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Interim Report - Report No 378, June 2016

Case No 3032 (Honduras) - Complaint date: 15-MAY-13 - Follow-up

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Allégations: Les organisations plaignantes allèguent la mort d’une syndicaliste, l’engagement de poursuites pénales, l’arrestation de syndicalistes, la déclaration d’illégalité de la grève par l’autorité administrative, des licenciements massifs pour la participation à des mobilisations, des restrictions au droit de grève et aux congés syndicaux et autres actions antisyndicales

  1. 357. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa réunion de mars 2015 et, à cette occasion, il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 374e rapport, paragr. 372-423.]
  2. 358. L’une des organisations plaignantes, la Confédération unitaire des travailleurs du Honduras (CUTH), a envoyé des informations additionnelles dans une communication en date du 12 juin 2015.
  3. 359. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications en date des 29 et 30 avril et 19 octobre 2015.
  4. 360. Le Honduras a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 361. Lors de son examen antérieur du cas, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 374e rapport, paragr. 423]:
    • a) Le comité prie les organisations plaignantes de fournir les informations en leur possession concernant la mort de Mme Ilse Ivania Velásquez Rodríguez en particulier si, comme l’indique le gouvernement, celle-ci a été occasionnée par un accident de voiture et d’indiquer si des personnes ont été arrêtées ou inculpées pour cette mort.
    • b) En ce qui concerne les procédures judiciaires entamées contre 24 enseignants pour les délits de sédition et d’association illicite et de leur arrestation qui s’en est suivie alors qu’ils participaient à une manifestation pacifique, le comité prie instamment le gouvernement de fournir sans délai des informations sur les faits concrets qui sont reprochés à ces enseignants, sur l’évolution des procédures judiciaires intentées et, le cas échéant, sur leur issue.
    • c) En ce qui concerne le conflit objet de la présente plainte, le comité prend note des allégations relatives à la suspension du régime économique prévu dans le Statut des enseignants honduriens en vertu de l’article 3 du décret-loi no 224-2010 du 28 octobre 2010, et à l’absence de paiement des augmentations salariales, le comité prie le gouvernement et les organisations plaignantes de tenter de trouver une solution négociée acceptable pour toutes les parties concernées, en conformité avec les principes de la liberté syndicale et de la négociation collective énoncés dans les conventions ratifiées portant sur ces sujets. Le comité s’attend à ce que les parties tiennent à l’avenir pleinement compte des principes mentionnés dans ses conclusions et prie le gouvernement de l’informer des résultats des négociations salariales prévues dans le décret-loi no 224-2010 du 28 octobre 2010.
    • d) Concernant l’allégation relative à la suspension de la déduction des cotisations syndicales en faveur des organisations d’enseignants, le comité souligne que la suspension de la déduction des cotisations syndicales porte atteinte aux droits syndicaux; il prie par conséquent le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que, si ce n’est pas encore le cas, toutes les organisations d’enseignants bénéficient à nouveau de la retenue à la source des cotisations syndicales de leurs affiliés.
    • e) Concernant la déclaration d’illégalité par le Secrétariat d’Etat aux bureaux du Travail et de la Sécurité sociale, qui a motivé l’adoption de la décision exécutoire no 15575-SE-2012 du 18 octobre 2012, et l’imposition consécutive des sanctions de déduction de salaire, de suspension temporaire ou de révocation, selon le cas, à des centaines d’enseignants, le comité prie le gouvernement et les organisations plaignantes de tenter de trouver une solution négociée acceptable pour toutes les parties concernées, en conformité avec les principes de la liberté syndicale et de la négociation collective énoncés dans les conventions ratifiées portant sur ces sujets, et il prie également le gouvernement de prendre des mesures pour modifier la législation de manière à ce que la légalité ou l’illégalité de la grève soit déclarée par un organe indépendant.
    • f) En ce qui concerne les allégations relatives à l’envoi, par le Secrétariat d’Etat au bureau de l’Education, de vérificateurs à chaque assemblée légalement convoquée, le comité souligne que la présence de représentants des autorités ou de l’employeur dans les assemblées syndicales constitue une ingérence en violation des principes de la liberté syndicale et de la négociation collective énoncés dans les conventions ratifiées portant sur ces sujets et il prie le gouvernement de s’assurer que de telles pratiques ne se reproduisent pas à l’avenir.
