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- 422. La plainte de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) figure dans des communications respectivement datées des 19 avril et 29 août 1990. Le gouvernement a envoyé ses observations sur les allégations dans des communications en date des 30 août 1990, 23 janvier et 5 février 1991.
- 423. Le Panama a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de la confédération plaignante
A. Allégations de la confédération plaignante
- 424. Dans sa communication du 19 avril 1990, la CISL dénonce la violation des conventions nos 87 et 98 par le gouvernement du Panama. Elle indique qu'au cours des derniers mois le Panama a connu une crise économique et sociale profonde dont les victimes ont été essentiellement les travailleurs; c'est la raison pour laquelle elle a envoyé, conjointement avec son organisation affiliée pour les Amériques, l'Organisation régionale interaméricaine des travailleurs (ORIT), une mission dans ce pays pour prendre connaissance sur le terrain des faits qui ont été dénoncés à maintes reprises par son organisation affiliée, la Confédération des travailleurs de la République du Panama (CTRP) et d'autres organisations syndicales.
- 425. La CISL rapporte que, pendant sa mission, la délégation a pu constater l'existence de pratiques gouvernementales qui portent atteinte de manière persistante à la stabilité du travail et aux droits des travailleurs et de leurs organisations; la répression accrue contre les agents publics est manifeste, comme le montre à l'évidence la succession des faits suivants:
- - menaces et répression dirigées contre les dirigeants et les travailleurs membres de la Fédération nationale des associations et organisations des agents publics (FENASEP), en violation des droits consacrés dans les lois de la République et la Constitution du pays;
- - perquisition et fermeture des locaux des associations par voie administrative en présence, à plusieurs reprises, d'autorités armées détenant et intimidant les dirigeants et les travailleurs;
- - déroulement d'une campagne systématique contre les associations d'agents publics par des licenciements de leurs dirigeants et des licenciements massifs de travailleurs. Campagne d'intimidation et pressions pour inciter les travailleurs à démissionner de leurs organisations;
- - licenciement de plus de 3.000 travailleurs, dans la majorité des cas de façon arbitraire et injustifiée, depuis la prise du pouvoir par le nouveau gouvernement. Ces décisions ont été en général communiquées verbalement sans que les motifs des licenciements soient indiqués; rétention illégale des salaires des travailleurs;
- - licenciements dans le secteur public: le syndicalisme panaméen est accusé d'avoir été, dans l'ensemble, favorable à l'ancien régime et d'avoir participé aux bataillons dits de la dignité. C'est en se fondant sur cette accusation abusive que le gouvernement a fait approuver le décret du cabinet no 1, du 26 décembre 1989, qui autorise de manière discrétionnaire et sans formalité les licenciements dans le secteur public. Ce décret répressif et rétrograde déroge au décret exécutif no 116 du 10 octobre 1984 qui garantissait la sécurité de l'emploi des agents publics; les nouvelles dispositions laissent sans aucune défense les 150.000 agents de l'Etat qui, quelle que soit leur ancienneté, deviennent des travailleurs précaires;
- - perquisitions du domicile et détentions illégales des dirigeants Héctor Alemán, Juan Antonio Samudio et Saúl Quiróz qui sont maintenus au secret pour le seul fait de défendre les intérêts des travailleurs;
- - détentions massives de dirigeants des associations et des comités de la FENASEP dans les provinces;
- - campagne de dénigrement menée par les médias gouvernementaux à l'encontre du dirigeant Héctor Alemán, dirigeant et conseiller du travail, sans que les accusations portées contre lui puissent être réfutées, étant donné que le droit de réponse n'est pas autorisé par le gouvernement.
- 426. La CISL poursuit en signalant que le mouvement syndical a été sérieusement affecté par la crise économique qui a réduit le nombre de ses membres et limité les ressources de ses organisations en les amenant au bord de l'asphyxie financière.
- 427. La CISL communique une liste des employés et des dirigeants syndicaux d'organismes publics et de leurs organisations qui ont été licenciés récemment. La liste compte plus de 1.700 travailleurs et quelque 90 dirigeants syndicaux, et elle énumère les pratiques de rétention de salaires, de retard dans le paiement de prestations, etc.
