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Report in which the committee requests to be kept informed of development - Report No 397, March 2022

Case No 3401 (Malaysia) - Complaint date: 30-DEC-20 - Follow-up

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Allégations: L’organisation plaignante allègue que le gouvernement n’a pas assuré, en droit et en pratique, la protection voulue face à la commission répétée par l’employeur d’actes antisyndicaux à l’encontre de ses membres, parmi lesquels des responsables et des adhérents ont notamment fait l’objet de harcèlement, de traitements injustes et de licenciements, ainsi que face à la violation par l’employeur d’un accord conclu et aux retards délibérés qu’il a imposés à la négociation d’une convention collective

  1. 480. La plainte figure dans une communication de l’Union nationale des employés de banque (NUBE) en date du 30 décembre 2020.
  2. 481. Le gouvernement a présenté ses observations dans des communications en date des 10 avril, 30 septembre 2021 et 28 janvier 2022.
  3. 482. La Malaisie a ratifié la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, mais elle n’a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 483. Dans sa communication en date du 30 décembre 2020, l’organisation plaignante allègue que le gouvernement n’a pas assuré, en droit et en pratique, la protection voulue face à la commission répétée par la Hong-kong and Shanghai Banking Corporation (HSBC) Bank Malaysia Berhad (ci-après «la banque») d’actes antisyndicaux à son encontre et à l’encontre de ses membres, parmi lesquels des responsables et des adhérents ont notamment fait l’objet de harcèlement, de traitements injustes et de discrimination antisyndicale, et ainsi que face à la violation par la banque d’un accord conclu et aux retards délibérés qu’elle a imposés à la négociation d’une convention collective.
  2. 484. L’organisation plaignante allègue, plus particulièrement, que la banque a délibérément retardé les négociations visant à conclure une convention collective pour la période 2016-2019, et que ces négociations ont finalement abouti à une impasse lorsqu’elle a refusé quatre articles importants, alors que les questions dont ils traitaient avaient fait l’objet d’un accord dans le cadre d’une convention collective nationale applicable à 21 banques. Elle argue de ce qu’elle est entrée dans un conflit du travail avec la banque en septembre 2018 en recourant à la grève (organisant des piquets de grève et une campagne syndicale via les médias sociaux), du fait que le gouvernement n’offrait pas de mécanisme efficace de facilitation des négociations. La convention collective a finalement été signée en juillet 2019.
  3. 485. L’organisation plaignante allègue, en outre, que la banque n’a pas respecté un accord conclu avec elle en 2010 aux termes duquel l’employeur était tenu de consulter le syndicat avant de procéder à des restructurations et d’externaliser des emplois occupés par des salariés permanents. Or, invoquant un sureffectif lié à l’automatisation et à l’externalisation des tâches, la banque a mis en œuvre des plans de départ volontaire en 2015 et 2017, puis a imposé un nouveau plan en 2019, sans avoir recueilli au préalable l’accord de la NUBE. Bien que le syndicat ait tenté à maintes reprises de l’amener à respecter l’accord conclu, la banque, faisant valoir le caractère non contraignant de cet instrument, a soutenu qu’elle n’était tenue à aucune consultation avant de procéder à des restructurations. Dans une décision rendue en octobre 2019, le tribunal du travail a jugé que ledit accord était nul, car il ne l’avait pas validé, mais l’organisation plaignante fait cependant valoir que, même s’il n’a pas été déposé auprès tribunal du travail à titre de convention collective, il s’agit d’un avenant adopté à l’issue d’un conflit du travail et exprimant le consensus trouvé par les parties. L’organisation plaignante a donc interjeté appel auprès de la Haute Cour contre la décision d’octobre 2019. Elle estime que la banque tire profit des incertitudes de la situation découlant de la pandémie de COVID 19 et persiste à ignorer l’accord de 2010, ce qui révèle des manquements de la part des services d’inspection du travail du ministère.
