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- 604. La plainte de la Confédération nationale des travailleurs agricoles (CONTAG) est formulée dans une communication du 6 avril 1981. La CONTAG a envoyé des renseignements complémentaires le 10 juillet 1981. Le gouvernement a communiqué sa réponse dans une lettre du 3 novembre 1981.
- 605. Le Brésil n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, mais il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 606. Dans ses communications des 6 avril et 10 juillet 1981, l'organisation plaignante allègue qu'une action a été intentée dans la douzième Circonscription judiciaire militaire, à Manaus, contre José Francisco da Silva, Président de la CONTAG, Joao Maia da Silva Filho, délégué syndical de cette organisation pour Acre et Randónia, et contre les dirigeants syndicaux Luis Inácio da Silva et Jacó Bittar, ainsi que le conseiller Francisco Mendes, qui sont accusés d'incitation à la désobéissance collective aux lois et (ou) à la lutte violente entre classes sociales, chefs d'inculpation prévus par la loi sur la sécurité nationale, et qui peuvent entraîner une peine allant jusqu'à trente ans de réclusion. Selon l'organisation plaignante, les activités des inculpés ne constituaient pas un délit; elles étaient, en effet, parfaitement compatibles avec l'exercice des droits syndicaux, et s'ils ont été accusés, le 9 février 1981, c'est seulement pour s'être solidarisés avec leurs compagnons et les avoir incités à s'unir afin de défendre leurs droits et pour avoir protesté contre les assassinats et les actes de violence et d'injustice perpétrés par les grands propriétaires et accapareurs de terres dont les travailleurs ruraux du Brésil et leurs dirigeants ont été victimes.
- 607. L'organisation plaignante ajoute que le prétexte invoqué cette fois par les organismes de sécurité pour porter préjudice au mouvement syndical en la personne du Président et du délégué de la CONTAG pour Acre a été l'homicide du propriétaire Nilo Sérgio de Oliveira, commis le 27 juillet 1980 par un groupe de travailleurs indignés de l'assassinat du Président du Syndicat des travailleurs ruraux (STR) de Brasilia, Wilson Souza Pinheiro, perpétré au siège du syndicat le 21 juillet 1980.
- 608. Dans sa Communication du 10 juillet 1981, la CONTAG signale qu'au cours de la procédure engagée contre le Président et le délégué régional de la CONTAG, ceux-ci ont reconnu se trouver à Brasilia le 27 juillet 1980 pour protester contre l'assassinat du dirigeant Wilson Souza Pinheiro, mais ils ont rejeté toute responsabilité dans la mort de Nilo Sérgio de Oliveira. L'organisation plaignante ajoute que le conseil militaire a rejeté la demande présentée par le procureur concernant la détention préventive des accusés.
- 609. Par ailleurs, dans les annexes qu'elle a envoyées, la CONTAG mentionne un grand nombre d'organisations syndicales et de représentants d'autres secteurs, qui lui ont manifesté leur appui de diverses manières et qui demandent que les dirigeants en question soient acquittés.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 610. Dans sa communication du 3 novembre 1981, le gouvernement fait savoir que le bureau du procureur militaire a déclaré que José Francisco da Silva et Joao Maia da Silva Filho étaient passibles des sanctions prévues à l'article 36, alinéas II et IV, et au paragraphe unique de la Loi sur la sécurité nationale ("Inciter... II- à la désobéissance collective aux lois ... IV- à la lutte violente entre classes sociales... Paragraphe unique: lorsqu'une lésion corporelle grave ou la mort résultent d'une telle incitation").