- 428. Dans sa communication du 29 août 1990, la CISL signale que, conformément aux informations transmises par le Syndicat national des travailleurs des produits de fibres textiles, du vêtement et du cuir de Panama (SINATRAPROFITECC), deux entreprises, la Greenbay Overseas International Inc. et la Jenny Manufacturing Inc., mènent des politiques discriminatoires et antisyndicales contre leurs salariés. Ces derniers mois, un grand nombre de travailleurs ont été licenciés de manière injustifiée, en violation du décret du cabinet no 10, du 12 janvier 1990, et du Code du travail panaméen, ainsi que des principes de la liberté syndicale. De plus, lesdites entreprises ont cherché à éviter que les travailleurs recourent auprès du ministère du Travail pour obtenir le respect de leurs droits.
- 429. La CISL ajoute que, le 27 avril 1990, Lourdes Salazar, secrétaire générale du Syndicat des travailleurs de l'entreprise Greenbay Overseas International Inc. - située dans la zone franche de Colón -, a été licenciée et chassée de son lieu de travail par le personnel de sécurité de l'entreprise et qu'elle n'a pas été réintégrée. De plus, le 16 mai 1990, le SINATRAPROFITECC a convoqué une assemblée générale des travailleurs de la Jenny Manufacturing Inc. au siège du syndicat, et ladite entreprise a imposé au personnel des heures supplémentaires pour l'empêcher d'assister à cette assemblée. Parmi les rares salariés qui ont pu participer à la réunion se trouvaient les chefs de la production, le chef du personnel et les employés administratifs qui ont pris la parole pour attaquer le syndicat et ses dirigeants. Des attaques similaires ont été lancées par voie de pamphlets, de bulletins et autres moyens de communication. La CISL conclut en indiquant que le syndicat n'a pas pu mettre en oeuvre un mouvement de protestation effectif parce que les entreprises intéressées exercent une pression constante et que, comme le ministère du Travail l'a indiqué au SINATRAPROFITECC, "les choses ne sont plus ce qu'elles étaient".
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 430. Dans sa communication du 30 août 1990, le gouvernement indique qu'à la suite des événements de décembre 1989 certains dirigeants syndicaux ont été détenus parce que pesait sur eux la présomption d'être impliqués dans des actes délictueux. Tel a été le cas des dirigeants Héctor Alemán, Juan Antonio Samudio, Saúl Quiróz et d'autres dirigeants de la Fédération nationale des agents publics (FENASEP) de l'intérieur du pays mentionnés par la confédération plaignante. Le gouvernement déclare qu'il n'y a pas de dirigeants syndicaux détenus dans le pays et qu'il présentera ultérieurement les preuves à décharge de chacune des violations alléguées de la liberté syndicale dont il est accusé.
- 431. Dans une communication ultérieure, en date du 5 février 1991, se référant aux allégations relatives à des pratiques gouvernementales qui auraient été préjudiciables aux agents publics, le gouvernement indique que le décret du cabinet no 1 du 26 décembre 1989 établissant l'organisation des services de l'Etat autorise les ministres d'Etat, les directeurs d'organismes autonomes, le procureur général de la nation et le procureur général de l'administration, le contrôleur général des comptes de la République, les gouverneurs, les maires et autres autorités supérieures à annuler les nominations des fonctionnaires qui, au cours des trente derniers mois et sous la protection de la dictature, se sont livrés à des actes de persécution, répression, menace, harcèlement, destruction et vol de la propriété publique et privée, importation ou trafic d'armes, ou qui, de quelque autre manière notoire, ont attenté à la dignité et aux droits de l'homme de leurs collègues de travail et d'autres citoyens panaméens ou étrangers. Le décret susmentionné contient un exposé des motifs très clair et déclare que son adoption est due à la manière alarmante avec laquelle, ces dernières années, les fonctionnaires, bien qu'ils aient l'obligation de respecter les garanties fondamentales reconnues à l'article 17 de la Constitution de la République du Panama pour protéger la vie, l'honneur et les biens des citoyens panaméens où qu'ils se trouvent et des étrangers résidant sur le territoire national, se sont attachés ostensiblement à porter atteinte à ces principes. De plus, les fonctionnaires protégés par le pouvoir autoritaire et dictatorial se sont voués à l'organisation de bandes paramilitaires comme les "CODEPADI" et les "bataillons de la dignité", et à d'autres activités terroristes, portant ainsi atteinte à l'organisation des institutions, à la paix et à la sécurité de leurs collègues de travail et allant jusqu'à détruire ou garder indûment par-devers eux des archives, documents, matériels et autres biens propriété de l'Etat. Le décret no 1 prend également en considération que l'article 295 de la Constitution nationale fait dépendre la sécurité de l'emploi du fonctionnaire de sa compétence, de sa loyauté et de sa moralité dans l'exercice de ses fonctions.
