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  1. 105. La plainte de la Fédération syndicale mondiale est contenue dans une communication en date du 17 février 1959 adressée directement à l'O.I.T. Le gouvernement du Royaume-Uni a présenté ses observations à son sujet par une lettre datée du 13 mai 1959. A sa réunion tenue à Genève les 25 et 26 mai 1959, le Comité a décidé de demander au gouvernement de fournir sur certains points des informations complémentaires. Le gouvernement a répondu par une lettre en date du 28 octobre 1959. A sa réunion des 9 et 10 novembre 1959, le Comité a de nouveau décidé de demander des informations complémentaires au gouvernement. Celui-ci a répondu par une lettre en date du 12 février 1960.
  2. 106. Le Royaume-Uni a ratifié la convention (no 84) sur le droit d'association (territoires non métropolitains), 1947, et a déclaré ses dispositions applicables à Singapour sans modifications.

A. Allégations relatives au retrait de l'enregistrement de syndicats

A. Allégations relatives au retrait de l'enregistrement de syndicats
  1. 107. Les plaignants allèguent que dix-sept organisations syndicales, y compris la Fédération des gens de mer de Malaisie et la Fédération des dockers, se seraient vu retirer leur enregistrement au cours de 1958.
  2. 108. Dans sa lettre en date du 13 mai 1959, le gouvernement déclarait que deux de ces organisations avaient cessé d'être enregistrées à la suite de leur dissolution volontaire, six pour avoir cessé d'exister et neuf pour avoir contrevenu volontairement à certaines dispositions de l'Ordonnance sur les syndicats et après de nombreux avertissements.
  3. 109. En vertu de l'article 15 (1) b) v) de l'Ordonnance de 1940 sur les syndicats, telle qu'amendée, le fonctionnaire chargé de l'enregistrement (Registrar) peut retirer ou annuler le certificat d'enregistrement d'un syndicat si, entre autres, il a acquis la conviction que le syndicat, après avoir été prévenu, a volontairement contrevenu à une disposition quelconque de l'ordonnance. Il peut être fait appel contre les décisions du « Registrar » auprès du ministre compétent mais non pas auprès des tribunaux. Aux termes de l'article 18 c) de l'ordonnance, le syndicat dont l'enregistrement est retiré sera dissous.
  4. 110. A sa réunion de mai 1959, le Comité a fait remarquer que, dans un certain nombre de cas antérieurs, il avait souligné l'importance qu'il attache au principe généralement reconnu selon lequel les organisations de travailleurs et d'employeurs ne devraient pas être exposées à une décision de suspension ou de dissolution prise par voie administrative. A Singapour, le retrait de l'enregistrement entraîne automatiquement la dissolution de l'organisation visée et le seul appel possible contre la décision du « Registrar » peut être fait auprès du ministre compétent et non devant les tribunaux. A cet égard, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations avait suggéré que les appels des décisions du « Registrar » soient portés devant la Cour suprême. Dans son dernier rapport annuel sur l'application à Singapour de la convention (no 84) sur le droit d'association (territoires non métropolitains), le gouvernement déclarait que des mesures étaient prises pour que la législation en vigueur soit amendée dans ce sens.
  5. 111. Le Comité avait donc constaté qu'il ressortait tant de la réponse du gouvernement que des dispositions de l'Ordonnance sur les syndicats que six des dix-sept syndicats dont on allègue qu'ils se seraient vu retirer leur enregistrement en 1958 ont, en fait, été dissous contre leur volonté par voie administrative. Par ailleurs, il avait noté, bien que l'amendement législatif mentionné au paragraphe 110 ci-dessus n'ait pas encore été fait, que le retrait de l'enregistrement ne constitue pas un pouvoir discrétionnaire et ne peut être ordonné que pour l'une des raisons précisées à l'article 15 de l'ordonnance, raisons parmi lesquelles figure celle donnée par le gouvernement dans le cas des six syndicats en question, à savoir que «les syndicats, après avoir été prévenus, ont volontairement contrevenu à une disposition quelconque de l'ordonnance ».
  6. 112. Dans ces conditions, en ce qui concerne les six syndicats dont l'enregistrement a été retiré - et qui ont, en fait, été dissous - pour avoir contrevenu à l'ordonnance sur les syndicats, le Comité, avant de formuler ses conclusions au sujet de ces allégations, avait demandé au gouvernement de bien vouloir indiquer la nature précise des violations qui ont motivé le retrait de l'enregistrement de ces six syndicats, y compris les deux organisations mentionnées nommément par les plaignants.
