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Informe provisional - Informe núm. 258, Junio 1988

Caso núm. 1129 (Nicaragua) - Fecha de presentación de la queja:: 14-ABR-82 - Cerrado

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  1. 2. Le comité est saisi de différentes plaintes en violation de la liberté syndicale au Nicaragua déposées par la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT), la Confédération mondiale du travail (CMT) et la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) et d'une plainte relative à l'observation par le Nicaragua des conventions (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, présentée par plusieurs délégués employeurs à la 73e session (1987) de la Conférence, en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT.
  2. 3. Conformément à la décision adoptée par le Conseil d'administration à sa 239e session (février-mars 1988), le comité soumet à l'approbation du Conseil un rapport sur les cas en instance et la plainte présentée en vertu de l'article 26 de la Constitution
  3. 4. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication du 29 avril 1988.
  4. 5. Depuis plusieurs années, le Comité de la liberté syndicale est saisi de diverses plaintes en violation du droit d'association et de la liberté syndicale au Nicaragua. Deux cas examinés antérieurement et présentés par des organisations internationales de travailleurs (CLAT, CMT et CISL) sont encore actuellement en instance devant le comité.
  5. 6. En outre, par une communication du 17 juin 1987, plusieurs délégués employeurs à la 73e session (1987) de la Conférence internationale du Travail ont présenté une plainte en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT contre le gouvernement du Nicaragua pour violation des conventions (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, toutes trois ratifiées par le Nicaragua.
  6. 7. Les cas en instance ainsi que la plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT ont été examinés pour la dernière fois par le comité à sa réunion de février 1988. (Voir 255e rapport, paragr. 4 à 68, approuvé par le Conseil d'administration à sa 239e session (février-mars 1988) ).
  7. 8. Depuis lors, le gouvernement a fourni ses observations dans une communication du 29 avril 1988.

A. Plaintes déposées par des organisations de travailleurs

A. Plaintes déposées par des organisations de travailleurs
  • a) Examens antérieurs des cas par le comité
    1. 9 Dans le cas no 1129 présenté par la CLAT et la CMT, les allégations portaient sur la perquisition avec mise à sac des archives de la Centrale des travailleurs du Nicaragua (CTN).
    2. 10 A sa réunion de février 1988, le comité avait noté que, selon le gouvernement, cette mesure était motivée par les dissensions internes existant au sein de l'organisation. Toutefois, le gouvernement ne précisait pas si la perquisition avait été effectuée sur mandat judiciaire. Le comité avait rappelé que les locaux syndicaux ne devraient faire l'objet de perquisitions que sur mandat de l'autorité judiciaire ordinaire. (Voir, par exemple, 236e rapport, cas no 1269 (El Salvador), paragr. 536.) Le comité avait estimé en outre que, même si une perquisition avait été autorisée par un mandat délivré par l'autorité judiciaire ordinaire, ceci ne justifiait en rien la mise à sac des locaux de la CTN dont avaient fait état les plaignants. Le comité avait donc demandé au gouvernement de s'assurer que des perquisitions dans des locaux syndicaux ne soient effectuées que sur mandat de l'autorité judiciaire ordinaire. Il lui avait demandé d'indiquer si un mandat judiciaire avait été délivré dans ce cas.
    3. 11 Dans le cas no 1298 présenté par la CISL, les allégations portaient sur l'arrestation de syndicalistes.
    4. 12 A sa réunion de février 1988, le comité avait relevé que le gouvernement n'avait pas répondu aux allégations concernant l'arrestation des syndicalistes Eduardo Aburto, Eric González, Carlos Herrera, Sergio Rosa et Eugenio Membreño, et lui avait demandé de fournir ses observations à cet égard.
  • b) Réponse du gouvernement
    1. 13 Pour ce qui est de l'attaque des locaux de la CTN, le gouvernement réaffirme que cette intervention de la police était due à une affaire interne de l'organisation au cours de laquelle l'une des parties impliquées avait appelé la police pour rétablir l'ordre. Le gouvernement ajoute que la vie de personnes et les biens étant en danger, un mandat judiciaire n'était pas nécessaire.
