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Observación (CEACR) - Adopción: 2016, Publicación: 106ª reunión CIT (2017)

Convenio sobre la libertad sindical y la protección del derecho de sindicación, 1948 (núm. 87) - Venezuela (República Bolivariana de) (Ratificación : 1982)

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La commission prend note des observations de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) et de la Fédération des chambres et associations de commerce et de production du Venezuela (FEDECAMARAS), reçues les 18 mai et 30 août 2016; de la Centrale des travailleurs de l’Alliance syndicale indépendante (ASI), reçues le 22 août 2016; et de la Confédération des travailleurs du Venezuela (CTV), de l’Union nationale des travailleurs du Venezuela (UNETE), de la Confédération générale du travail (CGT) et de la Confédération des syndicats autonomes (CODESA), reçues les 8 et 12 septembre et 12 octobre 2016. La commission prend note également des observations à caractère général de l’OIE, reçues le 1er septembre 2016. La commission prend note par ailleurs des réponses du gouvernement aux observations de l’OIE et de la FEDECAMARAS et aux observations de la CTV, de l’UNETE, de la CGT et de la CODESA, ainsi qu’aux observations de 2015 de l’OIE et de la FEDECAMARAS et de la CTV.
En ce qui concerne les observations de l’ASI, la commission note que, selon le gouvernement, l’ASI n’a pas mené à son terme la procédure de son inscription au registre syndical; des omissions subsistent et des lacunes doivent être résolues et, tant que l’ASI n’aura pas satisfait aux obligations et aux conditions requises pour mener à bien son inscription conformément au droit, les observations que cette organisation adresse à l’OIT ne seront pas prises en compte. Notant que les indications fournies par le gouvernement ne permettent pas d’établir que l’ASI ne constitue pas une organisation de travailleurs, et que le gouvernement ne remet pas en question ce point, la commission doit rappeler qu’avoir mené à son terme la procédure d’enregistrement syndical n’est pas une condition nécessaire pour considérer une organisation comme une organisation de travailleurs au regard de la convention ni pour qu’elle exerce des activités syndicales légitimes. Dans ces conditions, la commission prie le gouvernement de communiquer ses commentaires sur les observations de l’ASI.
La commission note que le Conseil d’administration examine actuellement une plainte présentée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT alléguant l’inobservation par la République bolivarienne du Venezuela de la convention et d’autres conventions, présentée par un groupe de délégués employeurs à la Conférence internationale du Travail en 2015. La commission note aussi qu’une nouvelle plainte présentée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT alléguant l’inobservation par la République bolivarienne du Venezuela de la convention et d’autres conventions, présentée par un groupe de délégués travailleurs à la Conférence internationale du Travail en 2016, a été déclarée recevable et est en instance devant le Conseil d’administration.
La commission prend note des conclusions du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2254, dans lequel les organisations plaignantes sont l’OIE et la FEDECAMARAS, ainsi que dans les cas nos 3016, 3059 et 3082 présentés par des organisations syndicales.
La commission note que, dans les rapports et les conclusions du Comité de la liberté syndicale et de la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail (ci-après la Commission de la Conférence) en 2015, en examinant les informations du gouvernement, ces deux organes ont pris en compte le rapport de la mission tripartite de haut niveau qui s’est rendue dans le pays du 27 au 31 janvier 2014 afin d’examiner toutes les questions en suspens relatives au cas no 2254 qui est en instance devant le Comité de la liberté syndicale (actes de violence ou de harcèlement commis contre des dirigeants patronaux, graves divergences dans le dialogue social, y compris absence de consultations sur des lois du domaine social et du travail, promotion d’organisations parallèles, etc.) et le plan d’action proposé par la mission au sujet des problèmes soulevés, plan qui a été approuvé par le Conseil d’administration à sa session de mars 2014. La commission note avec préoccupation que, dans leurs observations, tant l’OIE et la FEDECAMARAS que la CTV, l’UNETE, la CGT et la CODESA déclarent que le gouvernement n’a pas donné suite aux recommandations formulées par la mission tripartite de haut niveau et aux conclusions de la Commission de la Conférence de 2015.
