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Report in which the committee requests to be kept informed of development - Report No 362, November 2011

Case No 2832 (Peru) - Complaint date: 07-DEC-10 - Closed

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1318. La plainte figure dans une communication de la Confédération des travailleurs du Pérou (CTP) en date du 7 décembre 2010.

  1. 1318. La plainte figure dans une communication de la Confédération des travailleurs du Pérou (CTP) en date du 7 décembre 2010.
  2. 1319. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication en date du 3 mai 2011.
  3. 1320. Le Pérou a ratifié la convention no 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention no 98 sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 1321. Dans sa communication en date du 7 décembre 2010, la Confédération des travailleurs du Pérou (CTP) allègue que, le 29 janvier 2007, le Syndicat des travailleurs des mines, de la métallurgie et des secteurs connexes des mines de la société minière Atacocha a présenté un projet de convention collective de travail pour la période 2007-08 à la sous-direction des négociations collectives de la ville de Cerro de Pasco, à l’intention des entreprises sous-traitantes de la société minière Atacocha, afin que des négociations collectives directes soient engagées avec la commission chargée des négociations du syndicat, dirigée entre autres par MM. Tito Matos Galarza et Jesús Gavino Ventura. Mais, devant le manque de volonté de négocier de ces entreprises, les travailleurs réunis en assemblée générale le 18 avril 2007 ont conclu un accord de grève générale illimitée qui devait débuter le 30 avril 2007.
  2. 1322. Nonobstant ce qui précède, l’organisation plaignante ajoute que les dirigeants syndicaux étaient partis de leur localité pour se rendre à Lima, la capitale, afin de se présenter devant le bureau de la Direction nationale des relations de travail du ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi (MTPE), demandant que soient organisées des réunions avec l’entreprise, qui se sont tenues les 18 mars, 8 mai, 8 juin et 9 juillet 2007 et au cours desquelles l’entreprise s’était engagée, au nom de la paix sociale, à intervenir auprès des entreprises sous-traitantes afin qu’elles embauchent les travailleurs et n’usent pas de représailles envers eux. Mais, au lieu de cela, le secrétaire général du syndicat, M. Tito Matos Galarza, a été licencié pour faute grave, sans qu’aucune raison objective n’ait été avancée et au mépris de l’immunité syndicale prévue par la législation. Dans ces circonstances, le 19 mars 2008, les travailleurs et les dirigeants licenciés (leurs noms ne sont pas cités, mais, dans les documents joints à la plainte, les noms des dirigeants syndicaux Epifanio Julián Villavicencio Ramírez, Jesús Eugenio Gavino et Arturo Garpán Elescano sont mentionnés) ont observé un arrêt du travail en signe de protestation et lancé une mobilisation pacifique afin de dénoncer publiquement les licenciements. Dans ce contexte, la police nationale du Pérou est intervenue et a émis un constat de police indiquant qu’un délit avait été commis contre la sécurité publique, à savoir une atteinte aux moyens de transport du service public, et contre le patrimoine, à savoir des dommages causés à l’Etat et à l’entreprise mentionnée précédemment. A la suite de cela, le ministère public (Fiscalía de la Nación) a déposé une plainte formelle, et le juge a ordonné lors de l’instruction l’émission d’un mandat d’arrêt contre le secrétaire général, M. Tito Alfredo Matos Galarza, qui a immédiatement été enfermé, le 21 mars 2008, à l’établissement pénitentiaire pour accusés (establecimiento penal de procesados), l’objectif étant de décapiter l’organisation syndicale et de laisser ses membres sans défense.
  3. 1323. L’organisation plaignante indique que, le 14 mai 2008, au 55e jour de privation de sa liberté, le juge chargé de statuer sur l’affaire a ordonné la révocation du mandat d’arrêt émis contre M. Tito Alfredo Matos Galarza dans le document d’ouverture de l’instruction et infligé à la place des «déplacements restreints» et des règles de conduite précises.
  4. 1324. Selon l’organisation plaignante, la criminalisation des protestations est utilisée contre les travailleurs qui s’organisent en syndicats pour demander que soient respectés les principes fondamentaux du travail et exiger de meilleures conditions salariales et de travail. Autrement dit, ce dirigeant jouit d’une liberté restreinte avec le risque latent de retourner en prison parce qu’aucun jugement n’a encore été rendu.
