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- 104. La plainte de la Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (CMOPE) figure dans une communication en date du 16 janvier 1979. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication en date du 1er juin 1979.
- 105. Le gouvernement du Royaume-Uni a ratifié la convention (no 84) sur le droit d'association (territoires non métropolitains), 1947, la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et a déclaré que ces conventions étaient applicables à Antigua sans modification.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 106. L'organisation plaignante a déclaré qu'en date du 31 décembre 1977, Juno Samuel, président du Syndicat des enseignants antiguais (AUT) a eu notification de son transfert d'un emploi permanent dans l'enseignement à un emploi temporaire au ministère du Développement économique et du Tourisme. Ses nouvelles fonctions, qui étaient liées à l'introduction du système métrique, n'avaient aucun rapport avec ses qualifications de psychologue. De l'avis de l'organisation plaignante, ce transfert avait pour objet de porter atteinte à sa situation en tant que président de l'AUT.
- 107. Selon l'organisation plaignante, le syndicat ayant à plusieurs reprises essayé de convaincre le gouvernement de revenir sur sa décision, le Premier ministre l'avait prié, en date du 14 février 1978, de soumettre des propositions concernant les règles à appliquer en matière de transfert du personnel. Copie du mémoire contenant les propositions du syndicat au gouvernement est annexée à la plainte. Après avoir proposé un certain nombre de principes généraux pouvant être appliqués aux transferts, le mémoire s'achève sur une déclaration dans laquelle l'AUT réaffirme, d'une part, son attachement au principe selon lequel l'acceptation de ces règles suppose l'acceptation du droit de M. Samuel d'exercer la profession de son choix et, d'autre part, son engagement d'oeuvrer à la réintégration de M. Samuel dans la profession enseignante. Le 18 mai 1978, poursuit la CMOPE, le président de la commission du cabinet chargée des questions de la fonction publique a fait savoir au syndicat que le mémoire était rédigé en des termes reflétant l'insubordination et, partant, n'était pas satisfaisant.
- 108. Face à cette réaction négative, l'AUT a, le 7 juin 1978, organisé des piquets de grève pacifiques aux abords du ministère de l'Education et de celui du Développement économique et du Tourisme. Selon l'organisation plaignante, 13 enseignants, y compris plusieurs dirigeants du syndicat, ont été arrêtés et inculpés de "surveillance et harcèlement". Lorsqu'ils ont été relaxés, une grande foule les a accompagnés du poste de police au siège de l'AUT, où M. Samuel a pris la parole. Il a alors été arrêté et inculpé pour avoir pris la parole à une réunion publique sans autorisation de la police.
- 109. En attendant leur procès, le président de VAUT et les 13 enseignants ont été suspendus de leurs fonctions, et n'ont plus touché que 20 pour cent de leur salaire. Les inculpations contre les enseignants ont fait l'objet d'un non-lieu par-devant le tribunal, mais les autorités ont fait appel contre cette décision, maintenant ainsi en vigueur la suspension de leurs fonctions. M. Samuel s'est trouvé dans une situation semblable; le tribunal ayant estimé qu'il s'était rendu coupable de violation du règlement l'avait condamné à une amende, mais il a fait appel.
- 110. Par une lettre du 5 juin 1978, dont le texte est annexé à la plainte, le fonctionnaire supérieur de l'Education nationale a signalé au syndicat que les autorités avaient été rendues attentives au fait que des groupes d'enseignants de l'AUT se rendaient dans les écoles pour traiter de questions syndicales. Il a précisé que les délégations de l'AUT n'avaient pas le droit de visiter les écoles pendant l'année scolaire et que les enseignants ne pouvaient se rendre dans d'autres écoles que la leur que moyennant une autorisation préalable du ministère de l'Education. Les directeurs d'école - ajoute l'organisation plaignante - étaient peu enclins à accepter même l'affichage d'avis syndicaux par crainte de déplaire aux autorités. Le ministre de l'Education et de la Culture a publiquement accusé les dirigeants de l'AUT de ne pas être représentatifs de la grande majorité des enseignants et de se laisser guider, dans leur action, par des considérations politiques. A cet égard, l'organisation plaignante déclare que l'AUT est politiquement indépendante et que ses dirigeants actuels ont été élus (ou réélus) à une assemblée générale syndicale qui avait eu lieu en juillet 1978.