Libertés publiques et droits syndicaux. Actes de violence et d’intimidation commis contre des organisations et des dirigeants patronaux et syndicaux. La commission note que, dans leurs dernières observations, l’OIE et la FEDECAMARAS dénoncent la prolifération d’actes d’intimidation et le durcissement de la campagne de stigmatisation et de discrimination contre la FEDECAMARAS, les entreprises qui y sont affiliées et ses dirigeants, et mentionnent en particulier ce qui suit: i) des allocutions publiques du Président de la République dans lesquelles ce dernier a porté des accusations destinées à intimider la FEDECAMARAS et a désigné à la vindicte populaire cette organisation d’employeurs et ses dirigeants, et l’utilisation répétée des médias publics à des fins d’intimidation et de stigmatisation (l’OIE et la FEDECAMARAS donnent plusieurs exemples détaillés de cas concrets et font état des accusations et des insultes proférées, par exemple le fait de les qualifier d’«ennemis du peuple» ou de les accuser de livrer une «guerre économique»; ii) des accusations analogues visant à intimider en particulier un groupe d’entrepreneurs du secteur de l’alimentation et des boissons affilié à des organisations membres de la FEDECAMARAS, laquelle serait victime de persécution et de harcèlement moral dans le cadre d’inspections persistantes; la saisie de camions, des confiscations et des expropriations ou des menaces d’expropriation de ses installations; des persécutions et des atteintes à la vie privée du président de ce groupe d’entreprises accusé publiquement de conspirer contre la patrie; et la persécution et la détention de sept travailleurs occupant des postes d’encadrement en raison de la suspension d’activités due au manque de matières premières et de pièces importées (à ce propos, les organisations concernées indiquent que ces faits font l’objet du cas no 3178 présenté au Comité de la liberté syndicale. Ce cas est en cours d’examen et, à ce sujet, les organisations indiquent avoir fourni des éléments de preuve détaillés.)
La commission note que la CTV, l’UNETE, la CGT et la CODESA font non seulement état des faits qu’elles avaient déjà dénoncés devant la mission tripartite de haut niveau de 2014 et devant le Comité de la liberté syndicale, ainsi que dans des observations adressées précédemment à la commission (assassinat du dirigeant syndical de l’UNETE, M. Ramón Jiménez, dans l’Etat de Barinas le 16 avril 2015, au cours duquel deux autres dirigeants syndicaux avaient été blessés), mais aussi d’autres actes de violences et d’atteintes aux libertés publiques: i) deux travailleurs ont été blessés gravement à l’arme blanche pendant une assemblée du Syndicat des travailleurs de Ferrominera del Orinoco (SINTRAFERROMINERA) le 15 janvier 2016; et ii) embuscade et agression de sept individus à l’encontre de trois dirigeants syndicaux de la mairie métropolitaine et du secteur de la santé (MM. Pablo Zambrano, Eladio Mata et José Luis Jiménez) le 23 août 2016, puis intimidations à l’encontre de travailleurs de ce secteur le 29 août lorsqu’ils s’apprêtaient à tenir une assemblée par des groupes de personnes qui ont blessé par balles, gravement, le dirigeant syndical M. Eladio Mata ainsi que d’autres travailleurs. Par ailleurs, la commission note que ces organisations et l’ASI affirment que le gouvernement tient des propos visant à discréditer le syndicalisme autonome et mène une politique de criminalisation à son encontre.
La commission souligne à nouveau avec préoccupation la gravité des questions soulevées – actes de violence et propos agressifs de la part des plus hautes instances de l’Etat –, ainsi que différentes formes d’intimidation et de stigmatisation visant des organisations d’employeurs et de travailleurs ainsi que leurs dirigeants et leurs affiliés.