  5. 1325. En ce qui concerne les actions en annulation de licenciement des dirigeants du syndicat intentées auprès des tribunaux du travail de Lima, l’organisation plaignante indique que les plaintes ont été classées, que les travailleurs se sont retrouvés à la rue sans travail et que l’Etat ne les a pas protégés.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 1326. Dans sa communication en date du 3 mai 2011, le gouvernement évoque l’action pénale engagée contre M. Tito Alfredo Matos Galarza et indique que le ministère public (Fiscalía de la Nación) déclare que, dans le cadre du dossier no 2008-142 instruit contre M. Tito Alfredo Matos Galarza, le premier tribunal pénal spécialisé de Pasco a prononcé un jugement qui disculpe M. Tito Alfredo Matos Galarza de l’accusation d’atteinte à la tranquillité publique sous forme de dommages causés à l’Etat et à l’entreprise minière Atacocha S.A.; toutefois, ce dernier a été condamné parce qu’il a été jugé coupable de délit contre la sécurité publique sous forme d’atteinte aux moyens de transport du service public ayant causé des dommages à l’Etat et à l’entreprise minière Atacocha S.A., ce qui lui a valu une peine de privation de liberté de quatre ans et des peines accessoires prévues par la loi, ces peines ayant été suspendues à la condition qu’il observe des règles minimales de conduite. Le gouvernement ajoute que, compte tenu de ce qui précède, le jugement rendu à l’issue de la procédure pénale ne peut être lié ni associé à des pratiques antisyndicales de la part de l’Etat, puisqu’il existe une autonomie des pouvoirs, dans le cadre de laquelle il agit conformément à la réglementation en vigueur.
  2. 1327. Quant aux actions judiciaires intentées par M. Tito Alfredo Matos Galarza, le gouvernement indique que, le 2 mai 2007, ce dirigeant syndical a interjeté un recours en amparo devant la première chambre civile de la Cour supérieure de justice de Lima, sous le numéro de dossier 02755-2010-PA/TC, contre la société minière Atacocha S.A. et l’entreprise spécialisée Opermin S.A.C., demandant que l’on ordonne sa réintégration et celle d’autres dirigeants à leurs postes de travail et qu’ils soient inclus dans le registre des salariés de l’entreprise minière défenderesse, la société Atacocha. Le 30 septembre 2009, le premier tribunal spécialisé en matière constitutionnelle de Lima a déclaré le recours infondé, estimant que la relation de travail avait pris fin en raison de l’arrivée à échéance de la période contractuelle. Enfin, par un jugement daté du 27 septembre 2010, le Tribunal constitutionnel a déclaré le recours en amparo irrecevable, indiquant que le recours ne pouvait être reçu parce qu’il existe une procédure spécifique et tout aussi satisfaisante qui permet de protéger le droit constitutionnel qui aurait été violé, et qui comporte une étape de présentation de preuves nécessaire pour éclaircir les faits controversés exposés par les deux parties.
  3. 1328. Le gouvernement indique que, dans la plainte de l’organisation plaignante, les noms des autres dirigeants syndicaux qui auraient été licenciés ne sont pas mentionnés, bien que, parmi les documents joints à la plainte, figurent trois décisions judiciaires rendues dans le cadre des actions en annulation de licenciement intentées par MM. Epifanio Julián Villavicencio Ramírez (dossier no 183425-2007-00158 du vingt-cinquième tribunal du travail de Lima), Jesús Eugenio Gavino (dossier no 183429-2007-386 du vingt-neuvième tribunal du travail de Lima) et Arturo Gaspar Elescano (dossier no 183412-2007-152 du dixième tribunal du travail de Lima) contre la société susmentionnée. Dans ces décisions, il est expliqué que les plaintes ont été classées pour des faits relevant de la responsabilité exclusive des demandeurs, les actions n’ayant pas été intentées en temps opportun.
  4. 1329. Le gouvernement indique par ailleurs que, dans le cadre de la politique sectorielle qui consiste à rapprocher les parties afin de trouver d’autres formules de règlement des conflits du travail, le ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi a convoqué l’entreprise en question et les entreprises sous-traitantes à des réunions extraprocédurales, ce qui a permis de parvenir, entre autres choses, le 9 juillet 2007, à un accord sur le cas des anciens travailleurs Epifanio Julián Villavicencio Ramírez, Jesús Eugenio Gavino Ventura et Arturo Gaspar Elescano (tous trois dirigeants syndicaux, selon ce qu’il ressort des documents officiels joints à la plainte), en vertu duquel l’entreprise s’est engagée à présenter ces personnes à l’entreprise AESA. Des documents relatifs à l’application de l’accord signé émanant de l’entreprise Atacocha, de l’entreprise AESA et de la Direction générale du travail seront envoyés à des fins d’information.
  5. 1330. Tout ce qui précède, poursuit le gouvernement, montre qu’il est inexact d’affirmer que l’Etat péruvien ne reconnaît pas les droits collectifs des travailleurs; au contraire, à travers les actions qu’il mène, il soutient un respect sans restriction de la liberté syndicale et des droits collectifs des travailleurs en général.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 1331. Le comité note que, dans le présent cas, l’organisation plaignante allègue, premièrement, le licenciement des dirigeants syndicaux Tito Matos Galarza, Epifanio Julián Villacicencio Ramírez, Jesús Eugenio Gavino Ventura et Arturo Gaspar Elescano à la suite d’une grève menée en avril 2007 en raison du manque de volonté des entreprises sous-traitantes de la société minière Atacocha de négocier collectivement avec le Syndicat des travailleurs des mines, de la métallurgie et des secteurs connexes des mines de la société Atacocha. Selon l’organisation plaignante, les plaintes relatives à ces licenciements ont été classées.
