National Legislation on Labour and Social Rights
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1. Depuis 1999, la commission examine les mesures prises par le gouvernement pour donner effet aux recommandations de la commission d’enquête qui avait été désignée par le Conseil d’administration pour examiner le respect par le Myanmar de la convention. En 1999 et 2000, deux ordonnances rendant toute réquisition de travail forcé illégale et passible de sanctions pénales ont été prises. Depuis lors, et suite aux recommandations de la commission d’enquête, l’OIT a participéà un certain nombre d’activités. Entre mai 2000 et février 2002, plusieurs missions de coopération au Myanmar ont été assurées par un représentant du Directeur général; en septembre-octobre 2001, une Mission de haut niveau a été effectuée au Myanmar pour procéder à une évaluation des mesures prises par le gouvernement au regard de l’application de la convention. En mars 2002, comme cette Mission de haut niveau l’avait recommandé, le gouvernement a accepté la nomination dans le pays d’un chargé de liaison du BIT pour l’aider à assurer l’éradication rapide et effective du travail forcé. Un chargé de liaison ad interim a été nommé en mai 2002. A partir d’octobre 2002, une chargée de liaison permanente est entrée en fonction et des rapports sur ses activités, y compris sur ses déplacements dans le pays et sur ses entretiens avec les autorités, sont présentés à chacune des sessions du Conseil d’administration. Le 27 mai 2003, le gouvernement et l’OIT sont parvenus à un accord sur un plan d’action conjoint pour l’élimination des pratiques de travail forcé au Myanmar.
2. En 2002, la commission a conclu son observation en notant que certaines mesures avaient été prises par le gouvernement pour faire connaître l’interdiction du travail forcé et que des discussions sur un plan d’action étaient en cours entre l’OIT et le gouvernement. Elle avait cependant constaté que, en dépit des déclarations et des effets de rhétorique du gouvernement, aucune suite n’avait encore été donnée par le gouvernement aux trois recommandations de la commission d’enquête, à savoir: que les textes législatifs pertinents soient modifiés; qu’il ne soit plus imposé dans la pratique de travail forcé ou obligatoire par les autorités, notamment par les militaires; que les sanctions prévues par le Code pénal pour punir l’imposition illégale de travail forcé soient strictement appliquées.
3. La commission prend note des discussions consacrées à cette question en juin 2003 par la Commission de l’application des normes de la Conférence (Compte rendu provisoire no 24, troisième partie). Elle prend également note des déclarations faites par le représentant gouvernemental au Conseil d’administration et à la commission de la conférence, ainsi que des rapports et des informations fournis par la suite par le gouvernement détaillés ci-après:
- nouveau rapport en date du 4 février 2003 sur l’évolution de la situation concernant la mise en œuvre de la convention no 29;
- faits nouveaux concernant la convention no 29, en date du 24 mars 2003;
- réponses aux commentaires de la commission d’experts en date du 30 mai 2003 (reçues le 6 juin 2003);
- rapport sur l’application de la convention no 29, reçu le 2 octobre 2003;
- cinq lettres répondant à des questions abordées par le comité d’application de la convention no 29 adressées en octobre et novembre 2003 à la chargée de liaison par des représentants du gouvernement siégeant à ce comité, dont le représentant du ministère de la Défense.
4. La commission a également pris note des informations suivantes:
- les documents intitulés: «Faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930», soumis au Conseil d’administration à ses 285e (novembre 2002), 286e (mars 2003) et 287e (novembre 2003) sessions, documents qui incluent les rapports de la chargée de liaison;
- les discussions et conclusions du Conseil d’administration sur ces rapports (document GB.288/PV);
- une communication en date du 20 novembre 2003 par laquelle la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) soumet des documents nouveaux faisant état de la persistance du recours au travail forcé au Myanmar. Il a été communiqué copie de cette communication au gouvernement le 30 novembre 2003 pour tout commentaire que celui-ci souhaiterait formuler à ce propos.
5. Comme les années précédentes, la commission examinera la question de l’application de la convention par le gouvernement sous trois angles: i) modification de la législation; ii) mesures prises pour mettre un terme à l’imposition, dans la pratique, du travail forcé et obligatoire et informations disponibles sur la pratique existante; et iii) application des sanctions prévues par le Code pénal en cas d’imposition illégale de travail forcé ou obligatoire. La commission passera ensuite en revue les mesures prises au regard du plan d’action conjoint (iv).
6. Dans son rapport, la commission d’enquête priait instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les lois de 1907 sur les villes et sur les villages, qui confèrent aux autorités locales de larges pouvoirs de réquisition de main-d’œuvre, en violation de la convention, soient sans délai rendues conformes à la convention. Dans son observation de 2001, la commission notait que, si la loi sur les villages et la loi sur les villes n’avaient toujours pas été modifiées, «une ordonnance prescrivant de ne pas faire usage des pouvoirs conférés par certaines dispositions des lois de 1907 sur les villes et sur les villages» (ordonnance no 1/99), modifiée par «l’ordonnance complétant l’ordonnance no 1/99» datée du 27 octobre 2000, pourrait constituer une base juridique suffisante pour assurer le respect de la convention dans la pratique dès lors que les autorités locales ayant pouvoir de réquisition en vertu des lois sur les villes et villages et également les fonctionnaires civils et militaires habilités par lesdites lois à requérir à cette fin le concours des autorités locales appliqueraient ces ordonnances de bonne foi.