- 432. La communication du gouvernement signale encore qu'il faut relever que les fonctionnaires ne sont pas protégés par le Code du travail et ne jouissent pas de la sécurité de l'emploi depuis de nombreuses années, car le régime dictatorial avait aboli le service civil institué par les gouvernements de droit avant le coup d'Etat de 1968. Actuellement, les agents de l'Etat sont nommés et révoqués librement par l'organe exécutif, à l'exception de quelques-uns qui sont régis par des lois spéciales. A ce propos, le Code du travail établit ce qui suit:
- Article 2. Les dispositions du présent code sont d'ordre public et lient toutes les personnes, physiques ou morales, entreprises, exploitations et tous les établissements qui se trouvent ou s'établissent sur le territoire national.
- Les agents publics seront régis par les lois du service civil, sauf dans les cas où il est expressément prévu que leur sera appliquée une disposition du présent code.
- 433. Le gouvernement poursuit en indiquant que les licenciements de fonctionnaires n'ont pas été effectués de manière arbitraire et illégale comme l'affirme la CISL dans sa plainte. De plus, les fonctionnaires qui considèrent que leur licenciement était injustifié peuvent recourir aux voies légales pour présenter les réclamations qu'ils jugent bon; d'ailleurs, des procédures ont été engagées dans certains cas.
- 434. En ce qui concerne la détention de certains dirigeants syndicaux, le gouvernement indique que le procureur général a déclaré, dans la note DPG/2151 du 11 juin 1990, qu'il n'y a pas de dirigeants syndicaux détenus et que les autorités panaméennes n'ont ni perquisitionné ni fermé les locaux de la FENASEP.
- 435. Le gouvernement réfute en outre l'allégation selon laquelle le dirigeant syndical Héctor Alemán aurait été diffamé par les médias gouvermenentaux et qu'il n'aurait pas pu réfuter les accusations portées contre lui en raison des dispositions qui interdiraient le droit de réponse; il n'existe aucune disposition légale qui interdise le droit de réponse et, au contraire, le nouveau gouvernement a porté une attention particulière à la liberté d'expression finalement recouvrée après plus de vingt ans de contrôle absolu par la dictature. M. Alemán, malgré ses activités d'homme politique lié au régime déposé, jouit du climat de liberté que garantit le gouvernement démocratique.
- 436. Quant à la déclaration selon laquelle le mouvement syndical a été affecté par la crise économique, qui a réduit ses effectifs et limité les ressources des organisations au point de les conduire au bord de l'asphyxie financière, c'est là un fait que déplore le gouvernement qui fait justement tous ses efforts pour trouver des formules appropriées pour surmonter la crise qui touche non seulement le mouvement syndical, mais encore tous les secteurs du pays et qui est le résultat des multiples erreurs de gestion commises par la dictature, dont l'administration s'est caractérisée par la corruption et le mauvais usage des fonds publics.
- 437. Le gouvernement explique dans sa communication que, après le saccage et le vandalisme des CODEPADI et des "bataillons de la dignité" à la chute de la dictature dans le pays, plus de 250 établissements de commerce ont perdu tout ou partie de leurs actifs, laissant des milliers de travailleurs sans emploi, fait sans précédent dans l'histoire de la nation. Le nouveau gouvernement s'est évidemment penché en priorité sur la situation dramatique que présentaient les milliers de travailleurs dans les rues avoisinant le ministère du Travail et du Bien-être social, les lieux de travail saccagés et détruits et leurs propriétaires atterrés par la perte de leur commerce. La législation du travail reconnaît comme un juste motif pour mettre fin à la relation de travail, sans responsabilité de l'employeur, un cas fortuit ou de force majeure qui a comme conséquence nécessaire, immédiate et directe la paralysie définitive des activités de l'employeur. Devant cette situation, le ministère du Travail s'est employé immédiatement à prendre contact avec les parties pour trouver des formules d'accord encourageant les employeurs intéressés à affecter des ressources financières pour la reprise de leurs affaires et la réouverture de leurs établissements, et pour éviter ainsi le licenciement massif des travailleurs. A cet effet, les décrets nos 5 et 10, du 4 et du 12 janvier 1990, respectivement, ont été soumis à l'approbation du conseil de cabinet; ces textes prorogent les délais pour la suspension des effets des contrats de travail, font dépendre le licenciement pour le motif susmentionné de l'autorisation préalable du ministère du Travail et du Bien-être social, et exhortent les parties à négocier des accords temporaires sur les conditions de travail, sous réserve de l'approbation du ministère, afin de surmonter la situation critique sans avoir à supporter d'autres conséquences que celles dont pâtissent déjà les parties.
