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Observación (CEACR) - Adopción: 2016, Publicación: 106ª reunión CIT (2017)

Convenio sobre el trabajo forzoso, 1930 (núm. 29) - Reino Unido de Gran Bretaña e Irlanda del Norte (Ratificación : 1931)
Protocolo de 2014 relativo al Convenio sobre el trabajo forzoso, 1930 - Reino Unido de Gran Bretaña e Irlanda del Norte (Ratificación : 2016)

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La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que des observations reçues du Congrès des syndicats (TUC) les 1er et 19 septembre 2016.
Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. Suppression de toutes les formes de travail forcé, y compris la traite des personnes. Cadre législatif et institutionnel. Se référant à ses précédents commentaires, la commission prend note de l’information fournie par le gouvernement dans son rapport au sujet de l’adoption de la loi de 2015 sur l’esclavage moderne. Elle note avec intérêt que la loi renforce le cadre juridique de lutte contre toutes les formes de travail forcé en définissant les éléments constitutifs des délits d’esclavage, de servitude, de travail forcé ou obligatoire et de traite des personnes, et en aggravant les sanctions applicables. La loi prévoit en particulier l’institution d’un poste de commissaire indépendant anti-esclavage dont le rôle est d’encourager les bonnes pratiques dans les domaines de la prévention, de la détection et des poursuites des délits d’esclavage moderne, et dans l’identification des victimes. Elle renforce également les pouvoirs des autorités chargées de l’application de la loi, entre autres en autorisant les tribunaux à rendre des ordonnances préventives, à décider de la confiscation des biens, ou à rendre des ordonnances de réparation pour esclavage et traite contre les délinquants qui devront payer des indemnités à la victime pour tout dommage résultant de leur délit. La loi renforce également le soutien juridique aux victimes et prévoit une interdiction de détention, d’accusation et de poursuite pour des délits commis durant l’exploitation. Enfin, la loi exige des établissements commerciaux qu’ils publient, lors de chaque exercice budgétaire, une déclaration sur l’esclavage et la traite des personnes indiquant les mesures prises pour éradiquer l’esclavage moderne de leur organisation et de leurs chaînes d’approvisionnement.
La commission note également avec intérêt l’adoption de la loi de 2015 (Ecosse) sur la traite et l’exploitation des personnes, qui prévoit un délit unique regroupant toutes les formes d’exploitation et accroît la sanction maximum, ainsi que de l’adoption de la loi de 2015 (Irlande du Nord) sur la traite et l’exploitation des personnes (justice pénale et soutien aux victimes), qui regroupe les nouveaux délits en un seul instrument législatif, donnant un poids égal à la traite des personnes et aux délits apparentés à l’esclavage. Ces deux lois comportent des dispositions similaires à celles de la loi sur l’esclavage moderne en ce qui concerne les nouveaux outils et pouvoirs en matière de contrôle de l’application de la loi. Le gouvernement indique que, suite à l’adoption de ces lois, le Département de la justice de l’Irlande du Nord a adopté une stratégie annuelle de sensibilisation aux délits d’esclavage moderne, qui s’appuie sur quatre priorités stratégiques (poursuites, protection et soutien, prévention et partenariats) et que les autorités écossaises travaillent conjointement avec diverses parties prenantes pour finaliser la stratégie sur la traite et l’exploitation des personnes.
La commission note que le commissaire indépendant anti-esclavage, dont le mandat porte sur l’ensemble du territoire national du Royaume-Uni, a adopté un plan stratégique pour 2015-2017, et que ce plan est axé sur cinq priorités: i) l’amélioration de l’identification des victimes et des soins apportés à celles-ci; ii) l’amélioration de la réponse apportée par les autorités chargées de faire appliquer la loi et la justice pénale; iii) la promotion des meilleures pratiques pour un travail en partenariat; iv) l’incitation du secteur privé à œuvrer à une plus grande transparence des chaînes d’approvisionnement; v) l’encouragement de la collaboration internationale. Dans son premier rapport, le commissaire indépendant met l’accent sur les résultats obtenus et fait un certain nombre de recommandations spécifiques en relation avec les priorités susmentionnées. Le gouvernement indique qu’il examine actuellement les recommandations du commissaire indépendant et qu’il collabore avec ses partenaires des administrations chargées de l’application de la loi et de la justice pénale pour améliorer la réaction à l’esclavage moderne. Le gouvernement fournit également des informations sur la création d’un groupe spécial national chargé de lutter contre l’esclavage moderne.