    2. 14 Au sujet des détentions de syndicalistes, le gouvernement indique que le 11 novembre 1984 Eduardo Aburto a été remis en liberté après avoir accompli une peine d'une année de prison pour avoir provoqué des lésions physiques à une autre personne. Pour ce qui est de Carlos Herrera et Sergio Rosa, le gouvernement déclare qu'il n'existe aucune trace de leur détention dans les archives du ministère de l'Intérieur.

B. Plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution

B. Plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution
  • a) Allégations contenues dans la plainte
    1. 15 Cette plainte, datée du 17 juin 1987, était signée de MM. Henri Georget, délégué employeur, Niger; Johan von Holten, délégué employeur, Suède; Hiroshi Tsujino, délégué employeur, Japon; Javier Ferrer Dufoll, délégué employeur, Espagne; Arthur Joao Donato, délégué employeur, Brésil; Raoul Inocentes, délégué employeur, Philippines; Wolf Dieter Lindner, délégué employeur, République fédérale d'Allemagne; Tom D. Owuor, délégué employeur, Kenya; et Ray Brillinger, délégué employeur, Canada. Par des communications séparées, M. Roberto Favelevic, délégué employeur, Argentine, et M. Vincente Bortoni, délégué employeur, Mexique, s'étaient associés à la plainte.
    2. 16 Dans leur communication, les plaignants rappelaient que, depuis 1981, 21 plaintes au moins avaient été déposées au BIT par des organisations de travailleurs et d'employeurs relatives à des violations par le gouvernement du Nicaragua de ses obligations en vertu de la convention no 87. Les violations avaient consisté en meurtres (cas no 1007), agressions physiques (cas nos 1031, 1129, 1169, 1185 et 1298), tortures (cas nos 1283 et 1344), arrestations arbitraires (cas nos 1007, 1031, 1047, 1084, 1129, 1148, 1169, 1185, 1208, 1283, 1298, 1344 et 1351), violations de domicile (cas nos 1129 et 1148), pillages de bureaux (cas nos 1129 et 1298), confiscation de propriétés (cas no 1344), restrictions à la liberté de mouvement (cas nos 1103, 1114, 1129, 1317 et 1351), violations de la liberté d'expression (cas nos 1084, 1129 et 1283) et nombre d'autres questions comprenant la non-reconnaissance d'organisations de travailleurs indépendants jusqu'à ce que des plaintes puissent être présentées au BIT. Toute organisation professionnelle d'employeurs ou de travailleurs qui ne se soumettait pas à l'autorité du Front sandiniste de libération nationale (FSLN) était, selon les plaignants, l'objet de répression par le gouvernement soit par l'intermédiaire de ses fonctionnaires, soit par celui de gangs organisés. Dans les faits, le Nicaragua était en état d'urgence depuis plusieurs années. Cet état d'urgence avait été continuellement prolongé, le plus récemment par le décret no 245 du 9 janvier 1987. Les plaignants ajoutaient que l'état d'urgence était utilisé par le gouvernement pour supprimer tous les droits et libertés essentiels à l'exécution satisfaisante de la convention no 87 et pour supprimer toute opposition aux intérêts de l'autorité. Par ailleurs, une nouvelle Constitution avait été promulguée en janvier 1987 qui déniait implicitement aux employeurs le droit de s'associer dont ils jouissaient précédemment, tout en l'accordant à beaucoup d'autres catégories de personnes, ce qui était, pour les plaignants, une violation évidente de l'article 2 et de l'article 8, paragraphe 2, de la convention no 87.
    3. 17 Les plaignants alléguaient en outre que le décret no 530, édicté par le gouvernement le 24 septembre 1980, avait, depuis son application, subordonné les conventions collectives à l'approbation du ministère du Travail pour des raisons de politique économique, ce qui, en réalité, rendait la liberté de négocier collectivement sans aucune signification. Les plaignants estimaient que, nonobstant le fait que les organes compétents de l'OIT avaient répété que cela était une violation de la convention no 98, le gouvernement n'avait rien fait pour corriger la situation. En particulier, les salaires ne pouvaient être l'objet de négociations collectives puisqu'ils étaient déterminés par le Système national de travail et d'organisation des salaires (SNOTS) qui classifiait chacune des formes concevables d'emploi et fixait les salaires leur correspondant. Les plaignants remarquaient que cette violation de l'article 4 de la convention avait été le sujet d'une recommandation de .
