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- 353. Les organisations plaignantes ont présenté leur plainte dans des communications des 1er décembre 2005 et 13 janvier 2006.
- 354. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication du 12 septembre 2006. Dans une communication du 2 octobre 2006, il a transmis les commentaires de l’entreprise UNILEVER à propos de la plainte.
- 355. Le Brésil a ratifié la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (nº 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971, mais il n’a pas ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
A. Allégations des plaignants
A. Allégations des plaignants- 356. Dans leur communication du 1er décembre 2005, les organisations plaignantes affirment que l’entreprise IGL Industrial Ltda, qui appartient au groupe multinational UNILEVER, ne respecte pas les garanties relatives à la liberté syndicale prévues dans les conventions nos 87 et 98.
- 357. Les organisations plaignantes indiquent que le Syndicat unifié des travailleurs de l’industrie chimique – Section régionale de Vinhedo représente près de 2 000 travailleurs de l’industrie chimique à la base territoriale de Vinhedo, dont 822 sont affiliés au syndicat. Elles ajoutent que sont affiliés au syndicat 313 des 524 travailleurs de l’entreprise IGL Industrial Ltda, soit un taux de syndicalisation de 59,70 pour cent très supérieur à la moyenne enregistrée dans le pays.
- 358. Concrètement, les organisations plaignantes affirment que ces vingt dernières années l’action de l’entreprise s’est caractérisée par le recours à des pratiques autoritaires et par sa réticence au dialogue social, ce que démontrent les nombreux conflits avec le syndicat qui ont été alimentés pendant cette période.
- 359. A titre d’exemple, les plaignants indiquent qu’en 1991 une grève de trois jours a débouché sur l’intervention de la force de choc de la police militaire de l’Etat de São Paulo, à la demande de l’entreprise, afin de réprimer les grévistes qui manifestaient devant les locaux de l’entreprise. Au cours des années quatre-vingt-dix, le syndicat a promu plusieurs grèves de quelques heures. Depuis 2001, il a paralysé à trois reprises, pendant une journée, la chaîne de production de l’entreprise pour faire aboutir des revendications salariales, pour obtenir le renouvellement de conventions collectives et pour protester contre les licenciements collectifs effectués par l’entreprise ces dernières années. IGL Industrial Ltda a réagi à ces mesures par des menaces téléphoniques à l’encontre des travailleurs, et a filmé les manifestations pour en identifier les participants et exercer des pressions sur eux. De plus, l’entreprise infiltre systématiquement des chefs dans les assemblées des travailleurs et interdit l’accès des dirigeants syndicaux à l’usine. Lorsqu’elle les y autorise, ils doivent être accompagnés des agents de sécurité de l’entreprise, ce qui entrave les contacts avec les travailleurs.
- 360. Pendant la dernière grève menée par le syndicat, en mars 2005, l’entreprise a ordonné au service de sécurité de couper des clôtures afin que les briseurs de grève puissent éviter le piquet de grève. De plus, des gérants et des coordinateurs ont intimidé les salariés, y compris en dehors de l’usine, pour qu’ils aillent travailler.
- 361. Les organisations plaignantes affirment aussi que l’entreprise a institué une forme propre de représentation des salariés sur le lieu de travail, qui est parallèle au syndicat, au moyen du «Groupe de travail pour améliorer l’ambiance». Ce groupe tend à jouer le rôle d’un syndicat d’entreprise – figure juridique qui n’existe pas dans le droit syndical brésilien – constitué sous les auspices de la direction d’IGL Industrial Ltda et docile à ses souhaits et à ses ordres. Les organisations plaignantes soulignent en outre qu’UNILEVER refuse de reconnaître le Comité syndical national d’UNILEVER Brésil qu’ont formé les syndicats représentatifs de toutes les usines en place sur le territoire national.
