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Report in which the committee requests to be kept informed of development - Report No 374, March 2015

Case No 3026 (Peru) - Complaint date: 22-MAY-13 - Closed

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Allégations: Les organisations plaignantes allèguent des restrictions en droit et dans la pratique à la négociation collective dans le secteur public

  1. 627. La plainte relative au cas no 2941 figure dans des communications en date des 20 mars 2012 et 7 juin 2013 de la Fédération des travailleurs de l’électricité du Pérou (FTLF). Le Syndicat unitaire des travailleurs de l’Institut de médecine légale et des sciences médico légales du Pérou (SUTRAIMELCIFOR) a fait parvenir ses allégations par une communication en date du 28 juin 2012.
  2. 628. Le gouvernement a fait parvenir ses observations par des communications en date des 25 juin 2012, 14 septembre 2012 et 6 septembre 2013.
  3. 629. La plainte concernant le cas no 3026 figure dans des communications en date des 22 mai 2013 et 23 septembre 2013 de la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP). Cette plainte est appuyée par la Confédération des travailleurs du Pérou (CTP), le Syndicat unitaire des travailleurs de l’Institut national de l’innovation agricole (SUTSA INIA) et la Fédération des syndicats unitaires des travailleurs du secteur agricole (FESUTSA), par des communications en date du 9 septembre 2013, et par la Fédération des travailleurs municipaux, employés et ouvriers du Pérou (FTM-Perú), par une communication en date du 16 mai 2014. La Confédération nationale des travailleurs de l’Etat du Pérou (CTE-Perú) a transmis ses allégations dans des communications en date du 17 octobre et du 5 décembre 2014. La Fédération nationale des travailleurs du pouvoir judiciaire (FNTPJ) a transmis ses allégations dans une communication en date du 13 octobre 2014. Enfin, la Centrale autonome des travailleurs du Pérou (CATP) a transmis ses allégations dans une communication en date du 26 décembre 2014.
  4. 630. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans des communications en date du 7 février, des 1er et 24 septembre, et du 1er octobre 2014.
  5. 631. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes

    Cas no 2941

  1. 632. Dans sa communication en date du 20 mars 2012, la Fédération des travailleurs de l’électricité du Pérou (FTLF) allègue que le Fonds national de financement de l’activité économique de l’Etat (FONAFE) prévoit des plafonds applicables aux rémunérations dans les entreprises d’Etat de production d’électricité alignés sur le budget alloué aux entreprises d’Etat, ce qui limite les possibilités de négocier des augmentations salariales par la négociation collective.
  2. 633. Par ailleurs, la FTLF allègue que l’arrêté no 284-2011-TR du ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi, en date du 23 octobre 2011, a rendu inapplicable et sans effet l’arbitrage potestatif en tant que mécanisme de traitement des cahiers de revendications en imposant aux arbitres d’une négociation collective concernant un organisme ou une entreprise de l’Etat de tenir compte des ressources disponibles dans le budget public. Plus précisément, en vertu de l’arrêté susmentionné, les arbitres d’une négociation collective sont tenus d’appliquer ce que l’on appelle les «critères de pondération», qui se rapportent au budget du secteur public et sont énoncés dans les articles 77 et 78 de la Constitution politique de l’Etat, ainsi que ceux qui figurent dans les décisions du Tribunal constitutionnel entérinant le plein respect des normes budgétaires.
  3. 634. Dans sa communication en date du 7 juin 2013, la FTLF allègue que la 58e disposition complémentaire finale de la loi relative au budget du secteur public pour 2013, à savoir la loi no 29951, porte atteinte au droit de négociation collective dans la mesure où elle interdit d’augmenter la rémunération des travailleurs par l’intermédiaire de la négociation collective ou d’une sentence arbitrale. La FTLF indique que cette loi est d’application obligatoire pour le FONAFE et que, de ce fait, les entreprises d’Etat de production d’électricité relevant du FONAFE sont dans l’impossibilité de négocier des clauses de nature économique. La FTLF indique que, au début de 2013, elle a formé un recours en amparo contre cette loi eu égard au fait que cette dernière porte atteinte à son droit constitutionnel à la liberté syndicale et à la négociation collective et que la neuvième Chambre constitutionnelle a déclaré la demande irrecevable et ordonné le classement définitif de l’affaire. L’organisation plaignante estime qu’une telle décision porte atteinte au droit à la liberté de négociation collective.
  4. 635. Dans sa communication en date du 28 juin 2012, le Syndicat unitaire des travailleurs de l’Institut de médecine légale et des sciences médico-légales du Pérou (SUTRAIMELCIFOR), représentant les travailleurs de l’Institut de médecine légale du pays, allègue que la direction générale du ministère public l’a exclu du champ d’une résolution autorisant le ministère de l’Economie et des Finances à réaliser une enquête visant à établir le barème des traitements pour l’année 2012; et que le ministère public ne lui a pas permis de participer à une commission chargée de proposer et de coordonner avec le ministère de l’Economie et des Finances le barème des traitements du ministère public pour l’année 2012.

    Cas no 3026

  1. 636. Dans sa communication en date du 22 mai 2013, la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP) allègue que la 58e disposition complémentaire finale de la loi relative au budget du secteur public pour 2013, à savoir la loi no 29951, porte atteinte au droit de négociation collective en interdisant de procéder à des augmentations salariales par l’intermédiaire de la négociation collective. La CGTP estime que ladite loi contrevient aux principes du Comité de la liberté syndicale énoncés dans le rapport no 357 sur le Pérou, dans lequel le comité souligne que l’impossibilité de négocier des augmentations salariales de manière permanente est contraire au principe de la négociation libre et volontaire consacré dans la convention no 98.