- 111. L'organisation plaignante relève aussi qu'au début de la nouvelle année scolaire, en septembre 1978, le ministère de l'Education a changé l'affectation d'un grand nombre d'enseignants, et notamment de tous les directeurs d'établissements secondaires sauf un en vue de briser les îlots de résistance au sein de VAUT, ce qui a créé une ambiance générale de crainte dans l'enseignement et découragé l'exercice d'activités syndicales.
- 112. En outre, à la suite de l'établissement de piquets de grève en date du 13 décembre 1978, 15 enseignants ont été arrêtés et la police a usé de la force, s'étant, en particulier, attaquée physiquement au secrétaire général de l'AUT, Harold Lovell. A une troisième occasion, la mise en place de piquets de grève le 17 décembre a débouché sur d'autres arrestations encore, les enseignants intéressés ayant été contraints de passer la nuit en prison.
- 113. Enfin, le 11 janvier 1979, la CMOPE a appris que huit des enseignants ayant été suspendus de leurs fonctions, à savoir MM. Samuel, Harold Lovell - le secrétaire général -, Leon Symister, Euphema Joseph, Evans Moulon, Shelly Clarke, Adlai Carrot et Ira Davis, avaient été licenciés par le gouvernement. Le seul motif de licenciement invoqué était "l'intérêt public".
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 114. Dans sa communication en date du 1er juin 1979, le gouvernement d'Antigua explique que la grande majorité des membres de la profession enseignante sont des fonctionnaires titularisés et, en tant que tels, sont exclus de l'application du code du travail antiguais de 1975. De nombreuses années avant l'adoption du code, les enseignants s'étaient constitués en un syndicat, lequel avait été enregistré en vertu de la loi sur les syndicats qui était en vigueur à l'époque mais qui a été abrogée par l'article G.26 du code du travail. L'arrêté de 1967 portant Constitution d'Antigua protège le droit de constituer un syndicat et d'autres associations et d'y adhérer (article 11) sous réserve toutefois de toute autre loi qui "impose des restrictions aux fonctionnaires". Les membres de la profession enseignante sont des "fonctionnaires" et le Parlement a exclu tous les "fonctionnaires titularisés" de la protection du code du travail.
- 115. Au début de 1978, date prévue pour une élection générale à l'AUT, un petit groupe de militants a organisé le scrutin de telle sorte que seules des personnes soigneusement choisies ont été convoquées. Le corps enseignant comprenait plus de 600 personnes mais seulement 120 d'entre elles avaient été informées. Parmi ceux qui n'avaient pas été prévenus figure même un vice-président du syndicat. Un simulacre d'élection a eu lieu et seuls les militants ont été élus; un enseignant qui n'avait pas fini son stage est devenu secrétaire général, et quelques-uns des autres élus étaient encore étudiants d'un établissement de formation des enseignants. Immédiatement après, le gros des enseignants a retiré son appui au syndicat. Quelque temps après l'élection, le pays a connu une réorganisation ministérielle et un nouveau ministre de l'Education a été désigné.
- 116. Selon le gouvernement, l'AUT a lancé une campagne publique tendant à mobiliser l'opinion publique contre lui, en utilisant des moyens tels que circulaires, articles de presse, visites au domicile des enseignants et des parents, discussions avec les écoliers, dans les locaux scolaires, pour les encourager à établir des piquets de grève autour des bureaux de l'administration et organiser des défilés, lettres adressées à diverses institutions pour soulever l'opinion internationale. Le gouvernement joint à sa réponse divers exemples des textes ayant été distribués. Ainsi, un article publié dans le numéro d'octobre 1978 du périodique "New Teacher", et signé du secrétaire général du syndicat, décrit le ministre de l'Education comme étant un "maniaque de la volonté de puissance".