  4. 486. Concernant les questions touchant à la négociation collective, l’organisation plaignante allègue aussi que la législation du travail en vigueur fait obstacle à la promotion de ce droit et ne favorise pas le règlement des conflits collectifs. Elle fait valoir, en particulier, que les questions relatives au licenciement, à la promotion, au recrutement et au transfert sont exclues du champ de la négociation, ce qui donne un avantage à l’employeur dans les procédures disciplinaires. En outre, compte tenu de l’absence de disposition prévoyant des mécanismes de conciliation et de médiation efficaces, les conflits dont le ministère est saisi pour conciliation finissent devant le tribunal du travail, qui les tranche sans qu’aucun processus de conciliation ou de médiation ne soit intervenu, et, une fois que le ministère ou le tribunal du travail ont été saisis du conflit, les syndicats ne peuvent plus recourir à la grève.
  5. 487. L’organisation plaignante allègue de surcroît le fait que ses membres aient été systématiquement visés par une série d’actes antisyndicaux. En premier lieu, elle affirme que certains travailleurs ont fait l’objet de traitements injustes en raison de leur adhésion au syndicat, expliquant notamment qu’ils ont reçu des lettres d’avertissement de la banque et se sont trouvés artificiellement promus à des postes d’encadrement pour réduire le nombre d’adhérents, car les cadres ne peuvent se syndiquer. Elle allègue, en second lieu, que des membres de la NUBE ont subi des actes de harcèlement et des menaces de la part de la police au cours de la grève de septembre 2018 en raison de l’exercice de leur droit de réunion pacifique et de leur participation à des piquets de grève. À la suite de la grève, deux représentants syndicaux membres de la Commission travailleurs-employeurs, Mme Sarimah Binti Awang Senik et M. T. Sethupathy (également responsable syndical de la NUBE) ont été suspendus puis licenciés, et un autre représentant syndical, M. Arshad Bin Amran, a été suspendu avant d’être réintégré. Bien que des employés de la banque aient pris part au même conflit du travail et aux mêmes actions dans tout le pays, l’employeur a délibérément visé ces trois syndicalistes parmi les membres de la NUBE de Kuala Lumpur dans le but de les empêcher de poursuivre leur action syndicale légitime et de décourager d’autres syndicalistes. Les lettres motivées qui leur ont été adressées allèguent qu’en prenant part à des actions syndicales ils auraient agi de manière contraire aux intérêts de la banque, ce qui constituerait une violation de leurs obligations à son égard. M. Sethupathy et Mme Sarimah ont contesté les décisions de la banque, mais leurs recours ont été rejetés. Ils ont également saisi le tribunal du travail, sans résultat à ce jour. L’organisation plaignante allègue que 19 autres de ses membres ont également reçu des lettres de réprimande motivées ainsi que des avertissements visant à les dissuader de participer à toute grève à venir, et que la banque a aussi pris des mesures disciplinaires à l’encontre d’autres syndicalistes ayant pris part à la grève. Elle affirme que les actes de l’employeur violent les articles 4, 5(d), 39(a) et 59(d) de la loi sur les relations professionnelles (IRA), et a porté plainte en ce sens auprès du ministère des Ressources humaines en avril 2019. Elle indique que le Département des relations professionnelles procède toujours aux auditions des syndicalistes lésés, et que ceux-ci se sont vu refuser la présence de représentants syndicaux lors des auditions contrairement à la pratique admise en matière de conciliation et de médiation. Les affaires relatives au licenciement des deux syndicalistes sont en attente de jugement devant le tribunal du travail, auquel il faudra probablement beaucoup de temps pour se prononcer.