  2. 637. Dans sa communication en date du 23 septembre 2013, la CGTP allègue que la loi sur la fonction publique no 30057, adoptée en juillet 2013, porte atteinte aux droits à la liberté syndicale et à la négociation collective consacrés par les conventions nos 87, 98 et 151. Concrètement, la CGTP allègue que: 1) la loi exclut des droits de négociation collective les fonctionnaires publics et le personnel de direction et de confiance; 2) la loi limite la négociation collective, dans toutes les entités publiques, aux conditions de travail, et sont exclues de la négociation et de tout autre mécanisme de participation les questions salariales ou les questions ayant une incidence économique; 3) la loi porte atteinte au droit de grève en permettant à l’entité publique d’embaucher temporairement et directement le personnel nécessaire pour garantir la fourniture des services minimaux normalement assurés par les services essentiels et la fourniture minimale de services indispensables au fonctionnement de l’entité, depuis le début de la grève jusqu’à sa fin effective. De plus, la loi ne précise pas quelles sont les activités qui constituent des services essentiels, ce qui fait que les restrictions au droit de grève peuvent s’étendre bien au-delà des situations admises par les organes de contrôle de l’OIT pour la qualification d’un service comme «essentiel», et inclut la notion de «services indispensables au fonctionnement de l’entité» en étendant de la sorte les restrictions à ce droit; enfin, 4) que, dans les travaux d’élaboration de cette loi, l’on a ignoré le mécanisme de participation ou de consultation des organisations de travailleurs.
  3. 638. Dans ses communications en date du 9 septembre 2013, la Confédération des travailleurs du Pérou (CTP), le Syndicat unitaire des travailleurs de l’Institut national de l’innovation agricole (SUTSA INIA) et la Fédération des syndicats unitaires des travailleurs du secteur agricole (FESUTSA) allèguent que la loi sur la fonction publique no 30057 dénie le droit de négociation collective aux agents de la fonction publique pour ce qui a trait aux conditions économiques et viole ainsi la Constitution politique du Pérou, de même que les droits au travail et les droits syndicaux reconnus par les conventions nos 87, 98 et 151. Les organisations plaignantes indiquent que le gouvernement n’a jamais consulté les agents de la fonction publique, pas plus que leurs organisations ni les centrales syndicales, et que 36 parlementaires ont présenté un recours en inconstitutionnalité contre ladite loi en juillet 2013. Les organisations plaignantes déclarent que le projet de budget du Pérou pour 2014 viole aussi la convention no 98 puisqu’il interdit à toutes les entités publiques de procéder à un réajustement et/ou une augmentation des rémunérations, primes, allocations ou autres avantages de toutes sortes.
  4. 639. Pour sa part, dans sa communication en date du 16 mai 2014, la Fédération des travailleurs municipaux, employés et ouvriers du Pérou (FTM-Perú) allègue que la loi no 30057: 1) interdit la négociation collective sur les rémunérations et ne prévoit que le changement de conditions de travail ou d’emploi selon les possibilités budgétaires et structurelles de l’entité et la nature des fonctions accomplies au sein de l’entité; 2) ajoute de grandes difficultés au processus de négociation du fait que les cahiers de revendications doivent obtenir l’approbation de l’Autorité nationale de la fonction publique (SERVIR) et du ministère de l’Economie et des Finances, et que les accords ont une durée minimale de validité de deux ans; 3) porte atteinte au droit de grève en permettant à l’entité publique d’engager temporairement et directement le personnel nécessaire pour garantir la fourniture des services minimaux normalement assurés par les services essentiels et la fourniture minimale de services indispensables au fonctionnement de l’entité, depuis le début de la grève jusqu’à sa fin effective. Enfin, la FTM-Perú indique que, si la loi prévoit que l’intégration dans le nouveau régime prévu par la loi est volontaire, elle prévoit aussi que, durant une période maximale de six ans complets – à l’exception des services exclus –, les intéressés relèveront de la loi no 30057.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement

    Cas no 2941

  1. 640. Dans sa communication en date du 25 juin 2012, le gouvernement indique que l’Etat péruvien respecte la négociation collective et que les normes appliquées par le Fonds national de financement de l’activité économique de l’Etat (FONAFE) ne violent pas ce droit, pas plus qu’elles ne l’affaiblissent. Le gouvernement explique que le FONAFE plafonne les rémunérations conformément aux ressources budgétaires assignées aux entreprises d’Etat pour qu’elles puissent se conformer à leurs plans opérationnels et stratégiques, et ainsi gagner en viabilité. Le gouvernement souligne que les dispositions de la loi relative au budget du secteur public pour 2013 constituent une norme d’application obligatoire pour le FONAFE ainsi que pour les entreprises relevant de sa compétence et que, en conséquence, les actions ou mesures mises en œuvre par le FONAFE découlent de normes impératives et d’ordre public et ne violent aucunement le droit syndical.
  2. 641. En relation avec l’allégation de la Fédération des travailleurs de l’électricité du Pérou (FTLF), selon laquelle le décret no 284-2011-TR du ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi, en date du 23 octobre 2011, a rendu inapplicable et inefficace l’arbitrage potestatif en tant que mécanisme de traitement des cahiers de revendications présentés en imposant aux arbitres d’une négociation collective concernant un organisme ou une entreprise de l’Etat de tenir compte de ce que l’on appelle les «critères de pondération» qui se rapportent au budget du secteur public et sont énoncés dans les articles 77 et 78 de la Constitution politique de l’Etat, ainsi que de ceux qui figurent dans les décisions du Tribunal constitutionnel entérinant le plein respect des normes budgétaires, le gouvernement indique que, dans les décisions nos 008-2005-AI/TC et 02566-2012-PA-TC, le Tribunal constitutionnel a déclaré que les négociations collectives engagées par des agents publics doivent être menées dans le respect des limites imposées par la Constitution aux fins de l’établissement d’un budget équilibré et équitable. Le gouvernement souligne que le Tribunal constitutionnel ne dénie pas aux travailleurs de l’Etat le droit à la négociation collective mais qu’il subordonne l’exercice de ce dernier à l’application des normes budgétaires, les accords conclus dans le domaine économique devant être inscrits au budget.
