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Informe definitivo - Informe núm. 6, 1953

Caso núm. 49 (Pakistán) - Fecha de presentación de la queja:: 30-OCT-51 - Cerrado

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A. Analyse des plaintes

A. Analyse des plaintes
  1. 770. Les allégations sont contenues dans les communications de la Fédération syndicale mondiale, en date du- 30 octobre 1951 ; l'Union des syndicats néerlandais, en date du 13 novembre 1951; la Fédération pancypriote du travail, en date du 19 novembre 1951 ; la Confédération générale des syndicats birmans, en date du 29 novembre 1951 ; la Confédération des travailleurs brésiliens, en date du 1er décembre 1951; le Congrès des syndicats arabes (Nazareth), en date du 5 décembre 1951 ; l'Union internationale des syndicats des travailleurs du bâtiment, du bois et des matériaux de construction (Helsinki), en date du 1er décembre 1951.
  2. 771. Certaines communications émanant des organisations suivantes traitent également, en des termes généraux, des mêmes questions : Fédération nationale des travailleurs du bâtiment, des travaux publics et des matériaux de construction, en date du 15 novembre 1951 ; Conseil central des syndicats professionnels (Prague), en date du 6 décembre 1951 ; Union internationale des syndicats du textile et de l'habillement (Varsovie), en date du 14 décembre 1951 ; et Union internationale des travailleurs agricoles et forestiers, en date du 17 décembre 1951.
  3. 772. Etant donné que les différentes plaintes contiennent en fait, les mêmes allégations, elles seront analysées en même temps. Les principales allégations sont les suivantes.
  4. 773. Le gouvernement du Pakistan aurait privé la Fédération des syndicats du Pakistan du droit de fonctionner comme une organisation syndicale et pris des mesures tendant à supprimer le mouvement syndical au Pakistan, étant donné qu'il a arrêté non seulement les principaux dirigeants de la Fédération, y compris Mirza Ibrahim, président, Mohamed Afzal, secrétaire général, et Mohamed Jalil, secrétaire adjoint, mais également d'autres dirigeants syndicaux et paysans, entre autres A. N. Quasmi, secrétaire de l'Association des écrivains progressistes du Pakistan, A. P. Manzar, secrétaire du parti paysan, et H. Hussain, chef de ce parti, aussi bien que des militants syndicalistes effectuant des activités syndicales ordinaires, comme le recrutement de membres, la réunion d'assemblées syndicales et la distribution de tracts ; le gouvernement a également interdit à la Fédération de publier des tracts et des brochures et sa brochure sur Le mouvement syndical aurait été confisquée.
  5. 774. Etant donné que les arrestations ont été faites en vertu de diverses lois intitulées « Lois sur la sécurité publique», des chefs d'accusation précis n'ont pas été formulés ; la défense des accusés serait impossible et la durée de la détention illimitée. Il est donc possible de dire que, dans ces conditions, la liberté syndicale n'existe plus au Pakistan.
  6. 775. Privés de leurs droits les plus élémentaires, les travailleurs du Pakistan voient leur niveau de vie baisser constamment à la suite de la hausse continuelle des prix et de la baisse que leurs salaires réels subissent de ce fait.
  7. 776. En même temps que le gouvernement du Pakistan prend des mesures pour supprimer le mouvement syndical, il porte manifestement atteinte aux droits démocratiques par la procédure qu'il suit dans l'affaire de la conspiration de Rawalpindi, dont est actuellement saisi un tribunal spécial constitué conformément à la loi de 1951 sur la conspiration de Rawalpindi (tribunal spécial) ; les dispositions de cette loi vont à l'encontre de tous les principes de droit reconnus et leur substituent une procédure privant les accusés de tout moyen de se défendre. On ne saurait dire que ce procès se déroulera dans des conditions équitables, alors que les accusés se voient refuser le droit à une instruction préliminaire de l'affaire, à être jugés par un jury et à faire appel de la décision du tribunal et qu'ils peuvent être condamnés pour une infraction ne figurant pas parmi les chefs d'accusation, que des témoignages indirects sont admis, y compris les déclarations qu'auraient faites des personnes décédées, qu'un compte rendu sténographique des audiences n'est pas établi, et enfin que les audiences du procès sont secrètes.