  6. 488. En outre, l’organisation plaignante estime que le fait d’imposer un plan de départ volontaire à ses membres en violation de l’accord de 2010, ainsi qu’il est expliqué ci-dessus, constitue également un comportement antisyndical. Elle affirme qu’un grand nombre d’entre eux a été contraint d’y adhérer – 97 se sont vu obligés d’accepter un départ volontaire en 2015, puis 120 en 2017, et au total près de 500 membres de la NUBE ont indirectement subi des menaces ou des actes d’intimidation visant à les inciter à adhérer au plan de départ volontaire sous peine de mesures disciplinaires, y compris de licenciement. L’organisation plaignante a porté ces questions à l’attention du ministère des Ressources humaines, en novembre 2020 notamment, mais celui-ci n’a pas donné suite. Elle allègue de surcroît que la banque empêche les responsables syndicaux d’accéder aux lieux de travail pour rencontrer des adhérents. Elle mentionne à titre d’exemple une réunion organisée en novembre 2019 au sein de la filiale de Petaling Jaya pour permettre aux employés d’exprimer leurs revendications. Lors de cette réunion, le directeur de la filiale a fait savoir à Mme Sarimah qu’elle ne pouvait y participer du fait qu’elle avait été licenciée, et il lui a demandé de quitter les locaux. Des adhérents ayant insisté pour poursuivre la réunion avec le secrétaire de la NUBE au sein de la filiale, le directeur a menacé d’appeler la sécurité, puis l’a finalement fait, obligeant les responsables syndicaux à quitter les lieux. Selon l’organisation plaignante, les agissements décrits ci-dessus à l’encontre de membres de la NUBE sont constitutifs de harcèlement, de représailles, de mises à la retraite d’office et de discrimination antisyndicale en raison de l’exercice d’activités syndicales légitimes.
  7. 489. L’organisation plaignante allègue, en outre, que la banque n’a pas fait montre d’un esprit coopératif dans le cadre des conflits susmentionnés, et elle affirme que, ayant tenté à plusieurs reprises d’engager un véritable dialogue avec elle pour régler les problèmes en suspens, la banque a refusé de la rencontrer au prétexte de la pandémie de COVID 19. Elle ajoute que la banque est membre de l’Association des banques commerciales malaisiennes (Malaysian Commercial Banks’ Association (MCBA)) avec laquelle la NUBE a créé une commission permanente, qui fait partie intégrante du processus obligatoire de règlement des conflits prévu par l’accord collectif en vigueur entre la MCBA et la NUBE, auquel la banque est également partie. Or, cette commission permanente ayant été saisie du conflit en cours en vue de procéder à une médiation, la banque a refusé d’assister à la réunion, déclarant qu’elle préférait se tourner vers les tribunaux.
  8. 490. L’organisation plaignante considère également que le ministère des Ressources humaines n’a pas assuré aux travailleurs une protection effective face aux atteintes croissantes portées aux droits syndicaux, cette considération s’appliquant à tous les aspects du présent cas. Elle allègue, en particulier, que le ministère n’est pas intervenu en faveur de l’application de l’accord de 2010, qu’il n’a pas facilité la négociation d’une nouvelle convention collective, ni garanti l’exercice légitime de la grève et protégé les travailleurs contre les mesures discriminatoires qui les visaient, alors même qu’elle avait déposé deux plaintes auprès des fonctionnaires chargés des relations professionnelles au titre des articles 39(a) et 59(1)(d) de l’IRA. Selon l’organisation plaignante, le ministère a refusé de dialoguer et de coopérer avec la NUBE à la réalisation d’une inspection du travail conjointe, qu’elle avait demandée au regard des différentes violations de la liberté syndicale et du droit de négociation collective qu’elle alléguait; et, lors de l’inspection qui a eu lieu en décembre 2020, le Département du travail n’a pas répondu aux préoccupations soulevées par le syndicat quant aux sanctions prises à l’encontre de certains travailleurs. Enfin, l’organisation plaignante soutient que les agissements de la banque conjugués à l’inefficacité des mesures gouvernementales engendrent un recul de la sécurité syndicale, favorisent les attaques contre le syndicat et tendent à affaiblir les droits syndicaux. L’organisation plaignante estime donc que le ministère devrait prendre les mesures voulues pour faire en sorte de veiller à ce que: le conflit soit réglé et tous les travailleurs qui ont été licenciés soient réintégrés avec une indemnisation adéquate; la banque retire son plan de départ volontaire et ouvre des négociations avec le syndicat sur cette question; et la banque, le ministère et le tribunal du travail reconnaissent la valeur juridique contraignante de l’accord de 2010.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 491. Dans ses communications en date des 10 avril et 30 septembre 2021 et du 28 janvier 2022, répondant aux allégations selon lesquelles il n’aurait pas pris les mesures voulues pour faciliter les négociations entre le syndicat et la banque, le gouvernement indique que, ayant reçu une plainte du syndicat au sujet de l’impasse dans laquelle se trouvaient les négociations, le Département des relations professionnelles a organisé entre août et novembre 2018 quatre réunions de conciliation entre les parties. Celles-ci n’étant pas parvenues à un accord amiable, le tribunal du travail a été saisi de l’affaire en décembre 2018. Le conflit a finalement fait l’objet d’un règlement extrajudiciaire et les deux parties ont déposé conjointement la convention collective qu’elles ont conclue auprès du tribunal du travail pour que celui-ci la valide officiellement, ce qu’il a fait en 2019. Cette quatrième convention collective a été considérée comme ayant été en vigueur de juillet 2016 à juin 2019, et le conflit tenu pour réglé.