    • g) En ce qui concerne le refus des congés syndicaux demandés par de nombreux dirigeants, en vertu de la circulaire officielle no 0019-SE-2013 du 7 février 2013, le comité prie le gouvernement de renouer le dialogue avec les organisations plaignantes afin de trouver une solution rapide à cette situation et de l’informer sur l’issue de toutes les actions en justice entamées.
    • h) Le comité note avec regret que le gouvernement ne répond pas de manière suffisamment précise aux allégations relatives à: 1) l’exclusion des organisations d’enseignants de l’organe supérieur de l’administration de l’INPREMA; et 2) la répression des protestations motivées par l’absence de paiement des augmentations salariales des années 2010 à 2013. Le comité exhorte le gouvernement à envoyer sans délai ses observations à cet égard, en l’informant notamment sur les plaintes déposées auprès des autorités compétentes par les personnes ayant été victimes de répression policière au cours des protestations.
    • i) Par ailleurs, le comité prie les organisations plaignantes de fournir des informations plus détaillées sur les allégations portant sur: 1) la suspension unilatérale des comités de sélection des enseignants et des concours; 2) la demande de rapport sur les montants, l’utilisation et la gestion des fonds reçus à partir des déductions transférées aux organisations d’enseignants; 3) le lancement d’actions en responsabilité civile à l’encontre de quatre dirigeants du SINPRODOH, pour un montant de 49 070 777,49 lempiras; et 4) l’allégation de harcèlement au travail sans plus de précisions contre deux membres du COPEMH. Le comité prie les organisations plaignantes de transmettre toute information dont elles disposeront concernant ces allégations afin que le gouvernement puisse y répondre avec précision.
    • j) Le comité prie le gouvernement de transmettre ses observations au sujet de la communication en date du 23 janvier 2015 de la Centrale générale des travailleurs (CGT), de la Confédération unitaire des travailleurs du Honduras (CUTH) et d’autres organisations nationales concernant des allégations de sanctions à l’encontre de syndicalistes enseignants et d’autres restrictions aux droits syndicaux liés au conflit relatif au cas présent.

B. Informations complémentaires et nouvelles allégations d’une organisation plaignante

B. Informations complémentaires et nouvelles allégations d’une organisation plaignante
  1. 362. Dans une communication en date du 12 juin 2015, l’une des organisations plaignantes, la Confédération unitaire des travailleurs du Honduras (CUTH), fournit des informations supplémentaires sur certaines des recommandations formulées par le comité lors de son examen antérieur du cas (recommandations a) à e), g) et i)); de plus, elle présente de nouvelles allégations relatives à des restrictions au droit de réunion; à des modifications dans les conditions de travail des enseignants; et à des poursuites pénales contre les enseignants.
  2. 363. En ce qui concerne la recommandation a) du comité, l’organisation plaignante explique que, lors d’une manifestation d’enseignants, Mme Ilse Ivania Velásquez Rodríguez a subi un choc à la tête qui lui a fait perdre l’équilibre et tomber sur la chaussée avant d’être percutée par une voiture [dans un contexte de répression policière]; la cause de la mort, selon le rapport d’autopsie, est un œdème cérébral que l’organisation plaignante attribue à l’impact subi avant d’être percutée par une voiture. Elle ajoute que, à ce jour, selon les autorités, personne n’a été arrêté ni fait l’objet de poursuites.
  3. 364. En ce qui concerne la recommandation b) du comité, l’organisation plaignante signale que les 24 enseignants poursuivis sont toujours emprisonnés; que la procédure judiciaire a subi des retards liés à des reports arbitraires; et que les enseignants éprouvent un sentiment d’angoisse face à la perspective d’être condamnés.
  4. 365. En ce qui concerne la recommandation c) du comité, l’organisation plaignante indique qu’il n’y a pas eu de rapprochement de la part du gouvernement, en vue d’engager les négociations salariales prévues par le décret législatif no 224-2010, en date du 28 octobre 2010; il n’y a pas eu de hausse de salaire depuis l’année 2006.
  5. 366. En ce qui concerne la recommandation d) du comité, l’organisation plaignante déclare que le gouvernement a continué d’omettre de déduire les cotisations syndicales depuis le mois de février 2013; aucun transfert n’a donc été réalisé en faveur des organisations d’enseignants. Elle signale en outre que la loi sur l’Institut national de prévision sociale de l’enseignement (INPREMA), dans sa teneur modifiée par le décret législatif no 267-2013 en date du 22 janvier 2014, réglemente de manière arbitraire les cotisations syndicales, en imposant une limite au nombre de membres par organisation et un taux de cotisation de 49,32 lempiras.