- 362. Enfin, la mesure la plus récente et la plus grave de l’entreprise, qui a amené à consulter la Commission sociale et du travail du MERCOSUR et à soumettre la présente plainte, a été la campagne de désaffiliation syndicale de ses salariés. Cette campagne a commencé en janvier 2005 par la distribution de formulaires de désaffiliation. Le point culminant en a été, en mars de la même année, la mise en service d’un numéro d’appel gratuit (0800) qui donnait notamment la possibilité de demander la désaffiliation du syndicat. Une fois cette option choisie, une personne au service de l’entreprise aidait le travailleur à remplir et à envoyer la demande de désaffiliation. Cette situation, qui a duré environ un mois, a constitué selon le plaignant une grave ingérence dans les activités licites du syndicat.
- 363. En conclusion, les organisations plaignantes demandent que l’on recommande au gouvernement du Brésil de garantir le libre exercice de la manifestation syndicale, à l’intérieur et à l’extérieur des locaux de l’entreprise IGL Industrial Ltda, la liberté d’affiliation au syndicat, la liberté de réaliser des piquets de grève pacifiques sans ingérence de l’entreprise, et la reconnaissance par l’entreprise du Comité syndical national susmentionné. Elles demandent aussi que l’on recommande au gouvernement de veiller à ce que l’entreprise n’ait pas recours à des pratiques incitant à se désaffilier du syndicat, et à ce qu’elle s’abstienne de filmer ou de photographier les manifestations et assemblées des travailleurs sans le consentement individuel préalable de ces derniers et sans celui du syndicat.
- B. Réponse du gouvernement
- 364. Dans sa communication du 12 septembre 2006, le gouvernement indique que le Syndicat unifié des travailleurs de l’industrie chimique – Section régionale de Vinhedo avait porté devant le Point de contact national au Brésil une plainte contre UNILEVER pour violation des Principes directeurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour les entreprises multinationales. Cette plainte était motivée par le fait que l’entreprise avait annoncé la fermeture de l’unité de production de Vinhedo et son transfert dans la municipalité d’Ipojuca, décision qui n’avait pas été communiquée aux représentants des travailleurs.
- 365. Sous la forme d’une demande d’information, la CUT a signalé en mai 2005 à la Commission sociale et du travail du MERCOSUR des pratiques antisyndicales de l’entreprise – en particulier, distribution d’un formulaire de désaffiliation intitulé «Exclusion d’affiliés au syndicat» et mise en service d’un numéro d’appel gratuit du Département des ressources humaines permettant aux intéressés de demander leur exclusion de la liste des cotisations syndicales à retenir sur les salaires. Ce fait, qui avait été précédemment dénoncé devant le ministère du Travail et de l’Emploi afin qu’il intervienne, fait l’objet de la présente plainte.
- 366. Le gouvernement indique que le ministère du Travail et de l’Emploi a envoyé un enquêteur pour que ce dernier rencontre les parties. De plus, le ministère, par un courrier, a demandé à UNILEVER de transmettre ses commentaires au sujet de la plainte.
- 367. Lors d’une réunion avec l’enquêteur, les représentants du syndicat ont fait encore état, d’une façon générale, des éléments déjà contenus dans la plainte et en ont signalé de nouveaux. En particulier, ils ont indiqué que l’entreprise poursuit une politique antisyndicale qui, même s’il n’est pas toujours possible de la démontrer avec des données objectives, vise constamment à saper le rôle de représentation du syndicat. De plus, les dirigeants de l’entreprise exercent des coercitions sur les travailleurs pendant les heures de travail pour que ceux-ci se désaffilient du syndicat. Jusqu’en 2004, les dirigeants syndicaux qui travaillaient dans l’entreprise devaient être accompagnés d’agents de sécurité pour entrer dans les locaux de l’entreprise; plus tard, après la dénonciation de cette pratique, l’entreprise a appliqué la même mesure à tous les salariés qui se rendaient dans les locaux de l’entreprise en dehors des horaires de travail. Le syndicat ne participe pas aux négociations sur la participation aux résultats de l’entreprise, ce que prévoit la loi. L’entreprise avait mis en place un service téléphonique interne permettant aux travailleurs de demander leur désaffiliation du syndicat; ce service a été supprimé après la plainte du syndicat. L’entreprise promeut des instances de discussion avec les travailleurs. Elles seraient positives si l’on ne refusait pas que le syndicat y participe de façon organisée; les plaignants mentionnent par exemple le Programme ouvert d’écoute et le Groupe de travail pour améliorer l’ambiance. Ils affirment enfin que l’entreprise ne communique pas copie au syndicat des procès-verbaux des réunions de la Commission interne des accidents du travail.