  2. 492. Pour ce qui est des allégations portant sur le non-respect par la banque de l’accord de 2010 sur l’externalisation et la restructuration, le gouvernement affirme qu’en octobre 2019 le tribunal du travail a jugé que cet accord était dépourvu d’effet juridique. La NUBE a alors déposé un recours devant la Haute Cour de Malaisie, qui l’a déboutée en décembre 2021.
  3. 493. Concernant les allégations selon lesquelles la législation en vigueur ne garantirait pas comme il convient le droit à la négociation collective ni le règlement des conflits collectifs, le gouvernement répond que, tout en prenant note de cette préoccupation, il considère que l’article 13(3) de l’IRA, en ce qu’il concerne des questions touchant à la gestion du personnel, vise à préserver l’harmonie des relations entre employeurs et travailleurs et à accélérer le processus de négociation collective. Selon lui, les restrictions apportées au champ des négociations par cette disposition ne sont pas contraignantes et rien n’empêche les deux parties, si elles en conviennent ainsi, de négocier sur des questions se rapportant à la promotion, au transfert, au recrutement, à la fin de contrat, au licenciement, à la réintégration et à l’affectation ou à l’attribution des tâches. Le gouvernement indique également que cette disposition a été révisée récemment en vue de permettre aux organisations syndicales de soulever des questions d’ordre général sur ces différents sujets dans le cadre de toute discussion avec les employeurs, y compris toute négociation collective.
  4. 494. Concernant les traitements injustes que certains travailleurs auraient subis en raison de leurs activités syndicales, le gouvernement indique qu’aucune plainte n’a été déposée auprès du Département des relations professionnelles au titre de l’article 8 de l’IRA, mais que des plaintes fondées sur les articles 39(a) et 59(d) de cette loi sont en cours d’instruction. En réponse à l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle les syndicalistes concernés n’ont pas été autorisés à se faire assister par des représentants syndicaux pendant les auditions, le gouvernement souligne que les intéressés sont directement interrogés par l’enquêteur, et qu’aucune autre personne, pas même un représentant syndical, n’est autorisée à participer à l’enquête, car il ne s’agit pas d’un processus de conciliation ou de médiation. Concernant le conflit du travail relatif au licenciement de deux membres de la NUBE, le gouvernement indique que, dans l’affaire de Mme Sarimah, les audiences devaient se tenir entre avril et octobre 2020 et, dans l’affaire de M. Sethupathy, entre décembre 2020 et janvier 2021, mais qu’elles n’ont pu avoir lieu en raison de la pandémie de COVID 19 et ont été reportées, dans les deux cas, à janvier et avril 2022. Il ajoute que, contrairement à ce que prétend l’organisation plaignante, la législation ne restreint pas les droits des travailleurs occupant des fonctions de direction, d’encadrement, ou des fonctions soumises à une obligation de confidentialité ou liées à la sécurité de créer un syndicat et d’exercer le droit de négociation collective, mais elle dispose que, pour éviter des conflits d’intérêt, les syndicats constitués par ces catégories de travailleurs ne peuvent représenter les travailleurs d’autres catégories.