- 438. Le ministère du Travail et du Bien-être social, touché lui aussi dans ses installations, son matériel et son mobilier à la suite de la mise à sac et du vandalisme, comme aussi dans sa structure, par suite de l'indispensable changement de gouvernement, a concentré ses efforts sur la conciliation et la médiation entre les parties; il a d'ailleurs obtenu des résultats satisfaisants puisque, à présent, la majorité des établissements affectés ont rouvert leurs portes et occupent plus de 80 pour cent de leur personnel et que d'autres sont sur le point de reprendre leurs activités; quelques-uns restent dans l'incertitude quant à l'avenir, et le ministère s'occupe des travailleurs de ces derniers établissements pour ce qui est des prestations et des droits qui leur sont dus.
- 439. La CISL allègue, par ailleurs, que la Direction générale du travail fait obstacle aux activités syndicales en posant une série de conditions qui ne figurent pas à l'article 376 du Code du travail. A ce sujet, il faut préciser que la Direction générale du travail a commencé à demander aux syndicats et aux autres organisations sociales de mettre à jour la liste de leurs membres et que la plupart de ces organisations ont laissé passer le délai d'une année qui leur était imparti pour ce faire, conformément à l'article 376, no 30, susmentionné. Les données à fournir à l'effet d'identifier un membre d'une organisation sont: le nom, le numéro de la carte de membre, l'affiliation, l'entreprise dans laquelle il est occupé et le numéro d'assurance sociale. Le seul but de cette mesure est de mettre à jour la liste des membres des organisations sociales, et non pas de faire obstacle aux activités syndicales.
- 440. Dans des allégations formulées ultérieurement, la CISL a communiqué des informations transmises par le Syndicat national des travailleurs des produits de fibre textile, du vêtement et du cuir de Panama (SINATRAPROFITECC), selon lesquelles les entreprises Greenbay Overseas International Inc. et Jenny Manufacturing Inc. pratiquent des politiques discriminatoires et antisyndicales. En ce qui concerne Greenbay Overseas International Inc., le gouvernement informe que les travailleurs ont présenté au Département des organisations sociales du ministère, le 2 mars 1990, une demande pour se constituer en syndicat et, comme ils ne satisfaisaient pas aux conditions formelles posées par la loi, leur demande a été refusée et ils ont reçu le 2 avril 1990 communication de la décision qui les a privés au même moment du droit syndical. A la fin du mois d'avril, sept travailleurs qui faisaient partie du comité directeur provisoire ont été licenciés, mais à cette date ils ne jouissaient pas de l'immunité syndicale. Par la suite, et avant l'engagement des procédures respectives, six ont été réintégrés. Le 23 mai 1990, une autre demande a été déposée en vue de constituer un syndicat et elle a fait l'objet d'observations dont il aurait fallu tenir compte en l'espace de trente jours. Le 22 juin, la décision a été communiquée, conformément au délai prévu par la loi et, une nouvelle fois, le 9 juillet, une autre demande a été déposée. Il convient de signaler qu'après avoir reçu la demande les documents suivants ont été joints à la communication:
- - 21 renonciations de membres du syndicat en formation, avec photocopie de la carte de membre de chacun, quelques-unes ayant été présentées personnellement par les travailleurs;
- - 3 renonciations de membres du comité directeur;
- - 1 consentement mutuel;
- - 2 autorisations de licenciement acceptées par le second tribunal du travail;
- - des signatures de travailleurs qui manifestaient leur désaccord avec le syndicat et la proposition de constituer une coopérative dans l'entreprise;
- - 1 demande d'un groupe de travailleurs en faveur de la tenue d'un vote.