  7. 113. Dans sa lettre en date du 28 octobre 1959, le gouvernement fournissait des informations en ce qui concerne deux seulement des six syndicats mentionnés plus haut, à savoir: les deux syndicats auxquels les plaignants font allusion nommément. Il déclarait que le « Malayan National Seamen's Union » (appelé par les plaignants «Seamen's Federation of Malaya ») en avait appelé avec succès auprès du ministre du Travail et de la Prévoyance sociale contre l'annulation de son certificat d'enregistrement, lequel lui a depuis été rendu, et que le « Singapore Harbour Board Stevedores and Wharf Workers Union » (appelé par les plaignants « Dockers Federation ») avait, depuis l'annulation de son certificat d'enregistrement, procédé à une réorganisation de son administration et avait obtenu l'enregistrement sous le nom de « Singapore Harbour Board Wharf and Stevedores Workers Trade Union».
  8. 114. A sa session de novembre 1959, le Comité a décidé, avant de formuler ses conclusions sur cet aspect du cas, de demander au gouvernement de fournir, en ce qui concerne les quatre syndicats restants sur les six intéressés, des informations similaires à celles fournies dans les cas du « Malayan National Seamen's Union» et du « Singapore Harbour Board Stevedores and Wharf Workers Union». Cette demande a été portée à la connaissance du gouvernement par une lettre en date du 23 novembre 1959. Les nouvelles observations présentées par le gouvernement, le 12 février 1960, ne contiennent pas d'informations sur ce point. Dans ces conditions, le Comité a décidé de demander à nouveau au gouvernement de bien vouloir indiquer la nature exacte des contraventions pour lesquelles les quatre syndicats restants sur les six mentionnés au paragraphe 111 ci-dessus se sont vu retirer leur enregistrement.
    • Allégations relatives à l'arrestation et à la détention de syndicalistes
  9. 115. Il est allégué que de nombreux syndicalistes auraient été arrêtés en 1958 en vertu de l'Ordonnance sur la sécurité publique; parmi eux figureraient M. Ang Gim Chew, secrétaire de l'Association des travailleurs de la mer. Il est allégué, en outre, que le siège de certains syndicats aurait fait l'objet de perquisitions et que des documents auraient été prélevés par la police. Il est allégué encore que dix-neuf militants syndicaux, arrêtés il y a deux ans, se trouveraient encore en détention sans avoir comparu devant un juge; parmi ceux-ci figureraient M. Ling Chin Siong, ancien secrétaire général du Syndicat des ouvriers d'usine, M. Fong Swe Suan, du Syndicat des employés des autobus, MM. Davan Nair, James Putcheray et Chan Chian Tor, Mlle Peggy Ng Hong et Mlle Chan Poh. Enfin - allègue le plaignant -, il y aurait eu treize dirigeants syndicaux parmi les 1.120 personnes privées de leurs droits civiques le 16 décembre 1958.
  10. 116. Dans sa réponse datée du 13 mai 1959, le gouvernement déclarait que personne n'avait été détenu sans jugement ou privé de ses droits civiques «en raison d'activités syndicales légitimes » et que, lorsqu'une personne avait été détenue en vertu de l'ordonnance sur le maintien de la sécurité publique, c'était parce que cette dernière s'était rendue coupable «d'activités subversives mettant en danger la vie de la nation ». Le gouvernement s'abstenait de faire allusion aux allégations selon lesquelles des locaux syndicaux auraient fait l'objet de perquisitions et des documents auraient été confisqués par la police.
  11. 117. A sa réunion de mai 1959, le Comité avait observé que, dans un certain nombre de cas antérieurs, il avait attiré l'attention sur l'importance qu'il attache à ce que, dans tous les cas, y compris lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou criminels que le gouvernement considère comme étant étrangers à leurs activités syndicales, les personnes en question soient jugées promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. De plus, dans le passé, lorsque les gouvernements ont répondu aux allégations selon lesquelles des dirigeants syndicaux ou des travailleurs avaient été arrêtés pour activités syndicales en déclarant que les personnes en cause avaient, en fait, été arrêtées pour leurs activités subversives, pour des raisons de sécurité intérieure ou pour des crimes de droit commun, le Comité a toujours suivi la règle consistant à prier les gouvernements intéressés de fournir des informations complémentaires aussi précises que possible sur les arrestations et, en particulier, sur les procédures légales ou judiciaires suivies à la suite des arrestations et sur le résultat de ces procédures. En conséquence, le Comité a décidé de demander au gouvernement de bien vouloir lui faire savoir si aucun des syndicalistes mentionnés par les plaignants, y compris les huit dont les noms sont donnés, ne se trouve encore détenu, et de lui fournir des informations sur les procédures légales ou judiciaires suivies dans le cas des personnes intéressées ainsi que ses observations sur les allégations selon lesquelles des locaux syndicaux auraient fait l'objet de perquisitions et des documents auraient été confisqués par la police.
