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Informe provisional - Informe núm. 218, Noviembre 1982

Caso núm. 1131 (Burkina Faso) - Fecha de presentación de la queja:: 27-ABR-82 - Cerrado

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  1. 751. Dans cette affaire, le comité a reçu des plaintes de différentes organisations syndicales: l'Internationale du personnel des postes, télégraphes et téléphones (27 avril, 14 juin, 31 août 1982), la Fédération syndicale mondiale (13 mai, 23 août 1982) et la Confédération syndicale voltaïque (29 avril, 24 mai, 21 août, 30 août, 11 septembre 1982). Le gouvernement a répondu dans des lettres des 13 mai et 6 septembre 1982.
  2. 752. La Haute-Volta a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 753. L'Internationale du personnel des postes, télégraphes et téléphones (IPTT) a communiqué, le 27 avril 1982, des informations qu'elle avait reçues de son organisation affiliée en Haute-Volta, le Syndicat autonome des postes et télécommunications et assimilés de la Haute-Volta (SAPT), d'où il ressortait que le gouvernement voltaïque avait suspendu de leurs fonctions 39 agents des postes et télécommunications et 23 autres fonctionnaires, 50 autres agents des PTT étant égaiement menacés de suspension.
  2. 754. Selon l'IPTT, ces mesures suivaient la dissolution de la Confédération syndicale voltaïque à laquelle le SAPT est affilié au niveau national, ainsi que le mandat d'arrêt lancé contre le secrétaire général de la confédération, M. Touré Soumane. Ces mesures avaient été prises dans le cadre d'un conflit entre les organisations de fonctionnaires et le gouvernement.
  3. 755. La Confédération syndicale voltaïque (CSV), pour sa part, avait adressé au BIT un télégramme relatif à cette affaire dès le 29 avril 1982 où elle expliquait que les six syndicats qui lui sont affiliés avaient observé une grève de protestation de trois jours pour exiger l'abrogation de l'ordonnance sur le droit de grève, le rétablissement de la Confédération syndicale voltaïque dissoute, la levée du mandat d'arrêt, qui avait été lancé contre son secrétaire général Touré Soumane à la suite de la grève, et la levée des mesures de suspension qui frappaient des fonctionnaires et autres agents grévistes. L'ensemble de ces allégations avaient été reprises par la Fédération syndicale mondiale dans une communication adressée au BIT le 13 mai 1982.

B. Première réponse du gouvernement

B. Première réponse du gouvernement
  1. 756. Dans une réponse du 13 mai 1982, le gouvernement expliquait qu'au lendemain du 25 novembre 1980 le président du Comité militaire de redressement pour le progrès national avait, dans un premier temps, garanti, dans une proclamation, les libertés syndicales, considérant les organisations syndicales comme des partenaires sociaux privilégiés dans la reconstruction nationale. Cependant, profitant de cette proclamation, certains responsables syndicaux avaient tenté de provoquer une crise grave, en distribuant de nombreux tracts sur l'étendue du territoire et en lançant des attaques violentes contre le régime en place à l'occasion de réunions syndicales et des appels en vue d'une mobilisation générale pour des grèves illimitées. Dans le souci de sauvegarder les intérêts supérieurs de la nation, le gouvernement expliquait qu'il s'était trouvé dans l'obligation d'y remédier en prenant diverses mesures d'ordre conjoncturel pour des raisons d'Etat, dont l'ordonnance no 81/ 0041/CMRPN/PRES du 1er novembre 1981 portant suppression du droit de grève.
  2. 757. Puis le gouvernement ajoutait qu'il avait abrogé, deux mois plus tard, l'ordonnance supprimant le droit de grève et qu'il avait adopté l'ordonnance no 82/ 003/PRES/CMRPN du 14 janvier 1982 portant réglementation de l'exercice du droit de grève.
  3. 758. Malheureusement, poursuivait le gouvernement, des responsables syndicaux, sous prétexte de dénoncer cette ordonnance, avaient lancé des appels à la grève sauvage en violation délibérée des textes. C'était le cas, au dire du gouvernement, de certains agents de l'Etat, notamment ceux des postes et télécommunications. Le gouvernement confirmait que les intéressés avaient été suspendus de leur emploi pour faits de grève illégale, en application de l'ordonnance du 14 janvier 1982.
  4. 759. En outre, en annexe à sa communication, il transmettait copie de l'ordonnance susmentionnée réglementant l'exercice du droit de grève et le décret no 82/0054/PRES/CMRPN du 12 février 1982 portant composition et fonctionnement des comités et du Conseil national de négociation chargés, aux niveaux départemental et national, de régler les conflits collectifs entre les employés des administrations publiques ou parapubliques et l'administration.