  6. 367. S’agissant de la recommandation e) du comité, l’organisation plaignante allègue que d’autres enseignants ont été sanctionnés pour avoir assisté à des assemblées convoquées par les organisations d’enseignants.
  7. 368. Pour ce qui est de la recommandation g) du comité, l’organisation plaignante allègue que plusieurs dirigeants continuent de se voir refuser les congés syndicaux qu’ils ont sollicités.
  8. 369. Pour ce qui a trait à la recommandation h) 1) du comité, l’organisation plaignante dénonce le fait que le gouvernement gère l’Institut national de prévision sociale de l’enseignement (INPREMA) de manière unilatérale, en alléguant que les organisations d’enseignants n’y participent qu’en qualité de membres de l’assemblée des participants.
  9. 370. En ce qui concerne la recommandation i) 1) du comité, l’organisation plaignante explique que, par un communiqué en date du 11 septembre 2013, le Secrétariat d’Etat au bureau de l’Education a cherché à accréditer les membres des comités de sélection des enseignants uniquement dans seulement 5 des 18 départements du pays.
  10. 371. Par ailleurs, l’organisation plaignante allègue également que: le droit de réunion des organisations d’enseignants est restreint; les dirigeants des syndicats d’enseignants continuent de faire l’objet de persécutions et d’actes de harcèlement; en particulier, le droit de convoquer des assemblées en dehors des heures de travail ne leur est pas accordé, et les autorisations de tenir des réunions leur sont refusées. L’organisation plaignante présente également une série d’allégations relatives à des changements dans les conditions de travail.

C. Réponse du gouvernement

C. Réponse du gouvernement
  1. 372. Dans ses communications en date des 29 et 30 avril et 19 octobre 2015, le gouvernement fait parvenir les informations suivantes.
  2. 373. En ce qui concerne la recommandation a) du comité lors de son examen antérieur du cas, le gouvernement réitère que Mme Ilse Ivania Velásquez Rodríguez est morte écrasée par une voiture, et joint l’expertise médicale no A-600-11, établie par la Direction de la médecine légale. Il indique en outre qu’un conducteur, M. Carlos Eduardo Zelaya Ríos, a été inculpé d’homicide involontaire, et est dans l’attente d’un jugement définitif du tribunal pénal.
  3. 374. Pour ce qui a trait à la recommandation b) du comité, le gouvernement indique que l’arrêt définitif n’a pas encore été rendu en ce qui concerne les procédures judiciaires entamées contre 24 enseignants pour les délits de sédition et d’association illicite, alors qu’ils participaient à une manifestation.
  4. 375. En ce qui concerne la recommandation c) du comité, le gouvernement fait savoir que le décret législatif no 18-2010 du 28 mars 2010, qui contient la loi sur l’urgence fiscale et financière, a été prorogé à plusieurs reprises, ce qui fait que le régime économique prévu dans le Statut des enseignants honduriens reste suspendu. Le gouvernement explique que la politique d’augmentation des salaires des enseignants a été progressive et subordonnée aux possibilités économiques de l’Etat; par conséquent, la dernière augmentation de salaire des enseignants a été approuvée en juillet 2012.
  5. 376. S’agissant de la recommandation d) du comité, le gouvernement indique que la suspension de la déduction des cotisations syndicales en faveur des organisations d’enseignants a été temporaire, et motivée par le changement du système de paiement interne de la direction des ressources humaines du corps enseignant du Secrétariat d’Etat au bureau de l’Education. Il précise que le décret législatif no 267-2013, en date du 22 janvier 2014, portant sur les modifications à la loi sur l’Institut national de prévision sociale de l’enseignement (INPREMA), ne vise pas à ignorer le droit d’appartenir à une organisation d’enseignants, mais à protéger les investissements des enseignants; il n’interdit pas non plus l’octroi d’avantages sociaux par les organisations d’enseignants. Le gouvernement ajoute que la participation des enseignants aux comptes d’épargne prévisionnelle est volontaire.
  6. 377. Pour ce qui est de la recommandation e) du comité, le gouvernement indique que les dispositions législatives régissant les relations professionnelles entre l’Etat et le système éducatif public national ne prévoient pas de procédure pour déclarer l’illégalité d’une suspension collective de travail et que l’entité compétente en la matière est le Secrétariat d’Etat aux bureaux du Travail et de la Sécurité sociale. Le gouvernement réfute les arguments exposés par la Confédération unitaire des travailleurs du Honduras (CUTH) et indique qu’aucun enseignant n’a été sanctionné pour le simple fait d’avoir assisté aux assemblées convoquées par les organisations d’enseignants. Il explique que les sanctions imposées en vertu de la décision en question ne concernent que les enseignants qui ont abandonné leur travail dans les centres éducatifs en 2012.
