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Observación (CEACR) - Adopción: 1989, Publicación: 76ª reunión CIT (1989)

Convenio sobre la libertad sindical y la protección del derecho de sindicación, 1948 (núm. 87) - Alemania (Ratificación : 1957)

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La commission a pris note des informations communiquées par le gouvernement en réponse à ses précédents commentaires ainsi que des observations de la Confédération des syndicats allemands (Deutscher Gewerkschaftsbund (DGB)) du 16 septembre 1988 à propos de l'application de la convention.

La commission rappelle que ses commentaires antérieurs portaient sur les points suivants:

- déni du droit d'accès dans les lieux de travail aux délégués syndicaux étrangers à une entreprise;

- réquisition de postiers, guichetiers ou téléphonistes du service des postes ayant le statut de fonctionnaires (Beamte) mais n'exerçant évidemment pas de fonctions d'agents agissant en tant qu'organes de la puissance publique, pour remplacer des grévistes, postiers, guichetiers ou téléphonistes du service des postes ayant le statut d'employés ou d'ouvriers de l'Etat (Angestellte);

- illégalité des grèves de protestation.

1. Accès dans les lieux de travail de délégués syndicaux étrangers à une entreprise. Au sujet des commentaires de la commission relatifs au déni du droit d'accès dans les lieux de travail de délégués syndicaux étrangers à une entreprise, dans son dernier rapport, le gouvernement réitère ses déclarations antérieures selon lesquelles cette question n'a depuis longtemps soulevé aucun litige entre employeurs et travailleurs et il ajoute qu'aucun développement nouveau n'est intervenu à cet égard.

La Confédération des syndicats allemands (DGB), en revanche, fait savoir qu'elle est en désaccord avec la réponse du gouvernement. Elle explique que la Cour fédérale constitutionnelle a rendu un arrêt en 1981, prétendant que la protection constitutionnelle du droit syndical et donc des activités des syndicats ne s'applique qu'au noyau central (Kernbereich). En conséquence, les activités syndicales ne jouissent de cette protection constitutionnelle que si elles sont considérées comme indispensables au maintien et à la sauvegarde de l'existence même du syndicat. Cet arrêt de la Cour a eu comme incidence de dénier aux délégués syndicaux étrangers à une entreprise, en particulier dans les établissements appartenant à l'Eglise et dans d'autres établissements, le droit d'accès sur les lieux de travail. Pour la DGB, à cause de cet arrêt, le gouvernement fédéral n'a pas encore été à même d'adapter sa législation aux exigences de la convention. De surcroît, le tribunal fédéral du travail et tous les tribunaux du travail subséquents se sont estimés tenus par cet arrêt. Or, d'après la DGB, ce déni du droit syndical est contraire aux dispositions des conventions nos 87 et 135. La DGB rappelle que l'article 3 de la convention no 87 accorde aux organisations de travailleurs le droit d'élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d'élire librement leurs représentants, d'organiser leur gestion et leurs activités et de formuler leur programme d'action, et que ceci signifie que la convention garantit aux syndicats le droit d'établir les limites qu'ils entendent se donner en ce qui concerne le développement de leurs fonctions et l'étendue de leurs activités. Or cette latitude leur est déniée par l'arrêt de 1981, spécialement dans les lieux de travail où, précisément, des conflits sociaux surgissent et se développent. La conséquence de cet arrêt est qu'en cas de conflit sur les lieux de travail le syndicat est tenu d'apporter la preuve que son action est indispensable au maintien et à la sauvegarde de sa propre existence. De plus, ce même article 3 implique que c'est aux syndicats qu'il appartient de décider comment ils souhaitent s'organiser et qui ils souhaitent désigner pour les représenter dans leurs activités syndicales sur les lieux de travail. Etant donné qu'en République fédérale d'Allemagne il n'existe pas de syndicats d'entreprise et que les syndicats sont totalement indépendants des entreprises individuelles ce qui, pour la DGB, est une des conditions essentielles de la capacité de négocier des syndicats, la structure même de ces syndicats, qui sont des syndicats indépendants des entreprises, a pour conséquence que les intérêts des travailleurs doivent, dans une large mesure, pouvoir être représentés par des délégués syndicaux étrangers aux entreprises. Cependant, les tribunaux, en exigeant que les activités syndicales internes à l'entreprise ne soient exercées que par des délégués syndicaux appartenant à ladite entreprise, dictent automatiquement aux syndicats le nom de ceux qui représenteront les intérêts des syndicats et des travailleurs dans une entreprise. Une telle interprétation conduit à une situation dans laquelle seuls les travailleurs directement employés par l'entreprise peuvent s'adonner à des activités syndicales dans une entreprise. Ceci risque de conduire au déni du droit syndical dans les entreprises où les syndicats n'ont encore aucun travailleur syndiqué ou bien où leurs travailleurs syndiqués, quand ils en ont, n'osent pas se faire connaître par crainte de discrimination ou de représailles de la part de l'employeur. Enfin, si dans une entreprise il n'y a qu'un seul travailleur syndiqué, en application de cet arrêt, toutes les activités syndicales et les activités de recrutement dans cette entreprise devraient être confiées à ce seul travailleur. Selon la DGB, cette situation est évidemment contraire à l'article 3 de la convention qui garantit aux syndicats le droit d'élire librement leurs représentants sans ingérence extérieure et exige que les autorités publiques s'abstiennent de toute intervention de nature à limiter ce droit.