    4. 18 Les plaignants affirmaient en outre que l'organisation la plus représentative d'employeurs au Nicaragua est le Conseil supérieur de l'entreprise privée (COSEP). Le COSEP est couvert, ajoutaient-ils, par l'article 1 de la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976. Pourtant, selon les plaignants, le gouvernement n'avait pas consulté le COSEP sur les procédures visant à assurer des consultations efficaces, tel qu'envisagé à l'article 2 de l'instrument. A l'inverse de ce qu'il avait déclaré dans son rapport sur l'application de la convention, le gouvernement avait aussi négligé de consulter le COSEP sur les questions couvertes par l'article 5 de la convention et en conséquence, d'après les plaignants, le gouvernement n'avait respecté aucune de ses obligations au regard de la convention, dans la mesure où elles se rapportent aux consultations avec le COSEP.
    5. 19 En conclusion, les plaignants demandaient qu'il soit procédé à l'examen de cette plainte et qu'un rapport soit établi par une commission d'enquête comme prévu à l'article 26, paragraphe 3, de la Constitution de l'OIT puisque, en particulier, le gouvernement ignorait les recommandations du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration et de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations qui, eux, s'étaient déjà prononcés sur les questions mentionnées ci-dessus.
  • b) Décision du Conseil d'administration sur la procédure
    1. 20 A sa session de novembre 1987, le Conseil d'administration, sur proposition de son bureau, avait pris les décisions suivantes au sujet de la plainte en question:
  • a) le gouvernement du Nicaragua, en tant que gouvernement contre lequel la plainte a été déposée, devrait être invité par le Directeur général à lui communiquer ses observations sur la plainte pour le 15 janvier 1988 au plus tard;
  • b) à sa 239e session, le Conseil d'administration devrait déterminer à la lumière i) des recommandations du Comité de la liberté syndicale au sujet des aspects de la plainte reçue relatifs à la liberté syndicale; ii) des informations qui pourraient être fournies par le gouvernement du Nicaragua; iii) des recommandations du Comité de la liberté syndicale sur les cas encore en instance, si la plainte dans son ensemble doit être renvoyée à une commission d'enquête.
  • c) Réponses du gouvernement
    1. 21 Dans sa réponse du 5 janvier 1988, le gouvernement affirmait que, s'il était vrai que plusieurs plaintes pour prétendue violation de la liberté syndicale avaient été présentées, il était également vrai que les plaintes avaient été closes car le gouvernement avait démontré qu'elles n'avaient rien à voir avec des affaires syndicales, mais qu'il s'agissait de délits de droit commun punis par la loi.
    2. 22 Le gouvernement déclarait que le 9 janvier 1987, par le décret no 245, il avait rétabli l'état d'urgence en tant que mécanisme juridique de défense face à la guerre menée par les Etats-Unis contre le Nicaragua, de sorte que son application était destinée à affronter les conduites contre-révolutionnaires en préservant ainsi les droits des Nicaraguayens. D'après le gouvernement, l'affirmation selon laquelle le décret no 245 suspendait plusieurs droits syndicaux était totalement fausse puisque, parmi les droits suspendus, aucun n'était strictement syndical. Le seul droit suspendu en matière de travail était le droit de grève qui n'est pas un droit des syndicats mais un droit des travailleurs syndiqués ou non.
    3. 23 Le gouvernement ajoutait que l'établissement de l'état d'urgence était conforme aux dispositions contenues à l'article 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et à l'article 27 de la Convention américaine des droits de l'homme.
    4. 24 Selon le gouvernement, l'état d'urgence n'avait empêché, en aucune circonstance, le développement du mouvement syndical et la libre affiliation des travailleurs à leurs organisations professionnelles. De 1980 à 1986, les travailleurs de la campagne et de la ville avaient constitué un total de 1.203 syndicats.