  7. 378. En ce qui concerne la recommandation f) du comité, le gouvernement déclare que les allégations relatives à l’envoi par le Secrétariat d’Etat au bureau de l’Education de vérificateurs à chaque assemblée légalement convoquée n’ont pas été prouvées. Il ajoute que les assemblées d’enseignants se déroulent dans des lieux publics où peut être présente toute personne estimant y avoir un intérêt.
  8. 379. Pour ce qui est de la recommandation g) du comité, le gouvernement indique que, durant la période comprise entre 2011 et 2015, il a continué à accorder des congés pour les affaires syndicales pour autant que les demandeurs y aient droit. Il ajoute que plus de 50 dirigeants enseignants bénéficient actuellement de congés rémunérés.
  9. 380. S’agissant de la recommandation h) 1) du comité, le gouvernement explique que le conseil d’experts est l’organe supérieur de l’administration et de l’exécution de l’INPREMA, l’assemblée des participants et des cotisants étant l’organe de direction et de participation. Il ajoute que les organisations d’enseignants font partie de l’assemblée des participants et des cotisants, et ont des attributions dans la politique stratégique de l’institut. Il signale que la loi ne permet pas d’appartenir aux deux organes à la fois.
  10. 381. Pour ce qui est de la suspension unilatérale des comités de sélection des enseignants et des concours (recommandation i) 1) du comité), le gouvernement indique que les comités ont déjà été mis en place et précise que la législation n’exclut pas la participation des organisations d’enseignants.
  11. 382. En lien avec la recommandation j) de l’examen antérieur du cas, le gouvernement fournit les informations suivantes:
    • – Au sujet des sanctions prises à l’encontre de cinq dirigeants enseignants syndicaux du département de Cortés, Mme Reina Isabel Discua et MM. José Antonio Carvallo, José Antonio Alas, Wilson Mejía Fiallos et Reynaldo Inestrosa, il indique que la procédure administrative suit son cours. A ce jour, aucune sanction n’a été prise contre les enseignants susmentionnés, qui ne sont pas des dirigeants syndicaux de l’enseignement, et il n’a pas été établi qu’ils avaient droit à des congés syndicaux. Les procédures disciplinaires engagées par la Direction départementale de l’éducation de Cortés l’ont été pour négligence supposée dans l’exécution de leurs tâches (de direction et de sous-direction des centres éducatifs) et pour résistance à des ordres émanant de l’autorité compétente.
    • – En ce qui concerne la suspension du sous-directeur de l’Institut central Vicente Cáceres, M. Valentín Canales Bustillo, le gouvernement explique que la procédure disciplinaire a été engagée en raison de son refus d’assumer la direction de l’institut comme le prévoit la loi. M. Canales Bustillo a été réintégré après avoir subi la sanction imposée.
    • – Pour ce qui est de la publication au Journal officiel de 21 règlements de la loi fondamentale sur l’éducation, le gouvernement rappelle que ladite loi prévoit qu’il appartient au Secrétariat d’Etat au bureau de l’Education d’émettre les règlements correspondants. Ces règlements ne diminuent ni ne restreignent les droits reconnus par la Constitution; en outre, ils ont été approuvés à l’issue d’un processus de consultation de divers secteurs du corps enseignant, des parents et de la société civile.
    • – S’agissant de l’envoi d’une communication par la Commission nationale des banques et des assurances en novembre 2014, imposant le transfert des cotisations syndicales accumulées par chaque organisation syndicale à l’INPREMA lorsque des enseignants ont opté pour le compte d’épargne prévisionnelle, le gouvernement fait savoir que ce dernier est un compte individualisé qui améliore les prestations aux participants au moment de leur départ à la retraite, et que la participation des enseignants à ce compte est volontaire.
  12. 383. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles le droit de réunion des organisations d’enseignants est restreint, les dirigeants des syndicats d’enseignants continuent à faire l’objet de persécutions et d’actes de harcèlement, en particulier, le droit de convoquer des assemblées en dehors des heures de travail ne leur est pas accordé et les autorisations de tenir des réunions leur sont refusées, le gouvernement indique qu’il les réfute catégoriquement, précise que l’utilisation des installations physiques des centres éducatifs est réservée aux enfants, et qu’aucune demande d’organisation de journées de formation pédagogique n’a été présentée.