  3. 642. En ce qui concerne l’arrêt de la neuvième Chambre constitutionnelle, mentionné par la FTLF, en vertu duquel le recours en amparo portant sur la loi relative au budget du secteur public pour 2013 a été rejeté, le gouvernement indique que le fait qu’il ne soit pas favorable à l’organisation plaignante ne revient en aucune manière à une atteinte au droit fondamental à la liberté de négociation collective.
  4. 643. Dans sa communication en date du 14 septembre 2012, le gouvernement déclare, en lien avec les allégations présentées par le Syndicat unitaire des travailleurs de l’Institut de médecine légale et des sciences médico-légales du Pérou (SUTRAIMELCIFOR), que le bureau de conseil juridique du ministère public a fait savoir que, conformément à la loi de procédure administrative générale, il n’est pas possible de modifier la résolution de gestion générale du ministère public qui a exclu de son champ l’organisation plaignante et que, si le ministère public n’avait aucune obligation de constituer une commission pour analyser le barème des traitements pour 2012, il a décidé de créer une commission spéciale à laquelle a participé un autre syndicat (le Syndicat des travailleurs du ministère public).

    Cas no 3026

  1. 644. Dans sa communication en date du 7 février 2014, en réponse à la plainte présentée par la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP), le gouvernement explique que, en vertu de la loi fixant les bases de la carrière administrative et les rémunérations du secteur public, approuvée par décret législatif no 276, de mars 1984, les travailleurs n’ont le droit d’engager des négociations collectives que sur les questions portant sur les conditions de travail ou d’emploi. Le gouvernement déclare que, si le droit à la négociation collective des travailleurs du secteur public n’est pas expressément reconnu dans la Constitution, sa reconnaissance ressort de l’application de l’article 7 de la convention no 151, qui a été ratifiée par le Pérou et intégrée par l’intermédiaire de l’article 55 de la Constitution politique du Pérou.
  2. 645. Le gouvernement indique que, conformément aux articles 77 et 78 de la Constitution politique du Pérou, le budget prévoit une répartition équitable des ressources publiques, et le projet relatif à celui-ci doit être équilibré. Le gouvernement mentionne également l’approbation de la loi de responsabilité et de transparence fiscale, no 27245, en novembre 2003, ainsi que de la loi générale, no 28411, sur le système budgétaire national, en décembre 2004, qui établissent les principes et les procédures qui régulent le système budgétaire national conformément aux articles 77 et 78 de la Constitution politique.
  3. 646. De même, a été approuvée la loi no 29849 en avril 2012, dans le but d’accorder les droits au travail aux travailleurs embauchés sous le régime des «contrats administratifs de services» ainsi que la loi no 29874, de juin 2012, qui permet la mise en œuvre de mesures d’incitation par l’intermédiaire des Comités de l’administration du fonds d’assistance et d’émulation (CAFAE) auxquels se réfère la loi no 29812, loi budgétaire du secteur public pour 2012. Le gouvernement explique que cette norme vise à supprimer les inégalités dans les augmentations salariales accordées aux travailleurs administratifs par l’intermédiaire des CAFAE dans le cadre des différentes dispositions budgétaires visées par le décret législatif no 276.
  4. 647. En ce qui concerne les allégations présentées par la CGTP selon lesquelles la loi sur le budget du secteur public pour 2013, no 29951, viole les conventions nos 87 et 98, en interdisant les augmentations des rémunérations des travailleurs par la négociation collective, le gouvernement explique que les normes régissant le budget public de l’Etat visent à répartir équitablement les dépenses de l’Etat, vu qu’il s’agit de ressources publiques provenant des contributions de tous les citoyens et servant à diverses missions de l’Etat.
  5. 648. Le gouvernement indique que le Tribunal constitutionnel a eu l’occasion de se prononcer sur le droit de négociation collective et l’interdiction d’accorder tout type d’augmentation au personnel de l’administration publique, y compris si celui-ci découle d’arbitrages dans le domaine du travail. Le gouvernement souligne que le Tribunal constitutionnel, dans ses décisions nos 008-2005-AI/TC et 02566-2012-PA-TC, a estimé que les négociations collectives engagées par des agents de la fonction publique devaient être menées en tenant compte des limites imposées par la Constitution aux fins de l’établissement d’un budget équilibré et équitable. Le gouvernement ajoute que la Cour suprême de justice a exposé des conclusions similaires dans le jugement no 4169-2008-Lambayeque, dans lequel elle a indiqué que la négociation collective dans le secteur public doit avoir lieu en tenant compte des lois portant sur le budget de la République qui délimitent le cadre de la négociation.
  6. 649. Le gouvernement signale que, malgré les faits exposés, il a noté que, à diverses reprises, des sentences arbitrales ont adopté des positions contraires, voire provocantes, en déclarant expressément la non-application des restrictions budgétaires prévues par les lois budgétaires du service public, et ont ordonné des augmentations de rémunérations dépourvues de base technique et de source de financement identifiable, qui portent atteinte au principe de l’équilibre budgétaire et créent un désordre dans le secteur public, et que le Congrès de la République a décidé de réguler cette situation, y compris la disposition de la loi portant sur le budget de la fonction publique pour 2013, contestée par la CTP.