La commission prend dûment note des mesures prises pour renforcer le cadre législatif et institutionnel de lutte contre toutes les formes de travail forcé, qui témoignent de l’engagement du gouvernement à cet égard. La commission encourage le gouvernement à poursuivre ses efforts et à fournir des informations sur la mise en œuvre du plan stratégique du commissaire indépendant antiesclavage ainsi que sur les stratégies adoptées par l’Irlande du Nord et l’Ecosse, et sur les résultats obtenus. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur les activités menées par le groupe spécial national ainsi que sur toute évaluation des politiques appliquées, sur les obstacles rencontrés et sur les mesures prises ou envisagées pour les surmonter.
Application de sanctions efficaces. La commission note l’information fournie par le gouvernement dans son rapport selon laquelle, en 2015, 289 délits d’esclavage moderne ont fait l’objet de poursuites et ont donné lieu à 113 condamnations (contre 253 poursuites et 108 condamnations en 2014). Dans son rapport, le commissaire indépendant souligne les points faibles de l’enregistrement des crimes d’esclavage moderne par les forces de police en Angleterre et au pays de Galles, qui ont pour conséquence que les enquêtes nécessaires ne sont pas ouvertes. L’effet direct de cette situation est qu’il y a moins de poursuites et de condamnations, créant ainsi un contexte dans lequel les délinquants peuvent opérer en toute impunité. Le commissaire indépendant a par conséquent pris des mesures pour le financement et le développement de programmes de formation des juges et des membres des forces de police, axés en particulier sur la façon d’engager des poursuites avec succès. A cet égard, le TUC considère que la cause la plus importante du faible nombre des poursuites et des condamnations est l’insuffisance des capacités et ressources de la police. Le TUC observe que plusieurs tâches importantes destinées à mettre en œuvre la loi sur l’esclavage moderne sont confiées à la police, pour lesquelles elle ne dispose pas des capacités nécessaires. La commission prie le gouvernement de continuer de prendre des mesures pour renforcer la formation et les capacités des organes chargés de faire appliquer la loi, en relation avec le nouveau cadre juridique adopté pour lutter contre l’esclavage moderne et les outils qu’il contient, de manière à améliorer l’identification des cas, à veiller à ce que des enquêtes appropriées soient menées et à s’assurer que des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives sont appliquées aux auteurs des délits. Elle prie le gouvernement de continuer de fournir des informations sur le nombre des enquêtes menées, des poursuites engagées et des condamnations prononcées.
Protection et assistance des victimes. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle le ministère de l’Intérieur a estimé à 13 000 le nombre potentiel des victimes d’esclavage moderne. Un soutien aux victimes potentielles est apporté au moyen du Mécanisme national d’orientation (NRM) durant quarante-cinq jours. Cette assistance est octroyée par l’intermédiaire de contrats avec des ONG après une évaluation initiale des besoins de la victime potentielle. La commission prend note également des informations concernant l’assistance apportée par l’Irlande du Nord après la période de rétablissement et l’intention d’élargir le champ d’application du NRM aux victimes potentielles d’esclavage et de travail forcé. La commission observe que dans son rapport le commissaire indépendant déclare que, en 2015, 3 266 victimes potentielles ont été orientées vers le NRM, contre 2 340 en 2014. Tout en se félicitant de cette augmentation, le commissaire indépendant a fait observer qu’un nombre important de victimes ne sont pas identifiées et restent par conséquent non protégées et dans des situations d’abus et d’exploitation. Il souligne également la nécessité de s’assurer que les victimes reçoivent un appui adapté à leurs besoins individuels, qui sont complexes. Dans ses observations, le TUC reconnaît que le nombre croissant de personnes orientées vers le NRM suggère que l’on procède à des améliorations des campagnes de sensibilisation. Toutefois, le TUC indique que les victimes font état de difficultés d’accès aux services auxquels elles ont droit. Il se réfère également aux décisions discriminatoires et différentielles fondées sur la nationalité des victimes et fait remarquer que l’évaluation du fonctionnement du NRM doit être exhaustive et que toute révision du mécanisme doit être faite dans l’intérêt des victimes. La commission prie le gouvernement d’intensifier ses efforts pour apporter une protection et une assistance, y compris une assistance juridique, aux victimes de travail forcé, de façon à ce qu’elles soient en mesure de faire valoir leurs droits, y compris leurs droits en matière de droit du travail. Elle prie également le gouvernement de continuer de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard, ainsi que sur le nombre de personnes bénéficiant de ces services.