C. Compléments d'informations adressés par les plaignants

C. Compléments d'informations adressés par les plaignants
  1. 760. La Confédération syndicale voltaïque, dans une lettre du 24 mai 1982, avait, par ailleurs, fourni un complément d'informations á l'appui de sa plainte et avait fait état d'allégations complémentaires.
  2. 761. Elle expliquait qu'elle avait en effet appelé à une grève générale de tous les syndicats les 14, 15 et 16 avril 1982 pour protester contre sa propre dissolution par voie administrative qui était intervenue le 24 novembre 1981 alors qu'elle refusait la suppression du droit de grève décrétée au 1er novembre 1981. Elle voulait également protester contre le mandat d'arrêt qui avait été lancé le 24 novembre 1981 contre son secrétaire général.
  3. 762. En outre, la CSV joignait à sa lettre des copies de plusieurs décisions administratives adoptées entre le 23 avril et le 10 mai 1982 et contenant de très longues listes de noms d'employés licenciés ou suspendus pour avoir participé aux grèves des 14, 15 et 16 avril 1982. Ces décisions émanaient notamment du ministre de la Fonction publique et du Travail, des ministères des Travaux publics, des Transports, de l'Urbanisme, des Finances et de l'Education nationale, du ministre des Postes et Télécommunications, du directeur général de l'Office des postes et télécommunications, du ministre du Développement rural, du directeur général de la Société voltaïque d'électricité et de la Banque internationale pour le commerce, l'industrie et l'agriculture.
  4. 763. L'IPTT, quant à elle, communiquait les noms des 85 travailleurs des postes qui, en tout, avaient été licenciés, les menaces de licenciements dont avait fait état l'IPTT dans sa communication initiale s'étant matérialisées.
  5. 764. Plus récemment, les plaignants, dans leur ensemble, annonçaient que les 154 travailleurs déjà suspendus ou licenciés à la suite de grève allaient être traduits en justice à partir du 9 septembre 1982.
  6. 765. Par ailleurs, la CSV indiquait, dans une communication du 11 septembre 1982, que son secrétaire général, Touré Soumane, avait effectivement été arrêté le 9 septembre 1982 à la suite du mandat d'arrêt national et international qui avait été lancé contre lui au moment de la dissolution, par voie administrative, de la CSV en novembre 1981.

D. Seconde réponse du gouvernement

D. Seconde réponse du gouvernement
  1. 766. Dans une lettre du 6 septembre 1982, le gouvernement se borne à affirmer que les récentes mesures prises par lui et dénoncées par les plaignants sont parfaitement conformes aux dispositions de l'ordonnance du 14 janvier 1982 portant réglementation de l'exercice du droit de grève.