  7. 650. Dans ses communications en date des 1er et 24 septembre 2014, le gouvernement a formulé ses observations relatives aux allégations portant sur la loi sur la fonction publique no 30057. En lien avec l’allégation selon laquelle la loi exclut les fonctionnaires publics et le personnel de direction et de confiance du droit syndical, le gouvernement indique que, si une telle exclusion n’existe pas au sens strict, il serait utile, pour une meilleure interprétation, que le champ d’application de la loi soit précisé par une norme. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle la loi permet, en cas de grève, d’embaucher temporairement et directement le personnel nécessaire pour garantir la fourniture des services minimaux normalement assurés par les services essentiels et la fourniture minimale de services indispensables, le gouvernement considère que cette disposition ne semble pas présenter de problème de compatibilité avec les conventions de l’OIT à partir du moment où les conditions prévues par la loi sont respectées, à savoir que les services qualifiés d’essentiels soient définis selon les critères des organes de contrôle de l’OIT, que la définition des services minimaux soit établie avec les organisations de travailleurs et qu’il ne soit procédé à l’embauche de travailleurs de remplacement que lorsque les services minimaux n’ont pas été assurés par l’organisation ou les travailleurs en grève et que cette situation présente un risque grave pour la vie, la sécurité ou la santé des personnes. S’agissant de l’allégation selon laquelle la loi limite le droit de négociation collective en requérant une négociation pour une période de deux ans, le gouvernement souligne que le Comité de la liberté syndicale a indiqué que «la durée des conventions collectives est une question qui relève au premier chef des parties concernées». Quant à l’allégation selon laquelle la loi limite la négociation collective aux seules conditions de travail et exclut de la négociation et de tout autre mécanisme de participation les questions salariales ou ayant une incidence économique, le gouvernement est d’avis que la loi peut être considérée comme une régression dans la reconnaissance et l’exercice effectif d’un droit fondamental tel que celui à la négociation collective et juge qu’il faut inclure ces aspects dans une disposition normative. Concernant ce dernier point, le gouvernement fait savoir que, le 21 mai 2014, la Cour constitutionnelle siégeant en séance plénière a rendu une décision concernant l’action en inconstitutionnalité intentée par 34 membres du Congrès de la République contre plusieurs articles de la loi. Le gouvernement indique que même si on n’a pas atteint, conformément aux exigences de l’article 5 de la loi organique du Tribunal constitutionnel, la majorité des votes nécessaires pour déclarer fondés les moyens de droits de l’action relative à l’inconstitutionnalité de la loi no 30057 pour violation du droit à la négociation collective, trois magistrats estiment que l’exclusion des compensations et des questions d’ordre budgétaire du champ de la négociation collective constitue une violation de ce droit constitutionnel. Par ailleurs, trois autres magistrats estiment que la loi ne sera constitutionnelle que si un mécanisme de consultation est mis en œuvre dans un délai de quatre-vingt-dix jours. Enfin, le gouvernement souligne que, dans les deux cas, le Tribunal constitutionnel a utilisé comme paramètre de constitutionnalité les normes de l’OIT ratifiées par le Pérou.
  8. 651. Dans sa communication du 1er octobre 2014, le gouvernement déclare que l’engagement de travailleurs durant la grève constitue une mesure de caractère exceptionnel dans la nouvelle réglementation applicable dans le cas où les services minima ne sont pas respectés. En ce qui concerne la négociation collective, la loi mentionnée délimite le contenu du droit de négociation collective et se justifie par le fait qu’elle évite les différences qui existent à l’heure actuelle dans la négociation des salaires et le désordre qui résulte de règles différentes dans la négociation des salaires en fonction de la relation de travail du salarié. La loi établi des critères techniques et objectifs pour l’augmentation des salaires et tient compte du principe de la provision budgétaire.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 652. Le comité note que, dans les deux cas, les allégations portent sur des restrictions en droit et dans la pratique à la négociation collective dans le secteur public, et plus particulièrement sur l’impossibilité d’effectuer des augmentations salariales dans le secteur public par le biais de la négociation collective. Le cas no 2941 a trait essentiellement à la loi sur le budget du secteur public pour 2013, loi no 29951, et plus particulièrement à sa 58e disposition complémentaire finale qui, selon les organisations plaignantes (la FTLF et la CGTP), interdit de procéder à des augmentations de traitements par le biais de la négociation collective. Ladite disposition prévoit, entre autres, que les procédures de négociation ou d’arbitrage relatives au travail ne pourront porter que sur les conditions de travail; que seront déclarées nulles de plein droit les résolutions, conventions ou sentences arbitrales méconnaissant cette interdiction; et que les arbitres qui passeront outre ces dispositions ne seront pas habilités à participer aux processus d’arbitrage de négociations collectives dans le secteur public.
  2. 653. Selon les allégations de l’organisation plaignante, la FTLF, confirmées par le gouvernement, la loi sur le budget du secteur public pour 2013 est d’application obligatoire pour le Fonds national de financement de l’activité économique de l’Etat (FONAFE) et, en conséquence, les entreprises d’Etat de production d’électricité relevant du FONAFE sont dans l’impossibilité de négocier des clauses de nature économique. L’organisation plaignante allègue en outre que le FONAFE prévoit des plafonds applicables aux rémunérations dans les entreprises d’Etat de production d’électricité alignés sur le budget attribué aux entreprises d’Etat, ce qui limite les possibilités de négocier des augmentations salariales par le biais de la négociation collective. La FTLF conteste également le décret ministériel no 284-2011-TR, du 23 octobre 2011, qui impose aux arbitres d’une négociation collective concernant un organisme ou une entreprise de l’Etat de tenir compte des ressources disponibles dans le budget public.