Article 2 c). Privatisation des prisons et du travail pénitentiaire. Travail des détenus pour des entreprises privées. Depuis de nombreuses années, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que tout travail de prisonnier accompli dans des établissements pénitentiaires gérés par le secteur privé, de même que tout travail de prisonnier pour des entreprises privées, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur des prisons, soit exécuté avec le consentement formel, libre et éclairé des intéressés.
La commission note que le gouvernement indique dans son rapport qu’il n’y a pas eu de changement dans la position du gouvernement qui continue d’être d’avis que son approche de la détention et de la réinsertion est pleinement conforme aux objectifs de la convention. Le gouvernement considère que le travail pénitentiaire relève de l’exception prévue par la convention, puisque le travail accompli dans les prisons du secteur public et du secteur privé fait l’objet d’une supervision et d’un contrôle par le secteur public. Le gouvernement se réfère de nouveau aux inspections rigoureuses et indépendantes qui sont menées dans les ateliers et les établissements pénitentiaires privés; aux cadres législatifs solides qui protègent les conditions de travail des prisonniers et les empêchent d’être exploités; à l’accès des prisonniers à des systèmes efficaces de dépôt de plaintes. Le gouvernement ajoute que le travail pénitentiaire continue de croître régulièrement. Il indique qu’il recherche en permanence de nouveaux modèles pour accroître le travail pénitentiaire, y compris en demandant à des employeurs d’ouvrir des «académies pour l’emploi» au sein des établissements pénitentiaires; en créant des centres d’appel dans lesquels les entreprises détachent du personnel expérimenté pour former les prisonniers de façon à ce que ceux-ci puissent travailler dans des conditions aussi proches que possible de celles que l’on trouve dans la société et puissent bénéficier d’une expérience du travail en situation réelle; en demandant aux employeurs d’offrir une formation professionnelle aux délinquants ainsi qu’un appui pour préparer leur libération et trouver un emploi après celle-ci. Le gouvernement réaffirme également que la réinsertion demeure le principal objectif du travail et que, s’il acceptait l’interprétation de la convention par la commission, le travail pénitentiaire, dans de nombreuses prisons du pays, ne serait plus viable, ce qui serait préjudiciable aux prisonniers et à leur réinsertion.
La commission note avec regret l’indication du gouvernement selon laquelle il n’y a pas eu de changement dans la position du gouvernement. Tout en reconnaissant l’objectif de la réinsertion recherché par le gouvernement en offrant du travail aux prisonniers condamnés, la commission se voit contrainte de rappeler que la privatisation du travail pénitentiaire va au-delà des conditions expressément prévues à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention pour exclure le travail pénitentiaire obligatoire du champ d’application de celle-ci. En effet, le travail pénitentiaire au profit des entreprises privées n’est compatible avec la convention que s’il n’implique aucune coercition, ce qui requiert le consentement formel, libre et éclairé des personnes concernées ainsi que des garanties et des sauvegardes couvrant les éléments essentiels de la relation de travail, tels que le niveau des salaires, l’étendue de la sécurité sociale et l’application de la règlementation en matière de sécurité et santé au travail. Comme la commission l’a souligné à de nombreuses reprises, bien que les dispositions de la convention interdisent expressément que des prisonniers soient cédés ou mis à la disposition d’entités privées, il est néanmoins parfaitement possible, pour les gouvernements, d’appliquer la convention lorsqu’ils élaborent ou mettent en œuvre un système de travail pénitentiaire privatisé, si les conditions susmentionnées sont remplies. Par conséquent, la commission prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour assurer que le consentement formel, libre et éclairé des prisonniers est requis pour que ceux-ci travaillent dans des prisons gérées par le secteur privé ainsi que pour tout travail de prisonniers au profit d’entreprises privées, aussi bien dans les locaux de l’établissement pénitentiaire qu’à l’extérieur, ce consentement étant authentifié par des conditions de travail se rapprochant de celles d’une relation de travail libre.