7. La commission constate qu’à la fin de novembre 2003 les lois de 1907 sur les villages et sur les villes n’ont toujours pas été modifiées. Notant que le gouvernement déclare, dans sa réponse en date du 30 mai 2003 aux commentaires de la commission, que l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire ont force de loi et que la loi sur les villes et la loi sur les villages ne sont plus invoquées, la commission veut croire que le gouvernement ne verra par conséquent aucune difficultéà abroger les dispositions pertinentes de ces lois, de manière à rendre la législation pleinement conforme à la convention. Dans cette attente, la commission veut croire que le gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour assurer que l’interdiction du travail forcé prévue par l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire soit rigoureusement respectée et appliquée.
8. Dans ses recommandations, la commission d’enquête avait souligné qu’outre la modification de la législation des mesures concrètes devaient être prises immédiatement pour mettre un terme à l’imposition du travail forcé dans la pratique, en particulier par l’armée. De l’avis de cette commission, cela était d’autant plus important que le pouvoir d’imposer un travail obligatoire semblait tenu pour acquis, sans que les lois sur les villages et sur les villes n’aient apparemment àêtre invoquées. Dans ses précédentes observations, la commission avait identifié quatre domaines dans lesquels des mesures devaient être prises par le gouvernement pour parvenir à un tel résultat: émettre des instructions spécifiques et concrètes à l’adresse des autorités civiles et militaires; assurer une large publicitéà l’interdiction du travail forcé; prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d’œuvre forcée ou non rémunérée; assurer le suivi de l’interdiction du travail forcé.
9. Instructions spécifiques et concrètes. Dans ses observations de 2001 et 2002, la commission avait noté que, faute d’avoir adressé aux autorités civiles et militaires des instructions spécifiques et concrètes contenant une description des diverses formes et modalités d’imposition du travail forcé, l’application des dispositions adoptées jusque-là tourne autour de l’interprétation dans la pratique de la notion de «travail forcé». Néanmoins, la pratique elle-même ne va pas de soi, en témoigne la diversité des expressions employées en birman quand il s’agit d’imposer du travail à la population: «loh-ah-pay», travail «volontaire», ou encore travail «donné».
10. Dans son observation de 2002, la commission prenait note d’une directive émise le 1er novembre 2000 par le secrétaire 1 du Conseil d’Etat pour la paix et le développement (SPDC), (lettre no 4/Na ya ka U/Ma Nya) ordonnant aux conseils pour la paix et le développement de l’Etat d’adresser les instructions nécessaires aux conseils pour la paix et le développement des districts et localités pour que ces derniers respectent les interdictions prévues par l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire. La commission note que les rapports du gouvernement et les déclarations faites par des représentants gouvernementaux contiennent de nombreuses références à des «explications», «instructions» et «directives»émises par les bureaux des conseils pour la paix et le développement à divers niveaux et par les services du département de l’Administration générale, du département de la Justice, de la Police et des Tribunaux locaux, de même que de nombreuses références aux orientations données par les équipes d’observation sur le terrain à l’occasion de leurs déplacements dans le pays. Toutefois, le gouvernement ne donne aucune précision quant à la teneur desdites explications, instructions, directives ou orientations; il ne communique pas non plus le texte de la moindre instruction ou directive donnant le détail des travaux pour lesquels la réquisition de main-d’œuvre est interdite ou spécifiant la manière dont certains travaux doivent être accomplis sans recourir au travail forcé.
11. Dans sa réponse à l’observation de la commission en date du 30 mai 2003, le gouvernement indique que les forces de police du Myanmar ont émis de nouvelles directives et circulaires explicatives concernant l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire, par lesquelles le personnel est rendu plus attentif à ses obligations à l’égard de la population s’agissant du «sens plein et entier de l’utilisation du travail forcé». Le gouvernement communique copie d’une lettre no 1002(3)/202/G4 en date du 27 octobre 2000 «tendant à prévenir la réquisition illicite de travail forcé», signée du directeur général de la police. La commission note que cette lettre attire à nouveau l’attention sur la teneur de l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire et indique la procédure à suivre par les fonctionnaires de police pour le traitement des plaintes pour imposition de travail forcé, mais sans expliquer, cependant, la nature des tâches constituant du travail forcé ni de quelle manière ces tâches doivent être accomplies.
12. S’agissant des forces de défense, la commission prend note, à la lecture de la réponse écrite remise à la chargée de liaison par le représentant du ministère de la Défense siégeant au Comité d’application de la convention no 29, de la mention d’une lettre de 2001 émanant du bureau du ministère de la Défense «ordonnant que les ordres englobent le personnel des niveaux subalternes de ces principaux bureaux et directions», de même que de deux lettres de 1999 et 2000 et d’un télégramme de 2001 émanant du bureau du chef d’état-major «tendant à garantir que le personnel subalterne suive expressément les ordres». La commission prie le gouvernement de communiquer copie de ces lettres et télégrammes dans son prochain rapport.