  8. 777. Bien que les milieux intéressés aient déclaré qu'il n'y a pas de rapport entre cette affaire et les arrestations en masse effectuées parmi les dirigeants syndicaux et paysans, il est évident que le gouvernement a recours à des lois antidémocratiques pour supprimer, de manière systématique, toutes les opinions et les mouvements favorables au progrès social, à une législation sociale progressiste et au fonctionnement libre des organisations syndicales, et cela parce que ces mouvements et principes sont contraires à sa politique.
  9. 778. La Confédération générale des syndicats birmans allègue en plus que le gouvernement du Pakistan donne son entier appui à l'Union générale des travailleurs pakistanais, qui n'a pas d'existence réelle et ne constitue qu'un groupement fantoche créé par le gouvernement pour saper l'unité des travailleurs. L'Union des syndicats néerlandais allègue également que le gouvernement donne un appui semblable à une organisation intitulée: Confédération du travail du Pakistan.

B. Analyse de la réponse du gouvernement

B. Analyse de la réponse du gouvernement
  1. 779. Le gouvernement du Pakistan a présenté les observations suivantes.
  2. 780. Il n'y a jamais eu d'ingérence de quelque nature que ce soit dans les activités et le fonctionnement de la Fédération des syndicats du Pakistan. Mirza Ibrahim et Mohamed Afzal n'ont pas été arrêtés en raison d'activités syndicales, mais parce qu'il a été constaté qu'ils avaient pris part à des activités préjudiciables à la sécurité publique. Mirza Ibrahim, qui a, depuis, été relâché, et Mohamed Afzal sont tous deux membres du Comité régional du parti communiste du Pakistan occidental. A. N. Quasmi, de l'Association des écrivains progressistes du Pakistan, a été arrêté pour la même raison, mais n'est plus détenu. Aucune personne du nom de Mohamed Jalil, appartenant à la Fédération des syndicats du Pakistan, n'a jamais été arrêtée. Aucune personne n'a été arrêtée pour avoir recruté, parmi les travailleurs, des membres pour la Fédération des syndicats du Pakistan.
  3. 781. L'allégation relative à l'application de la loi sur la sécurité publique en ce qui concerne les arrestations de militants syndicalistes en raison de leurs activités syndicales est complètement fausse, étant donné qu'aucune personne n'a jamais été arrêtée en vertu de cette loi du fait de ses activités syndicales.
  4. 782. Il n'est pas vrai que le gouvernement ait empêché la distribution de tracts ou brochures de la Fédération des syndicats du Pakistan ou interdit une brochure intitulée Le mouvement syndical au Pakistan.
  5. 783. Un document sur le coût de la vie est annexé à la réponse et il en ressortirait que l'augmentation de coût de la vie a été presque insensible et que les salaires ont augmenté proportionnellement beaucoup plus.
  6. 784. Parmi les quinze personnes accusées dans l'affaire de la conspiration de Rawalpindi, figurent onze anciens officiers des forces armées du Pakistan, la femme d'un officier, un éditeur de journaux et un dirigeant communiste indien. Aucun des accusés, à l'exception de l'éditeur de journaux, ne fait partie d'un syndicat et aucun d'entre eux n'a été traduit en justice en raison de ses activités syndicales.