  13. 384. S’agissant des allégations relatives à des changements dans les conditions de travail, le gouvernement explique que de tels changements n’ont pas eu lieu et qu’il s’agit simplement de mettre en œuvre la disposition législative en vigueur. Pour ce qui est de l’accès à la carrière d’enseignant, il déclare qu’il a lieu désormais par voie de concours.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 385. Le comité rappelle que, dans le présent cas, les plaintes s’inscrivent dans un conflit de longue durée entre les organisations d’enseignants et le gouvernement, qui a donné lieu à des mobilisations et des grèves tout au long de la période allant de 2010 à 2013, ce conflit ayant été entre autres provoqué par la suspension du régime économique prévu dans le Statut des enseignants honduriens et par les retards dans le paiement des salaires dus. Le comité rappelle également que les allégations restées en suspens dans le présent cas concernent: 1) la mort d’une syndicaliste le 18 mars 2011, alors qu’elle participait à une manifestation pacifique; 2) les procédures judiciaires entamées contre 24 enseignants pour les délits de sédition et d’association illicite, et leur arrestation quand ils participaient à une manifestation pacifique; 3) l’exclusion des organisations d’enseignants de l’organe supérieur de l’administration de l’Institut national de prévision sociale de l’enseignement (INPREMA); 4) la suspension du régime économique prévu dans le Statut des enseignants honduriens et la désindexation du salaire minimum (empêchant de continuer à utiliser ce dernier comme référence pour l’augmentation automatique et directe des salaires); 5) l’absence de paiement des augmentations salariales des années 2010 à 2013 et la répression des protestations qu’elle a provoquées; 6) la déclaration d’illégalité des mobilisations par l’autorité administrative et les sanctions consécutives imposées à plus de 600 enseignants; 7) la suspension des déductions des cotisations syndicales en faveur des organisations d’enseignants; 8) l’adoption de la décision no 15096-SE-2012 du 30 juillet 2012, qui prévoit la prolongation de l’année scolaire en cas d’arrêts de travail ou de suspensions des cours; 9) le rejet des demandes de renouvellement des congés syndicaux; 10) la suspension unilatérale des comités de sélection des enseignants et des concours; 11) la demande d’un rapport sur les montants, l’utilisation et la gestion des fonds reçus à partir des déductions transférées aux organisations d’enseignants; 12) les cahiers de revendications de responsabilité civile notifiés à quatre dirigeants du Syndicat professionnel des enseignants honduriens (SINPRODOH), pour un montant de 49 070 777,49 lempiras; 13) le harcèlement au travail dont font l’objet deux membres du Collège des professeurs du premier cycle de l’enseignement secondaire du Honduras (COPEMH); et 14) les sanctions à l’encontre de syndicalistes enseignants et d’autres restrictions aux droits syndicaux.
  2. 386. En ce qui concerne la recommandation a), le comité observe que tant l’organisation plaignante que le gouvernement s’accordent sur le fait que la mort de Mme Ilse Ivania Velásquez Rodríguez a été causée par un œdème cérébral. Cependant, le comité constate le caractère contradictoire du récit des circonstances ayant conduit à cette mort; l’organisation plaignante allègue que, avant la collision avec un véhicule, la victime a souffert d’un coup à la tête qui lui a fait perdre l’équilibre et tomber sur la chaussée, dans un contexte de répression policière, et attribue l’œdème cérébral au coup sur la tête, alors que le gouvernement dément qu’il y ait eu une répression policière et attribue l’œdème cérébral uniquement à la collision. Le comité note que, selon les informations fournies par le gouvernement, un conducteur a été inculpé d’homicide involontaire et que l’affaire est toujours en instance. Le comité rappelle que l’assassinat ou la disparition de dirigeants syndicaux et de syndicalistes ou des lésions graves infligées à des dirigeants syndicaux et des syndicalistes exigent l’ouverture d’enquêtes judiciaires indépendantes en vue de faire pleinement et à bref délai la lumière sur les faits et les circonstances dans lesquelles se sont produits ces faits et ainsi, dans la mesure du possible, de déterminer les responsabilités, de sanctionner les coupables et d’empêcher que de tels faits se reproduisent. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 48.] Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des résultats de la procédure judiciaire.