  5. 495. Le gouvernement conclut en indiquant que le Département du travail a apporté son concours au règlement du conflit et cherché à le faciliter en appelant à diverses reprises les deux parties à se réunir pour dialoguer et en procédant à des inspections dans les locaux de l’employeur. Il fait également valoir qu’il a appelé l’attention sur la question des licenciements et demandé à l’employeur de les notifier au Département du travail avec un préavis de trente jours. Ainsi, le gouvernement s’est efforcé de faciliter la résolution du conflit conformément à la législation interne, dans le respect des normes internationales du travail, et réaffirme sa détermination à défendre la justice sociale et l’harmonie des relations entre employeurs et travailleurs en collaborant avec les parties prenantes concernées et en les consultant régulièrement.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 496. Le comité observe que le présent cas porte sur des allégations selon lesquelles le gouvernement n’a pas assuré, en droit et en pratique, la protection voulue face à la commission répétée d’actes antisyndicaux par l’employeur à l’encontre de la NUBE et de ses membres, parmi lesquels des responsables et des adhérents auraient notamment fait l’objet de harcèlement, de traitements injustes et de licenciements antisyndicaux, ainsi que face à la violation par l’employeur d’un accord conclu et aux retards délibérés qu’il aurait imposés à la négociation d’une convention collective.
  2. 497. Le comité note que l’organisation plaignante allègue qu’une série d’atteintes ont été portées en pratique au droit à la négociation collective. Elle allègue, en premier lieu, qu’agissant en violation d’un accord de 2010, qui faisait obligation à l’employeur de consulter le syndicat avant de procéder à des restructurations dans l’entreprise, la banque a imposé à plusieurs reprises un plan de départ volontaire à des membres de la NUBE (question qui sera traitée de manière plus détaillée ci-après) sans avoir recueilli au préalable l’accord du syndicat, affirmant que l’accord n’était pas contraignant et qu’elle n’était tenue à aucune consultation avant de procéder à des restructurations. Le comité note que l’organisation plaignante considère ledit accord comme un instrument juridiquement contraignant, qui exprime le consensus trouvé par les parties à l’issue d’un conflit du travail, et qu’elle allègue sa violation par la banque, mais que le gouvernement ne répond pas de manière détaillée à cette allégation, se contentant de renvoyer à la décision rendue en octobre 2019 par le tribunal du travail dans laquelle celui-ci a jugé que l’accord n’était pas valide car il n’avait pas été enregistré auprès de lui. Tout en notant qu’il ne dispose pas d’une copie de cet accord, ni d’aucune autre précision concernant sa nature juridique, le comité souhaite réaffirmer que le respect mutuel des engagements pris dans les accords collectifs est un élément important du droit de négociation collective et doit être sauvegardé pour fonder les relations professionnelles sur des bases solides et stables. Les accords doivent être obligatoires pour les parties. Le comité a souligné l’importance qu’il attache à ce que les gouvernements consultent les organisations syndicales en vue d’examiner les conséquences des programmes de restructuration sur l’emploi et sur les conditions de travail des salariés. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 1336, 1334 et 1555.] En conséquence, lorsqu’un accord conforme au droit est conclu entre les parties, celles-ci devraient s’efforcer de bonne foi d’en respecter les dispositions.
