs affiliés n’ayant pas démissionné et sur les pressions alléguées exercées à l’encontre des six dirigeants syndicaux afin qu’ils démissionnent; si le bien-fondé des allégations est confirmé, le comité demande que les mesures nécessaires soient prises pour appliquer les sanctions prévues par la législation et empêcher que de tels actes ne se répètent. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • c) Le comité prie le gouvernement, si l’entreprise «Manufacturera de Papeles y Cartones del Perú SA – Planta Chillón» est en mesure de poursuivre ses activités, de prendre les mesures nécessaires pour encourager et promouvoir la négociation collective au sein de l’entreprise.
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