  3. 387. Pour ce qui a trait à la recommandation b), le comité note que, selon les informations fournies par l’organisation plaignante, les enseignants sont toujours emprisonnés et la procédure judiciaire a subi des retards; situation qui n’a pas été démentie par le gouvernement, qui se borne à indiquer que l’arrêt définitif n’a pas encore été rendu. Le comité rappelle qu’une administration dilatoire de la justice constitue un déni de justice. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 105.] Observant avec préoccupation que l’emprisonnement des 24 enseignants a eu lieu en 2011 et que le gouvernement ne fournit toujours pas d’information sur les faits concrets qui leur sont reprochés, le comité souligne que la détention prolongée de personnes en attente de jugement implique un risque d’abus. Ainsi, le comité s’attend à ce que toutes les mesures nécessaires soient prises pour que les procédures judiciaires en cours aboutissent sans délai supplémentaire et que des mesures de mise en liberté provisoire soient prévues si les décisions judiciaires ne sont pas prises dans un proche avenir. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
  4. 388. En ce qui concerne la recommandation c), le comité prend note des déclarations de l’organisation plaignante, selon lesquelles il n’y a pas eu de rapprochement de la part du gouvernement, et des explications fournies par le gouvernement en ce qui concerne la prolongation de la suspension du régime économique prévu dans le Statut des enseignants honduriens, et la nécessité de s’adapter aux possibilités économiques de l’Etat. Le comité prie à nouveau le gouvernement et les organisations plaignantes de tenter de trouver une solution négociée acceptable pour toutes les parties concernées, en conformité avec les principes de la liberté syndicale et de la négociation collective énoncés dans les conventions ratifiées portant sur ces sujets. En outre, il prie le gouvernement de l’informer sur les résultats de toute négociation engagée dans ce sens.
  5. 389. S’agissant de la recommandation d), le comité prend note de la divergence entre les allégations de suspension continue de la déduction des cotisations syndicales et la réponse du gouvernement selon laquelle cette suspension a été temporaire. Le comité note à cet égard que le gouvernement présente une preuve documentaire, signée du sous-directeur général des ressources humaines du corps enseignant du Secrétariat d’Etat au bureau de l’Education, dans laquelle il est indiqué que les déductions salariales des enseignants correspondant à leurs cotisations syndicales versées aux organisations d’enseignants respectives fonctionnaient normalement. Compte tenu de cette preuve documentaire, tout en déplorant toute suspension survenue et convaincu que les déductions seront effectuées d’une manière normale, le comité, à moins qu’il ne reçoive de nouvelles informations de la part des organisations plaignantes à cet égard, ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
  6. 390. En outre, au sujet des allégations selon lesquelles la loi sur l’Institut national de prévision sociale de l’enseignement (INPREMA), dans sa teneur modifiée par le décret législatif no 267-2013 en date du 22 janvier 2014, réglemente de manière arbitraire les cotisations syndicales, le comité note que, en vertu de l’article 4 dudit décret législatif, «le Secrétariat d’Etat au bureau de l’Education, le Secrétariat d’Etat au bureau des Finances, et les écoles privées ne pourront effectuer aucune sorte de déduction en faveur des organisations d’enseignants qui différerait ou qui irait au-delà de celles prévues par ledit article. Le Secrétariat d’Etat au bureau de l’Education informera les instances pertinentes et les écoles privées, le cas échéant, afin que les déductions automatiques en faveur des organisations syndicales qui ne respectent pas les dispositions du précédent article soient annulées tant qu’une telle irrégularité persiste.» Le comité rappelle que: «Une restriction imposée par la loi du montant qu’une fédération peut recevoir des syndicats qui lui sont affiliés semble contraire au principe généralement accepté selon lequel les organisations de travailleurs doivent avoir le droit d’organiser leur gestion et leurs activités et celles des fédérations qu’elles constituent». [Voir Recueil, op. cit., paragr. 483.] Le comité prie le gouvernement d’envoyer sans délai ses observations à cet égard, en particulier sur la question de la portée de l’article 4 du décret législatif no 267-2013 en date du 22 janvier 2014, pour préciser comment le respect des droits des syndicats d’organiser leur gestion est garanti.
  7. 391. De même, pour ce qui est des allégations relatives à l’envoi d’une communication par la Commission nationale des banques et des assurances en novembre 2014, imposant le transfert des cotisations syndicales accumulées par chaque organisation syndicale à l’INPREMA lorsque des enseignants ont opté pour le compte d’épargne prévisionnelle, le comité, prenant note des indications du gouvernement selon lesquelles le compte d’épargne a un caractère volontaire, demande à l’organisation plaignante de lui fournir des informations plus détaillées à cet égard, y compris une copie de la communication en question.