Suivi des recommandations du comité tripartite (réclamation présentée en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT)

La commission rappelle que, en novembre 2015, le Conseil d’administration a adopté le rapport du comité tripartite établi pour examiner la réclamation présentée par les syndicats UNISON, GMB et Napo, alléguant l’inexécution de la convention. Le comité tripartite a prié le gouvernement d’assurer que le travail exigé de personnes condamnées à une peine de travail d’intérêt général reste dans les limites de l’exception au travail forcé prévue à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention. Il a observé que le secrétaire d’Etat avait conclu des arrangements contractuels avec des centres de réinsertion communautaire (CRC) privés pour l’exécution des services de probation, y compris la peine de travail d’intérêt général. Les CRC sont des entreprises privées, mais ils s’acquittent de fonctions publiques au nom de l’Etat. Ils sont chargés de placer les délinquants auprès de fournisseurs d’emploi chez lesquels ceux-ci exercent un travail d’intérêt général; ils ne sont pas les bénéficiaires du produit de ce travail; et le travail effectué par les délinquants l’est dans l’intérêt général de la communauté. Etant donné l’implication des prestataires privés dans le processus de gestion de cette sanction pénale, le comité tripartite a été d’avis qu’il doit y avoir des sauvegardes en ce qui concerne les conditions dans lesquelles le travail est effectué, afin de garantir que ce travail obligatoire est effectivement réalisé dans l’intérêt général, que les arrangements conclus n’ont pas pour effet que le prestataire privé affecte les délinquants à du travail obligatoire pour des entités à but lucratif et que les prestataires privés ne sont rémunérés que sur la base des termes financiers du contrat signé et ne font pas de bénéfices avec le travail d’intérêt général exécuté par les personnes condamnées.
Le gouvernement indique que les contrats des CRC font l’objet de procédures de gestion rigoureuses et de dispositifs de gouvernance solides. Le contractant est tenu de divulguer des informations sur les revenus qui seraient supérieurs au coût de l’offre du travail d’intérêt général; de prouver comment il a réinvesti ce revenu dans la fourniture de travail; de divulguer ses modèles de travail ainsi que les sommes générées en confiant le travail d’intérêt général à un sous-traitant; et de prouver qu’il ne bénéficie pas directement du travail d’intérêt général. Le gouvernement communique également un rapport du Groupe de gestion des contrats des CRC du Service national de prise en charge des auteurs d’infraction (NOMS) selon lequel ce service est convaincu, d’après les preuves fournies, que les 21 CRC s’assurent que les personnes condamnées peuvent effectivement accéder aux mécanismes de plainte; que les CRC ne tirent pas directement profit de la fourniture de travail d’intérêt général; et que le travail est réalisé dans l’intérêt général. Certains CRC ont établi des sociétés d’intérêt général et des fonds d’investissement pour les personnes condamnées afin de gérer de manière appropriée les revenus générés.
Dans ses observations, le TUC conteste l’argument du gouvernement selon lequel les entreprises privées qui offrent un travail d’intérêt général sous contrat au nom du secrétaire d’Etat sont en fait des autorités publiques. A l’appui de sa position, le TUC se réfère à différents instruments législatifs, qu’il analyse, et il considère qu’il ne ressort pas de cette analyse que les CRC sont des autorités publiques. Il indique également qu’aucune jurisprudence ne vient appuyer l’affirmation du gouvernement selon laquelle les CRC sont reconnus et traités comme des autorités publiques et n’ont pas encore fait l’objet d’une demande d’examen judiciaire («Judicial review»).
La commission prend note de ces informations. Elle observe que la peine de travail d’intérêt général est imposée aux délinquants sans que ceux-ci aient donné leur consentement. Dans la mesure où il s’agit d’un travail obligatoire imposé suite à une décision judiciaire, son accomplissement doit rester dans les limites de l’exception au travail forcé prévue à l’article 2, paragraphe 2 c), de la convention. La commission prie par conséquent le gouvernement de continuer de s’assurer que le travail exercé dans le cadre de la peine de travail d’intérêt général fait l’objet d’une surveillance adéquate; que les CRC sont régulièrement contrôlés par les autorités publiques; que le travail obligatoire effectué suite à une condamnation à du travail d’intérêt général n’est pas exercé pour des entités privées. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le contrôle et la supervision exercés pour s’assurer que les CRC ne bénéficient pas du revenu généré en sous-traitant le travail d’intérêt général et que le travail des condamnés est effectivement accompli dans l’intérêt général, ainsi que des informations sur toute plainte déposée par les personnes condamnées.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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