- 368. Lors d’une réunion avec l’enquêteur envoyé par le ministère du Travail et de l’Emploi, les représentants de l’entreprise ont nié l’existence de pratiques, voilées ou explicites, visant à entraver l’action syndicale. Ils ont déclaré que des gardes de sécurité accompagnent dans les locaux de l’entreprise quiconque ne fait pas partie du personnel, qu’il s’agisse ou non de dirigeants syndicaux, ainsi que les salariés qui se rendent dans les locaux de l’entreprise en dehors de leurs heures de travail.
- 369. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle un numéro d’appel gratuit aurait été mis en service pour faciliter la désaffiliation des travailleurs, les représentants de l’entreprise ont indiqué qu’elle dispose d’un service téléphonique interne qui répond à plusieurs objectifs, dont celui de permettre aux travailleurs de demander que leur cotisation syndicale ne soit plus retenue sur leur salaire. Dans ce cas, on oriente les travailleurs pour qu’ils prennent d’abord contact avec le syndicat afin de formaliser leur désaffiliation. Les représentants de l’entreprise n’ont pas indiqué pourquoi ce service téléphonique avait été interrompu. A ce sujet, le gouvernement reproduit le texte d’une communication que le syndicat a porté à sa connaissance. Cette communication diffusée par l’entreprise, intitulée «Exclusion d’affiliés au syndicat», indique ce qui suit: «Pour demander votre exclusion de la liste des retenues sur la feuille de paie, appelez le 0800 du Département des ressources humaines puis adressez le document avec le numéro d’appel».
- 370. En ce qui concerne le «Groupe de travail pour améliorer l’ambiance», les représentants de l’entreprise ont indiqué qu’il a cessé d’exister en 2004. Cette initiative et d’autres analogues comme le «Programme ouvert d’écoute» (Programe Aberto Para Ouvir) permettent de communiquer avec les salariés pour discuter des mesures susceptibles d’améliorer la qualité de vie au travail. Tous les travailleurs peuvent y participer et les réunions ont lieu une fois par trimestre pendant les horaires de travail. Les représentants de l’entreprise ont précisé que cette activité étant réservée au personnel, les dirigeants syndicaux qui ne travaillent pas dans l’entreprise ne sont pas autorisés à y participer. A été créée plus tard la Global People Survey (étude d’ensemble sur les effectifs) dans un but analogue à celui du Groupe de travail pour améliorer l’ambiance. Les représentants de l’entreprise ont ajouté qu’il n’y avait pas de documents écrits sur la marche de ces programmes.
- 371. Enfin, le gouvernement souligne dans sa communication que le ministère du Travail et de l’Emploi, par le biais de la délégation régionale du travail à São Paulo, est pleinement habilité à enquêter sur toutes les infractions à la législation du travail et à faciliter la conciliation entre les parties par le dialogue social.
- Observations d’UNILEVER transmises
- par le gouvernement
- 372. Dans sa communication du 2 octobre 2006, le gouvernement a transmis les observations d’UNILEVER sur la plainte. L’entreprise indique qu’elle exerce ses activités au Brésil depuis quatre-vingts ans et qu’elle y occupe plus de 13 000 personnes dans ses treize usines. Son Code de principes sur ses activités prévoit le respect de tout type de représentation légitime des travailleurs et de leur droit d’association. L’entreprise croit au dialogue et reste constamment à l’écoute de ses salariés. UNILEVER indique que dans le pays il est en contact direct avec 15 syndicats et que le Syndicat unifié des travailleurs de l’industrie chimique – Section régionale de Vinhedo ne représente que 3,4 pour cent de l’ensemble de ses effectifs dans le pays. Il souligne que le taux élevé de syndicalisation dont le syndicat fait état suffit à lui seul pour mettre en doute les «pratiques antisyndicales et attitudes autoritaires de l’entreprise». UNILEVER réfute catégoriquement les accusations mentionnées dans la plainte et affirme avoir toujours veillé à la protection de l’intégrité physique de ses travailleurs et de son patrimoine, tout en respectant le libre exercice du droit de manifestation syndicale, même lorsque celui-ci a été exercé de façon agressive et violente.