  3. 498. En second lieu, le comité note que l’organisation plaignante allègue les retards injustifiés imposés par la banque aux négociations visant à conclure une convention collective pour la période 2016 2019, et l’absence d’esprit coopératif dont elle a fait preuve dans la recherche d’une solution aux questions en suspens, révélée par son refus de participer aux réunions de la Commission permanente MCBA/NUBE – mécanisme obligatoire de règlement des conflits prévu par la convention collective en vigueur –, ainsi que par son refus de rencontrer le syndicat au prétexte de la pandémie de COVID 19. L’organisation plaignante allègue également que le conflit a dû être porté devant le tribunal du travail du fait que le gouvernement n’a pas offert de mécanisme efficace de facilitation des négociations, ce qui a retardé la signature de la convention collective jusqu’à juillet 2019. Le comité note que, si le gouvernement ne conteste pas le comportement dilatoire de la banque dans les négociations alléguées par l’organisation plaignante ni son absence d’esprit coopératif, il réfute les allégations concernant sa propre inaction, affirmant qu’il a appelé à diverses reprises les parties à se réunir pour dialoguer et organisé des réunions de conciliation, mais que le conflit a été tranché devant le tribunal du travail en raison de leur incapacité à trouver un accord. Le comité souhaite rappeler d’emblée qu’il importe qu’employeurs et syndicats participent aux négociations de bonne foi et déploient tous leurs efforts pour aboutir à un accord, des négociations véritables et constructives étant nécessaires pour établir et maintenir une relation de confiance entre les parties. Le principe selon lequel les employeurs comme les syndicats doivent négocier de bonne foi et s’efforcer de parvenir à un accord suppose que soit évité tout retard injustifié dans le déroulement des négociations. [Voir Compilation, paragr. 1328 et 1330.] Le comité rappelle en outre que, dans le cas où les négociations engagées n’ont pas pu aboutir à cause de désaccords, le gouvernement devrait envisager avec les parties des voies de sortie d’un tel blocage par un mécanisme de conciliation ou de médiation ou, si les désaccords persistaient, via l’arbitrage d’un organe indépendant ayant la confiance des parties. [Voir Compilation, paragr. 1322.] Le comité note à cet égard que, bien que le gouvernement ait organisé un certain nombre de réunions de conciliation et que le tribunal du travail ait été saisi du conflit, la convention collective n’a été signée que quelques mois avant la fin de la période pendant laquelle elle était censée s’appliquer, de sorte qu’elle a perdu une grande partie de son intérêt. Le comité veut croire que les parties mèneront toutes négociations futures entre elles de bonne foi et qu’elles chercheront à éviter des retards excessifs en ayant à l’esprit les avantages d’un dialogue constructif pour établir et entretenir des relations harmonieuses entre employeurs et travailleurs. Le comité s’attend à ce que le gouvernement continue de prendre toutes les mesures nécessaires pour faciliter de telles négociations entre les parties.
  4. 499. En ce qui concerne les allégations relatives aux lacunes de la législation en matière de négociation collective, le comité observe que, si l’organisation plaignante et le gouvernement conviennent de ce que l’article 13(3) de l’IRA impose certaines restrictions au champ de la négociation, leurs avis divergent au sujet de l’effet réel de ces restrictions. L’organisation plaignante allègue que la loi limite le champ de la négociation dans la mesure où les questions touchant au licenciement, à la promotion, au recrutement et au transfert en sont exclues, ce qui donnerait un avantage à l’employeur dans les procédures disciplinaires, tandis que le gouvernement fait valoir que les restrictions prévues à l’article 13(3) ne sont pas contraignantes et que rien n’empêche donc les parties de convenir de négocier sur ces questions, précisant en outre que la modification récemment apportée à cette disposition permet aux organisations syndicales de soulever des questions d’ordre général sur ces différents sujets au cours de toute discussion, y compris tout processus de négociation collective. Le comité constate à cet égard que si, d’un côté, l’article 13(3) de l’IRA dispose en effet que les syndicats ne peuvent faire figurer dans leurs propositions de négociation certaines questions ayant trait pour l’essentiel aux conditions d’emploi, lesquelles devraient être considérées comme relevant du champ de la négociation collective, d’un autre côté, il autorise en même temps les syndicats à soulever des questions d’ordre général sur ces mêmes sujets, y compris dans le cadre de toute négociation collective. Observant le manque de clarté quant à l’application pratique de cette disposition telle que modifiée et à ses effets sur le champ des questions négociables, le comité souhaite rappeler que des mesures devraient être prises pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d’employeurs, d’une part, et les organisations de travailleurs, d’autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d’emploi. Le droit de négocier librement avec les employeurs au sujet des conditions de travail constitue un élément essentiel de la liberté syndicale, et les syndicats devraient avoir le droit, par le moyen de négociations collectives ou par tout autre moyen légal, de chercher à améliorer les conditions de vie et de travail de ceux qu’ils représentent, et les autorités publiques devraient s’abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l’exercice légal. Toute intervention de ce genre semblerait une violation du principe selon lequel les organisations de travailleurs et d’employeurs ont le droit d’organiser leur gestion et leur activité et de formuler leur programme d’action. [Voir Compilation, paragr. 1231 et 1232.] Le comité observe également à cet égard que la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations (ci-après «la commission d’experts») avait déjà prié le gouvernement à modifier l’article 13(3) de la loi sur les relations professionnelles afin de supprimer les larges restrictions qu’il impose au champ de la négociation collective. Dans ses dernières observations, la commission d’experts avait accueilli favorablement la révision de cette disposition visant à autoriser les syndicats à soulever des questions d’ordre général en lien avec les sujets susmentionnés, et elle avait prié le gouvernement de préciser ses conséquences concrètes sur le champ des négociations collectives en expliquant comment jouera en pratique la possibilité de soulever des questions d’ordre général sur les sujets visés par les restrictions. Compte tenu de ce qui précède, le comité prie le gouvernement de fournir à la commission d’experts plus ample information sur l’application pratique de l’article 13(3) de l’IRA, tel que modifié, en particulier sur la façon dont s’articulent les restrictions imposées par ce texte concernant les sujets négociables et la possibilité de soulever des questions d’ordre général sur ces mêmes sujets, et il renvoie à la commission d’experts cet aspect législatif du présent cas.