  7. 785. L'affaire est actuellement en instance de jugement devant un tribunal comprenant trois juges et constitué en vertu d'une loi adoptée par l'autorité législative. Ces trois juges sont parmi les juristes les plus éminents du pays. Le tribunal est présidé par un juge de la Cour fédérale du Pakistan, qui a été membre de la Sous-commission des Nations Unies pour la Palestine. Les deux autres juges sont inscrits sur la liste des juristes internationaux établie par les Nations Unies et contenant le nom de juristes habilités à faire partie d'organismes de conciliation et d'arbitrage et à faire fonction d'observateurs pour le règlement des différends internationaux.
  8. 786. Le tribunal siège à huis clos pour des raisons de sécurité nationale. Aucun pays n'admettrait un procès public dans des affaires où l'accusation porte sur des questions militaires et sur la défense du pays.
  9. 787. D'ordinaire, les procès criminels se déroulent devant des tribunaux inférieurs. Dans de tels cas, les accusés ont le droit de se pourvoir en appel devant la Haute Cour et l'appel est jugé par deux juges de cette Cour. Dans le cas présent, le tribunal est déjà composé de trois juges choisis parmi les juges de la Cour fédérale et de la Haute Cour et il a, par conséquent, un rang égal à celui de l'autorité judiciaire suprême du pays. Dès lors, la question du droit d'appel contre les décisions de ce tribunal ne se pose pas, de même qu'il ne peut être question d'accorder un droit d'appel contre les décisions de la Cour fédérale elle-même.
  10. 788. Une grande liberté a été accordée aux accusés en ce qui concerne le choix de leurs défenseurs. En fait, chaque avocat pakistanais qui a demandé à défendre l'un des accusés a obtenu l'autorisation nécessaire et a reçu des instructions de la part de son client. Le choix d'un défenseur n'est pas laissé à la discrétion du tribunal, pour autant que le défenseur est domicilié au Pakistan et que le tribunal est convaincu que le défenseur désigné dans cette affaire respectera le caractère secret qu'aux termes de la loi elle-même doivent avoir les débats. Dans les cas où des accusés n'avaient pas les moyens de s'assurer le concours d'un avocat, un défenseur leur a été assigné aux frais du gouvernement. Les avocats des accusés ont été autorisés à emporter à domicile les documents nécessaires pour qu'ils puissent étudier l'affaire et à recevoir des instructions de leur client en prison.
  11. 789. Le gouvernement n'a pas fait d'observations au sujet de l'allégation d'après laquelle il aurait créé l'Union générale des travailleurs pakistanais, qui serait un groupement fantoche destiné à saper l'unité des travailleurs et accorderait son appui à cette organisation ou à une organisation dite «Confédération du travail du Pakistan ».
  12. 790. Le gouvernement déclare qu'en ratifiant la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, de même que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, il a témoigné de son désir réel de garantir les droits fondamentaux des travailleurs.

C. C. Conclusions du comité

C. C. Conclusions du comité
  1. 791. Au cours de l'examen de ce cas, le Comité a tenu compte du fait que le gouvernement a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
    • Allégation relative à la loi de sécurité publique, notamment en ce qui concerne la Fédération des syndicats du Pakistan
  2. 792. Alors qu'il est allégué que la Fédération des syndicats du Pakistan est privée du droit de fonctionner comme une organisation syndicale, cette allégation semble faire partie d'une allégation plus générale d'après laquelle le gouvernement cherche à supprimer le mouvement syndical au Pakistan, et cela par la manière dont il applique la loi sur la sécurité publique. Il est allégué par les plaignants que, du moment que des dirigeants syndicaux et des travailleurs ont été arrêtés en vertu de cette loi, sans que des chefs d'accusation précis aient été formulés contre eux, que la défense des accusés est rendue impossible et que les personnes arrêtées peuvent être détenues pendant une période illimitée, il ne saurait être question de liberté syndicale tant qu'une telle loi est en vigueur.