La commission avait prié précédemment le gouvernement de communiquer des informations détaillées sur les cas allégués d’actes de violence, de détentions, d’intimidations et d’autres actes d’ingérence mentionnés dans les observations des partenaires sociaux. La commission note que le gouvernement répond, à propos de l’homicide du dirigeant syndical M. Tomás Rangel, qu’une personne a été mise en examen et qu’elle est en détention. La commission exprime l’espoir que les responsabilités pénales en ce qui concerne ce crime seront bientôt établies et prie le gouvernement de fournir des informations sur l’issue de la procédure judiciaire. La commission note aussi, à propos de toutes les autres allégations d’actes de violence, de détention, d’intimidation et d’actes d’ingérence mentionnés par les organisations syndicales et par les organisations d’employeurs, actes dont la commission avait fait mention dans ses commentaires précédents, que le gouvernement indique ne pas disposer d’autres informations et qu’il demande de plus amples précisions aux plaignants. A ce sujet, la commission rappelle qu’elle avait demandé aux organisations d’employeurs et de travailleurs concernées un complément d’information afin de faciliter l’examen de la situation (dans son dernier commentaire, la commission avait demandé un complément d’information sur l’allégation de 2014, qui concernait la surveillance et le harcèlement du président de la FEDECAMARAS, et sur les noms des 65 syndicalistes qui auraient été assassinés). Au sujet d’autres allégations, les partenaires sociaux avaient communiqué des éléments détaillés pour identifier ces personnes, et le gouvernement avait indiqué avoir pris connaissance de ces cas. A titre d’exemple, le gouvernement avait fait état, dans ses précédents rapports, des conclusions d’une table ronde tripartite de haut niveau de 2011 sur la violence dans le secteur de la construction et des assassinats, depuis 2008, de 13 syndicalistes (à ce sujet, le gouvernement avait indiqué que les auteurs de neuf de ces assassinats avaient été condamnés). La commission avait demandé dans son commentaire précédent un complément d’information à ce sujet. La commission rappelle que beaucoup d’allégations concernant des actes d’intimidation portent sur des déclarations publiques, au sujet desquelles les organisations concernées communiquent dans leurs observations le lien d’accès à leur contenu ainsi que d’autres précisions. La commission prie à nouveau les organisations d’employeurs et de travailleurs concernées d’adresser les informations supplémentaires dont elles disposent sur leurs allégations, et sur les récentes allégations selon lesquelles deux travailleurs ont été blessés au cours d’une assemblée du SINTRAFERROMINERA le 16 janvier 2016 et d’autres travailleurs ont été blessés également alors qu’ils s’apprêtaient à tenir une assemblée du secteur de la santé le 23 août 2016 à la mairie métropolitaine. Par ailleurs, la commission déplore que le gouvernement indique seulement qu’une personne a été accusée et qu’elle est en détention en ce qui concerne le meurtre du dirigeant syndical M. Tomás Rangel et qu’il déclare ne pas avoir de plus amples informations. De plus, le gouvernement n’indique pas avoir essayé d’obtenir des éclaircissements au sujet des nombreuses allégations formulées dans des observations précédentes des partenaires sociaux, allégations que la commission a soulignées dans ses commentaires précédents. Le gouvernement a précédemment fourni, au sujet de certaines de ces allégations, des informations partielles dans des rapports précédents. Compte tenu des indications déjà fournies, d’autres éléments que pourraient communiquer les organisations d’employeurs et de travailleurs concernées, des enquêtes menées par les organes compétents et des différentes procédures applicables, la commission prie instamment le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les différentes allégations d’actes de violence, de détentions, d’intimidations et d’ingérence dont il est question dans le présent commentaire et dans les commentaires précédents de la commission. La commission attire à nouveau l’attention du gouvernement sur le principe selon lequel les droits reconnus par la convention aux organisations de travailleurs et aux organisations d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, d’intimidation et de menaces, de quelque nature que ce soit, en particulier lorsque celles-ci sont dirigées contre des personnes et des organisations qui défendent légitimement les intérêts des employeurs ou des travailleurs dans le cadre prévu par la convention.