  3. 654. Le cas no 3026 porte essentiellement sur la loi sur la fonction publique no 30057 adoptée en juillet 2013 qui, selon les organisations plaignantes CGTP, CTP, SUTSA INIA, FESUTSA et FTM-Perú, limite la négociation collective dans toutes les entités publiques aux seules conditions de travail et exclut de la négociation et de tout autre mécanisme de participation les questions salariales ou ayant une incidence économique. Ladite loi prévoit, entre autres, que les agents de la fonction publique ont le droit de demander une amélioration de leurs compensations non économiques, y compris des changements dans leurs conditions de travail ou d’emploi, en fonction des possibilités budgétaires et structurelles de l’entité et de la nature des fonctions exercées.
  4. 655. Le comité prend note des observations du gouvernement selon lesquelles l’exercice du droit à la négociation collective pour les travailleurs de la fonction publique, comme tout autre droit, n’est pas absolu mais assujetti aux limites fixées par la loi, notamment celles qui se rapportent aux questions budgétaires. A cet égard, le gouvernement explique que, conformément à la loi générale sur le système budgétaire national, no 28411, le FONAFE fixe, au moyen de lignes directrices, un plafond applicable aux rémunérations en fonction du budget alloué aux entreprises d’Etat pour qu’elles puissent se conformer à leurs plans opérationnels et stratégiques et, de la sorte, gagner en viabilité. Le gouvernement soutient que les actions ou mesures mises en œuvre par le FONAFE découlent de normes impératives et d’ordre public et ne violent aucunement le droit syndical.
  5. 656. En lien avec l’allégation des organisations plaignantes FTLF et CGTP, selon laquelle la 58e disposition complémentaire finale de la loi relative au budget du secteur public pour 2013, loi no 29951, interdit que l’on procède à des augmentations de traitements au moyen de la négociation collective, ce qui fait que les entreprises publiques de production d’électricité relevant du FONAFE sont dans l’impossibilité de négocier des clauses de nature économique, le comité prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle la loi relative au budget du secteur public pour 2013 constitue une norme d’application obligatoire pour le FONAFE ainsi que pour les entreprises relevant de sa compétence et que, en conséquence, les actions ou mesures mises en œuvre par le FONAFE découlent de normes impératives et d’ordre public et ne violent aucunement le droit syndical. Le gouvernement explique que les normes régissant le budget public de l’Etat visent à répartir équitablement les dépenses de l’Etat, vu qu’il s’agit de ressources publiques provenant des contributions de tous les citoyens et servant à diverses missions de l’Etat.
  6. 657. En ce qui concerne la 58e disposition complémentaire finale de la loi sur le budget du secteur public pour 2013, loi no 29951, le comité constate que, comme l’allèguent les organisations plaignantes et le confirme le gouvernement, cette disposition limite les sujets de négociation collective et d’arbitrage aux seules conditions de travail et que l’article 6 de ladite loi interdit le réajustement, l’augmentation ou la création de toute forme de revenu pour les travailleurs du secteur public quel que soit le mécanisme utilisé. Le comité note que, selon l’information envoyée par l’organisation plaignante FTLF et confirmée par le gouvernement, la loi no 29951 est d’application obligatoire pour le FONAFE et que, de ce fait, les entreprises d’Etat de production d’électricité relevant du FONAFE sont dans l’impossibilité de négocier des clauses de nature économique. Le comité note que l’organisation plaignante FTLF a annexé à sa plainte des copies des lettres envoyées au FONAFE et à l’entreprise d’électricité Electrocentro, S.A. dans lesquelles elle demande que la 58e disposition complémentaire finale de la loi no 29951 ne soit pas appliquée. Comme il ressort des annexes de l’organisation plaignante, dans sa réponse, le directeur exécutif du FONAFE explique que la loi no 29951 limite les sujets de la négociation collective et de l’arbitrage en matière de travail aux seules conditions de travail et souligne que cette loi est d’application obligatoire pour le FONAFE. Pour sa part, l’entreprise Electrocentro, S.A. explique qu’elle-même dépend du FONAFE et n’a pas compétence pour examiner les demandes d’annulation ou de non-application des prescriptions de la 58e disposition complémentaire finale de la loi no 29951.
  7. 658. Le comité souhaite souligner qu’il s’est prononcé à plusieurs reprises sur des questions relatives à la négociation collective dans la législation péruvienne applicable au secteur public et qu’il a formulé ces dernières années des recommandations à l’intention du gouvernement dans le cadre de plaintes présentées par des organisations syndicales péruviennes très similaires aux présents cas (cas nos 2639 et 2934). Le comité rappelle que, dans le cas no 2639, il a déjà examiné l’allégation relative aux plafonds des rémunérations imposés par le FONAFE dans les barèmes de traitements des entreprises publiques de production d’électricité. Le comité réitère ses conclusions antérieures et rappelle une nouvelle fois le principe selon lequel, dans la mesure où les revenus des entreprises et organismes publics dépendent des budgets de l’Etat, il n’y aurait pas d’objection à ce que – après discussions et consultations approfondies entre les employeurs et les organisations syndicales concernées, dans le cadre d’un système qui recueille la confiance des parties – soient fixés des plafonds de salaire dans les lois visant le budget de l’Etat. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 1036.] Le comité a demandé au gouvernement à cette occasion de prendre les mesures nécessaires pour garantir que les syndicats des entreprises publiques sont consultés dans la détermination du plafonnement des salaires dans le cadre du budget des entreprises publiques, de telle sorte que les organisations syndicales concernées puissent évaluer la situation, exprimer leur point de vue et leur position et débattre avec les autorités des considérations d’intérêt général que, le cas échéant, ces autorités jugent utiles de souligner. [Voir 355e rapport, paragr. 1013.]