- 117. Le 3 janvier 1979, poursuit le gouvernement, l'AUT a déclaré une grève et la tension est devenue si forte dans l'Etat que des actes de violence ont été perpétrés. Des bombes incendiaires ont été lancées sur les maisons du Secrétaire permanent du gouvernement, du fonctionnaire supérieur de l'Education nationale, du "chief magistrate" et d'un commissaire de police; un bâtiment scolaire a été gravement endommagé par le feu et trois autres ont fait l'objet de tentatives d'incendie; des explosifs ont été trouvés dans trois bâtiments de l'administration; un officier de police a été blessé à l'occasion de manifestations non autorisées. Un enseignant gréviste a été inculpé, prouvé coupable et condamné par un juge, en liaison avec ce dernier incident.
- 118. Les enseignants grévistes ont alors demandé et obtenu l'appui du Mouvement progressiste du travail (Progressive Labour Movement) et du Mouvement de libération Antigua-Caraïbes (Antigua Caribbean Liberation Movement) - parti politique communiste auquel sont affiliés le secrétaire général et quelques-uns des militants les plus actifs du syndicat. Le gouvernement fournit le texte d'une déclaration intitulée "La lutte contre le régime corrompu de Bird a commencé" qui contient des allégations de brutalités policières et accuse le gouvernement d'être corrompu et incapable de répondre aux besoins économiques et sociaux du peuple. On y mentionne les gouvernants, en précisant: "Ils sont corrompus, ils sont illégalement au pouvoir, ils doivent s'en aller". On y déclare également: "Il faut une agitation organisée" et on en appelle à tous les travailleurs et hommes d'affaires pour qu'ils participent à une grève d'un jour, le 1er mars 1979, "contre l'injustice, contre la brutalité policière, contre la dictature de Bird". Une imitation a été lancée à une grande réunion publique au siège de l'AUT.
- 119. Dans cette ambiance, le gouvernement a estimé de son devoir de sauvegarder l'ordre public. Ainsi, le 27 février 1979, le Front uni s'est efforcé d'organiser un défilé sans en avoir obtenu l'autorisation, et ce malgré une intervention personnelle de la part du chef de la police. Le gouvernement déclare que la police a été contrainte de recourir à la force pour empêcher une violation flagrante de la loi et que la grève générale prévue pour le 1er mars n'a obtenu aucun appui populaire.
- 120. En ce qui concerne les allégations relatives aux transferts d'enseignants, le gouvernement déclare que Juno Samuel a été muté à un poste permanent, pour lequel il avait été considéré comme étant qualifié. Il ajoute que la Commission de la fonction publique a le droit, aux termes de la Constitution d'Antigua, de transférer les fonctionnaires avec ou sans consultation préalable. Le fait que M. Samuel ait été président de l'AUT n'est qu'une coïncidence; il a d'ailleurs continué à exercer ses fonctions de président, qualité que le gouvernement lui reconnaissait.
- 121. Au sujet de l'allégation selon laquelle le droit du syndicat d'être consulté pour tout ce qui touche aux transferts avait été enfreint, le gouvernement déclare que la consultation n'est pas une procédure établie dans la fonction publique sauf lorsque les qualifications sont mises en cause, et que M. Samuel n'avait pas été recruté en qualité de psychologue et ne travaillait pas en tant que tel. M. Samuel a quitté son poste à plusieurs reprises pour s'occuper de questions syndicales par exemple, présenter l'avis du syndicat à la commission spéciale.