  8. 392. En ce qui concerne la recommandation e), le comité prend note des explications fournies par le gouvernement relatives au champ limité des sanctions prises au titre de la décision exécutoire no 15575-SE-2012 du 18 octobre 2012, à la déclaration d’illégalité de la suspension collective de travail, et à la compétence du Secrétariat d’Etat aux bureaux du Travail et de la Sécurité sociale en la matière. Le comité rappelle que la décision de déclarer une grève illégale ne devrait pas appartenir au gouvernement mais à un organe indépendant et impartial. Le comité demande à nouveau au gouvernement de prendre des mesures pour modifier la législation de manière à ce que la légalité ou l’illégalité de la grève soit déclarée par un organe indépendant.
  9. 393. S’agissant de la recommandation f), le comité prend note du fait que le gouvernement est d’avis que les faits allégués n’ont pas été prouvés par les organisations plaignantes, et que toute personne ayant un intérêt particulier peut participer aux réunions en question puisqu’elles se tiennent dans des lieux publics. Tout en rappelant que, lorsqu’un représentant des autorités publiques a le droit d’être présent à des réunions syndicales, cela peut influencer les délibérations et les décisions adoptées (à plus forte raison si ce représentant a le droit d’intervenir dans les débats) et peut donc constituer une ingérence incompatible avec le principe de libre réunion syndicale [voir Recueil, op. cit., paragr. 132], le comité prie de nouveau le gouvernement de s’assurer que de telles pratiques ne se reproduisent à l’avenir.
  10. 394. Pour ce qui a trait à la recommandation g), le comité prend note des déclarations du gouvernement assurant que, entre 2011 et 2015, il a continué à accorder des congés pour les affaires syndicales pour autant que les demandeurs y aient droit. Dans ces conditions, à moins que les organisations plaignantes ne fournissent plus d’informations à ce sujet, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
  11. 395. Au sujet de la recommandation h), le comité prend note des explications fournies par le gouvernement au sujet de l’inclusion des organisations d’enseignants dans l’assemblée des participants et des cotisants, l’un des organes de direction, d’administration et de gestion de l’INPREMA. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
  12. 396. Le comité constate que le gouvernement ne mentionne pas les plaintes présentées par les victimes de la répression des protestations motivées par l’absence de paiement des augmentations salariales des années 2010 à 2013. Le comité exhorte à nouveau le gouvernement à envoyer sans délai ses observations à cet égard, en l’informant notamment sur les plaintes déposées auprès des autorités compétentes par les personnes ayant été victimes de répression policière au cours des protestations.
  13. 397. En ce qui concerne la recommandation i), le comité rappelle qu’il a demandé aux organisations plaignantes de fournir des informations plus détaillées sur les allégations portant sur: 1) la suspension unilatérale des comités de sélection des enseignants et des concours; 2) la demande de rapport sur les montants, l’utilisation et la gestion des fonds reçus à partir des déductions transférées aux organisations d’enseignants; 3) le lancement d’actions en responsabilité civile à l’encontre de quatre dirigeants du SINPRODOH, pour un montant de 49 070 777,49 lempiras; et 4) l’allégation de harcèlement au travail sans plus de précisions contre deux membres du COPEMH (recommandation i)) afin que le gouvernement puisse y répondre avec précision. En l’absence des informations complètes demandées aux organisations plaignantes, et prenant note des informations fournies par le gouvernement indiquant que les comités ont déjà été mis en place et précisant que la législation n’exclut pas la participation des organisations d’enseignants, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.
  14. 398. S’agissant de la recommandation j), le comité prend note des informations fournies par le gouvernement concernant: 1) les cinq enseignants du département de Cortés contre qui des procédures disciplinaires ont été engagées pour négligence supposée dans l’exécution de leurs tâches et pour résistance à des ordres émanant de l’autorité compétente, précisant que ces personnes ne sont pas dirigeants syndicaux enseignants, ne semblent pas bénéficier de congés syndicaux et n’ont pas fait l’objet de sanctions: 2) la réintégration du sous-directeur de l’Institut central Vicente Cáceres après avoir subi la sanction imposée; 3) l’approbation et la publication de 21 règlements de la loi fondamentale sur l’éducation, conformément à la loi en question, à l’issue d’une procédure de consultation de divers secteurs. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.