- 441. Le gouvernement indique que, face aux irrégularités observées, il a été décidé de procéder à un vote, comme une mesure saine visant à déterminer le nombre de travailleurs qui désiraient constituer un syndicat. Le vote a eu lieu le 7 août 1990 après les renonciations et autres documents présentés, et il s'est déroulé de manière objective. Les bulletins ont été distribués individuellement et l'on a expliqué la procédure consistant à écrire son nom et le numéro de sa carte de membre en indiquant si l'on désirait ou non un syndicat. Le vote s'est déroulé en ordre parfait, sans pression, intimidation ou incident. Il n'y a eu ni tracasserie ni crainte de la part des travailleurs. Le résultat du vote a été le suivant:
- 361 ont déclaré ne pas vouloir de syndicat, 48 ont remis un bulletin blanc, 67 ont exprimé leur désir de constituer une coopérative, bien qu'il leur ait été dit que ce point ne faisait pas partie du vote.
- Sur les 69 qui ont voté en faveur d'un syndicat, seuls huit étaient affiliés au syndicat en formation UNTRAPROFITECC. Parmi les personnes qui ont voté "oui", quelques-unes figurent sur la liste d'autres syndicats et non de l'UNTRAPROFITECC.
- 442. En ce qui concerne les licenciements qui ont eu lieu à Jenny Manufacturing Inc., le gouvernement informe que, aux termes de la décision 194 DT 90, la Direction générale du travail a ordonné à l'entreprise de réintégrer les travailleurs et de leur verser leur salaire. Cependant, l'employeur a fait observer que cette procédure était inconstitutionnelle, raison pour laquelle le dossier a été envoyé à la Cour suprême le 4 septembre 1990.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 443. Le comité observe que les allégations présentées dans ce cas concernent des événements qui se situent dans le contexte du changement de régime intervenu dans des circonstances exceptionnelles en décembre 1989. Les allégations se réfèrent à des harcèlements et des pressions de la part du gouvernement contre les agents publics, par voie de menaces, détentions, répressions, perquisitions et fermetures de locaux syndicaux et au licenciement injustifié de dirigeants syndicaux du secteur public, fondé sur un décret du cabinet. En outre, d'autres allégations dans ce cas se réfèrent aux politiques discriminatoires et antisyndicales de deux entreprises situées dans la zone franche de Colón.
- 444. Le comité prend note des informations détaillées communiquées par le gouvernement sur les allégations présentées dans ce cas.
- 445. Pour ce qui est de l'allégation selon laquelle il existe des pratiques gouvernementales qui portent atteinte aux droits syndicaux des travailleurs du secteur public par des licenciements massifs de travailleurs et de dirigeants syndicaux de ce secteur, fondés sur le décret du cabinet no 1, le comité demande au gouvernement de lui communiquer des informations précises pour lui permettre d'évaluer si ces licenciements ont été motivés ou non par les activités ou les fonctions syndicales des fonctionnaires concernés.
- 446. En ce qui concerne les allégations relatives aux menaces contre les dirigeants syndicaux, aux perquisitions et à la fermeture de locaux syndicaux et aux campagnes présumées d'intimidation contre les associations d'agents publics, le comité rappelle que les droits syndicaux ne peuvent s'exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces de toutes sortes à l'encontre des syndicalistes et qu'il appartient aux gouvernements d'assurer le respect de ce principe. (Voir à ce sujet le 234e rapport, cas no 1237 (Brésil), paragr. 213.) En outre, en ce qui concerne la perquisition des locaux syndicaux, il rappelle au gouvernement que la résolution concernant les droits syndicaux et leurs relations avec les libertés civiles, adoptée par la Conférence internationale du Travail à sa 54e session (1970), dispose que le droit à une protection adéquate des biens des syndicats constitue l'une des libertés civiles essentielles à l'exercice normal des droits syndicaux.
- 447. En ce qui concerne la détention des dirigeants syndicaux Héctor Alemán, Juan Antonio Samudio et Saúl Quiróz et d'autres dirigeants de la FENASEP à l'intérieur du pays, le comité prend note des informations du gouvernement selon lesquelles, à la suite des faits survenus en décembre 1989, plusieurs dirigeants syndicaux ont été détenus parce que pesait sur eux la présomption d'être impliqués dans des faits délictueux, mais qu'il n'existe plus actuellement de dirigeants syndicaux détenus. A ce propos, le comité tient à rappeler que la détention de dirigeants syndicaux, sans qu'aucun délit spécifique soit retenu contre eux et même si c'est pour une courte période, constitue une entrave à l'exercice des droits syndicaux. (Voir à ce sujet, par exemple, le 217e rapport, cas no 1031 (Nicaragua), paragr. 120.)