  12. 118. Dans sa lettre du 28 octobre 1959, le gouvernement indiquait n'avoir pas encore reçu du gouvernement de Singapour d'information sur les questions mentionnées plus haut.
  13. 119. A sa réunion des 9 et 10 novembre 1959, le Comité avait rappelé que le Conseil d'administration avait décidé, à sa 140ème session (Genève, 18-21 novembre 1958), de faire à l'avenir une distinction entre les cas urgents et ceux qui le sont moins. Un des critères adoptés pour opérer cette distinction avait été de considérer comme urgents les cas mettant en cause la vie ou la liberté des individus. Le Conseil d'administration avait décidé que, dans de tels cas, lors de la communication de la plainte au gouvernement, l'attention de celui-ci serait tout particulièrement attirée sur le fait que le cas appartient à la catégorie des cas considérés comme urgents par le Conseil d'administration et qu'il serait invité, au nom du Conseil, à fournir pour cette raison une réponse particulièrement rapide en ce qui concerne les aspects urgents du cas.
  14. 120. Dans ces conditions, le Comité a décidé de demander au gouvernement de fournir d'urgence les informations qui lui avaient déjà été demandées et dont il est question au paragraphe 117 ci-dessus en ce qui concerne les allégations relatives à l'arrestation et à la détention de syndicalistes; il lui a également demandé de fournir, aussitôt que possible, ses observations sur les allégations relatives aux perquisitions de locaux syndicaux et à la confiscation de documents par la police.
  15. 121. Cette demande d'informations complémentaires a été portée à la connaissance du gouvernement par une lettre en date du 23 novembre 1959. Ce sont ces questions qui sont traitées dans les observations du gouvernement du 12 février 1960.
  16. 122. Dans ces observations, le gouvernement déclare que, sur les dix-neuf syndicalistes mentionnés au paragraphe 115 ci-dessus, treize ont été relâchés, y compris les huit dont les noms sont donnés au paragraphe 115. Six syndicalistes se trouvent encore en détention. Aucune procédure judiciaire n'a été entreprise en ce qui les concerne si ce n'est que leur cas a été examiné par le tribunal d'appel institué en vertu des dispositions de la Preservation of Public Security Ordinance et réexaminé périodiquement par le Reviewing Officer désigné en vertu de la même ordonnance. Le gouvernement déclare qu'en 1958 aucun local syndical n'a été fouillé par la police, qui n'a confisqué aucun document.
  17. 123. Bien que les plaignants déclarent que des locaux syndicaux ont fait l'objet de perquisitions et que des documents ont été confisqués - allégations dont le gouvernement nie tout fondement -, ils ne donnent aucun détail pour appuyer leurs affirmations. Dans ces conditions, le Comité estime que les éléments fournis par les plaignants sont trop vagues pour permettre un examen des allégations en question quant au fond et, en conséquence, recommande au Conseil d'administration de décider qu'elles n'appellent pas de sa part un examen plus approfondi.
  18. 124. En ce qui concerne la détention de syndicalistes, le Comité observe que, bien que le gouvernement déclare que treize des syndicalistes mentionnés par les plaignants ont été relâchés, six d'entre eux restent encore en détention sans être passés en jugement.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 125. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de décider que les allégations relatives à des perquisitions de locaux syndicaux et à la confiscation de documents n'appellent pas de sa part un examen plus approfondi;
    • b) de noter la déclaration du gouvernement selon laquelle treize des dix-neuf syndicalistes mentionnés par les plaignants ont été relâchés;
    • c) d'attirer l'attention du gouvernement sur l'importance que le Conseil d'administration attache au principe selon lequel, dans tous les cas, y compris lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques ou criminels que le gouvernement considère comme étant étrangers à leurs activités syndicales, les personnes en question devraient être jugées promptement par une autorité judiciaire impartiale et indépendante;
    • d) de demander au gouvernement de lui indiquer d'urgence, tenant compte des principes rappelés plus haut et du fait que les six syndicalistes sont encore en détention sans avoir été jugés, s'il entend prendre des mesures pour faire bénéficier rapidement les personnes intéressées d'un jugement équitable ou si leur libération prochaine est envisagée.
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