- 122. Le gouvernement déclare aussi que les dispositions du code du travail antiguais relatives aux conflits du travail ne s'appliquent pas aux fonctionnaires titularisés. En conséquence, l'établissement de piquets de grève, qu'ils soient pacifiques ou non, ne saurait être admis. Un tel précédent aurait pu porter atteinte à l'ensemble du service si on l'avait toléré. Les fonctionnaires ou agents titularisés ont le droit de faire valoir leurs doléances au sein du ministère, ou auprès de la Commission de la fonction publique, ou encore par voie d'enquête spéciale, si le conflit ne relève pas de la compétence de la commission.
- 123. Pour ce qui est de l'arrestation de M. Samuel, le gouvernement déclare qu'en sa qualité de fonctionnaire il n'aurait pas dû prendre la parole à une réunion publique sans avoir obtenu l'autorisation de son ministère et que les actes qu'il a commis étaient contraires à la loi de 1972 sur l'ordre public.
- 124. Pour ce qui a trait à la réduction du salaire versé aux enseignants suspendus de leurs fonctions, le gouvernement déclare que, lorsque des fonctionnaires font l'objet d'une inculpation pénale, la suspension est normale aux termes du règlement de la Commission de la fonction publique, qui a toute latitude de fixer le pourcentage du salaire devant être versé. En cas de non-lieu, la totalité du salaire ou la fraction du salaire ayant été retenue est remboursée. En outre, le gouvernement déclare qu'en décembre 1978, la commission a augmenté le pourcentage du salaire versé aux fonctionnaires suspendus à 75 pour cent, avec effet rétroactif à la date de la suspension. Les suspensions ont été levées le 1er janvier 1979 et les intéressés ont touché leur rémunération complète à partir de la date de la suspension. En ce qui concerne le président du syndicat, la Cour d'appel a rendu un verdict en sa faveur, motivant sa décision par des considérations techniques. Le gouvernement déclare qu'il n'a jamais, à quelque moment que ce soit, voulu contraindre les enseignants suspendus de chercher un autre emploi.
- 125. Selon le gouvernement, le président de l'AUT et les 13 enseignants devaient obtenir l'approbation du ministère de l'Education pour pénétrer dans des locaux scolaires parce qu'ils étaient allés au Collège national et à d'autres écoles et avaient effectivement menacé les autres enseignants qui travaillaient; ils avaient utilisé un langage offensant, détruit des livres et écrit dès phrases ordurières sur le tableau noir. Pour l'exercice normal des activités syndicales, on n'empêche pas les dirigeants d'organiser des réunions dans les locaux scolaires, en dehors de l'année scolaire.
- 126. En ce qui concerne les changements d'affectation des enseignants qui ont eu lieu en septembre 1978, le gouvernement déclare qu'ils avaient été dictés par les exigences du service. En outre, étant donné qu'Antigua ne s'étend que sur 108 miles carrés et ne comprend que huit écoles secondaires d'Etat, de telles mesures ne sauraient, dans la réalité des faits, briser les points de force au sein du syndicat.
- 127. Le gouvernement dénie tout usage de la force de la part de la police lors de l'établissement des piquets de grève le 13 décembre 1978; bien au contraire, il avance que le secrétaire général du syndicat avait attaqué un agent de police qui était de garde au poste de police, et avait dû être maîtrisé, puis arrêté. Le 17 décembre 1978, des membres de piquets de grève ont été arrêtés et détenus pendant la nuit pour des raisons de sécurité, étant donné que les enseignants avaient organisé une réunion publique pour cette nuit-là. La déclaration du ministère de l'Education concernant la politisation de l'AUT et son caractère non représentatif est, selon le gouvernement, justifiée et reflète l'opinion de la majorité de la population.