Observations d’organisations d’employeurs et de travailleurs sur le dialogue social. La commission note que, dans ses communications relatives à la plainte présentée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT, le gouvernement réaffirme son engagement en faveur d’un dialogue social ample et participatif. La commission note que le gouvernement a nié que la FEDECAMARAS soit exclue ou marginalisée, comme le démontre la participation d’un nombre important de chambres et d’entreprises de cette organisation à des réunions et à des processus de dialogue, à des concertations, à des tables rondes techniques, à des accords et à des négociations. En particulier, le gouvernement ajoute que ce secteur d’entreprises participe activement au Conseil national de l’économie productive qui a été créé en 2016 pour débattre afin de recommander des mesures visant à accroître la productivité du pays.
La commission prend note par ailleurs des allégations d’exclusion du dialogue social qui figurent dans les observations d’organisations d’employeurs et d’organisations de travailleurs. D’une part, en ce qui concerne les observations de l’OIE et de la FEDECAMARAS, la commission note que, à nouveau, ces organisations dénoncent l’absence de dialogue social effectif avec la FEDECAMARAS, qui est l’organisation d’employeurs la plus représentative du pays. En résumé, ces allégations sont les suivantes: i) au moyen des communications nos 1980 et 1981 du ministère du Pouvoir populaire pour le processus social du travail, adressées les 18 et 24 décembre 2015 à la FEDECAMARAS (c’est-à-dire en période de fêtes), le gouvernement mène un pseudo-dialogue avec la FEDECAMARAS. En réalité, il ne s’agit pas d’un dialogue constructif, et le gouvernement continue à prendre des mesures sans procéder aux consultations voulues; les prétendues consultations sont effectuées en retard, quand les mesures devant faire l’objet de consultations ont déjà été adoptées ou promulguées. Le gouvernement n’a pas constitué de tables rondes ou d’instances de travail et il n’y a pas eu de débats sérieux et amples sur des questions du domaine du travail, comme le demandent les organes de contrôle de l’OIT; ii) l’adoption en décembre 2015, sans que les partenaires sociaux n’aient été consultés, de 29 lois nationales, dont la loi sur l’inamovibilité au travail, qui permet à l’inspection du travail, laquelle dépend du gouvernement, de qualifier le licenciement et de réintégrer automatiquement le salarié sans que ne soit garanti le droit de défense des employeurs; iii) l’OIE et la FEDECAMARAS allèguent de surcroît que la FEDECAMARAS a été exclue concernant d’autres mesures ayant un fort impact économique et dans le domaine du travail qui ont été adoptées sans dialogue social et sans consulter l’organisation la plus représentative des employeurs, par exemple l’adoption d’un nouveau régime professionnel provisoire et de décrets d’urgence économique (les organisations précisent que, dans leurs considérants, ces décrets attribuent la crise à une guerre économique prétendument menée par la FEDECAMARAS et des entrepreneurs nationaux, lesquels sont accusés d’un comportement hostile qui vise à déstabiliser et à entraver l’accès à des biens et à des services nécessaires à la population); iv) le Président de la République, dans des déclarations, a dit qu’il ne consulterait jamais la FEDECAMARAS au sujet de l’adoption de hausses du salaire minimum et qu’il n’était pas disposé à dialoguer avec la FEDECAMARAS; v) en ce qui concerne la création le 19 janvier 2016 du Conseil national de l’économie productive, le conseil compte parmi ses membres, à titre personnel, des entrepreneurs liés à des secteurs économiques représentés à la FEDECAMARAS, mais il n’y a pas au sein de ce conseil une représentation de la FEDECAMARAS ou des liens institutionnels avec la FEDECAMARAS; le secteur syndical indépendant n’a pas été invité à y participer, et le Président de la République a désigné les membres du conseil sans y inviter ni la FEDECAMARAS ni les organisations qui lui sont affiliées; vi) le plan d’action pour le dialogue social n’a pas été exécuté (il prévoyait la création d’une table ronde de dialogue entre des représentants du gouvernement et de la FEDECAMARAS, pour traiter les questions liées à la plainte et d’autres questions, et prévoyait également l’engagement de procéder à des consultations au moyen de communications écrites); le gouvernement s’y était pourtant engagé devant le Conseil d’administration du BIT en mars 2016, dans le cadre de l’examen de la plainte présentée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT; les organisations soulignent que, malgré plusieurs tentatives de la FEDECAMARAS, il n’y a eu aucune réunion.