    5. 25 Le gouvernement estimait qu'il est important de rappeler que l'arrêt rendu par la Cour internationale de Justice le 27 juin 1986 avait accordé un appui juridique fondamental au gouvernement et à son droit de défendre sa souveraineté, son intégrité territoriale et son indépendance économique et politique à travers l'ordre juridique international. C'était, selon le gouvernement, la politique d'agression menée contre le Nicaragua et non l'état d'urgence qui était à l'origine des circonstances difficiles et exceptionnelles que traversait la société nicaraguayenne dans son ensemble. Le gouvernement soulignait qu'il avait l'espoir de suspendre l'état d'urgence quand cesseraient les causes qui l'avaient motivé.
    6. 26 Le gouvernement poursuivait en indiquant que l'absence d'inscription du droit des employeurs de s'organiser dans la Constitution ne devait pas être comprise comme une interdiction puisque l'article 49 de la Constitution politique énonce le principe général du droit d'organisation de toutes les personnes en vue de défendre leurs intérêts. En outre, ajoutait-il, le droit des employeurs de s'organiser est inscrit dans le Code du travail et le règlement des associations syndicales.
    7. 27 Pour ce qui est du décret no 530 de 1980, le gouvernement estimait que les dispositions en question ne portaient en aucune manière atteinte au droit des organisations d'employeurs et de travailleurs de négocier des conventions collectives et, conformément au principe du tripartisme de l'OIT, on prévoyait l'intervention du ministère du Travail. En ce qui concerne les conditions d'emploi, celles-ci étaient négociées au moyen d'une procédure de conciliation. En cas d'échec, le ministère du Travail ne pouvait imposer aux parties les clauses d'une convention collective. L'affaire devait être résolue, en période d'état d'urgence, par le tribunal d'arbitrage, organe du pouvoir judiciaire et, en période normale, par la procédure relative au droit de grève.
    8. 28 Le système national d'organisation du travail et des salaires, ajoutait le gouvernement, permet aux employeurs et aux travailleurs de participer à la discussion des bases du contenu du travail pour fixer les salaires, selon la quantité et la complexité.
    9. 29 Enfin, le gouvernement estimait que la convention no 144 n'avait pas été enfreinte, car les consultations avaient été effectuées avec les organisations que le gouvernement avait considérées, dans un acte souverain, comme les plus représentatives. Cependant, il ne voyait aucun inconvénient à consulter aussi le COSEP en temps opportun.
    10. 30 Dans sa communication du 19 janvier 1988, le gouvernement avait fourni le texte d'un communiqué déclarant qu'à compter du 19 janvier l'état d'urgence était suspendu sur tout le territoire. Le gouvernement affirmait également dans ce communiqué qu'il avait l'intention d'appliquer la loi d'amnistie no 33 lorsqu'un cessez-le-feu interviendrait, et que les groupes qui avaient pris les armes réintégreraient la vie civile. Si un tel cessez-le-feu n'était pas décidé, le gouvernement libérerait les intéressés si le gouvernement des Etats-Unis ou un gouvernement d'Amérique centrale décidait de les accueillir sur son territoire. Ils seraient autorisés à rentrer au Nicaragua quand la guerre serait terminée.
    11. 31 Dans une communication postérieure du 28 janvier 1988, le gouvernement avait fourni le texte des décrets no 296 qui supprimait les tribunaux populaires antisomozistes, et no 297 qui levait l'état d'urgence sur tout le territoire national et rétablissait les droits et garanties reconnus dans la Constitution du Nicaragua.
  • d) Examen de la plainte par le comité à sa réunion de février 1988
    1. 32 En ce qui concerne les allégations relatives aux violations de la convention no 87, le comité avait rappelé qu'il avait adopté sur chacun des cas cités par les plaignants des conclusions qui avaient été approuvées par le Conseil d'administration et qui contenaient des recommandations précises adressées au gouvernement. Les réponses fournies par le gouvernement à l'occasion de l'examen de nombreux cas étaient très souvent contradictoires avec les allégations de fait des auteurs des plaintes. Le comité n'était donc pas en mesure de tirer de l'ensemble de ces cas une conclusion sur la situation générale qui règne au Nicaragua en matière de liberté syndicale.
    2. 33 En ce qui concerne les allégations relatives à l'inobservation de la convention no 98, le comité avait noté que la commission d'experts s'était interrogée sur la conformité du système de détermination des salaires avec l'article 4 de la convention.