- 128. Le gouvernement déclare qu'en date du 7 janvier 1979, les enseignants cités, à l'exception de Harold Lovell, ont été mis à la retraite dans "l'intérêt public" par l'autorité légale compétente, pour avoir écrit des articles de caractère politique et exercé des activités subversives à l'encontre du gouvernement et contraires aux règlements régissant la fonction publique ils recevront les prestations de retraite auxquelles ils ont droit. M. Lovell en était encore à son stage et, étant donné que la Commission de la fonction publique a estimé qu'il n'était pas apte à un emploi dans la fonction publique, il s'est vu refuser une nomination.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 129. Les allégations soumises dans le présent cas ont trait à une série de mesures touchant le Syndicat des enseignants d'Antigua et plusieurs de ses dirigeants ou membres. Bien qu'il y ait une contradiction, sur plusieurs points, entre les informations fournies par l'organisation plaignante et celles qui figurent dans la réponse du gouvernement, il semble que ce qui avait été initialement un différend concernant le transfert du président de l'AUT, M. Samuel, du ministère de l'Education et de la Culture à un autre ministère a débouché sur un conflit de portée beaucoup plus large entre l'AUT et le gouvernement.
- 130. Selon les allégations de l'organisation plaignante, après avoir essayé sans succès de convaincre le gouvernement de revenir sur sa décision concernant M. Samuel et après le rejet par le gouvernement d'un mémoire du syndicat contenant des propositions sur une politique, le syndicat en est venu à établir des piquets de grève pacifiques pour protester contre l'attitude gouvernementale et contre les mesures répressives prises à l'encontre des enseignants. Parmi ces mesures figurent des changements d'affectation, l'arrestation de plusieurs dirigeants et membres du syndicat, leur suspension pendant la procédure pénale et, enfin, leur licenciement. En outre, il a été avancé que, tout au long de ces événements, des fonctionnaires importants de l'Etat se sont efforcés de discréditer le syndicat par des déclarations publiques et que les autorités ont interdit aux dirigeants de VAUT de pénétrer dans les locaux scolaires.
- 131. La réponse du gouvernement confirme plusieurs des allégations figurant dans la plainte, tout en leur donnant une explication différente. Le gouvernement déclare que la décision de transférer le président de VAUT au début de 1978 est conforme à la Constitution d'Antigua qui accorde à la commission de la fonction publique le droit de transférer les fonctionnaires avec ou sans consultation préalable. Selon les informations disponibles, M. Samuel a continué à exercer ses fonctions de président de VAUT et c'est à ce titre qu'il a présenté au gouvernement les propositions du syndicat sur la politique de transfert dans la profession enseignante. En ce qui concerne les changements d'affectation des directeurs d'école et des professeurs qui ont eu lieu plus tard, en 1978, le comité note les observations faites par le gouvernement selon lesquelles ces mesures ont été prises pour répondre aux besoins du service et ne pouvaient pas, en raison de la dimension d'Antigua, affecter les activités syndicales des intéressés.
- 132. Dans un certain nombre de cas, le comité a fait observer qu'un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi - licenciement, transfert, rétrogradation et autres actes préjudiciables - et que cette protection est particulièrement souhaitable en ce qui concerne les responsables syndicaux étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendance, ceux-ci doivent avoir la garantie qu'ils ne subiront pas de préjudice en raison du mandat syndical qu'ils détiennent. Le comité a estimé que la garantie de semblable protection, dans le cas de dirigeants syndicaux, est en outre nécessaire pour assurer le respect du principe fondamental selon lequel les organisations de travailleurs ont le droit d'élire librement leurs représentants. Le comité a aussi indiqué qu'une politique délibérée de mutations fréquentes des responsables syndicaux peut porter gravement préjudice au bon déroulement des activités syndicales.
- 133. Le comité a rappelé que la commission d'investigation et de conciliation en matière de liberté syndicale avait souligné l'importance qu'il y a à veiller à ce qu'il existe, pour la réparation des griefs motivés par des actes de discrimination antisyndicale, des moyens expéditifs, peu coûteux et tout à fait impartiaux; elle a attiré l'attention sur l'opportunité de régler, dans toute la mesure possible, les plaintes au moyen de discussions sans que le processus soit considéré comme une forme de litige; toutefois, avait conclu la commission, dans les cas où il existera des divergences d'opinions ou de points de vue, procédant d'une entière bonne foi, on devrait avoir recours à des tribunaux ou à des individus impartiaux, ce recours représentant l'étape finale de la procédure de plainte.