13. Sur la base des informations dont la commission dispose, il apparaît que des instructions claires sont encore requises pour faire connaître à tous les représentants de l’autorité, y compris aux membres des forces armées, la nature des pratiques qui constituent du travail forcé et pour lesquelles la réquisition de main-d’œuvre est interdite ainsi que la manière dont ces mêmes tâches doivent dorénavant être exécutées. La commission note qu’à la réunion de septembre 2003 du Comité d’application de la convention no 29 il a été signaléà la chargée de liaison qu’il pourrait y avoir des divergences sur la définition de certaines pratiques en tant que travail forcé et qu’il est important de tenir compte des us et coutumes du pays. La chargée de liaison a proposé de rencontrer un petit groupe du comité d’application afin de mettre au point des concepts communs en vue de l’application de la convention no 29 dans le contexte du Myanmar, les résultats de cette démarche pourraient être exposés dans une brochure destinée àêtre largement diffusée. La commission exprime l’espoir qu’avec l’aide de la chargée de liaison les instructions détaillées nécessaires seront émises sans délai et que ces instructions engloberont, entre autres, chacune des tâches énumérées au paragraphe 13 de son observation de 2002.
14. Publicité faite aux ordonnances. La commission note, à la lecture des informations communiquées par le gouvernement, que des mesures continuent d’être prises en vue de rendre l’interdiction du travail forcé prévue dans l’ordonnance no 1/99 et son ordonnance complémentaire largement connue de tous les représentants de l’autorité de même que du grand public. Ces mesures incluent:
- la diffusion et l’affichage des ordonnances aux différents niveaux administratifs de l’ensemble du pays;
- l’inclusion d’informations sur la convention no 29 dans le bulletin mensuel du ministère du Travail, qui connaît une large diffusion;
- l’établissement d’une brochure sur le travail forcé et sur la convention no 29;
- l’envoi d’équipes d’observation sur le terrain, sous la direction de membres du Comité d’application de la convention no 29, dans diverses parties du pays pour faire connaître les ordonnances aux autorités locales et à la population; et enfin la traduction des ordonnances dans les langues ethniques.
15. La commission rappelle que, dans son observation de 2001, elle se référait à des allégations de la CISL, selon lesquelles des villageois étaient contraints d’acheter le «livre vert» contenant le texte des ordonnances ou bien étaient contraints d’acheter les panneaux sur lesquels les ordonnances étaient placardées. La commission prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle, d’après le département de l’Administration générale, les «livres verts» ont été distribués gratuitement, sans aucun frais pour qui que ce soit.
16. Dans la communication de la CISL reçue en novembre 2002, cette organisation allègue également que, «dans certaines zones, les villageois n’ont jamais entendu parler des ordonnances émises par Yangon en vertu desquelles le travail forcé est désormais interdit» et que «beaucoup de villageois interrogés dans les Etats de Shan, de Karenni, de Karen et dans les divisions de Pegu et de Mandalay n’ont encore jamais entendu d’annonces ou de proclamations selon lesquelles il devait être mis fin aux pratiques de travail forcé». Le gouvernement n’a fourni aucune réponse à ces allégations.
17. S’agissant de la traduction des ordonnances dans les langues ethniques, la commission note que, fin novembre 2003, ces ordonnances avaient été traduites et publiées dans deux dialectes de la langue kayin, de même que dans les langues de Kayah, Mon, Shan et Kachin, un exemplaire de ces traductions ayant été transmis au BIT. Elle exprime l’espoir que le gouvernement communiquera copie, avec son prochain rapport, des traductions dans les quatre dialectes chin.
18. La commission note la déclaration de la chargée de liaison contenue dans son premier rapport présentéà la session de novembre 2003 du Conseil d’administration, selon laquelle «rien n’indique à ce jour que le texte traduit desdites ordonnances ait été effectivement distribué ou diffusé dans les zones où vivent des minorités ethniques».
19. La commission exprime l’espoir que le gouvernement poursuivra ses efforts pour assurer la plus large publicitéà l’interdiction du travail forcé dans l’ensemble du pays, y compris dans les zones les plus reculées auxquelles se réfèrent les allégations de persistance de travail forcé. En particulier:
a) Comme il apparaît que les mesures prises jusqu’à présent s’adressent principalement sinon exclusivement aux autorités civiles, la commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur les mesures prises ou envisagées afin que les membres des forces armées, à tous les niveaux de celles-ci, aient pleinement connaissance de l’existence des ordonnances et des sanctions prévues en cas de violation. Le gouvernement est prié de communiquer copie des ordres adressés aux forces armées ainsi que des informations sur les réunions, ateliers et séminaires organisés pour assurer la diffusion de ces ordres dans les forces armées.
b) Comme les équipes d’observation sur le terrain relevant du Comité d’application de la convention no 29 ne couvrent pas l’ensemble des 16 Etats et divisions du pays, la commission exprime l’espoir que la juridiction de ce comité d’application sera étendue à l’ensemble du pays et que le prochain rapport contiendra des informations sur les progrès réalisés à cet égard.
c) La commission espère que la brochure qui est en préparation depuis l’an dernier sera achevée prochainement, que la chargée de liaison en sera avisée et qu’un exemplaire en sera communiqué avec le prochain rapport.
d) La commission veut croire que des mesures seront prises pour assurer que des textes dûment traduits soient diffusés et affichés dans les zones ethniques, qui sont celles où apparemment les pratiques de travail forcé ont le plus souvent cours.