- 611. Le gouvernement ajoute qu'après avoir participé à une assemblée du Parti des travailleurs, tenue le 27 juillet 1980 à Rio Branco (capitale de l'Etat d'Acre), les accusés se sont rendus à Brasilia où ils ont pris part à la manifestation publique organisée à la suite de l'assassinat de Wilson Souza Pinheiro, Président du STR de cette ville, assassinat perpétré le 21 juillet 1980. Au cours de la manifestation ils ont incité les autres participants à la vengeance, à la désobéissance aux lois et à la lutte violente entre les classes sociales. Le gouvernement ajoute en outre que Nilo Sérgio de Oliveira, que beaucoup tenaient pour responsable de la mort de Wilson Souza Pinheiro, a été assassiné à la fin de ladite manifestation.
- 612. Enfin, le gouvernement déclare que la présente affaire n'est pas un cas de persécution syndicale, qu'aucune menace ne pèse sur la vie et la liberté des accusés qui ont même pu continuer d'exercer leurs fonctions syndicales et que la procédure en est encore à la phase de l'instruction judiciaire dans l'attente de la décision correspondante.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 613. Le comité note que la présente plainte concerne l'inculpation, devant la douzième Circonscription judiciaire militaire de Manaus, des dirigeants syndicaux José Francisco da Silva, Joao Maia da Silva Filho, Luis Inácio da Silva et Jacó Bittar, qui sont accusés d'incitation à la désobéissance collective aux lois et à la lutte violente entre classes sociales, chefs d'inculpation prévus à l'article 36 de la Loi sur la sécurité nationale, et qui peuvent entraîner une peine allant jusqu'à trente ans de réclusion.
- 614. Le comité note que, selon l'organisation plaignante, les activités des inculpés ne constituaient pas un délit mais qu'elles étaient parfaitement compatibles avec l'exercice des droits syndicaux; en revanche, le gouvernement déclare que, lors de la manifestation publique organisée à Brasilia le 27 juillet 1980 à la suite de l'assassinat de Wilson Souza Pinheiro, Président du STE de cette ville - assassinat perpétré une semaine auparavant -, les accusés ont incité les autres participants à la vengeance, à la désobéissance aux lois et à la lutte violente entre classes sociales, et que c'est à la fin de ladite manifestation qu'a été assassiné Nilo Sérgio de Oliveira (que beaucoup tenaient pour responsable de la mort de Wilson Souza Pinheiro).
- 615. Par ailleurs, le comité note que l'autorité judiciaire militaire a rejeté la demande présentée par le procureur concernant la détention préventive des accusés et que ceux-ci ont pu poursuivre l'exercice de leurs fonctions syndicales.
- 616. Dans ces conditions, compte tenu en particulier des divergences existant entre les allégations de l'organisation plaignante et la réponse du gouvernement au sujet de la légitimité des activités des dirigeants syndicaux en question au cours de la manifestation publique organisée à Brasilia le 27 juillet 1980 à la suite de la mort du dirigeant Wilson Souza Pinheiro, et compte tenu du fait que la procédure judiciaire ouverte contre ces dirigeants est en cours, le comité ne peut que faire part de sa préoccupation devant la sévérité des peines qu'ils encourent et demander au gouvernement de lui envoyer le texte de la sentence que la justice militaire rendra en l'espèce ainsi que les attendus correspondants, et formuler l'espoir que le jugement tiendra pleinement compte des principes de la liberté syndicale.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 617. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:
- Au sujet de l'inculpation des dirigeants syndicaux José Francisco da Silva, Joao Maia da Silva Filho, Luis Inácio da Silva et Jacó Bittar, accusés d'avoir enfreint l'article 36 de la loi sur la sécurité nationale, le comité, compte tenu des divergences existant entre les allégations de l'organisation plaignante et la réponse du gouvernement et notant qu'une procédure judiciaire est en cours, ne peut que faire part de sa préoccupation devant la sévérité des peines encourues par les dirigeants syndicaux, et demander au gouvernement de lui envoyer le texte de la sentence que la justice militaire rendra en l'espèce, ainsi que les attendus correspondants, et formuler l'espoir que le jugement tiendra pleinement compte des principes de la liberté syndicale.