- 134. Dans le présent cas, à la lumière des observations du gouvernement, le comité considère que l'organisation plaignante n'a pas fourni de preuves démontrant que le transfert des directeurs et enseignants d'une école à une autre entraînait une violation des droits syndicaux. Néanmoins, dans le cas du président du syndicat, M. Samuel, sa mutation à un poste dans un autre ministère pouvait, même si le gouvernement continuait de reconnaître ses fonctions syndicales, l'empêcher, dans une certaine mesure, d'exercer efficacement ces fonctions. A cet égard, le comité souhaite appeler l'attention sur le principe énoncé à l'article 6 de la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, selon lequel des facilités doivent être accordées aux représentants des organisations d'agents publics reconnues, de manière à leur permettre de remplir rapidement et efficacement leurs fonctions, aussi bien pendant leurs heures de travail qu'en dehors de celles-ci, l'octroi de telles facilités ne devant pas entraver le fonctionnement efficace de l'administration ou du service intéressé. Le comité fait observer que, pour favoriser de bonnes relations professionnelles, il faudrait accorder l'importance qu'il convient à ce principe et aux principes mentionnés aux paragraphes 132 et 133 ci-dessus, lorsque l'on examine le transfert de responsables syndicaux pour des raisons de service.
- 135. Le comité note que les propositions faites au gouvernement par le syndicat concernant les transferts dans la profession enseignante avaient été faites sous réserve de la réintégration de M. Samuel dans le service de l'éducation. Le rejet de cette demande, considérée par le gouvernement comme reflétant un acte d'insubordination, a été suivi par une nouvelle détérioration grave des relations entre VAUT et les autorités, détérioration qui a débouché sur des incidents, des arrestations, des suspensions d'enseignants et, enfin, sur la mise à la retraite par décision gouvernementale de plusieurs des enseignants qui avaient été suspendus. Le gouvernement fait état d'actes de violence et d'autres infractions de la loi ainsi que d'attaques insultantes contre les autorités dans la presse; le ministre de l'Education, pour sa part, parlant à la radio, avait accusé les dirigeants de l'AUT d'être non représentatifs et politiquement motivés. Les observations et documents soumis par le gouvernement montrent que, après la date de soumission de la plainte en janvier 1979, la situation avait empiré et que la question faisant l'objet de la plainte était devenue un élément seulement d'un conflit plus large, dans lequel l'AUT s'était jointe à des groupes politiques qui critiquaient fortement le comportement des autorités et exigeaient un changement de gouvernement.
- 136. Comme le comité l'a fait observer dans d'autres cas, ce n'est que dans la mesure où elles prendront soin de ne pas conférer à leurs revendications professionnelles un caractère nettement politique que les organisations pourront légitimement prétendre à ce qu'il ne soit pas porté atteinte à leurs activités. D'autre part, le comité a fait observer que la frontière entre ce qui est politique et ce qui est proprement syndical est difficile à tracer avec netteté. Les deux notions s'interpénètrent et il est inévitable, et parfois normal, que les publications syndicales comportent des prises de position sur des questions ayant des aspects politiques comme sur des questions strictement économiques et sociales.
- 137. Dans le présent cas, la déclaration appelant à une grève le 1er mars 1979 contient des passages qui débordent le cadre de ce que l'on peut réellement définir comme étant des activités syndicales normales. Néanmoins, le comité estime que si le grief initial concernant le transfert d'un responsable syndical avait été traité par une négociation constructive entre les parties, conformément aux principes de la liberté syndicale, les tensions inutiles qui se sont manifestes dans ce cas auraient pu être évitées.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 138. Etant donné toutes ces circonstances, et au sujet du cas dans son ensemble, le comité recommande au Conseil d'administration d'appeler l'attention sur les principes et les considérations exprimés aux paragraphes 132 à 137 ci-dessus et de décider que le cas n'appelle pas de sa part un examen plus approfondi.