  5. 500. Le comité note, en outre, que l’organisation plaignante allègue la commission répétée d’actes antisyndicaux à l’encontre de ses responsables et de ses membres en raison tant de leur affiliation que de leurs activités syndicales. En particulier, elle fait état de ce que certains travailleurs auraient fait l’objet de traitements injustes, expliquant qu’ils ont reçu des lettres d’avertissement ou été promus à des postes d’encadrement dans le but de réduire le nombre d’adhérents; elle fait également état de la commission d’actes de harcèlement par la police et par la banque au cours de la grève de septembre 2018 et à la suite de celle-ci, mentionnant notamment la suspension et le licenciement de deux représentants syndicaux, l’envoi de courriers de réprimande, ainsi que d’autres mesures disciplinaires à l’encontre de plusieurs autres syndicalistes. En outre, l’organisation plaignante allègue que la banque a restreint l’accès aux lieux de travail de responsables syndicaux et a obligé certains travailleurs à adhérer à un plan de départ volontaire en menaçant environ 500 membres de la NUBE de mesures disciplinaires et de licenciements. L’organisation plaignante estime que ces actes sont constitutifs d’atteinte délibérée aux droits syndicaux, y compris dans un contexte de restructurations économiques, et dénonce le fait que le gouvernement n’ait pas assuré une protection adéquate face à ces violations, tandis que le gouvernement soutient de son côté qu’il a pris les mesures voulues pour répondre aux préoccupations soulevées, notamment en diligentant des inspections du travail, en menant des discussions avec les deux parties, en entendant les syndicalistes concernés et en demandant à la banque de notifier les licenciements au titre du plan de départ volontaire au Département des relations professionnelles. Il ajoute que toute plainte reçue fait l’objet d’une enquête et que les affaires relatives aux licenciements de Mme Sarimah et de M. Sethupathy sont en attente de jugement devant le tribunal du travail, les audiences ayant dû être reportées aux mois de janvier et avril 2022 en raison de la pandémie de COVID 19.