- 373. A propos des allégations relatives à la campagne de désaffiliation syndicale, UNILEVER indique qu’en janvier 2005 il a mis en place à l’intention de ses travailleurs un nouveau service sur les ressources humaines. Il s’agit d’un numéro d’appel gratuit (0800) permettant à tous ses salariés de l’Amérique latine de s’informer et de solliciter des services concernant l’administration du personnel (par exemple, remboursement de frais médicaux, inscription à des programmes de formation, autorisation de retenir des cotisations sur le salaire). Ce service est assuré, sous la direction d’UNILEVER, par une entreprise sous-traitante. L’entreprise affirme que le syndicat déforme les faits lorsqu’il dit qu’un service a été mis en place en mars 2005 à des fins de désaffiliation syndicale. Ce service, qui a commencé en janvier, n’avait rien à voir avec la question syndicale. Les faits sont les suivants: en raison du nombre élevé de demandes d’information sur la façon de procéder à la désaffiliation d’un syndicat, désaffiliation qui entraîne la suspension de la retenue de la cotisation syndicale mensuelle sur le salaire, un fonctionnaire de l’entreprise sous-traitante, agissant de bonne foi mais en désaccord avec la direction d’UNILEVER, a pris l’initiative d’établir un formulaire d’orientation et de l’afficher afin de se faciliter la tâche. Cette communication a été retirée du panneau d’affichage le jour même et non un mois après comme l’affirme le syndicat. Une autre communication a été alors affichée au même endroit dans laquelle UNILEVER réaffirmait son respect de la liberté d’affiliation syndicale des travailleurs, ainsi que sa position à ce sujet qui figure dans le Code de principes. Le texte de cette communication a d’ailleurs été établi d’un commun accord avec le syndicat.
- 374. Au sujet de l’allégation relative au fonctionnement du Groupe de travail pour améliorer l’ambiance, UNILEVER précise que, toujours dans le souci de rester constamment à l’écoute de ses travailleurs, il a créé, développé et perfectionné plusieurs mécanismes à cette fin. A titre d’exemple, l’entreprise indique qu’en 1988 elle a créé le «canal va et vient», lequel a été modifié et adapté au fil des ans. Son objectif primordial n’a pas changé: informer les salariés et respecter leur opinion. L’élément d’information «va» consiste à renseigner les salariés sur l’évolution des activités économiques, entre autres par le biais de bulletins d’information et de réunions générales. L’élément d’écoute «vient» permet aux salariés d’exprimer librement leurs opinions et leurs revendications, d’obtenir des éclaircissements, de formuler des suggestions. Les initiatives dans ce sens ont revêtu de nombreuses formes: divers programmes («Parler avec le président», «Petit déjeuner avec le directeur»), et surtout une enquête menée il y a deux ans à laquelle 93 pour cent des personnes interrogées ont répondu. UNILEVER souligne que le Groupe de travail pour améliorer l’ambiance, qui a été créé en 1988, n’est qu’une des initiatives à cette fin et qu’il ne visait en aucune façon à entraver l’activité syndicale ou à s’y substituer.
- 375. Au sujet de la reconnaissance du Comité national syndical, UNILEVER affirme que le Syndicat unifié des travailleurs de l’industrie chimique – Section régionale de Vinhedo a revendiqué avec insistance sa représentation syndicale par le biais du Comité national syndical, lequel n’est actuellement constitué que de trois autres syndicats qui, ensemble, représentent 1,9 pour cent des travailleurs d’UNILEVER. Les onze autres syndicats, qui représentent 95 pour cent des effectifs, considèrent que cette initiative constitue une menace pour leur organisation. Ils ne reconnaissent pas le Comité national syndical comme représentant de leurs intérêts.