    3. 34 Enfin, en ce qui concerne l'application de la convention no 144, le comité avait rappelé qu'il avait indiqué que des critères objectifs précis et préétablis pour déterminer la représentativité d'une organisation d'employeurs ou de travailleurs doivent exister dans la législation, et que cette appréciation ne saurait être laissée à la discrétion des gouvernements.
    4. 35 Le comité avait noté que le gouvernement avait indiqué que le seul droit en matière de travail, suspendu par l'état d'urgence, était le droit de grève. En ce qui concerne le droit d'organisation des employeurs, le gouvernement avait signalé que ce droit est reconnu par le Code du travail et le règlement des associations syndicales, et il s'était dit prêt à consulter, en temps opportun, le COSEP sur les questions relatives aux normes internationales du travail.
    5. 36 En outre, dans une communication plus récente, le gouvernement avait annoncé la suspension effective de l'état d'urgence et sa volonté d'appliquer, sous certaines conditions, la loi d'amnistie. Le comité, tout en prenant note de cette évolution favorable, avait constaté cependant qu'il subsistait une contradiction substantielle entre les allégations des auteurs de la plainte et les réponses du gouvernement dans les domaines couverts par les conventions nos 87, 98 et 144. Ces contradictions portaient sur la conformité de certains textes avec les instruments cités et sur des questions de fait.
    6. 37 Par ailleurs, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations devait examiner, lors de sa prochaine session de mars 1988, l'application des conventions nos 87 et 98 par le Nicaragua sur la base, notamment, des informations fournies par le gouvernement lors de la dernière session de la Conférence devant la Commission de l'application des normes et des derniers développements intervenus dans le pays.
    7. 38 Le comité avait estimé que la réponse du gouvernement pour sa prochaine réunion de mai de même que les commentaires de la commission d'experts constituaient des éléments qui devraient être pris en considération pour déterminer quelles suites donner à la plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution.
    8. 39 Sur la base de ces conclusions, le comité avait donc demandé au gouvernement de fournir des informations détaillées sur les conséquences de la suspension de l'état d'urgence quant aux activités des organisations d'employeurs et de travailleurs ainsi que sur l'évolution de la situation quant à une éventuelle application de la loi d'amnistie. Ce comité avait en outre décidé qu'il examinerait à sa session de mai 1988 la question de l'opportunité de constituer une commission d'enquête pour faire suite à la plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution, sur la base des informations qui seraient fournies par le gouvernement et des commentaires qui seraient formulés par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur l'application des conventions nos 87 et 98 par le Nicaragua.
  • e) Réponse ultérieure du gouvernement 40. Dans sa communication du 29 avril 1988, le gouvernement déclare à nouveau que, par le décret no 247 du 18 janvier 1988, il a levé l'état d'urgence sur tout le territoire national qui avait été proclamé conformément à l'article 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et à l'article 27 de la Convention américaine des droits de l'homme. Le gouvernement affirme que la levée de l'état d'urgence est une manifestation de bonne volonté de sa part, pour faciliter l'accomplissement effectif des accords conclus par les présidents d'Amérique centrale le 7 août 1987 en vue d'établir la paix et la normalisation de la situation dans la région et particulièrement au Nicaragua.
    1. 41 Le gouvernement réaffirme que le décret établissant l'état d'urgence avait seulement suspendu provisoirement l'exercice d'un droit lié au travail: le droit de grève reconnu à l'article 83 de la Constitution. Comme loi de la République, le décret de suspension s'appliquait à toute la population, y compris les employeurs, les travailleurs et leurs organisations. Par conséquent, la suspension de l'exercice de quelques libertés civiles et politiques pourrait avoir affecté le développement normal des activités de ces organisations et de leurs membres qui, en tant que résidents au Nicaragua, doivent respecter la législation en vigueur.
    2. 42 Le gouvernement déclare qu'avec la levée de l'état d'urgence sur tout le territoire national est rétabli le plein exercice des droits et garanties contenus dans la Constitution politique du Nicaragua.