  8. 659. Le comité rappelle également que, dans le cas no 2934, il a déjà examiné l’allégation relative à l’arrêté ministériel no 284-2011-TR qui impose aux arbitres d’une négociation collective concernant un organisme ou une entreprise de l’Etat de tenir compte des ressources disponibles dans le budget public. Le comité observe que, dans sa dernière réponse, le gouvernement fait valoir la nécessité que la négociation collective s’inscrive dans les limites budgétaires de l’Etat. Le comité réitère sa conclusion exprimée dans le cas no 2934 selon laquelle, «même s’il estime que l’obligation des arbitres de tenir compte des ressources disponibles dans le budget public n’est pas, en soi, contraire aux principes de la liberté syndicale et la négociation collective», il prie le gouvernement de veiller au respect de ces principes. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1033-1043.][Voir 365e rapport, paragr. 1257.]
  9. 660. Par ailleurs, en lien avec la réforme de la fonction publique introduite par la loi no 30057, le comité observe que celle-ci est appliquée aux travailleurs de l’Etat des trois niveaux de gouvernement (national, régional et local) et que, parallèlement à la loi, deux projets de règlement ont été adoptés: un règlement régissant l’application générale de la loi et un règlement portant sur le régime spécial des gouvernements locaux. Le comité observe en outre que, en vertu de la loi, le personnel des régimes antérieurs (les travailleurs régis par le décret législatif no 276 (carrière dans la fonction publique), les travailleurs régis par le décret législatif no 728 (régime appliquant les normes du secteur privé) et les travailleurs régis par le décret législatif no 1057 (engagés sous le régime du contrat administratif de prestations de services)) peut s’il le souhaite, et après avoir réussi un concours public fondé sur les aptitudes, passer au régime prévu par cette dernière. La loi no 30057 prévoit que l’accès au nouveau régime doit se faire progressivement et sera réalisé dans un délai maximum de six ans.
  10. 661. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles, dans le processus d’élaboration de la loi sur la fonction publique no 30057, l’on a ignoré le mécanisme de participation ou de consultation des organisations de travailleurs, le comité note que le gouvernement n’a pas répondu à cette allégation et rappelle à ce sujet que, de manière générale, il est essentiel que l’introduction d’une loi affectant la négociation collective ou les conditions d’emploi soit précédée de consultations complètes et détaillées avec les organisations intéressées de travailleurs et d’employeurs. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1075.] En conséquence, le comité attend fermement du gouvernement qu’il prenne des mesures propres à assurer que les syndicats puissent, dans la pratique, participer aux consultations sur toute question ou tout projet de règlement affectant les droits des travailleurs qu’ils représentent.
  11. 662. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles la loi no 30057 porte atteinte au droit de grève en permettant à l’entité publique d’embaucher temporairement et directement le personnel nécessaire pour garantir la fourniture des services minimaux normalement assurés par les services essentiels et la fourniture minimale de services indispensables au fonctionnement de l’entité, depuis le début de la grève jusqu’à sa fin effective, le comité note que le gouvernement considère que cette disposition ne semble pas présenter de problème de compatibilité avec les conventions de l’OIT à partir du moment où les conditions prévues par la loi sont respectées, à savoir que les services qualifiés d’essentiels soient définis selon les critères des organes de contrôle de l’OIT, que la définition des services minimaux soit établie avec les organisations de travailleurs et qu’il ne soit procédé à l’embauche de travailleurs de remplacement que lorsque les services minimaux n’ont pas été assurés par l’organisation ou les travailleurs en grève et que cette situation présente un risque grave pour la vie, la sécurité ou la santé des personnes. A cet égard, le comité rappelle le principe selon lequel le droit de grève pourrait faire l’objet de restrictions, voire d’interdictions, dans la fonction publique ou les services essentiels dans la mesure où la grève pourrait y provoquer de graves préjudices pour la collectivité nationale et pourvu que ces limitations soient accompagnées de certaines garanties compensatoires. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 573.]
  12. 663. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles l’article 40 de la loi no 30057 exclut des droits collectifs le personnel de direction et de confiance, le comité note que le gouvernement indique que, si une telle exclusion n’existe pas au sens strict, il serait utile, pour une meilleure interprétation, que le champ d’application de la loi soit précisé par une norme. A cet égard, le comité rappelle que l’article 1, paragraphe 2, de la convention no 151 prévoit que la mesure dans laquelle les garanties prévues par la présente convention s’appliqueront aux agents de niveau élevé dont les fonctions sont normalement considérées comme ayant trait à la formulation des politiques à suivre ou à des tâches de direction ou aux agents dont les responsabilités ont un caractère hautement confidentiel sera déterminée par la législation nationale. Le comité rappelle toutefois que, en vertu de la convention no 98, ratifiée par le Pérou, seuls peuvent être exclus du droit à la négociation collective les fonctionnaires publics commis à l’administration de l’Etat.
  13. 664. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles la loi no 30057, dans son article 40, exclut des droits collectifs le personnel de direction et de confiance et ajoute de grandes difficultés au processus de négociation vu que, une fois présenté le cahier de revendications, il faut obtenir l’approbation de l’Autorité nationale du service civil (SERVIR) et du ministère de l’Economie et des Finances et que les accords souscrits entre les représentants de l’entité publique et des agents de la fonction publique ont une durée minimale de validité de deux ans, le comité note que le gouvernement souligne que le Comité de la liberté syndicale a indiqué que «la durée des conventions collectives est une question qui relève au premier chef des parties concernées». A cet égard, le comité rappelle, d’une part, que la vérification des disponibilités budgétaires dans le cadre de la négociation collective est admissible et, d’autre part, le principe selon lequel «une disposition réglementaire prévoyant qu’un accord collectif devrait s’appliquer pendant deux ans lorsqu’il n’y a pas eu d’accord entre les parties pour une autre période ne constitue pas une violation du droit de négociation collective». [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1049.] En conséquence, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.