  3. 793. Il est également allégué que le gouvernement a apporté des restrictions au droit de la Fédération des syndicats du Pakistan de publier des tracts et des brochures et qu'il lui a notamment interdit de distribuer sa brochure intitulée Le mouvement syndical au Pakistan. Bien que les plaignants ne soutiennent pas que l'interdiction qui aurait été ainsi faite était basée sur la loi de sécurité publique, le texte de cette loi fait ressortir que des mesures de contrôle des publications et autres moyens d'information sont également prévues par ce texte.
  4. 794. Dans ces conditions, il convient d'examiner en premier lieu les dispositions de la loi de sécurité publique du Pakistan. La loi a été maintenant incorporée dans le texte de la loi pakistanaise de 1952 sur la sécurité; avant que celle-ci ait été adoptée, deux ordonnances sur la sécurité publique avaient été promulguées, l'une en 1949, pour une durée d'une année, et l'autre en 1952. La loi actuelle, qui restera en vigueur pendant trois ans, semble reprendre le texte de ces deux ordonnances et valider les mesures prises en vertu des pouvoirs accordés par celles-ci.
    • Objectif de la loi
  5. 795. Ainsi qu'il est indiqué dans le préambule, l'objet de la loi est «de prévoir des mesures spéciales qui seraient prises à l'égard de personnes agissant de manière préjudiciable à la défense, aux relations extérieures et à la sécurité du Pakistan, ou au maintien de l'approvisionnement et au fonctionnement des services essentiels à la collectivité ainsi qu'à l'ordre public ».
    • Détention de personnes suspectes
  6. 796. Les dispositions de la loi autorisant la détention de personnes suspectes sont les suivantes
  7. 3. 1) Si le gouvernement central est convaincu qu'en vue d'empêcher certaines personnes d'agir de manière préjudiciable à la défense ou aux relations extérieures, ou à la sécurité du Pakistan, ou d'une partie de ce pays ... il est nécessaire de prendre une telle mesure, il peut prendre un ordre ...
    • b) enjoignant qu'elles soient détenues.
      • Contrôle des moyens d'information et des publications
    • 797. La loi prévoit également des mesures de contrôle des publications et des moyens d'information. Les dispositions en vigueur à cet égard sont notamment les suivantes
  8. 11. 1) Lorsque le gouvernement central estime que tout document préparé, imprimé ou publié, contient des nouvelles, rapports ou informations susceptibles de mettre en danger la défense ou les relations extérieures, ou la sécurité du Pakistan, il peut, par un ordre écrit...
    • c) interdire toute publication ultérieure de telles nouvelles, rapports ou informations, de même que la vente et distribution de tels documents;
    • d) décider que de tels documents et tout exemplaire, traduction ou copie des documents en question seront confisqués.
  9. 12. 1) Le gouvernement central, ou toute autorité ayant repu de lui des pouvoirs à cet effet, peut, s'il le considère nécessaire ou utile:
    • a) par un ordre adressé à l'imprimeur ou éditeur ou aux imprimeurs ou éditeurs d'une manière générale,
    • b) interdire ou réglementer la préparation ou la publication de tels documents ou de toute espèce de documents ou de toutes questions concernant certains sujets ou certaines espèces de sujets ;
    • c) interdire pour une période déterminée la publication de tout journal, périodique, brochure ou autre publication.
      • Examen des ordres par des conseils consultatifs et révision de ces ordres par les autorités
    • 798. La loi prévoit que les ordres mentionnés ci-dessus seront examinés par des conseils consultatifs et que le gouvernement lui-même procédera périodiquement à une révision de ces cas. Les dispositions relatives à ces mesures sont les suivantes:
  10. 5. 1) Le gouvernement central constituera, toutes les fois que cela sera nécessaire, un ou plusieurs conseils consultatifs aux fins de la présente loi.
  11. 2) Tout conseil consultatif ainsi constitué comprendra deux personnes qui sont, ou ont été, ou ont les qualifications requises pour être juges à la Haute Cour, et ces personnes seront nommées par le gouvernement central.