20. Inscription au budget des crédits adéquats. Dans ses recommandations, la commission d’enquête a attiré l’attention sur la nécessité d’inscrire au budget de l’Etat les crédits nécessaires pour rémunérer les travailleurs libres qui seront chargés d’accomplir le travail effectué jusqu’à présent par une main-d’œuvre forcée et non rémunérée. Dans son rapport, la Mission de haut niveau déclare n’être en possession d’aucun élément lui permettant de conclure que les autorités ont bien prévu le remplacement de la main-d’œuvre forcée et gratuite réquisitionnée pour aider l’armée ou pour réaliser les projets de travaux publics. Dans ses deux précédentes observations, la commission a abordé cette question, recherchant des éléments tangibles permettant d’établir que des crédits budgétaires adéquats ont été prévus pour recruter de la main-d’œuvre volontaire et rémunérée.
21. Dans sa réponse du 30 mai 2003, le gouvernement réitère ses déclarations antérieures, selon lesquelles il existe toujours une inscription budgétaire afférente à chaque projet; cette inscription couvrant le coût des matériaux et celui de la main-d’œuvre. Tel a été le cas pour chacun des projets réalisés sous la direction du département du développement des zones frontalières. De plus, le département relevant du comité de développement de la ville de Yangon, le ministère de la Construction et le ministère de l’Intérieur ont émis des instructions enjoignant «de se conformer strictement aux règles concernant le recrutement de main-d’œuvre et interdisant toute forme de travail forcé de sorte que les dépenses de main-d’œuvre soient provisionnées».
22. La commission prend note de cette déclaration. Cependant, comme il ressort des éléments disponibles que, dans la pratique, le travail forcé continue d’être imposé aujourd’hui dans de nombreuses régions du pays, notamment dans celles où l’armée est fortement présente, la commission ne peut que conclure que les allocations budgétaires pouvant exister ne sont pas suffisantes pour éviter le recours au travail forcé, à moins que l’affectation de ces crédits ne soit pas adéquatement contrôlée. A cet égard, la commission attire l’attention sur un commentaire figurant dans le premier rapport de la chargée de liaison présentéà la session de mars 2003 du Conseil d’administration, selon lequel la diffusion de l’ordonnance no 1/99 et de son ordonnance complémentaire n’a pas été suffisante pour que ces textes aient un impact notable sur la pratique, car cette diffusion n’a été assortie d’aucune mesure d’accompagnement telle que l’octroi aux personnes actuellement chargées d’imposer du travail forcé d’autres moyens pour faire exécuter les tâches relevant de leur responsabilité. La commission exprime à nouveau l’espoir que des ressources budgétaires adéquates seront allouées aux autorités civiles et militaires afin que celles-ci puissent s’acquitter de leurs tâches sans recourir à du travail forcé, et que le prochain rapport fera état des mesures prises dans ce sens.
23. Mécanismes de contrôle. La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement et des rapports de la chargée de liaison sur les activités menées par le Comité d’application de la convention no 29 pour suivre la situation relative au travail forcé et faire connaître à la population les ordonnances interdisant le travail forcé. Entre décembre 2002 et novembre 2003, ce comité a tenu trois réunions avec la chargée de liaison, réunions dans le cadre desquelles ont été abordées un certain nombre d’allégations de travail forcé qui avaient été transmises par la chargée de liaison. A ces réunions, le représentant du ministère de la Défense nouvellement désignéétait présent, ce qui a permis d’aborder certains problèmes concernant le recours au travail forcé par l’armée. Les équipes d’observation sur le terrain qui relèvent du comité d’application ont effectué de fréquents déplacements dans le pays pour enquêter sur des plaintes de travail forcé et pour faire connaître les ordonnances. Les rapports établissant leurs constatations ont été soumis au comité d’application. De plus, la chargée de liaison a reçu du comité d’application plusieurs communications écrites relayant les constatations faites par les équipes d’observation sur le terrain, suite aux plaintes qu’elle avait transmises.
24. La commission se félicite du dialogue qui s’est instauré entre le comité d’application et la chargée de liaison. Elle constate cependant que toutes les enquêtes menées sur des plaintes pour travail forcé par les autorités, y compris par les équipes d’observation sur le terrain, ont conclu que lesdites plaintes étaient infondées. A ce propos, elle relève que, dans le cadre de ses propositions faites au gouvernement au sujet d’un plan d’action conjoint, la chargée de liaison émet des suggestions précises en vue d’un nouveau système d’enquête, suggestions qui n’ont pas été retenues par le gouvernement. La commission note également que, suite à une demande de la chargée de liaison, le gouvernement a bien voulu que celle-ci accompagne une équipe d’observation sur le terrain dans un déplacement dans l’Etat de Kachin pour observer les méthodes de travail de cette équipe. La chargée de liaison a constaté, comme relaté dans son deuxième rapport présentéà la session du Conseil d’administration de novembre 2003, que «la manière dont l’équipe accomplit sa mission convient certes pour diffuser l’information mais non pour conduire des enquêtes sur les plaintes, et il serait difficile, voire impossible, de déterminer que lesdites plaintes sont ou ne sont pas fondées en procédant de cette manière». La commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour instaurer une procédure juste et plus efficace d’enquête sur les plaintes pour travail forcé, notamment sur les plaintes mettant en cause l’armée, et qu’il maintiendra le dialogue à ce sujet avec la chargée de liaison.