  2. 1332. Le comité prend note des déclarations du gouvernement confirmant que les actions en annulation de licenciement intentées par ces dirigeants syndicaux n’ont pas donné lieu à des décisions favorables, et que les plaintes ont été classées pour des faits relevant de la responsabilité absolue des demandeurs, les actions n’ayant pas été intentées en temps opportun (des jugements envoyés par le gouvernement, il ressort que le Tribunal constitutionnel estime, en réponse à la revendication des demandeurs, qu’il ne lui appartient pas à lui – mais à un tribunal ordinaire – de déterminer si l’entreprise contre laquelle il aurait fallu porter plainte était la société minière Atacocha S.A. ou l’une des entreprises sous-traitantes). Le comité prend note de l’information du gouvernement relative aux réunions organisées en juillet 2007 entre le ministère du Travail et la société minière Atacocha S.A. en vue de résoudre le conflit collectif, au cours desquelles il a été convenu que MM. Villavicencio, Gabino et Elescano «seraient présentés» par la société susmentionnée à l’entreprise AESA (dans une décision du Tribunal constitutionnel du 15 décembre 2010, que le gouvernement a joint en annexe, il est indiqué que les demandeurs évoquent un «accord en vue de leur réintégration»). Le comité prend note que le gouvernement déclare également qu’il a demandé aux entreprises précitées et à la Direction générale du travail des renseignements sur l’application de l’accord signé. Le comité attend donc de recevoir ces informations. Le comité constate que cet accord ne concernait pas M. Tito Alfredo Matos Galarza, selon ce qu’il ressort du texte de l’accord fourni par l’organisation plaignante et des décisions rendues par le tribunal constitutionnel.
  3. 1333. En ce qui concerne l’allégation de mise en détention (55 jours de détention préventive) de M. Tito Alfredo Matos Galarza, secrétaire général du syndicat, et les poursuites pénales engagées à son encontre après que, selon les allégations, un arrêt du travail ait été observé en signe de protestation et une mobilisation pacifique lancée en mars 2008 pour dénoncer les licenciements de 2007, allégués dans le présent cas, le comité prend note que le gouvernement indique que M. Tito Alfredo Matos Galarza a été disculpé par l’autorité judiciaire de l’accusation d’atteinte à la tranquillité publique sous forme de dommages causés à l’Etat et à l’entreprise mentionnée précédemment, mais a toutefois été condamné parce qu’il a été jugé coupable de délit contre la sécurité publique sous forme d’atteinte aux moyens de transport du service public, ce qui lui a valu une peine de privation de liberté de quatre ans et des peines accessoires prévues par la loi, ces peines ayant été suspendues à la condition qu’il observe des règles minimales de conduite. Dans le jugement rendu en première instance joint par le gouvernement, les preuves présentées sont le fait attesté d’avoir placé des pierres sur une route permettant d’accéder aux locaux de l’usine et d’avoir incité les travailleurs à occuper les locaux de l’entreprise, bloquant ainsi à tout moment l’accès à l’entreprise par la violence; sont également mentionnés dans le détail les dommages causés aux biens. En ce qui concerne les actes de violence et les dommages causés aux biens auxquels se réfère le gouvernement, le comité souligne que les principes de la liberté syndicale ne protègent pas les abus dans l’exercice du droit de grève qui constituent des actions de caractère délictueux, et que les autorités ne devraient avoir recours à la force publique dans des cas de mouvements de grève que dans des situations présentant un caractère de gravité et où l’ordre public serait sérieusement menacé. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 667 et 644.] Bien que le comité note que la peine imposée a été suspendue, il demande au gouvernement de lui indiquer si ce dirigeant syndical a présenté un recours judiciaire contre ce jugement et, dans l’affirmative, il prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de ce recours. Le comité prie également le gouvernement de lui indiquer si ce dirigeant syndical a intenté des actions judiciaires à la suite de son licenciement en 2007.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 1334. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité attend les informations annoncées par le gouvernement concernant l’application de l’accord conclu en juillet 2007 entre le ministère du Travail et l’entreprise précitée relativement au licenciement de trois dirigeants syndicaux et qui semble viser leur réintégration.
    • b) Le comité prie le gouvernement de lui indiquer si le dirigeant syndical, Tito Alfredo Matos Galarza, a présenté un recours judiciaire contre le jugement le condamnant en première instance pour atteinte à la tranquillité publique sous forme de troubles. Le comité prie également le gouvernement de lui indiquer si ce dirigeant a intenté des actions judiciaires à la suite de son licenciement en 2007.
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