  12. 6. Dans tous les cas où un ordre de détention a été donné conformément à l'alinéa b) du paragraphe 1) de l'article 3, et dans tous les cas où, avant l'introduction de cette loi, un tel ordre avait été donné en vertu de l'alinéa b) du paragraphe 1) de l'article 3 de l'ordonnance du Pakistan de 1952 sur la sécurité publique, l'autorité dont émane l'ordre en question communiquera, à la personne intéressée, dans le délai d'un mois à partir de la date de la détention, les raisons pour lesquelles l'ordre a été pris, et ceci afin de lui permettre, si elle le désire, de présenter des observations écrites contre cet ordre, et l'autorité en question devra informer cette personne de son droit de présenter de telles observations et lui donner au plus tôt la possibilité de le faire.
    • Toutefois, cet article n'oblige en rien l'autorité à divulguer des faits qu'elle considère comme contraires à l'intérêt public de divulguer.
  13. 7. Dans tous les cas où un ordre de détention a été donné ... ou lorsqu'un ordre a été pris en vertu des articles ... Il et 12, l'autorité dont émane cet ordre présentera, au conseil consultatif constitué par le gouvernement, dans les trois mois à partir de la date où cet ordre a été donné ...les raisons pour lesquelles cet ordre a été donné et les observations émanant éventuellement de la personne ou des personnes intéressées.
  14. 8. 1) Après avoir examiné la documentation qui lui a été présentée, et au besoin, après avoir demandé toutes autres informations complémentaires au gouvernement ou à toute personne intéressée, dans la mesure où il l'estimera nécessaire, le conseil consultatif soumettra son rapport au gouvernement central.
  15. 2) Le conseil consultatif indiquera dans une partie distincte de son rapport son avis sur le fait de savoir si cet ordre était suffisamment justifié...
  16. 3) Toute personne contre laquelle a été pris un ordre conformément à l'alinéa b) du paragraphe 1) de l'article 3, ou aux articles 11 et 12, ou qui est touchée par un tel ordre, ne sera ni tenue ni autorisée à se présenter personnellement ou à se faire représenter par un représentant légal devant le conseil consultatif, ou à présenter des témoins devant ce conseil.
  17. 4) Lorsqu'il aura repu le rapport du conseil consultatif, le gouvernement central examinera ce rapport et prendra à cette occasion toute décision qui lui apparaîtra juste et appropriée.
    • Le gouvernement central devra procéder à la révision de tous les ordres de cette nature dans un délai de six mois à partir de la date où ces ordres auront été pris, à moins qu'ils n'aient été révoqués auparavant, et dans le cas d'ordre pris conformément à l'alinéa b) du paragraphe 1) de l'article 3, le gouvernement informera du résultat de cette révision les personnes intéressées par ces ordres.
    • Disposition spéciale sur certains cas de détention
  18. 799. Toutefois, en vertu dé l'article 9:
    • Toute personne détenue afin d'être empêchée d'agir de manière préjudiciable à la défense ou aux relations extérieures, ou à la sécurité du Pakistan, ou d'une partie de ce pays, peut être détenue, sans que l'opinion du conseil consultatif ait été obtenue, pendant une période n'excédant pas une année à partir de la date de son arrestation.
  19. 800. Il semble que cette loi soit d'une application générale et ne vise pas directement les syndicalistes ou les activités syndicales. Le Comité estime que, lorsqu'il examine des mesures législatives de sécurité publique de cet ordre, il n'est pas appelé à se prononcer sur le bien-fondé ou la nécessité de la loi en tant que telle, mais sur la seule question de savoir si la loi est ou peut être appliquée de manière à restreindre l'exercice des droits syndicaux fondamentaux. A ce sujet, il convient de rappeler les dispositions de l'article 8 de la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, dont la teneur est la suivante:
  20. 1. Dans l'exercice des droits qui leur sont reconnus par la présente convention, les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives, sont tenus, à l'instar des autres personnes ou collectivités organisées, de respecter la légalité.