La commission note aussi que la CTV, l’UNETE, la CGT et la CODESA dénoncent l’exclusion du dialogue social des organisations syndicales qui ne sont pas proches du gouvernement.
Enfin, la commission note que, dans le cadre de l’examen de la plainte susmentionnée qui a été présentée en 2015 en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT, le Conseil d’administration du BIT, en novembre 2016, a noté avec intérêt les informations fournies par le Directeur général du BIT concernant l’engagement du gouvernement à inclure la FEDECAMARAS dans les futures tables de dialogue socio-économique. Le Conseil d’administration a exprimé le ferme espoir que, avant sa session de mars 2017, le gouvernement prendrait les mesures appropriées pour favoriser un environnement approprié au dialogue social qui permette à la FEDECAMARAS, aux organisations affiliées, à leurs dirigeants et aux entreprises affiliées, ainsi qu’aux syndicats, de développer leurs activités légitimes conformément aux décisions des organes de contrôle de l’OIT concernant la convention et d’autres conventions.
Tout en prenant note de l’ensemble des informations fournies, la commission exprime sa profonde préoccupation en raison des allégations d’exclusion du dialogue social formulées tant par des organisations d’employeurs que par des organisations de travailleurs et de l’absence de consultation de la FEDECAMARAS ainsi que d’organisations de travailleurs critiques à l’égard de la politique du gouvernement, en ce qui concerne l’adoption de normes et d’autres initiatives ayant une grande importance sur les plans économique, social et du travail qui touchent ces organisations d’employeurs et de travailleurs. Regrettant l’absence de progrès et prenant note de la décision de novembre 2016 du Conseil d’administration, la commission prie fermement le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour favoriser un environnement approprié au dialogue social qui permette à la FEDECAMARAS, aux organisations affiliées, à leurs dirigeants et aux entreprises affiliées, ainsi qu’aux syndicats, de développer leurs activités légitimes conformément aux commentaires du Conseil d’administration et à ceux d’autres organes de contrôle de l’OIT. La commission prie le gouvernement d’indiquer toute évolution à cet égard.