25. Lors de sa visite au Myanmar en octobre 2001, l’équipe de haut niveau a constaté que, «bien que les ordonnances interdisant le recours au travail forcé aient été largement (quoi que inégalement) diffusées», leur impact sur la pratique du travail forcé se révèle limité et la situation ne s’est que très modérément améliorée depuis la commission d’enquête. La situation reste particulièrement grave là où la présence militaire est forte, en particulier dans les zones frontalières.
26. Dans ses observations de 2001 et 2002, la commission avait pris note de deux communications de la CISL contenant de nombreuses allégations se référant, pour la plupart, à la persistance du recours au travail forcéà une vaste échelle par les autorités militaires birmanes. A l’appui de ses dires, la CISL joignait un grand nombre de rapports ou autres documents, de plusieurs centaines de pages au total, relatant parfois des entretiens et incluant des indications précises des moments, des lieux, des bataillons ou compagnies de l’armée mis en cause, avec les noms des chefs d’unité. La commission avait exprimé l’espoir que le gouvernement examinerait les allégations de la CISL et fournirait des informations détaillées sur les mesures prises afin que toutes les personnes responsables d’avoir réquisitionné de la main-d’œuvre forcée soient poursuivies. La commission note que, sauf sur deux allégations qui ont été mentionnées par la chargée de liaison auprès du Comité d’application de la convention no 29, le gouvernement n’a fourni aucune information en réponse aux communications de la CISL. A ces deux allégations qui concernent, l’une, la mort d’un syndicaliste, U Saw Mya Than, contraint par l’armée de servir de porteur et, l’autre, sur l’utilisation de main-d’œuvre forcée par TotalfinaElf pour la construction d’une autoroute entre Kanbauk et Maung Ma Gan, le gouvernement a répondu qu’il n’avait été recouru au travail forcé dans aucun de ces deux cas et que ces allégations ne visaient qu’à ternir son image.
27. Dans son premier rapport présenté au Conseil d’administration, en mars 2003, la chargée de liaison déclarait avoir l’impression que, «si l’on a peut-être moins recours maintenant au travail forcé dans les régions centrales du Myanmar, en revanche, dans les zones proches de la frontière avec la Thaïlande, où l’insécurité continue de régner et où l’on note une présence très forte de l’armée, de même que dans l’Etat de Rakhine, au nord du pays, la situation est particulièrement grave et semble avoir peu évolué (depuis la Mission de haut niveau)». Cette impression est confirmée dans le premier rapport de la chargée de liaison présentéà la session du Conseil d’administration de novembre 2003, où il est dit:
«La chargée de liaison continue de recevoir de sources tant internes qu’externes un certain nombre d’informations dignes de foi sur l’existence du travail forcé; de nouvelles allégations ont en outre été soulevées lors des récents voyages effectués dans plusieurs régions du pays. La chargée de liaison demeure préoccupée par le recrutement forcé de civils, dont des enfants, dans les forces armées, question sur laquelle les autorités n’ont pas répondu. La chargée de liaison a également été informée de l’existence d’un programme visiblement systématique et généralisé d’entraînement militaire de civils, qui concernerait un nombre très important de personnes depuis mai 2003. Les personnes enrôlées seraient notamment des fonctionnaires (par exemple des enseignants) ainsi que des villageois et des citadins, contraints de se soumettre à cet entraînement militaire et, dans certains cas, de supporter eux-mêmes leurs frais de matériel (bâtons en bambou par exemple).»
28. S’agissant du recrutement forcé d’enfants dans l’armée, la commission avait pris note de la réponse faite par le représentant du ministère de la Défense au comité d’application, réponse reprise dans la lettre de ce représentant à la chargée de liaison, selon laquelle les forces armées ne recrutent que, conformément à la législation et à la réglementation en vigueur et dans la mesure où la loi de 1959 sur les services de défense ne permet d’enrôler, et ce volontairement, que les personnes d’un âge compris entre 18 et 25 ans, il n’y a pas de recrutement forcé dans les forces armées et aucune personne mineure n’a été recrutée dans lesdites forces armées. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute enquête qui aurait été menée pour vérifier que dans la pratique aucune personne de moins de 18 ans n’a été recrutée dans les forces armées. Vu la gravité de la question, la commission exprime l’espoir que le gouvernement, avec l’aide de l’OIT, fera tout ce qui est en son pouvoir pour procéder à une évaluation approfondie de l’ampleur de cette pratique et prendra les mesures nécessaires pour y mettre un terme.