  21. 2. La législation nationale ne devra porter atteinte ni être appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la présente convention.
    • Allégation relative à l'arrestation de dirigeants syndicaux et de travailleurs
  22. 801. En ce qui concerne les circonstances dans lesquelles aurait été appliquée la loi de sécurité publique du Pakistan, il y a lieu de relever que: l'allégation des plaignants et les observations du gouvernement portent en premier lieu sur l'arrestation de dirigeants syndicaux et de travailleurs. Il ressort de la réponse du gouvernement que, parmi les dirigeants syndicaux mentionnés dans les plaintes, aucune personne du nom de Mohamed Jalil, de la Fédération des syndicats du Pakistan, n'a jamais été arrêtée, et que Mirza Ibrahim et N. A. Quasmi ont déjà été relâchés. Seul, Mohamed Afzal semble avoir été en détention au moment où le gouvernement a envoyé sa réponse.
  23. 802. Toutefois, les plaignants n'allèguent pas que Mohamed Afzal, aussi bien que les autres dirigeants syndicaux qui ont déjà été relâchés, ont été arrêtés en raison de leurs activités syndicales. Alors que les plaignants ont fait état d'arrestations de travailleurs occupés à des activités syndicales, ils n'ont pas apporté de preuves de cas précis dans lesquels de telles arrestations se seraient produites. Le gouvernement déclare qu'aucune personne n'a été arrêtée en vertu de la loi de sécurité publique.
  24. 803. Dans ces conditions, le Comité conclut que ces arrestations ne concernent pas en réalité l'exercice des droits syndicaux.
  25. 804. Toutefois, le Comité a noté que les termes de la loi de sécurité publique du Pakistan permettent qu'une personne soit arrêtée et détenue pour une période pratiquement illimitée sans qu'elle soit jugée sur la base d'accusations formelles. En ce qui concerne une loi semblable en vigueur dans l'Inde (cas no 5), il a exprimé l'opinion que « les mesures de détention préventive peuvent impliquer une grave ingérence dans les activités syndicales, qui semblerait devoir être justifiée par l'existence d'une crise sérieuse et qui pourrait donner lieu à des critiques, à moins qu'elle ne fût accompagnée de garanties juridiques appropriées mises en oeuvre dans des délais raisonnables ». Le Comité a souligné à cette occasion « que la politique de tout gouvernement doit veiller à assurer le droit qu'a toute personne détenue de bénéficier des garanties d'une procédure judiciaire régulière, engagée le plus rapidement possible». Le Comité a estimé que les mêmes observations sont applicables à la situation qui existe au Pakistan sous le régime de la loi sur la sécurité publique.
    • Allégation relative à l'interdiction faite à la Fédération des syndicats du Pakistan de publier et de distribuer des publications
  26. 805. En ce qui concerne l'interdiction qui aurait été faite à la Fédération des syndicats du Pakistan de publier des brochures et des tracts et de distribuer sa brochure sur Le mouvement syndical au Pakistan, le Comité à noté que les plaignants n'ont pas présenté de preuves à l'appui de cette allégation, alors que le gouvernement a catégoriquement démenti qu'il ait procédé à une telle interdiction. Dans ces conditions, le Comité conclut que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
  27. 806. Le Comité estime que la publication et la distribution de nouvelles et d'informations intéressant spécialement les syndicats et leurs membres constituent une activité syndicale licite et que l'application des mesures de contrôle des publications et des moyens d'information prévues aux articles 11 et 12 de la loi du Pakistan de 1952 sur la sécurité peut impliquer une ingérence sérieuse des autorités administratives dans ces activités. Le Comité exprime l'opinion que, dans de tels cas, la politique devrait tendre à subordonner l'exercice des pouvoirs administratifs à un contrôle judiciaire qui devrait intervenir le plus rapidement possible.