  14. 665. En lien avec l’allégation des organisations plaignantes selon laquelle l’article 42 de la loi no 30057 limite la négociation collective, dans toutes les entités publiques, aux conditions de travail et exclut de la négociation et de tout autre mécanisme de participation les questions salariales ou ayant une incidence économique, le comité prend note du fait que le gouvernement est d’avis que la loi peut être considérée comme une régression dans la reconnaissance et l’exercice effectif d’un droit fondamental tel que celui à la négociation collective et juge qu’il faut inclure ces aspects dans une disposition normative. Le comité note que l’article 42 prévoit expressément que les agents de la fonction publique ont le droit de demander une amélioration de leurs conditions non économiques, y compris l’amélioration de leurs conditions de travail ou d’emploi, en fonction des possibilités budgétaires et structurelles de l’entité et de la nature des fonctions exercées au sein de celle-ci. Le comité constate donc que, en vertu de l’article 42 de ladite loi, les agents de la fonction publique n’ont pas le droit d’engager des discussions sur des augmentations de salaires ou sur des thèmes ayant une incidence économique.
  15. 666. Le comité note avec regret que, en dépit de ses conclusions et recommandations formulées lors de cas antérieurs, tant la loi no 29951 que la loi no 30057 continuent à limiter les négociations collectives et l’arbitrage en matière de travail aux seules conditions de travail et à exclure de la négociation et de tout autre mécanisme de participation les questions salariales ou ayant une incidence économique. De même, le comité note que la loi relative au budget du secteur public pour 2014, loi no 30114, de la même manière que la loi relative au budget du secteur public pour 2013, interdit le réajustement, l’augmentation ou la création de toute forme de revenu pour les travailleurs de la fonction publique quel que soit le mécanisme utilisé. Le comité note avec préoccupation que ces restrictions législatives se traduisent, dans la pratique, par l’impossibilité de négocier ou de participer à des mécanismes de consultation avec les organisations syndicales sur les augmentations salariales dans le secteur public. Le comité rappelle que, dans un cas précédent relatif aux travailleurs portuaires du secteur public, il a souligné que l’impossibilité de négocier des augmentations salariales de manière permanente est contraire au principe de la négociation libre et volontaire consacré dans la convention no 98. [Voir 357e rapport (Pérou), paragr. 946.] De même, lors de cas antérieurs, face à des allégations concernant les obstacles et les difficultés qui entravent la négociation collective dans le secteur public, le comité a indiqué qu’«il est conscient de ce que la négociation collective dans le secteur public exige la vérification des ressources disponibles au sein des différents organismes ou entreprises publiques, que ces ressources dépendent du budget de l’Etat et que la période de validité des conventions collectives du secteur public ne coïncide pas toujours avec celle de la loi relative à ce budget, ce qui peut poser des difficultés». [Voir 357e rapport, cas no 2690 (Pérou), paragr. 944.] [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1037 et 1038.] De même, le comité a partagé le point de vue de la commission d’experts dans l’étude d’ensemble de 1994, qui estime que: «si le principe de l’autonomie des partenaires à la négociation collective reste valable en ce qui concerne les fonctionnaires couverts par la convention no 151, les particularités de la fonction publique décrites ci-dessus appellent une certaine souplesse dans son application». Ainsi, de l’avis de la commission, sont compatibles avec la convention les dispositions législatives qui permettent au Parlement ou à l’organe compétent en matière budgétaire de fixer une «fourchette» pour les négociations salariales ou d’établir une «enveloppe» budgétaire globale dans le cadre desquelles les parties peuvent négocier les clauses monétaires ou normatives (par exemple, réduction du temps de travail ou autres aménagements, modulation des augmentations salariales en fonction des niveaux de rémunération, modalités d’étalement des revalorisations), ou encore celles qui confèrent aux autorités financières un droit de participation à la négociation collective aux côtés de l’employeur direct, dans la mesure où elles laissent une place significative à la négociation collective. Il est essentiel, toutefois, que les travailleurs et leurs organisations puissent participer pleinement et de façon significative à la détermination de ce cadre global de négociation, ce qui implique notamment qu’ils aient à leur disposition toutes les données financières, budgétaires ou autres leur permettant d’apprécier la situation en toute connaissance de cause. [Voir 365e rapport (Pérou), paragr. 1257.] [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1038.]
  16. 667. Le comité rappelle que le Pérou a ratifié les conventions nos 98 et 151 et que, en conséquence, il s’est engagé à adopter des mesures pour promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de procédures permettant la négociation des conditions d’emploi entre les autorités publiques intéressées et les organisations d’agents publics, ou de toute autre méthode permettant aux représentants des agents publics de participer à la détermination desdites conditions. Dans ces conditions, le comité souligne au gouvernement qu’il a l’obligation de mettre la législation en conformité avec les conventions ratifiées par le Pérou relatives à la négociation collective des salaires dans le secteur public (aux niveaux étatique, régional et local). Le comité prie le gouvernement de promouvoir la négociation collective dans les domaines où opèrent les organisations plaignantes (médecine légale, innovation agricole, électricité, qui certes font partie du secteur public mais qui ne se rapportent pas aux fonctionnaires publics commis à l’administration de l’Etat).