E. Conclusions du comité

E. Conclusions du comité
  1. 767. Le comité constate avec préoccupation que les plaintes contiennent des allégations graves faisant état de la dissolution par voie administrative de la Confédération syndicale voltaïque, de l'arrestation de son secrétaire général, du licenciement et des poursuites judiciaires concernant 154 travailleurs de différentes branches de la fonction publique et de sociétés nationales à la suite d'une grève de protestation et trois jours engagée par les intéressés pour obtenir la levée des mesures visant la CSV et l'abrogation d'un texte législatif restreignant l'exercice du droit de grève. Le comité prend note des explications fournies par le gouvernement au sujet des motifs qui l'ont conduit à de telles mesures.
    • a) Allégation relative à la dissolution par voie administrative de-la Confédération syndicale voltaïque
  2. 768. Au sujet de la dissolution par voie administrative de la Confédération syndicale voltaïque qui serait intervenue alors que cette confédération protestait contre l'interdiction générale de la grève prononcée par le gouvernement en novembre 1981 et levée depuis, le comité ne peut que souligner la très grande importance qu'il attache au respect de l'article 4 de la convention no 87 ratifiée par la Haute-Volta, qui prévoit que les organisations syndicales ne soient ni suspendues, ni dissoutes, par voie administrative. Le comité tient à insister particulièrement sur ce point étant donné que, dans le présent cas, la confédération dissoute indique que les six syndicats qui lui sont affiliés ont soutenu sa protestation, ce qui laisse entendre que la mesure de dissolution affecte une confédération syndicale ayant une large représentativité et qu'elle a, par là même, des conséquences graves pour la défense des intérêts professionnels d'un nombre important de travailleurs du pays.
  3. 769. Le comité, observant que le gouvernement n'a pas nié l'allégation, doit rappeler que seuls des faits graves et dûment prouvés pourraient conduire à une dissolution par voie judiciaire des organisations syndicales. Il exprime donc le ferme espoir que le gouvernement donnera un caractère prioritaire à la levée de la mesure de dissolution par voie administrative de la CSV et il prie le gouvernement de le tenir informé de toute mesure prise à cet égard.
    • b) Allégation relative à l'arrestation du secrétaire général de la CSV
  4. 770. Le gouvernement ne formule pas d'observation sur l'allégation des plaignants selon laquelle Touré Soumane, le secrétaire général de la confédération dissoute, avait été l'objet d'un mandat d'arrêt, lancé dès le 24 novembre 1981 à la suite de la grève de protestation contre l'ordonnance supprimant le droit de grève décrétée le 1er novembre 1981. Par contre, d'après les dernières informations disponibles, les plaignants annoncent que ce dirigeant syndical vient effectivement d'être arrêté le 9 septembre 1982.
  5. 771. Le comité rappelle que la détention de dirigeants syndicaux pour le simple fait d'avoir exercé des activités de défense des intérêts professionnels de leurs mandants implique un grave danger d'atteinte aux droits syndicaux.
  6. 772. Dans ce cas d'espèce, il semble qu'il en était ainsi puisque, selon les plaignants, les poursuites contre le secrétaire général de la Confédération syndicale voltaïque ont été engagées le jour même (24 novembre 1981) où la confédération a été dissoute par voie administrative pour avoir protesté contre l'interdiction de la grève prononcée le 1er novembre 1981. Dans ces conditions, le comité invite le gouvernement à communiquer des informations sur cet aspect du cas, y compris tout jugement qui serait rendu dans cette affaire et rappelle que les syndicalistes ne devraient pas être incarcérés pour avoir exercé des activités syndicales légitimes.
    • c) Allégations relative au licenciement et aux poursuites judiciaires frappant 154 grévistes
  7. 773. Les plaignants se réfèrent à des licenciements et des poursuites judiciaires frappant 154 travailleurs de différentes branches de la fonction publique et des sociétés nationales, y compris notamment des postes et télécommunications, de l'éducation nationale, des travaux publics, de l'urbanisme, du développement rural, de la Société nationale d'électricité et d'une banque internationale. Les travailleurs en question sont sanctionnés pour avoir engagé une grève de protestation de trois jours contre les mesures prises par le gouvernement à l'encontre de la CSV. Ils le sont aussi pour avoir cherché à obtenir l'abrogation d'une législation restrictive en matière de droit de grève.
  8. 774. Le gouvernement estime avoir agi conformément á la législation nationale et, en particulier, à l'ordonnance no 82003 du 14 janvier 1982 portant réglementation de l'exercice du droit de grève, comme il l'indique dans sa communication du 13 mai 1982.
  9. 775. A cet égard, le comité rappelle qu'il a déjà procédé á l'examen de l'ordonnance no 82003 dans le cas no 1089 relatif A la Haute-Volta à sa réunion de mai 1982. Lors de cet examen, le comité avait relevé que certaines dispositions du texte appelaient, de sa part, des réserves.
  10. 776. En particulier en ce qui concerne les objectifs que les travailleurs poursuivent par l'exercice du droit de grève, le comité avait, notamment souligné, aux paragraphes 239 et 242 de son 217e rapport, que la grave est l'un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et défendre leurs intérêts professionnels et économiques, au sens large, intérêts qui non seulement se rapportent aux revendications collectives d'ordre professionnel (article 12 de l'ordonnance) mais également englobent la recherche de solutions aux questions de politique économique et sociale et qui intéressent directement les travailleurs. Le comité avait ainsi appelé l'attention du gouvernement sur le fait que les limitations à l'exercice du droit de grève et la réquisition des personnes pour remplir des fonctions abandonnées à l'occasion d'un conflit du travail ne sauraient être acceptables que pour assurer le fonctionnement de services essentiels au sens strict du terme, A savoir ceux dont l'interruption risque de mettre en danger la vie ou les conditions d'existence de tout ou partie de la population.