La commission prend note avec attention des commentaires de la DGB sur cette question. Elle rappelle que ceci fait l'objet de ses commentaires depuis plusieurs années et demande en conséquence à nouveau au gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport les mesures prises pour garantir que les délégués syndicaux, même extérieurs à une entreprise, puissent avoir accès aux lieux de travail dans une entreprise s'ils l'estiment nécessaire et mettre sa législation en conformité avec la convention à cet égard.

2. Réquisition de fonctionnaires (Beamte) pour remplacer des employés ou des ouvriers de l'Etat (Angestellte) grévistes dans les services publics. Au sujet des allégations de la DGB selon lesquelles des fonctionnaires de la poste, auxquels le droit de grève est interdit, ont été réquisitionnés pour briser une grève des ouvriers et des employés de la poste, dans son rapport le gouvernement indique seulement que la Cour fédérale constitutionnelle n'a toujours pas rendu son arrêt à propos du recours introduit par les travailleurs. Le gouvernement espère que la commission comprendra dans ces conditions qu'il ne peut faire aucune déclaration tant que le verdict de la Cour fédérale n'a pas été rendu.

La DGB, au sujet de l'intervention des fonctionnaires comme briseurs de grève, se déclare préoccupée de ce que la Cour fédérale constitutionnelle n'ait pas encore rendu son arrêt. Elle rappelle que, dans l'attente de cet arrêt, la situation légale demeure en l'état. Des fonctionnaires peuvent être requis contre leur volonté pour accomplir les tâches normalement confiées aux employés de l'Etat qui sont en grève. Le gouvernement a fait usage de cette mesure dans le passé et envisage probablement d'y recourir à nouveau en cas de conflits sociaux dans les services publics. Ceci a pour conséquence de porter atteinte au droit de grève de larges secteurs des services publics garanti par la Constitution. D'après la DGB, dans le service des postes, ce problème a pris récemment une plus grande ampleur parce que les deux tiers des employés y sont des fonctionnaires (Beamte) et qu'un tiers est composé de travailleurs manuels (Arbeiter) et d'employés de l'Etat (Angestellte). Ceci signifie que le gouvernement peut annuler les effets d'une grève des employés de l'Etat en ordonnant à ses fonctionnaires de briser ladite grève. Cette situation juridique est d'autant plus incompréhensible que le gouvernement et les tribunaux du travail dénient complètement aux fonctionnaires (Beamte) le droit de grève et contraignent ces mêmes fonctionnaires à jouer le rôle de briseurs de grève dans des domaines où le travail à accomplir n'entre même pas dans le champ de leurs activités professionnelles et de leurs responsabilités.

La commission rappelle qu'elle a déjà attiré l'attention du gouvernement dans sa précédente observation sur le fait que, lorsque des législations nationales interdisent ou limitent la grève dans la fonction publique ou les services essentiels, de telles restrictions perdraient tout leur sens si ces législations retenaient une définition trop extensive de la fonction publique ou des services essentiels. Ainsi, l'interdiction de la grève devrait être limitée aux fonctionnaires agissant en tant qu'organes de la puissance publique ou aux services dont l'interruption mettrait en danger dans l'ensemble ou dans une partie de la population la vie, la sécurité ou la santé de la personne.