Articles 2 et 3 de la convention. Dispositions de la législation contraires à l’exercice des droits syndicaux et à l’autonomie des organisations. S’agissant de l’obligation imposée aux syndicats de communiquer la liste nominative de leurs affiliés au Registre national des organisations syndicales (art. 388 de la loi organique du travail, des travailleurs et des travailleuses (LOTTT)), qui faisait l’objet de ses commentaires précédents, la commission note que le gouvernement met l’accent sur le fait que cette disposition existait dans la législation précédente et que la législation du travail n’a jamais prévu de sanctions juridiques ou des conséquences d’un autre ordre à l’encontre des organisations syndicales qui ne respecteraient pas cette disposition. Par conséquent, le gouvernement nie toute violation de la liberté syndicale. Le gouvernement ajoute que les travailleurs sont affiliés directement par les membres du comité de direction du syndicat, conformément à ce que prévoient les statuts, et qu’aucune décision des autorités administratives et judiciaires n’est nécessaire. A ce sujet, la commission fait observer que la pertinence de cet article et son impact ont été dénoncés par les organisations de travailleurs – comme le rappelle l’ASI dans ses observations, cette norme ainsi que d’autres dispositions de la LOTTT examinées dans le présent commentaire ont fait l’objet en 2013 d’un recours en nullité et en amparo conservatoire interjeté par de nombreuses organisations syndicales du pays (comme l’indique l’ASI, la Cour suprême de justice ne s’est pas encore prononcée sur la recevabilité de ce recours). En ce qui concerne le contenu de l’article en question, la commission se doit de rappeler à nouveau que, sauf dans les cas où les affiliés décident de leur gré de faire connaître leur condition d’affiliés, par exemple aux fins de la retenue sur leur salaire de leur cotisation syndicale, l’affiliation syndicale des travailleurs ne doit être portée ni à la connaissance de l’employeur ni à celle des autorités. Rappelant que le gouvernement peut requérir l’assistance technique du Bureau à ce sujet, la commission le prie à nouveau, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, de prendre les mesures nécessaires pour réviser l’article 388 de la LOTTT dans le sens indiqué.
En ce qui concerne les refus, les obstacles et les délais excessifs affectant l’enregistrement de syndicats qui sont dénoncés par l’UNETE, et l’obligation de conformer les statuts des syndicats à des exigences légales arbitraires (par exemple l’obligation d’imposer le principe de représentation proportionnelle ou d’imposer aux organisations syndicales des attributions et des finalités étrangères à leur nature) (art. 367 et 368 de la LOTTT), la commission note que le gouvernement indique, d’une part, que les articles 367 et 368 de la LOTTT ont été soumis à un examen et que des consultations ont été effectuées auprès de différentes organisations syndicales et d’employeurs ainsi que d’experts des questions du travail, et qu’il ressort de leurs conclusions que ces articles ne sont pas contraires à la convention. Par ailleurs, la commission prend dûment note du fait que, selon le gouvernement, les cas signalés par l’UNETE portent sur sept (et non 13) organisations syndicales, dont deux sont enregistrées, et les cinq autres organisations ont préparé un projet de révision de leurs statuts. Par conséquent, il incombera aux futures organisations de formuler à nouveau leur demande d’enregistrement. Le gouvernement demande à l’UNETE de fournir de plus amples informations ainsi que des données spécifiques. La commission note que les observations reçues d’organisations de travailleurs et d’employeurs, y compris de l’organisation d’employeurs la plus représentative, indiquent que ces organisations n’ont pas été consultées au sujet de l’examen portant sur l’adéquation des articles en question dont fait état le gouvernement (lequel n’a pas indiqué quand cet examen a eu lieu). En ce qui concerne le contenu de ces articles, la commission souligne à nouveau le caractère trop ample des finalités des organisations syndicales (et d’employeurs) prévues dans les articles 367 et 368 de la LOTTT, finalités qui recouvrent de nombreuses responsabilités incombant aux autorités publiques. Quant aux allégations faisant état de refus, d’obstacles et de délais excessifs en ce qui concerne l’enregistrement de syndicats, la commission note que les observations de la CTV, de l’UNETE, de la CGT et de la CODESA contiennent des dénonciations de plusieurs cas dans lesquels des groupes de travailleurs ont présenté plusieurs fois leurs projets d’organisation syndicale. Ces groupes n’ont pas reçu de réponse ou leurs projets n’ont pas encore été légalisés, et les organisations font état de retards atteignant un an (les organisations présentent en détail 12 cas – sept au sujet desquels le gouvernement a répondu, et cinq autres cas). Tout en prenant note des récentes observations de la CTV, de l’UNETE, de la CGT et de la CODESA qui font état de la persistance d’obstacles et de délais excessifs dans l’enregistrement d’organisations syndicales, ainsi que des informations partielles communiquées par le gouvernement, la commission prie ces organisations de travailleurs de fournir des informations détaillées et actualisées sur les cas signalés et d’indiquer les problèmes concrets qui ont été évoqués au sujet de l’enregistrement de syndicats (absence de réponse, refus et motif des refus, retards, etc.). La commission prie le gouvernement de communiquer des commentaires additionnels à ce sujet et de prendre des mesures pour que, en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives, les articles 367 et 368 de la LOTTT soient révisés.