    3. 43 Après avoir rappelé quelles étaient les dispositions de la Constitution qui se trouvaient suspendues et qui sont maintenant à nouveau en vigueur, le gouvernement affirme que le rétablissement de tous ces droits a incontestablement des effets positifs pour tous les secteurs de la population, y compris des travailleurs et des employeurs et de leurs organisations.
    4. 44 Le gouvernement ajoute qu'une amnistie partielle a été décrétée par l'Assemblée nationale le 26 mars 1988, amnistie qui concerne 100 coupables condamnés pour délits contre l'ordre et la sécurité publics, membres de la résistance nicaraguayenne. L'application d'une amnistie générale est une affaire actuellement en discussion entre le gouvernement et la direction de la résistance nicaraguayenne, en marge des problèmes sociaux.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 45. Les allégations formulées par les organisations de travailleurs encore en instance portaient sur la mise à sac de locaux syndicaux et la détention de syndicalistes.
  2. 46. Sur le premier point, le comité observe que, selon le gouvernement, c'est à l'occasion d'une dissension interne au sein de la Centrale des travailleurs du Nicaragua et à la demande de l'une des parties que la police est intervenue pour protéger les personnes et les biens. Tout en prenant note de ces explications, le comité doit rappeler l'importance qu'il attache à la protection des biens syndicaux, importance qui a été également soulignée par la Conférence internationale du Travail dans la résolution concernant les droits syndicaux et leurs relations avec les libertés civiles, adoptée en 1970, où elle avait signalé que le droit à une protection adéquate des biens des syndicats constitue l'une des libertés essentielles à l'exercice normal des droits syndicaux. Le comité tient également à signaler à l'attention du gouvernement que, même si une intervention de la police dans les locaux syndicaux peut être justifiée dans des circonstances particulièrement graves, une telle intervention ne devrait en aucun cas entraîner la mise à sac des locaux et des archives d'une organisation.
  3. 47. Pour ce qui concerne la détention de syndicalistes, le comité prend note des informations fournies par le gouvernement d'où il ressort qu'il n'y a aucune trace de l'arrestation de deux d'entre eux, et qu'un troisième a été libéré après avoir purgé la peine à laquelle il avait été condamné pour violences physiques. Le comité demande au gouvernement de fournir des informations sur le sort de deux personnes pour lesquelles il n'a pas encore fourni de réponses, à savoir Eric González et Eugenio Membreño.
  4. 48. En ce qui concerne la plainte déposée par plusieurs délégués employeurs en vertu de l'article 26 de la Constitution, le comité rappelle que cette plainte contient des allégations concernant la non-application de la convention no 87, fondées notamment sur les 21 plaintes examinées par le comité, la suspension de certaines libertés constitutionnelles et la non-reconnaissance dans la Constitution nationale du droit d'organisation des employeurs; la non-application de la convention no 98, fondée sur l'absence de libre négociation collective, et la non-application de la convention no 144, fondée sur l'absence de consultations du COSEP par le gouvernement.
  5. 49. Dans sa réponse le gouvernement se réfère à la levée de l'état d'urgence sur tout le territoire national. Le comité note avec intérêt que l'ensemble des droits constitutionnels qui avaient été suspendus ont ainsi été rétablis, notamment dans les domaines qui ont trait aux activités des organisations d'employeurs et de travailleurs. Le comité note également qu'une amnistie partielle a été prononcée en faveur de personnes condamnées pour délits contre l'ordre et la sécurité publics, et que des pourparlers sont en cours en vue de l'octroi d'une amnistie générale.
  6. 50. Le comité constate cependant que le gouvernement s'est limité à fournir des informations générales sur le rétablissement des droits qui avaient été suspendus sans communiquer d'informations concrètes sur la reprise des activités des organisations d'employeurs et de travailleurs en pratique. Le comité demande donc au gouvernement de fournir des informations concrètes et détaillées sur ce point, notamment en ce qui concerne la diffusion des informations syndicales et professionnelles, l'exercice du droit de réunion des organisations d'employeurs et de travailleurs, l'enregistrement de telles organisations et l'exercice du droit de grève.