29. S’agissant de la formation militaire obligatoire, la commission note qu’aux termes de la lettre adressée par le représentant du ministère de la Défense à la chargée de liaison «cette formation se déroule comme sous les précédentes Constitutions, à savoir que … l’Etat peut, dans un secteur particulier du pays ou bien sur l’ensemble du territoire, organiser une formation militaire»; «tout citoyen est tenu, conformément à la loi: a) de se soumettre à la formation militaire; et b) d’accomplir un service militaire pour la défense de l’Etat»; et «la formation de base est dispensée dans le but de protéger l’Etat contre toutes formes d’éléments destructeurs». La commission constate que les précédentes Constitutions ne sont plus en vigueur; qu’en tout état de cause l’obligation qu’elles font peser sur les citoyens d’accomplir une formation militaire ou un service militaire est «établie conformément à la loi» et que la loi de 1959 sur les services de défense prévoit uniquement l’engagement volontaire et non l’enrôlement obligatoire. Il apparaît donc que les programmes de formation militaire obligatoire n’ont aucune base légale et constituent une forme de travail forcé ou obligatoire au sens de la convention. La commission exprime l’espoir que le gouvernement mettra un terme à ces programmes et indiquera dans son prochain rapport les mesures prises dans ce sens.
30. Par lettre en date du 19 novembre 2003, la CISL transmet des informations sur la pratique actuelle, informations émanant de sources diverses et couvrant de nombreuses régions du pays (Etats de Chin, Kayah, Kayin, Mon, Rahkine et Shan et Divisions de Ayeyarwady, Magway, Sagaing et Taninthayi) pour la période septembre 2002 - octobre 2003. La CISL signale que ces informations concernent aussi bien «des faits d’extorsion de sommes d’argent ou de marchandises en contrepartie de l’exemption du travail forcé que des cas de mort violente au cours de missions de portage forcé ou de déminage "par des moyens humains" pour le compte de l’armée». Les documents annexés à la lettre de la CISL incluent:
- un rapport d’août 2003 émanant du groupe des droits de l’homme de l’Etat de Karen, contenant la traduction de quelque 200 ordres adressés principalement par l’armée aux villages pour réquisitionner de la main-d’œuvre en vue de diverses tâches ainsi que du matériel. On y trouve également la traduction de plus d’une centaine d’ordres par lesquels l’armée convoquait les chefs de village pour leur donner verbalement des instructions destinées à exiger du travail forcé;
- des documents de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) contenant 17 ordres analogues adressés par l’armée aux villageois pour réquisitionner de la main-d’œuvre ou du matériel;
- trois rapports de Forum Asie datés des 2 septembre 2002, 29 mai 2003 et 31 août 2003, contenant de nombreuses dénonciations de travail forcé, affectant en particulier la population musulmane de la partie nord de l’Etat de Rakhine;
- des documents de la FTUB reproduisant le détail d’entretiens avec 73 villageois ayant déclaré avoir été réquisitionnés pour du travail forcé. Ces documents contiennent aussi le détail d’entretiens avec un certain nombre de prisonniers ayant réussi à s’enfuir après avoir été réquisitionnés comme porteurs par l’armée;
- un document daté de février 2003 émanant du Syndicat des travailleurs de l’agriculture Pa’An, qui fait état de la réquisition de main-d’œuvre forcée dans 12 villages pour la construction d’une route dans l’Etat de Kayin.
La commission prie le gouvernement d’examiner les allégations de la CISL et les documents y annexés et de fournir des informations détaillées sur les enquêtes diligentées à cet égard et sur les poursuites engagées à l’encontre des personnes responsables d’avoir exigé du travail forcé.
31. Pour résumer, sur la base des informations dont elle dispose sur la pratique actuelle, la commission est conduite à conclure que si, depuis l’époque où la commission d’enquête a rendu son rapport, en 1998, il peut y avoir eu une certaine diminution du travail forcé, notamment dans le cadre de travaux de génie civil, du travail forcé continue néanmoins d’être imposé dans de nombreuses parties du pays. La situation est particulièrement grave dans les régions frontalières, habitées essentiellement par des populations de souche et connaissant, au surplus, une forte présence militaire. Cette situation démontre clairement qu’en dépit des engagements réitérés par le gouvernement d’abolir le travail forcé les mesures prises à ce jour n’ont pas suffi pour réaliser des progrès rapides et appréciables, notamment vis-à-vis de l’armée.
32. Dans son rapport, la commission d’enquête invitait instamment le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour que les sanctions prévues par l’article 374 du Code pénal en cas d’imposition de travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées, conformément à l’article 25 de la convention. De l’avis de la commission d’enquête, il faudrait pour cela que des enquêtes soient menées de manière approfondie, que des poursuites soient engagées et que des sanctions adéquates soient prises contre les coupables.
33. La commission constate qu’il ressort des informations communiquées par le gouvernement que, bien que l’ordonnance complétant l’ordonnance no 1/99 et la directive en date du 1er novembre 2000 du Secrétaire 1 du Conseil d’Etat à la paix et au développement prévoient l’une et l’autre des poursuites en application de l’article 374 du Code pénal à l’encontre des personnes violant l’interdiction du travail forcé prévue par l’ordonnance no 1/99, en novembre 2003, aucune sanction de cette nature n’a encore été infligée. De même, aucune plainte concernant l’imposition de travail forcé n’a été enregistrée à ce jour, même si les procédures sont prévues pour l’enregistrement des plaintes de cette nature auprès, notamment, des commissariats de police, des tribunaux ou du greffe du Parquet général.