- 376. Enfin, UNILEVER joint à sa communication trois courriers de syndicats dans lesquels, en des termes très analogues, les secrétaires généraux respectifs de ces syndicats affirment que l’entreprise respecte les conventions collectives et les conventions de l’OIT.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 377. Le comité rappelle que les allégations du présent cas sont les suivantes: pratiques antisyndicales à l’encontre du Syndicat unifié des travailleurs de l’industrie chimique
- – Section régionale de Vinhedo (ci-après le syndicat); constitution à la demande de l’entreprise d’un organe de représentation des travailleurs, qui est parallèle au syndicat; non-reconnaissance du Comité syndical national; et pressions sur les travailleurs pour qu’ils se désaffilient du syndicat, dans l’entreprise IGL Industrial Ltda qui appartient au groupe multinational UNILEVER. Le comité dispose, outre des informations adressées par les plaignants et le gouvernement, des observations d’UNILEVER. Le comité note avec préoccupation que, d’une manière générale, le gouvernement se borne à transmettre les informations reçues des deux parties, sans formuler de jugement à ce sujet.
- Pratiques antisyndicales: intimidation
- à l’encontre de travailleurs syndiqués
- en raison de leur participation à
- des protestations et à des grèves
- 378. Le comité note que, selon les plaignants, ces vingt dernières années l’action d’UNILEVER s’est caractérisée par sa réticence au dialogue social et par la poursuite d’une politique antisyndicale. En particulier, le comité note que les plaignants font état de plusieurs pratiques antisyndicales – entre autres, l’entreprise a menacé par téléphone des travailleurs qui avaient participé à des grèves, filmé des manifestations pour identifier les participants et exercer des pressions sur eux, et infiltré des chefs dans les assemblées des travailleurs. Les plaignants affirment aussi que, lors d’une grève menée en mars 2005, l’entreprise a ordonné au service de sécurité de couper des clôtures afin que les briseurs de grève puissent éviter le piquet de grève et que, dans le même temps, le personnel de direction a intimidé les effectifs, y compris en dehors de l’usine, pour qu’ils aillent travailler.
- 379. Le comité note que les représentants de l’entreprise nient l’existence de pratiques, voilées ou explicites, visant à entraver l’action syndicale. Ils soulignent que le Code de principes de l’entreprise sur ses activités prévoit le respect de tout type de représentation légitime des travailleurs. Le comité note aussi que, de l’avis des représentants de l’entreprise, le taux élevé d’affiliation au syndicat (59,70 pour cent) suffit à lui seul pour mettre en doute les pratiques antisyndicales qui sont alléguées.
- 380. Le comité note les divergences qu’il y a entre les allégations des plaignants et celles des représentants de l’entreprise. A ce sujet, il constate avec regret que la réponse du gouvernement ne contient pas d’observations spécifiques sur les différentes pratiques antisyndicales alléguées, en particulier les menaces téléphoniques, le fait que des manifestations auraient été filmées et l’infiltration de chefs dans les assemblées des travailleurs. Le comité demande au gouvernement d’enquêter sur ces allégations et de l’informer en détail à ce sujet.