  7. 51. Pour ce qui est des allégations relatives à l'application de la convention no 98, le comité note que la commission d'experts a souligné dans son rapport, adopté lors de sa session de mars 1988, que le décret no 530 - auquel fait référence la plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution - est en vigueur depuis plus de sept ans et qu'il soumet les conventions collectives à l'approbation du ministère du Travail pour des raisons de politique économique, de telle sorte que les organisations d'employeurs et de travailleurs ne peuvent fixer librement les salaires. Tout comme la commission d'experts, le comité considère qu'une telle situation n'est pas conforme à l'article 4 de la convention no 98 relatif à la promotion et au développement des procédures de négociation collective volontaire. Il demande donc au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour remédier à cette violation de la convention et de lui fournir des informations sur les mesures qu'il entend prendre à cet égard.
  8. 52. Au sujet de l'application de la convention no 144, le gouvernement ne fournit pas de nouvelles informations sur la consultation du COSEP sur les questions relatives aux normes internationales du travail, bien qu'il ait indiqué dans sa réponse fournie pour la réunion du comité de février 1988 qu'il était prêt à le consulter en temps opportun. Le comité demande donc au gouvernement de fournir des informations sur les consultations qu'il a entreprises ou qu'il entend entreprendre avec le COSEP.
  9. 53. A la lumière des considérations qui précèdent, le comité doit constater que le gouvernement n'a pas apporté toutes les informations nécessaires pour qu'il puisse se prononcer en toute connaissance de cause sur la situation des organisations d'employeurs et de travailleurs au Nicaragua.
  10. 54. A la lumière des informations ainsi recueillies, le comité s'est demandé quelles suites il convenait de donner à la plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT. En premier lieu, le comité a examiné la possibilité de reporter l'adoption de la recommandation à formuler au Conseil d'administration à sa prochaine session de novembre 1988. En second lieu, le comité a examiné la possibilité de recommander au Conseil d'administration, dès sa présente session, la constitution d'une commission d'enquête. En troisième lieu, le comité a examiné la possibilité de recommander au Conseil d'administration de demander au gouvernement d'inviter une mission d'étude qui serait chargée d'examiner sur place les questions de fait et de droit en instance devant le comité depuis 1981. Ayant reçu après ses délibérations une lettre du gouvernement du 23 mai 1988 qui propose la formation d'une mission d'étude, selon les lignes que le comité avait lui-même envisagées, le comité recommande au Conseil d'administration d'accepter cette proposition. Le comité sera ainsi en mesure, à sa session de novembre 1988, de donner une réponse définitive à la question posée au début du paragraphe.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 55. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité rappelle au gouvernement que le droit à une protection adéquate des biens des syndicats constitue l'une des libertés essentielles à l'exercice des droits syndicaux, et il lui demande de prendre les mesures nécessaires pour qu'une telle protection soit assurée efficacement.
    • b) Le comité demande au gouvernement de fournir des informations sur la détention et le sort des syndicalistes, Eric González et Eugenio Membreño.
    • c) Le comité, tout en notant avec intérêt que les droits suspendus par l'état d'urgence ont été rétablis, demande au gouvernement de fournir des informations concrètes et détaillées sur la reprise des activités des organisations d'employeurs et de travailleurs en pratique, notamment en ce qui concerne la diffusion des informations syndicales et professionnelles, l'exercice du droit de réunion, l'enregistrement de ces organisations et l'exercice du droit de grève.
    • d) Constatant que le décret no 130 n'est pas conforme à l'article 4 de la convention no 98 relatif à la promotion et au développement de la négociation collective volontaire, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour remédier à cette situation et de lui fournir des informations sur les mesures qu'il entend prendre à cet égard.
    • e) Le comité demande au gouvernement de fournir des informations sur les consultations qu'il a entreprises ou qu'il entend entreprendre avec le COSEP sur les questions relatives aux normes internationales du travail.
    • f) Ayant reçu après ses délibérations une lettre du gouvernement du 23 mai 1988 qui propose la formation d'une mission d'étude, selon les lignes que le comité avait lui-même envisagées, le comité recommande au Conseil d'administration d'accepter cette proposition. Le comité sera ainsi en mesure, à sa session de novembre 1988, de donner une réponse définitive quant à la question des suites qu'il convient de donner à la plainte déposée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT.
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