34. La commission est d’avis que l’absence de plainte et de poursuite sur la base de l’article 374 du Code pénal ne saurait se concevoir comme la marque de l’inexistence du travail forcé. Cette absence jette plutôt le doute sur la crédibilité du système actuel d’enregistrement des plaintes et d’enquête et sur la réalité de l’engagement du gouvernement à abolir totalement le travail forcé.
35. La commission rappelle que, pour résoudre le problème posé par le sentiment de défiance et de crainte qu’inspirent les institutions habilitées à connaître des plaintes, sentiment qui, à ses yeux, explique l’absence de plainte et de poursuite, l’équipe de haut niveau avait suggéré de désigner un médiateur à qui pourraient être adressées les plaintes ayant trait à du travail forcé. Ce médiateur aurait à la fois le pouvoir et les moyens nécessaires pour mener directement des enquêtes en toute neutralité et jouirait ainsi de la confiance de toutes les parties concernées.
36. La commission note avec intérêt que, selon le plan d’action conjoint conclu le 27 mai 2003 entre l’OIT et le gouvernement, celui-ci accepte la nomination d’un facilitateur indépendant, compétent pour recevoir des plaintes relatives au travail forcé et aider les victimes à obtenir réparation, conformément à la législation nationale. Aux termes de l’accord officiel concernant le facilitateur, celui-ci exercera ses fonctions dans le strict respect de la confidentialité et aura librement accès au plaignant et aux témoins, et aucune mesure de quelque ordre que ce soit ne sera prise par les autorités à l’encontre du plaignant ou des témoins. Lorsqu’il sera saisi d’éléments de prime abord recevables ayant trait à du travail forcé, le facilitateur pourra rechercher une solution pratique informelle avec l’autorité concernée ou bien saisir l’autorité compétente de la plainte afin que la procédure juridictionnelle soit initiée, et il sera informé de la décision prise au terme de cette procédure. Le facilitateur et son personnel d’assistance et d’appui disposeront des moyens, de l’assistance, de la protection et du statut nécessaires pour pouvoir exercer leurs fonctions avec efficacité et de manière pleinement indépendante et impartiale. Les services du facilitateur seront accessibles dans l’ensemble du pays; ils seront testés dans la région pilote prévue dans le plan d’action.
37. La commission estime que, s’il est appliqué de bonne foi, l’accord officiel concernant le facilitateur pourrait constituer un instrument déterminant pour aider les victimes de travail forcéà porter plainte et aller en justice, afin que des poursuites soient exercées et des sanctions prises contre les personnes responsables d’avoir imposé ce travail forcé. Comme indiqué ci-après, la commission espère que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour que cet accord officiel puisse être mis en œuvre le plus rapidement possible.
38. Suite à la nomination d’un chargé de liaison de l’OIT à Yangon, le Directeur général avait suggéré au ministère du Travail d’élaborer un plan d’action conjoint susceptible d’obtenir des avancées concrètes et vérifiables en vue de l’éradication complète du travail forcé. La commission note avec intérêt que, suite aux entretiens qui ont eu lieu cette dernière année entre la chargée de liaison et les autorités de Yangon, et entre les représentants du Directeur général et ceux du gouvernement à Genève, un plan d’action conjoint pour l’éradication des pratiques de travail forcé au Myanmar a été conclu le 27 mai 2003. Il s’agit d’un plan d’action proposé par le gouvernement, qui comporte un certain nombre de volets couvrant, entre autres: la diffusion de l’information et des campagnes de sensibilisation sur l’interdiction du travail forcé; le développement du transport pour des animaux comme alternative à l’utilisation de porteurs; le fonctionnement des équipes d’observation sur le terrain; un accord officiel concernant le facilitateur (détaillé au paragr. 36 ci-dessus) et un accord officiel instituant une région pilote. Cette région pilote serait une région où l’interdiction du travail forcé serait rigoureusement appliquée et où un certain nombre d’activités, au nombre desquelles la construction de routes, seraient menées avec l’assistance technique et le soutien de l’OIT. La région retenue est le district de Myeik, qui comporte quatre localités de la Division de Tanintharyi, dans le sud du pays.