    • Allégation relative à l'affaire de la conspiration de Rawalpindi
  28. 807. Le Comité croit devoir souligner que l'affaire de la conspiration de Rawalpindi a trait à des événements survenus à la suite de l'arrestation du chef d'état-major de l'armée du Pakistan, accusé de conspiration militaire.
  29. 808. Les plaignants allèguent que la procédure établie pour le jugement de cette affaire, procédure d'après laquelle les accusés auraient été privés du droit à l'instruction préliminaire de l'affaire, des garanties d'une procédure judiciaire régulière et des voies de recours, fait ressortir que la politique du gouvernement du Pakistan vise à supprimer systématiquement toute opinion ou mouvement favorable au fonctionnement libre des organisations syndicales et qu'à cet effet le gouvernement a recours à des lois antidémocratiques comme la loi établissant cette procédure (loi de 1951 sur la conspiration de Rawalpindi (Tribunal spécial)). Il n'est toutefois pas allégué qu'aucun des accusés soit jugé pour ses activités syndicales.
  30. 809. Le gouvernement a fourni des explications au sujet de certains aspects de ce procès contre lesquels les plaignants ont soulevé des objections. Il indique qu'il était nécessaire de juger ce procès à huis clos pour des raisons de sécurité nationale, étant donné que les accusations ont trait à des questions militaires et à la défense nationale ; il déclare également que, s'il n'est pas prévu d'appel contre les décisions du tribunal spécial, cela s'explique du fait que ce tribunal a été constitué de manière à avoir un rang égal à celui de l'autorité judiciaire suprême du pays ; le gouvernement déclare enfin que les accusés ont, à ces restrictions près, reçu toutes facilités leur permettant de présenter leur défense de manière satisfaisante.
  31. 810. Il ressort de la réponse du gouvernement et du texte de la loi elle-même, qui définit les termes «affaires de la conspiration de Rawalpindi » comme signifiant toute affaire «qui a son origine dans les actes de conspiration et de trahison découverts en février et mars 1951 », que cette affaire n'a pas trait à des activités syndicales, mais porte sur un événement particulier qui s'est produit dans des circonstances extraordinaires intéressant la sécurité et la défense nationales. '
  32. 811. Dans ces conditions, le Comité estime que l'affaire de la conspiration de Rawalpindi ne concerne en aucune façon l'exercice des droits syndicaux et conclut que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.
    • Allégation concernant l'appui donné à l'Union générale des travailleurs pakistanais ou à la Confédération du travail du Pakistan
  33. 812. L'allégation d'après laquelle le gouvernement du Pakistan aurait créé ou accordé son appui à une organisation intitulée «Union générale des travailleurs du Pakistan » ou «Confédération du travail du Pakistan » est d'un caractère général et n'est pas étayée par des preuves de mesures précises que le gouvernement aurait prises en ce sens. Bien que le gouvernement n'ait fait aucune observation au sujet de cette allégation, le Comité estime que, dans ces conditions, cette allégation n'appelle pas un examen plus approfondi.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 813. Compte tenu de toutes les circonstances, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • i) de noter avec satisfaction la ratification par le gouvernement du Pakistan de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949 ;
    • ii) d'exprimer l'espoir que le gouvernement prendra toutes mesures appropriées pour que la loi sur la sécurité publique ne soit pas appliquée de manière à porter atteinte aux garanties des droits syndicaux prévus par ces conventions ;
    • iii) de suggérer que le gouvernement pourrait estimer désirable d'examiner à nouveau sa législation en matière de sécurité publique, afin d'éviter que cette législation ne puisse être appliquée de manière incompatible avec les principes établis dans ces conventions ;
    • iv) de décider que, sous réserve des observations contenues aux paragraphes 804 et 806, il ne serait pas opportun de procéder à un examen plus approfondi de l'ensemble du cas.
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