En ce qui concerne les allégations d’ingérence dans les élections, en particulier de la part du Conseil national électoral (CNE), la commission note que le gouvernement indique ce qui suit: i) selon l’article 27 de la loi de la Cour suprême de justice, la chambre électorale de cette cour est compétente pour connaître les actions en contentieux électoral émanant des syndicats au motif d’actes à caractère électoral; ii) il n’est pas vrai que, lorsque le mandat de la direction d’un syndicat est arrivé à son terme, le syndicat ne peut pas négocier des conventions collectives (le gouvernement indique qu’il y a eu des discussions sur des conventions collectives qui ont abouti à la signature de ces conventions dans d’importants secteurs, comme l’éducation ou la pétrochimie, et que des conventions collectives ont été conclues avec des organisations syndicales alors que le mandat de la direction de ces organisations était arrivé à son terme; actuellement, dans le secteur de l’électricité et celui de l’aluminium, il y a des débats avec des syndicats dont la direction se trouve dans cette situation); iii) les demandes d’aide technique adressées au CNE ont un caractère volontaire, et les organisations qui décident de mener la procédure sans cette aide ne sont pas tenues de communiquer leur calendrier électoral au CNE; iv) de même, lorsque l’organisation syndicale organise ses élections sans avoir demandé l’aide du CNE, il n’est pas obligatoire d’en publier les résultats dans le bulletin électoral afin que ces élections soient reconnues. Tout en prenant note des indications du gouvernement sur les compétences de la chambre électorale de la Cour suprême de justice, la commission rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle a noté (ce que le gouvernement ne nie pas dans son dernier rapport) que, bien qu’il ne soit pas un organe judiciaire, le CNE tranche les recours qui lui sont soumis. Par ailleurs, la commission note que, dans leurs observations, la CTV, l’UNETE, la CGT et la CODESA affirment que le CNE continue à s’immiscer dans les processus électoraux et que, dans ses observations, l’ASI se dit préoccupée par le fait que la chambre électorale de la Cour suprême de justice a suspendu les élections syndicales dans le syndicat sidérurgique de l’Orénoque. En outre, tout en prenant note des indications du gouvernement selon lesquelles plusieurs directions syndicales dont le mandat s’était achevé ont pu négocier et conclure des conventions collectives, la commission note que l’article 402 de la LOTTT dispose toujours que «les membres de la direction des organisations syndicales, dont le mandat s’est achevé conformément à la présente loi et à leurs statuts […], ne pourront pas présenter, traiter ou conclure des conventions collectives du travail, des cahiers de revendications dans le cadre d’une conciliation ou d’un conflit et ne pourront pas participer aux travaux préparatoires d’une convention». Enfin, la commission estime que, bien que le recours à l’aide du CNE soit facultatif, le recours à cet organe ne devrait pas impliquer des obligations susceptibles de comporter une ingérence dans des élections syndicales. Réitérant que les élections syndicales relèvent des affaires internes des organisations dans lesquelles les autorités, y compris à travers le CNE, ne devraient pas s’ingérer, la commission se réfère à ses recommandations antérieures et prie une fois de plus le gouvernement, en consultation avec les organisations syndicales les plus représentatives, de prendre des mesures pour éviter toute ingérence dans les élections syndicales et, en particulier: i) pour que les règles en vigueur ne permettent pas à une autorité non judiciaire (comme le CNE) de trancher les recours portant sur des élections syndicales; ii) pour abroger, en droit et dans la pratique, le principe selon lequel un retard dans les élections syndicales empêche les organisations syndicales de participer à la négociation collective; iii) d’éliminer l’obligation de communiquer au CNE le calendrier électoral; et iv) de supprimer la publication dans la Gazette électorale des résultats des élections syndicales en tant que condition pour reconnaître les élections.