La commission demande en conséquence à nouveau au gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport les mesures qu'il a prises pour garantir aux fonctionnaires qui n'agissent pas en tant qu'organes de la puissance publique, et singulièrement aux postiers, guichetiers et téléphonistes du service des postes, qu'ils soient considérés comme des employés de l'Etat (Angestellte) ou qu'ils relèvent du statut de fonctionnaires (Beamte), le droit de recourir à la grève.

De surcroît, en ce qui concerne plus précisément la réquisition de fonctionnaires (Beamte) n'agissant pas en tant qu'organes de la puissance publique pour remplacer les grévistes, la commission est d'avis qu'une telle mesure risque de porter atteinte à l'application sur l'article 3 de la convention aux termes duquel les autorités publiques doivent s'abstenir de toute intervention de nature à limiter le droit des organisations de travailleurs d'organiser leurs activités et de formuler leur programme d'action.

La commission de même que le Comité de la liberté syndicale reconnaissent que l'arrêt du fonctionnement des services ou entreprises tels que les transports ou la poste pourrait être de nature à perturber la vie normale de la communauté. Toutefois, on ne peut affirmer que l'arrêt de tels services ou entreprises est, par définition, propre à engendrer un état de crise nationale aiguë. La commission estime en conséquence que la réquisition des fonctionnaires des postes (Baemte) prise lors d'un conflit dans ce service était de nature à restreindre le droit de grève des ouvriers des postes (Angestellte) en tant que moyen de défense de leurs intérêts professionnels et économiques. Autrement dit, l'utilisation de fonctionnaires (Beamte) ou d'un autre groupe de personnes pour remplir les fonctions abandonnées à l'occasion d'un conflit du travail ne saurait, si la grève est par ailleurs légale, être justifiée que par la nécessité d'assurer le fonctionnement de services ou d'entreprises dont l'arrêt créerait une situation de crise nationale aiguë, l'utilisation par le gouvernement d'une main-d'oeuvre étrangère à un conflit destinée à remplacer les travailleurs en grève comportant en effet un risque d'atteinte au droit de grève affectant le libre exercice des droits syndicaux.

La commission rappelle toutefois qu'elle a toujours estimé légitime qu'un service minimum concernant une catégorie de professionnels déterminée puisse être maintenu en cas de grève dont l'étendue et la durée pourraient provoquer une situation de crise nationale aiguë, mais, dans un tel cas, les organisations syndicales devraient, si elles le souhaitent, pouvoir participer à la définition d'un tel service minimum.

La commission, tout en notant que la Cour constitutionnelle n'a pas encore statué sur le recours qui a été porté devant elle à ce sujet, demande au gouvernement d'indiquer, dans son prochain rapport, les mesures qu'il a prises à cet égard étant donné qu'il lui appartient d'assurer l'application de cette convention.

3. Grèves de protestation. Au sujet de l'illégalité des grèves de protestation et en particulier des mesures de représailles qui, selon la DGB, dans ses observations des 21 janvier 1986 et 16 septembre 1988, auraient frappé des syndicalistes en grève de protestation contre l'amendement à l'article 116 de la loi sur la promotion de l'emploi, le gouvernement dans son rapport se réfère à ses déclarations antérieures et indique à nouveau que les travailleurs jouissent pleinement du droit de grève et qu'il ne voit aucune raison de prendre des mesures en ce domaine actuellement. Il ajoute qu'aucune amende n'a été infligée aux dirigeants syndicaux et il précise que les tribunaux du travail n'ont pas compétence pour infliger de sanctions pénales. Selon le gouvernement, il est arrivé, en effet, que des dirigeants syndicaux se soient vu interdire par les tribunaux du travail d'appeler à une grève de protestation, sous peine d'amende, en cas de contravention. Cependant, la menace d'une amende par un tribunal ne constitue pas en soi une sanction. Le but d'une telle menace ou d'un tel avertissement est de donner du poids à l'injonction du tribunal de s'abstenir de telles actions. De toute manière, le montant de l'amende n'a pas été établi. Au sujet de l'allégation de la DGB selon laquelle des syndicalistes auraient été licenciés pour avoir participé à une action de protestation, le gouvernement indique qu'il est entré en contact avec la Confédération allemande des associations d'employeurs, laquelle lui a indiqué avoir diligenté une enquête auprès de ses organisations affiliées, d'où il ressort qu'aucun travailleur n'a été licencié pour avoir participé à une action de protestation contre l'amendement à l'article 116 de la loi sur la promotion de l'emploi. Si des préavis de licenciement ont été envoyés, ils ont probablement soit été retirés soit été déclarés sans effet par les tribunaux.