  11. 777. Par ailleurs, bien que dans des cas antérieurs le comité ait admis que le droit de grève pourrait faire l'objet de restrictions, voire d'interdictions, dans la fonction publique ou les services essentiels parce que la grève pourrait y provoquer de graves préjudices pour la collectivité nationale, il a aussi estimé qu'il ne paraissait pas approprié de placer toutes les entreprises d'Etat sur un même pied sans que la législation distingue entre celles qui sont vraiment essentielles parce que l'interruption de leur fonctionnement met en danger la vie ou les conditions d'existence de tout ou partie de la population et celles qui ne le sont pas d'après ce critère.
  12. 778. Enfin, dans des cas où des syndicalistes et des dirigeants syndicaux ont été licenciés pour avoir exercé leur droit de grève, le comité a indiqué qu'il ne pouvait s'empêcher de conclure que les intéressés étaient sanctionnés pour avoir exercé leur activité syndicale et qu'ils faisaient l'objet d'une discrimination contraire à l'article 2 de la convention no 98.
  13. 779. Dans le cas d'espèce, les employés des services publics licenciés pour avoir participé à trois jours de grève de protestation contre un texte législatif qu'ils estiment trop restrictif en matière de grève appartiennent à différentes branches de la fonction publique et de sociétés nationales, y compris notamment aux postes et télécommunications, A l'éducation nationale, aux travaux publics, à l'urbanisme, au développement rural, à la société nationale d'électricité et même à la Banque internationale pour le commerce, l'industrie et l'agriculture. A cet égard, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a souligné que l'interdiction de la grève dans la fonction publique et les services essentiels devrait être limitée aux fonctionnaires agissant en tant qu'organes de la puissance publique ou aux services dont l'interruption mettrait en danger la vie ou les conditions d'existence de l'ensemble ou d'une partie de la population.
  14. 780. Le comité ne peut que faire siennes les indications de la commission d'experts sur cette question, ce d'autant plus que, comme il l'avait lui-même relevé dans son examen antérieur, aux termes de l'ordonnance en cause restreignant l'exercice du droit de grève, la participation à la grève illégale est passible d'un emprisonnement allant jusqu'à un an (article 20). Etant donné que, selon les plaignants, les grévistes licenciés vont être poursuivis en justice, le comité rappelle que l'imposition de sanctions excessivement sévères pour faits de grève ne peut que porter préjudice au développement de bonnes relations professionnelles. Il invite donc le gouvernement à réexaminer la situation des intéressés afin de contribuer à l'apaisement du climat social.
  15. 781. Enfin, à propos de l'ordonnance no 82003 du 14 janvier 1982 portant procédure de règlement des conflits collectifs du travail, le comité rappelle qu'il a déjà invité le gouvernement à amender sa législation pour la mettre en conformité avec les principes de la liberté syndicale.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 782. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:
    • a) Le comité observe avec préoccupation que la Confédération syndicale voltaïque (CSV) a été dissoute par voie administrative pour avoir, semble-t-il, protesté contre l'interdiction générale de la grève prononcée en novembre 1981 par le gouvernement, mais levée depuis. Le comité soulignant la grande importance qu'il attache au respect de l'article 4 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, ratifiée par la Haute-Volta, selon lequel les organisations de travailleurs et d'employeurs ne devraient pas pouvoir être dissoutes par voie administrative, exprime le ferme espoir que le gouvernement donnera un caractère prioritaire à la levée de la mesure de dissolution administrative de la CSV. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.
    • b) A propos du mandat d'arrêt lancé contre le secrétaire général de la confédération syndicale voltaïque à la suite de la dissolution par voie administrative de ladite confédération, le comité note avec regret que le gouvernement ne communique pas d'information sur cet aspect du cas. Il note aussi que, selon les plaignants, l'intéressé a été arrêté en septembre 1982. Le comité rappelle que l'arrestation de syndicalistes pour le simple fait d'avoir exercé des activités syndicales légitimes est contraire aux principes de la liberté syndicale. Le comité prie donc le gouvernement de communiquer ses observations sur cet aspect du cas, y compris une copie de tout jugement qui serait rendu dans cette affaire.
    • c) A propos du licenciement et des poursuites judiciaires frappant 154 syndicalistes pour avoir participé à une grève de protestation de trois jours contre une législation que les intéressés estiment trop restrictive en matière de grève, le comité relève que, outre les licenciements, les intéressés encourent une peine d'emprisonnement. Le comité rappelle à cet égard que l'imposition de sanctions excessivement sévères pour faits de grève ne peut que porter préjudice au développement de bonnes relations professionnelles. Il invite donc le gouvernement à réexaminer la situation des intéressés afin de contribuer à l'apaisement du climat social.
    • d) Enfin, le comité invite à nouveau le gouvernement à amender sa législation excessivement restrictive en matière de grève afin de la mettre en conformité avec les principes de la liberté syndicale.
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