- 381. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle les dirigeants syndicaux seraient accompagnés par des agents de sécurité dans les locaux de l’entreprise, le comité note que, d’après les déclarations des représentants de l’entreprise, cette procédure s’applique actuellement à quiconque ne fait pas partie du personnel de l’entreprise, qu’il s’agisse ou non de dirigeants syndicaux, ainsi qu’aux salariés qui se rendent dans les locaux de l’entreprise en dehors de leurs heures de travail. Les plaignants ont confirmé l’existence de cette procédure. Le comité rappelle que, pour que le droit syndical ait vraiment un sens, les organisations de travailleurs doivent être en mesure de promouvoir et de défendre les intérêts de leurs membres en bénéficiant des facilités nécessaires au libre exercice des activités. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 1106.] Le comité est également d’avis que l’accompagnement de personnes par des effectifs de sécurité pour accéder à l’entreprise pourrait être considéré comme une mesure nécessaire dans certaines circonstances. Cependant, compte tenu du fait qu’une telle procédure ne devrait pas donner lieu à une quelconque ingérence dans les affaires internes des syndicats ou dans la capacité des représentants syndicaux de communiquer librement avec les travailleurs afin de les informer des avantages que la syndicalisation peut présenter pour eux, le comité prie le gouvernement de prendre des mesures afin d’assurer que, une fois sur le lieu de travail, les agents syndicaux bénéficient des facilités nécessaires afin de communiquer librement avec les travailleurs, sans ingérence de l’employeur et sans présence de l’employeur ou de gardes de sécurité. Il prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- Constitution à la demande de l’entreprise
- d’un organe de représentation des travailleurs,
- qui est parallèle au syndicat
- 382. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle l’entreprise a institué une forme propre de représentation des salariés sur le lieu de travail, qui est parallèle au syndicat, au moyen de l’organe «Groupe de travail pour améliorer l’ambiance», le comité note que, selon les plaignants, ce groupe de travail et d’autres instances de discussion pourraient être positifs si l’on ne refusait pas que le syndicat y participe de façon organisée. Les plaignants estiment que ces instances de discussion tendent à jouer le rôle d’un syndicat constitué sous les auspices de la direction. Le comité prend note des observations des représentants de l’entreprise à ce sujet: le groupe de travail en question et d’autres initiatives analogues sont des moyens de communication avec les salariés dont l’objectif est de discuter des mesures susceptibles d’améliorer la qualité de vie au travail, et de respecter le droit d’information et d’opinion des travailleurs; tous les travailleurs peuvent y participer et les réunions ont lieu une fois par trimestre pendant les horaires de travail; cette activité étant réservée au personnel, les dirigeants syndicaux qui ne travaillent pas dans l’entreprise ne sont pas autorisés à y participer. UNILEVER souligne que le groupe de travail n’est qu’une des modalités utilisées à des fins de communication et qu’il ne visait en aucune façon à entraver l’activité syndicale ou à s’y substituer. Considérant que les instances de discussion ou les programmes de communication promus par l’entreprise ne constituent pas en soi une atteinte à la liberté syndicale, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour garantir, à la lumière des résultats de l’enquête sur les pratiques antisyndicales alléguées, que ces moyens ne seront pas utilisés au détriment du syndicat, le syndicat étant la seule entité qui puisse présenter des garanties d’indépendance tant dans sa constitution que dans son fonctionnement.
- Non-reconnaissance du Comité syndical
- national d’UNILEVER
- 383. Le comité note que, selon les organisations plaignantes, UNILEVER refuse de reconnaître le Comité syndical national d’UNILEVER Brésil, qui est constitué par les syndicats représentatifs de toutes les usines en place sur le territoire national. Le comité note qu’à ce sujet UNILEVER affirme que le syndicat a revendiqué avec insistance une représentation syndicale par le biais du Comité syndical national, lequel n’est actuellement constitué que de trois autres syndicats. Les onze autres syndicats, qui représentent 95 pour cent des effectifs, considèrent que cette initiative constitue une menace pour leur organisation. Ils ne reconnaissent pas le Comité syndical national comme représentant de leurs intérêts. Le comité prend note des divergences qu’il y a entre la version des plaignants et celle des représentants de l’entreprise. Constatant avec regret que le gouvernement n’a pas communiqué ses observations à ce sujet, il lui demande d’enquêter sans retard sur la véracité de ces allégations et de l’informer à cet égard.