  15. 399. Au sujet des nouvelles allégations selon lesquelles le droit de réunion des organisations d’enseignants est restreint, les dirigeants des syndicats d’enseignants continuent à faire l’objet de persécutions et d’actes de harcèlement, en particulier, le droit de convoquer des assemblées en dehors des heures de travail ne leur est pas accordé et les autorisations de tenir des réunions leur sont refusées, le comité prie l’organisation plaignante de fournir des informations plus détaillées en la matière.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 400. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite de nouveau le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des résultats de la procédure judiciaire engagée en raison de la mort de Mme Ilse Ivania Velásquez Rodríguez.
    • b) En ce qui concerne les procédures judiciaires entamées contre 24 enseignants pour les délits de sédition et d’association illicite et leur arrestation qui s’en est suivie alors qu’ils participaient à une manifestation pacifique, le comité s’attend à ce que toutes les mesures nécessaires soient prises pour que les procédures judiciaires en cours aboutissent sans délai supplémentaire et que des mesures de mise en liberté provisoire soient prévues si les décisions judiciaires ne sont pas prises dans un proche avenir. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
    • c) En ce qui concerne la suspension du régime économique prévu dans le Statut des enseignants honduriens en vertu de l’article 3 du décret-loi no 224-2010 du 28 octobre 2010, le comité prie à nouveau le gouvernement et les organisations plaignantes de tenter de trouver une solution négociée acceptable pour toutes les parties concernées, en conformité avec les principes de la liberté syndicale et de la négociation collective énoncés dans les conventions ratifiées portant sur ces sujets. Il prie le gouvernement de l’informer sur les résultats de toute négociation engagée dans ce sens.
    • d) Pour ce qui est de la réglementation arbitraire des cotisations sociales par le décret législatif no 267-2013 en date du 22 janvier 2014, le comité prie le gouvernement d’envoyer sans délai ses observations à cet égard, en particulier sur la question de la portée de l’article 4 du décret législatif en question pour préciser comment le respect des droits des syndicats d’organiser leur gestion est garanti.
    • e) Pour ce qui est de l’envoi d’une communication par la Commission nationale des banques et des assurances, en novembre 2014, imposant le transfert de la cotisation syndicale accumulée par chaque organisation syndicale à l’INPREMA, lorsque des enseignants ont opté pour le compte d’épargne prévisionnelle, le comité prie l’organisation plaignante de lui fournir des informations plus détaillées à cet égard, y compris une copie de la communication en question.
    • f) Concernant la déclaration d’illégalité par le Secrétariat d’Etat aux bureaux du Travail et de la Sécurité sociale, qui a motivé l’adoption de la décision exécutoire no 15575-SE-2012 du 18 octobre 2012, et l’imposition consécutive des sanctions de déduction de salaire, de suspension temporaire ou de révocation, selon le cas, à des centaines d’enseignants, le comité prie à nouveau le gouvernement de prendre des mesures pour modifier la législation de manière à ce que la légalité ou l’illégalité de la grève soit déclarée par un organe indépendant.
    • g) En ce qui concerne les allégations relatives à l’envoi, par le Secrétariat d’Etat au bureau de l’Education, de vérificateurs à chaque assemblée légalement convoquée, le comité, rappelant que la présence d’un représentant des autorités publiques ou de l’employeur dans des réunions syndicales constitue une ingérence incompatible avec le principe de libre réunion syndicale prescrit dans les conventions ratifiées sur la liberté syndicale et la négociation collective, prie de nouveau le gouvernement de s’assurer que de telles pratiques ne se reproduisent à l’avenir.
    • h) S’agissant de la répression des protestations motivées par l’absence de paiement des augmentations salariales des années 2010 à 2013, le comité prie à nouveau instamment le gouvernement d’envoyer sans délai ses observations à cet égard, en l’informant notamment sur les plaintes déposées auprès des autorités compétentes par les personnes ayant été victimes de répression policière au cours des protestations.
    • i) Par ailleurs, le comité prie l’organisation plaignante de fournir des informations plus détaillées concernant: 1) l’envoi d’une communication par la Commission nationale des banques et des assurances, en novembre 2014, imposant le transfert de la cotisation syndicale accumulée par chaque organisation syndicale à l’INPREMA lorsque des enseignants ont opté pour le compte d’épargne prévisionnelle; et 2) les restrictions au droit de réunion des organisations d’enseignants et les actes de persécution et de harcèlement contre les dirigeants des syndicats d’enseignants.
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