39. Le plan d’action conjoint a été discutéà la 91e session de la Conférence internationale du Travail, lors d’une séance spéciale de la Commission de l’application des normes consacrée au Myanmar (ci-après désignée «séance spéciale»). A cette occasion, un représentant gouvernemental a déclaré que ce plan d’action constitue une avancée, une étape qui correspond à l’aboutissement d’un long processus de négociations soutenues et intenses. Il a rappelé l’engagement et la détermination du gouvernement du Myanmar à appliquer efficacement ce plan et à résoudre le problème du travail forcé. La Commission de la Conférence a accueilli favorablement ce plan d’action, dans les termes suivants:
La commission s’est félicitée de ce que le gouvernement et le BIT se soient mis d’accord, le 27 mai 2003, sur un plan d’action conjoint pour l’élimination du travail forcé et a exprimé son soutien à ce plan. La commission a noté avec intérêt que, tenant compte de la suggestion faite par la Mission de haut niveau, le plan prévoit la nomination d’un facilitateur indépendant chargé d’aider les personnes victimes de travail forcéà obtenir réparation en vertu de la législation nationale. Elle a noté que le facilitateur exercera ses fonctions dans l’ensemble du pays. Conformément au plan d’action, le gouvernement s’est engagéà respecter strictement l’interdiction du travail forcé dans la région pilote. Tout en soulignant que la mise en œuvre du plan d’action ne dispense pas le gouvernement de l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre fin au travail forcé dans l’ensemble du pays, la commission a estimé que ce plan d’action, s’il est appliqué de bonne foi, pourrait permettre de réaliser un progrès tangible dans l’élimination du travail forcé et ouvrir la voie à des progrès plus substantiels. La commission a prié instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures requises dans ce sens.
40. Simultanément, dans le cadre de sa séance spéciale, la Commission de la Conférence a fait observer que ses discussions coïncidaient avec un climat d’incertitude et d’intimidation dans le pays, suite aux événements récents mettant gravement en question la volonté et la capacité des autorités de progresser sensiblement en vue de l’éradication du travail forcé. A cet égard, la commission a exprimé l’avis que:
Un climat d’incertitude et d’intimidation ne constitue pas un environnement favorable à la mise en œuvre, de manière crédible, du plan d’action et en particulier du mécanisme du facilitateur qu’il établit. La commission a exprimé l’espoir que le gouvernement prendra les mesures immédiates qui s’imposent pour mettre fin à cette situation et que le Directeur général pourra aller de l’avant rapidement avec la mise en œuvre du plan d’action, dès qu’il jugera les conditions réunies pour le faire de manière effective.
41. La commission partage la préoccupation exprimée par la Commission de la Conférence face au climat de peur et d’intimidation qui n’est pas favorable à la mise en œuvre, de manière crédible, du plan d’action, et en particulier du mécanisme du facilitateur. Prenant note des assurances données par le ministre du Travail lors de son entretien du 14 novembre 2003 avec la chargée de liaison, de même que des assurances contenues dans la déclaration du représentant gouvernemental à la session du Conseil d’administration de novembre 2003, à l’effet que le gouvernement s’engage fermement sur le plan d’action conjoint et est prêt à aller de l’avant pour sa mise en œuvre, la commission veut croire que le gouvernement adoptera à brève échéance les mesures nécessaires pour restaurer un climat autorisant la mise en œuvre effective et crédible du plan d’action.
42. Pour résumer, ces trois dernières années, les autorités gouvernementales, au plus haut niveau, ont donné de manière réitérée des assurances de leur intention de mettre un terme aux violations généralisées de la convention constatées par la commission d’enquête dans son rapport. Comme indiqué par la commission dans son observation, un certain nombre d’initiatives ont été prises dans ce sens, notamment des ordonnances interdisant le recours au travail forcé ont été prises. Ces ordonnances ont été traduites dans six langues ethniques et des dispositions ont été prises pour les porter à la connaissance à la fois des autorités publiques et de la population en général. Un mécanisme a été mis en place pour favoriser l’application de ces ordonnances et assurer la diffusion de leur teneur. Un dialogue intense s’est noué entre l’OIT et les autorités, qui a abouti à l’installation dans le pays d’une présence de l’OIT en la personne d’une chargée de liaison.
43. La commission est conduite à constater que les trois principales recommandations de la commission d’enquête n’ont toujours pas été mises en œuvre. Malgré les assurances réitérées du gouvernement sur ses bonnes intentions, les mesures prises jusqu’à présent ne se sont pas traduites par des progrès sensibles dans la pratique. Le travail forcé continue d’être imposé dans bien des parties du pays, principalement par l’armée. Aucune personne responsable d’imposition de travail forcé n’a fait l’objet de poursuites ni de condamnation sur la base des dispositions pertinentes du Code pénal.
44. Vu la lenteur des progrès, il est à espérer que le processus de dialogue et de coopération qui s’est instauré entre l’OIT et le gouvernement finira par offrir une chance réelle de parvenir plus rapidement à des résultats tangibles. La commission estime que le plan d’action conjoint convenu en mai 2003 offre une opportunité au gouvernement de passer, avec l’assistance technique de l’OIT et le soutien financier de la communauté internationale, d’étapes purement procédurales à des progrès tangibles et de dissiper les doutes que la réalité actuelle peut jeter sur le sérieux de son engagement. La commission ne peut qu’exprimer l’espoir que le gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour assurer la poursuite de ce processus de dialogue et de coopération et prendra toutes les mesures nécessaires dans un très proche avenir pour permettre la mise en œuvre du plan d’action conjoint.
45. La commission rappelle au gouvernement qu’en tout état de cause l’obligation exprimée par la convention de mettre un terme à toutes les formes de travail forcé ou obligatoire reste de sa responsabilité.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 92e session.]