- 448. En ce qui concerne l'allégation selon laquelle deux entreprises de la zone franche industrielle de Colón - la Greenbay Overseas International Inc. et la Jenny Manufacturing Inc. - pratiquent la discrimination antisyndicale, empêchent la tenue de réunions syndicales et mènent une campagne contre les syndicats des entreprises et selon laquelle la dirigeante syndicale Lourdes Salazar a été licenciée et enlevée de force de son lieu de travail, le comité prend note des explications fournies par le gouvernement à ce sujet et en particulier sur le vote qui a eu lieu dans l'une de ces entreprises. Le comité considère que ce système de vote en lui-même n'est pas contraire aux principes de la liberté syndicale. Il rappelle néanmoins que les formalités prévues dans les législations pour constituer un syndicat ne doivent pas être appliquées de manière à retarder ou à empêcher la formation d'organisations, comme cela est apparemment arrivé avec la demande de constitution présentée par le syndicat en formation de l'entreprise Greenbay Overseas, ce qui a eu pour résultat le licenciement des sept membres du comité directeur provisoire dudit syndicat qui n'ont pas pu bénéficier de la protection du droit syndical.
- 449. Tout en notant que six des sept dirigeants licenciés ont été réintégrés, le comité demande au gouvernement de le tenir informé des faits qui ont conduit au licenciement de la dirigeante syndicale Lourdes Salazar et de lui faire savoir si elle a été réintégrée dans son poste de travail ou si elle a engagé une procédure judiciaire à cet effet. Il demande également au gouvernement de le tenir informé du résultat des actions judiciaires en réintégration engagées par les travailleurs licenciés de la Jenny Manufacturing Inc. et de la demande d'inconstitutionnalité interjetée par ladite entreprise le 4 septembre 1990.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 450. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité observe que les allégations présentées dans le présent cas concernent des événements qui se situent dans le contexte du changement de régime intervenu, dans des circonstances exceptionnelles, en décembre 1989.
- b) En ce qui concerne les allégations de licenciement massif dans le secteur public, le comité demande au gouvernement de lui communiquer des informations précises pour lui permettre d'évaluer si ces licenciements ont été motivés ou non par les activités ou les fonctions syndicales des fonctionnaires concernés.
- c) En ce qui concerne les allégations relatives aux menaces proférées contre des dirigeants syndicaux, à la perquisition et à la fermeture de locaux syndicaux et à des campagnes présumées d'intimidation contre les associations d'agents publics, le comité rappelle que les droits syndicaux ne peuvent s'exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces de toutes sortes à l'encontre des syndicalistes et qu'il appartient aux gouvernements d'assurer le respect de ce principe. De plus, en ce qui concerne la perquisition effectuée dans des locaux syndicaux, il rappelle que la résolution concernant les droits syndicaux et leurs relations avec les libertés civiles, adoptée par la Conférence internationale du Travail à sa 54e session (1970), énonce que le droit à une protection adéquate des biens des syndicats constitue l'une des libertés civiles essentielles à l'exercice normal des droits syndicaux. En conséquence, le comité invite instamment le gouvernement à appliquer pleinement ces principes.
- d) En ce qui concerne le licenciement et l'expulsion forcée de son poste de travail de la dirigeante syndicale Lourdes Salazar, le comité demande au gouvernement de l'informer des faits qui ont conduit au licenciement de ladite dirigeante et de lui faire savoir si elle a été réintégrée dans son poste de travail ou si elle a engagé une action judiciaire à cet effet. De même, il demande à être informé du résultat des actions en réintégration engagées par les travailleurs licenciés de la Jenny Manufacturing Inc. et de la suite donnée à la demande d'inconstitutionnalité présentée par ladite entreprise le 4 septembre 1990.
- e) Quant aux allégations de pratique de discrimination antisyndicale, d'empêchement mis à la tenue de réunions syndicales d'un syndicat en formation et de campagnes antisyndicales, le comité rappelle que les formalités prescrites par la loi pour créer un syndicat ne doivent pas être appliquées de manière à retarder ou à empêcher la formation des organisations professionnelles, comme cela est apparemment arrivé avec la demande de constitution présentée par le syndicat en formation à la Greenbay Overseas, ce qui a abouti au licenciement des sept membres du comité directeur provisoire dudit syndicat qui n'ont pas pu bénéficier de la protection du droit syndical.