- Pression sur les travailleurs pour
- qu’ils se désaffilient du syndicat
- 384. Enfin, le comité note que, selon les plaignants, l’entreprise a mené une campagne de désaffiliation syndicale, qui a commencé en janvier 2005 par la distribution de formulaires de désaffiliation. Le point culminant en a été, en mars de la même année, la mise en service d’un numéro d’appel gratuit du Département des ressources humaines qui donnait notamment la possibilité de demander la désaffiliation du syndicat. Cette situation, toujours selon les plaignants, a duré environ un mois. Le comité prend note des observations de l’entreprise à ce sujet, à savoir que ce service, assuré par une entreprise sous-traitante, avait pour objectif de donner des renseignements sur l’administration du personnel et n’avait en principe rien à voir avec la question syndicale. Toutefois, en raison du nombre élevé de demandes d’information sur la façon de procéder à la désaffiliation syndicale, désaffiliation qui entraîne la suspension de la retenue sur le salaire de la cotisation syndicale, un fonctionnaire de l’entreprise sous-traitante a pris l’initiative d’établir un formulaire sur ce sujet et de l’afficher. L’entreprise affirme que ce formulaire a été retiré du panneau d’affichage le jour même.
- 385. Le comité estime que le fait de distribuer des formulaires de désaffiliation et celui de mettre en service un numéro d’appel gratuit qui donne la possibilité de demander la désaffiliation du syndicat constituent une ingérence dans les affaires internes du syndicat. A ce sujet, le comité rappelle que l’article 2 de la convention no 98 dispose que les organisations de travailleurs et d’employeurs doivent bénéficier d’une protection adéquate contre tous actes d’ingérence des unes à l’égard des autres, soit directement, soit par leurs agents ou membres, dans leur formation, leur fonctionnement et leur administration. Il demande au gouvernement de mettre sur pied un mécanisme qui permettrait de remédier rapidement aux effets d’une telle ingérence, y compris par l’imposition à l’employeur, quand approprié, de sanctions suffisamment dissuasives et d’éviter de tels incidents à l’avenir.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 386. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité note avec préoccupation que, de manière générale, le gouvernement se limite à transmettre l’information reçue des parties sans prendre position à son égard.
- b) Le comité demande au gouvernement d’enquêter sur les allégations relatives à différentes pratiques antisyndicales de l’entreprise (menaces téléphoniques à l’encontre de travailleurs, fait d’avoir filmé des manifestations dans le but d’exercer des pressions sur les salariés, infiltration de chefs dans les assemblées des travailleurs, coupure de clôtures pour éviter le piquet de grève et intimidation des salariés par le personnel de la direction pour qu’ils aillent travailler pendant une grève). Le comité demande au gouvernement de l’informer en détail à ce sujet.
- c) Observant que l’accompagnement des dirigeants syndicaux par du personnel de sécurité peut être considéré dans certaines circonstances comme nécessaire, mais qu’une telle mesure ne devrait donner lieu à une quelconque ingérence dans les affaires internes des syndicats ou dans la capacité des représentants syndicaux de communiquer librement avec les travailleurs afin de les informer des avantages que la syndicalisation peut présenter pour eux, le comité prie le gouvernement de prendre des mesures afin d’assurer que les agents syndicaux bénéficient des facilités nécessaires afin de communiquer librement avec les travailleurs, sans ingérence de l’employeur et sans présence de l’employeur ou de gardes de sécurité. Il prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- d) Au sujet de la création d’un organe de représentation des travailleurs qui est parallèle au syndicat, et considérant que les instances de discussion ou les programmes de communication promus par l’entreprise ne constituent pas en soi une atteinte à la liberté syndicale, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour garantir, à la lumière des résultats de l’enquête sur les pratiques antisyndicales alléguées, que ces moyens ne seront pas utilisés au détriment du syndicat, le syndicat étant la seule entité qui puisse présenter des garanties d’indépendance tant dans sa constitution que dans son fonctionnement.
- e) Constatant avec regret que le gouvernement n’a pas communiqué ses observations au sujet de la non-reconnaissance du Comité syndical national par UNILEVER, le comité lui demande d’enquêter sans retard sur la véracité de ces allégations et de l’informer à cet égard.
- f) A propos de la distribution de formulaires de désaffiliation et de la mise en service d’un numéro d’appel gratuit qui donne la possibilité de demander la désaffiliation du syndicat, le comité demande au gouvernement de mettre sur pied un mécanisme qui permettrait de remédier rapidement aux effets d’une telle ingérence, y compris par l’imposition à l’employeur, quand approprié, de sanctions suffisamment dissuasives et d’éviter de tels incidents à l’avenir.