  6. 501. S’il prend dûment note des initiatives du gouvernement, le comité constate que l’organisation plaignante a exprimé certaines préoccupations quant au fait que les différents agissements de la banque, y compris ceux qu’elle a justifiés par un impératif économique, constituent un ensemble systématique d’actes de harcèlement et d’actes antisyndicaux qui ont eu de graves conséquences pour les membres de l’organisation. Le comité rappelle que nul ne doit faire l’objet de mesures préjudiciables en raison de l’exercice d’activités syndicales légitimes et les affaires de discrimination antisyndicale devraient être traitées de manière rapide et efficace par les institutions compétentes. Le licenciement d’un travailleur en raison de son appartenance à un syndicat ou ses activités syndicales porte atteinte aux principes de la liberté syndicale. [Voir Compilation, paragr. 1077 et 1104.] Le comité souhaite également souligner que, non seulement le licenciement mais aussi la mise à la retraite d’office, lorsqu’ils sont dus à des activités syndicales licites, seraient contraires au principe selon lequel nul ne devrait faire l’objet de discrimination dans l’emploi en raison de son affiliation ou de ses activités syndicales. La restructuration d’une entreprise ne doit pas menacer directement ou indirectement les travailleurs syndiqués et leurs organisations. [Voir Compilation, paragr. 1109 et 1113.] Compte tenu de ce qui précède et de la volonté de répondre aux préoccupations exprimées qui a été manifestée par le gouvernement, le comité prie celui-ci de poursuivre le dialogue engagé avec les parties afin de résoudre toute question en suspens au sujet des allégations de licenciement ou de suspension antisyndicale de membres de la NUBE, et de veiller à ce que les travailleurs concernés puissent accéder, s’il y a lieu, à des mesures de réparation adéquates leur permettant d’obtenir leur réintégration et une indemnisation. Il prie également le gouvernement de fournir des informations sur l’issue des procédures judiciaires engagées dans les deux cas d’allégations de licenciements antisyndicaux de représentants de la NUBE. Le comité veut croire que le gouvernement demeurera vigilant face à tout futur licenciement éventuel ou à toute autre mesure susceptible de viser les membres de l’organisation plaignante, et qu’il fera en sorte de veiller à ce que ces mesures ne soient pas motivées par des considérations antisyndicales et à ce que la NUBE puisse mener ses activités dans un climat exempt de harcèlement, de menaces ou de tentatives de discréditer le syndicat ou ses responsables. Observant que certaines allégations, non détaillées, visent la police, le comité veut croire que des activités de sensibilisation aux droits syndicaux sont régulièrement organisées à l’intention de la police et d’autres autorités de l’Etat de sorte qu’elles s’abstiennent de tout acte de harcèlement ou d’intimidation à l’encontre de syndicalistes.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 502. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité veut croire que les parties mèneront toutes négociations futures entre elles de bonne foi, et qu’elles chercheront à éviter des retards excessifs en gardant à l’esprit les avantages d’un dialogue constructif pour établir et entretenir des relations harmonieuses entre employeurs et travailleurs. Le comité s’attend à ce que le gouvernement continue de prendre toutes les mesures nécessaires pour faciliter de telles négociations entre les parties.
    • b) Le comité prie le gouvernement de fournir à la commission d’experts plus ample information sur l’application pratique de l’article 13(3) de la loi sur les relations professionnelles, tel que modifié, en particulier sur la façon dont s’articulent les restrictions imposées par ce texte concernant les sujets négociables et la possibilité de soulever des questions d’ordre général sur ces mêmes sujets, et il renvoie à la commission d’experts cet aspect législatif du présent cas.
    • c) Compte tenu de la volonté de répondre aux préoccupations soulevées dans le présent cas qui a été manifestée par le gouvernement, le comité prie celui-ci de poursuivre le dialogue engagé avec les parties afin de résoudre toute question en suspens au sujet des allégations de licenciement ou de suspension antisyndicale de membres de la NUBE et de veiller à ce que les travailleurs concernés puissent accéder, s’il y a lieu, à des mesures de réparation adéquates leur permettant d’obtenir leur réintégration et une indemnisation. Il prie également le gouvernement de fournir des informations sur l’issue des procédures judiciaires engagées dans les deux cas d’allégations de licenciements antisyndicaux de représentants de la NUBE.
    • d) Le comité veut croire que le gouvernement demeurera vigilant face à tout futur licenciement éventuel ou à toute autre mesure susceptible de viser les membres de l’organisation plaignante et qu’il fera en sorte de veiller à ce que ces mesures ne soient pas motivées par des considérations antisyndicales, et à ce que la NUBE puisse mener ses activités dans un climat exempt de harcèlement, de menaces ou de tentatives de discréditer le syndicat ou ses responsables. Il veut croire également que des activités de sensibilisation aux droits syndicaux sont régulièrement organisées à l’intention de la police et d’autres autorités de l’État de sorte que celles-ci s’abstiennent de tout acte de harcèlement ou d’intimidation à l’encontre de syndicalistes.
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