  17. 668. En rapport avec ce point, le comité prend dûment note de l’information transmise par le gouvernement selon laquelle, le 21 mai 2014, la Cour constitutionnelle siégeant en séance plénière a rendu une décision concernant l’action en inconstitutionnalité intentée par 34 membres du Congrès de la République contre plusieurs articles de la loi no 30057. Le comité note que même si on n’a pas atteint, conformément aux exigences de l’article 5 de la loi organique du Tribunal constitutionnel, la majorité des votes nécessaires pour déclarer fondés les moyens de droits de l’action relative à l’inconstitutionnalité de la loi no 30057 pour violation du droit à la négociation collective, trois des magistrats ont estimé que l’exclusion des compensations et des questions d’ordre budgétaire du champ de la négociation collective constitue une violation de ce droit constitutionnel et que les trois autres magistrats ont estimé que la loi ne sera constitutionnelle que si un mécanisme de consultation est mis en œuvre dans un délai de quatre-vingt-dix jours. Le comité prend note du fait que le gouvernement souligne que, dans les deux cas, les membres du Tribunal constitutionnel ont utilisé comme paramètre de constitutionnalité les normes de l’OIT ratifiées par le Pérou. A cet égard, le comité note qu’il ressort du texte de la décision, qui est à la disposition du public, que les six magistrats ont estimé que l’exclusion des compensations et des questions d’ordre budgétaire du champ de la négociation collective est contraire aux dispositions de la convention no 151 de l’OIT.
  18. 669. Le comité regrette que, malgré le fait que le gouvernement a annoncé en 2013 qu’il demanderait l’assistance technique du BIT, il n’ait pas concrétisé sa demande, et l’invite à nouveau à bénéficier de cette assistance dès que possible, eu égard notamment au fait que: 1) les modalités particulières de la négociation collective dans la fonction publique permettent que la négociation collective ait lieu avant ou après l’adoption du budget, étant entendu que, dans le cas du Pérou, les négociations salariales devraient avoir lieu au moment de la préparation des budgets de l’Etat; et que 2) comme l’a signalé le gouvernement, il est possible qu’une révision de la loi no 30057 ait lieu, notamment en ce qui concerne les articles 31.2, 42, 43 et 44 qui imposent des limites au droit à la négociation collective s’agissant des questions salariales ou des questions ayant une incidence économique.
  19. 670. Enfin, en ce qui concerne l’allégation présentée par l’organisation plaignante SUTRAIMELCIFOR selon laquelle la direction générale du ministère public l’a exclue du champ d’une résolution relative à la réalisation d’une enquête sur le nouveau barème des traitements et ne lui a pas permis de faire partie d’une commission chargée de proposer et de coordonner avec le ministère de l’Economie et des Finances le barème des traitements du ministère public pour l’année 2012, le comité note que le gouvernement indique que le bureau de conseil juridique du ministère public a fait savoir que, conformément à la loi de procédure administrative générale, il n’est pas possible de modifier la résolution de gestion générale du ministère public qui a exclu du champ l’organisation plaignante et que, si le ministère public n’a aucune obligation de constituer une commission pour analyser le barème des traitements pour l’année 2012, il a décidé de créer une commission spéciale à laquelle a participé un autre syndicat (le Syndicat des travailleurs du ministère public). Le comité prie le gouvernement de veiller à ce que, à l’avenir, le ministère public permette aux syndicats représentatifs au sein des institutions publiques, y compris le SUTRAIMELCIFOR (qui représente les travailleurs de l’Institut de médecine légale du pays), d’être consultés dans la détermination des barèmes de traitements, de telle sorte que les organisations syndicales concernées puissent évaluer la situation, exprimer leur point de vue et leur position, et débattre avec les autorités des considérations d’intérêt général que ces autorités jugent utile de souligner.
  20. 671. Le comité prie le gouvernement de transmettre ses observations en réponse aux allégations de la CTE-Perú du 17 octobre et du 5 décembre 2014, aux allégations de la FNTPJ du 13 octobre 2014, ainsi qu’aux allégations de la CATP du 26 décembre 2014.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 672. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité prie une nouvelle fois le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que les syndicats des entreprises publiques sont consultés dans la détermination du plafonnement des salaires dans le cadre du budget des entreprises publiques, de telle sorte que les organisations syndicales concernées puissent évaluer la situation, exprimer leur point de vue et leur position, et débattre avec les autorités des considérations d’intérêt général que, le cas échéant, ces autorités jugent utile de souligner.
    • b) Le comité souligne que le gouvernement est tenu de mettre sa législation en conformité avec les conventions qu’il a ratifiées concernant la négociation collective des salaires dans le secteur public (secteurs étatique, régional et local); le comité prie le gouvernement de promouvoir la négociation collective dans les domaines où opèrent les organisations plaignantes (médecine légale, innovation agricole, électricité).
    • c) Le comité prie le gouvernement de veiller à ce que, à l’avenir, le ministère public permette aux syndicats représentatifs au sein des institutions publiques, y compris le SUTRAIMELCIFOR, d’être consultés pour la détermination des barèmes de traitements afin que les organisations syndicales concernées puissent évaluer la situation, exprimer leur point de vue et leur position, et débattre avec les autorités des considérations d’intérêt général que, le cas échéant, ces autorités jugent utile de souligner.
    • d) Le comité prie le gouvernement s’attend fermement à ce que, à l’avenir, le gouvernement garantisse que, dans la pratique, les syndicats pourront participer aux consultations sur toute question ou tout projet de règlement affectant les droits des travailleurs qu’ils représentent.
    • e) Le comité prie le gouvernement de transmettre ses observations en réponse aux allégations de la CTE-Perú du 17 octobre et du 5 décembre 2014 mettant en cause des dispositions du nouveau règlement de la loi sur la fonction publique ayant un impact sur l’exercice des droits syndicaux, aux allégations de la FNTPJ du 13 octobre 2014 relatives à l’impact de la loi sur la fonction publique sur les travailleurs du pouvoir judiciaire, ainsi qu’aux allégations de la CATP du 26 décembre 2014.
    • f) Le comité regrette que, malgré le fait que le gouvernement a annoncé en 2013 qu’il demanderait l’assistance technique du BIT, il n’ait pas concrétisé sa demande, et l’invite de nouveau à en bénéficier.
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