En ce qui concerne ses commentaires précédents sur les restrictions au droit des organisations syndicales d’organiser librement l’élection de leurs représentants qui sont imposées en vertu des articles 387, 395, 403 et 410 de la LOTTT, la commission note que, à nouveau, le gouvernement nie que ces articles restreignent la libre élection des représentants syndicaux; le gouvernement indique que ces articles ont été proposés par un grand nombre d’organisations syndicales et que les articles expriment ce qui est contenu dans les statuts internes de presque toutes les organisations syndicales du pays. A ce sujet, la commission note que la CTV, l’UNETE, la CGT, et la CODESA critiquent le gouvernement au motif qu’il n’a pas donné suite aux recommandations de la commission en vue de la révision de ces dispositions. La commission rappelle qu’il incombe aux organisations syndicales de déterminer dans leurs propres statuts les règles applicables à l’élection de leurs représentants. La commission prie à nouveau le gouvernement de prendre des mesures visant la révision des dispositions suivantes de la LOTTT qui restreignent le droit des organisations syndicales d’organiser librement les élections de leurs représentants: i) l’article 387, qui subordonne l’éligibilité des dirigeants à la condition d’avoir convoqué dans les délais les élections syndicales lorsqu’ils étaient dirigeants d’une autre organisation syndicale; ii) l’article 395, qui dispose que l’omission, de la part des adhérents et des adhérentes, du versement de leurs cotisations ne prive pas les intéressés de leur droit de vote; iii) l’article 403, qui impose un système de vote prévoyant un scrutin uninominal pour l’élection de l’instance dirigeante et la représentation proportionnelle; et iv) l’article 410, qui impose la tenue d’un référendum pour la destitution de dirigeants syndicaux. La commission prie le gouvernement de donner des informations sur toute évolution à cet égard.
Article 3. Restrictions au droit des organisations d’organiser librement leurs activités. La commission rappelle à nouveau ses commentaires précédents sur la nécessité d’attribuer à une autorité judiciaire ou à une autorité indépendante, et non au ministère du Pouvoir populaire chargé du travail, la compétence de déterminer les domaines ou secteurs d’activité qui ne doivent pas être paralysés en cas de grève du fait que cela affecterait la production de biens et de services essentiels, dont l’interruption porterait préjudice à la population (art. 484 de la LOTTT), ainsi que sur le système de désignation des membres du Conseil d’arbitrage en cas de grève dans les services essentiels, qui devrait suivre une procédure de nature à garantir la confiance des parties dans ce système, étant donné que, selon la législation en vigueur, si les parties ne parviennent pas à se mettre d’accord, les membres du Conseil d’arbitrage sont désignés par l’inspecteur du travail (art. 494). La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout fait nouveau à cet égard.
Prenant en compte l’ensemble des éléments mentionnés dans les observations des organisations de travailleurs et d’employeurs et dans les commentaires du gouvernement, la commission fait à nouveau siennes les considérations du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2254 au sujet de l’application de la convention et considère que la situation est extrêmement grave et urgente. La commission prie à nouveau instamment le gouvernement de mettre en œuvre sans délai le plan d’action proposé par la mission tripartite de haut niveau, et approuvé par le Conseil d’administration, et de donner effet aux conclusions adoptées par la Commission de la Conférence en juin 2015, ainsi qu’à l’engagement qui a été indiqué au Conseil d’administration en novembre 2016. La commission exprime le ferme espoir qu’elle pourra constater dans un proche avenir des progrès significatifs à cet égard et en ce qui concerne les diverses demandes formulées dans la présente observation. La commission prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard.
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