La DGB indique à nouveau dans son commentaire du 16 septembre 1988 qu'elle estime que la situation juridique prévalant en République fédérale d'Allemagne, aux termes de laquelle le gouvernement considère que les grèves de protestation sont illégales, n'est pas compatible avec les exigences de la convention. Les organes de contrôle, rappelle la DGB, ont de manière répétée attiré l'attention sur le droit des syndicats de recourir à des grèves de protestation, notamment en vue d'exercer une critique à l'égard de la politique économique et sociale des gouvernements. La DGB indique aussi que la grève de protestation à laquelle elle s'est référée dans son précédent commentaire n'a duré qu'une à trois heures pendant les heures de travail et que les tribunaux ont ordonné aux syndicats de ne pas appeler à des actions de protestation sous peine de lourdes amendes. Selon la DGB, l'opinion du gouvernement selon laquelle lesdites amendes ne constitueraient pas des sanctions pénales et n'ont pas été prononcées par des tribunaux correctionnels mais l'ont été par des tribunaux du travail n'est pas pertinente. De même que n'est pas pertinent le fait que lesdites amendes n'ont, en fin de compte, pas été infligées. Si aucune peine disciplinaire et coercitive n'a été infligée, cela tient uniquement à ce que le montant des amendes dont les syndicats étaient menacés était exorbitant puisqu'il s'élevait à 500.000 deutsche marks pour chaque contravention, ce qui a conduit les syndicats à obéir aux injonctions des tribunaux. Quant au licenciement des travailleurs qui ont pris part à cette action de protestation, les procédures judiciaires engagées ont eu pour résultat dans tous les cas le retrait des préavis de licenciement. Dans les cas où des recours ont été introduits devant les tribunaux du travail, les préavis de licenciement ont été déclarés sans effet. Cependant, regrette la DGB, les tribunaux n'ont pas justifié leurs décisions en déclarant que la participation à l'action de protestation était légale. Au contraire, ils ont déclaré qu'elle était en principe illégale et qu'elle constituait une rupture du contrat de travail. Dans certains cas, ils ont même estimé qu'il s'agissait de grèves politiques illégales. Les préavis de licenciement ont été déclarés sans effet parce que les tribunaux ont considéré que la participation à ces actions de protestation était un délit isolé et qu'ils ont tenu compte de la durée des états de service des personnes en cause pour déclarer insuffisante la raison justifiant leur licenciement. De plus, la DGB indique que plusieurs travailleurs ont reçu des lettres d'avertissement les menaçant de sanctions en application de la législation sur les relations de travail, y compris de licenciement en cas de récidive. Ces menaces de sanctions ont eu pour effet que plusieurs travailleurs craignant pour leur emploi ont refusé d'exercer leur droit de critique de l'amendement à l'article 116 de la loi en prenant part à l'action de protestation. La pression créée par ces lettres d'avertissement risque d'avoir des effets négatifs à l'avenir sur d'éventuelles actions syndicales; c'est pourquoi la DGB souhaite insister dans sa critique de la situation juridique actuelle en ce qui concerne les restrictions au droit de grève.

La commission prend note avec préoccupation des déclarations tant du gouvernement que de la DGB sur ces questions et rappelle qu'elle a à maintes reprises déclaré que les organisations syndicales doivent pouvoir recourir à des grèves de protestation, notamment en vue d'exercer une critique à l'égard de la politique économique et sociale des gouvernements, sans avoir à redouter des menaces de sanctions.

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