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Informe en el que el Comité pide que se le mantenga informado de la evolución de la situación - Informe núm. 304, Junio 1996

Caso núm. 1837 (Argentina) - Fecha de presentación de la queja:: 09-MAY-95 - Cerrado

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40. Les plaintes faisant l'objet du présent cas figurent dans une communication de la Confédération mondiale du travail (CMT) du 9 mai 1995, dans une communication conjointe du Congrès des travailleurs argentins (CTA) et de l'Association des travailleurs de l'Etat (ATE) de juin 1995, et dans une communication de la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) du 26 juillet 1995. Des informations complémentaires ont été transmises par la CLAT dans une communication du 31 août 1995 et par le CTA et l'ATE dans une communication conjointe du 18 octobre 1995. Le gouvernement a présenté ses observations dans des communications des 23 novembre et 26 décembre 1995 et 14 février et 17 mai 1996.

  1. 40. Les plaintes faisant l'objet du présent cas figurent dans une communication de la Confédération mondiale du travail (CMT) du 9 mai 1995, dans une communication conjointe du Congrès des travailleurs argentins (CTA) et de l'Association des travailleurs de l'Etat (ATE) de juin 1995, et dans une communication de la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) du 26 juillet 1995. Des informations complémentaires ont été transmises par la CLAT dans une communication du 31 août 1995 et par le CTA et l'ATE dans une communication conjointe du 18 octobre 1995. Le gouvernement a présenté ses observations dans des communications des 23 novembre et 26 décembre 1995 et 14 février et 17 mai 1996.
  2. 41. L'Argentine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

A. Allégations des plaignants
  1. 42. Après s'être référé à la diminution progressive de l'emploi dans la province de la Terre de Feu (en 1994, un quart des travailleurs de la métallurgie ont perdu leur emploi), les plaignants allèguent qu'en 1995 la majorité des entreprises des villes d'Ushuaia et de Rio Grande ont licencié ou menacé de fermer, et que l'usine de fabrication de téléviseurs Continental Fueguina a licencié une grande partie de son personnel en mars 1995, ce qui a soulevé des protestations de sa part. En février 1995, les ouvriers et employés de la province de la Terre de Feu ont organisé une manifestation au cours de laquelle ils ont bloqué la route no 3. Ils voulaient ainsi obtenir du gouverneur de la province qu'il leur accorde une entrevue afin de lui exposer leurs problèmes; celui-ci ne les a pas reçus.
  2. 43. Les plaignants ajoutent que, le 11 avril 1995, les travailleurs de l'entreprise Continental Fueguina (ville d'Ushuaia) qui, pour protester contre les 200 licenciements effectués sans indemnisation, occupaient les locaux de l'entreprise, en ont été violemment expulsés par la police. Le Front des syndicats des agents de l'Etat, les sections des syndicats locaux et l'Union ouvrière de la métallurgie (UOM), appuyés au niveau national par le Mouvement des travailleurs argentins (MTA) et par le Congrès des travailleurs argentins (CTA), ont décidé de déclencher une grève générale le 24 avril 1995. Les manifestations ont fait un mort, M. Víctor Choque, le 12 avril 1995 et des dizaines de blessés, parmi lesquels Juan Roberto Vera et Alejandro Vásques, membres de l'Association des travailleurs de l'Etat (ATE/CLAT). Leurs blessures étaient dues à l'impact de balles de caoutchouc et aux coups reçus. La personne décédée des suites d'une balle reçue dans la tête était un ouvrier du bâtiment âgé de 37 ans. D'après les plaignants, il ressort clairement des témoignages de personnes présentes à cette manifestation et des images filmées que les autorités ont usé de violence et n'ont pas hésité à tirer dans la foule, à un mètre de distance. Les policiers tiraient systématiquement à partir de la rue, mais aussi depuis un véhicule (el "colectivo salvaje", comme les manifestants l'ont appelé), à l'abri duquel ils tiraient sur tout ce qui bougeait. Les plaignants joignent un rapport de la Commission d'enquête du Parlement sur ces événements ainsi qu'une vidéo cassette sur lesdits événements.
  3. 44. Par ailleurs, les plaignants affirment que, dans la province de San Juan, les agents de l'Etat ont organisé une grève de la faim pour protester contre les mesures d'ajustement prises par les autorités de la province. Alors que cette grève durait déjà depuis plus de quatre jours, M. Eloy Camus, secrétaire général de l'Association des travailleurs de l'Etat (ATE), a décidé d'aller chercher chez lui des couvertures pour ses compagnons. Il a été intercepté par quatre personnes qui l'ont frappé, jeté dans un véhicule et séquestré pendant plusieurs heures, au cours desquelles il a été torturé, notamment brûlé avec des cigarettes sur diverses parties du corps. Après avoir reçu un coup de feu à la jambe, il a été poussé hors du véhicule à une cinquantaine de mètres de l'endroit où avait lieu la grève de la faim. Les auteurs de ces actes n'ont à ce jour pas été identifiés, malgré la plainte déposée par la victime.
  4. 45. Par ailleurs, les plaignants indiquent que, dans la province de Corrientes, le 24 avril 1995, l'Institut de prévoyance sociale de cette province, en vertu de divers décrets, a mis en disponibilité 39 travailleurs. Le personnel a alors appelé à une grève de durée indéterminée sur le lieu de travail. Le 27 avril, des agents de l'Etat ont manifesté devant les portes de l'institut par solidarité avec les personnes licenciées. Les manifestants ont été violemment agressés par la police. Le secrétaire de l'ATE/CLAT (Corrientes), M. Juan González, a été frappé à coups de poings et de pieds puis arrêté avec d'autres dirigeants syndicaux. Il a été conduit arbitrairement au commissariat no 1 où il est resté pendant cinq heures sans pouvoir communiquer avec personne. Il a été inculpé pour "coups et blessures, résistance et atteinte à l'autorité".
  5. 46. En conclusion et sur un plan général, les plaignants ont exprimé leur préoccupation de ce que des manifestations et autres voies légitimes d'action syndicale donnent lieu à des poursuites contre des syndicalistes qui, à des fins d'intimidation, sont accusés de "délits" divers. Ils ont estimé que cela réduit la marge d'action des organisations syndicales qui souhaitent manifester leur désaccord avec les politiques d'ajustement.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 47. Dans ses communications des 23 novembre et 26 décembre 1995, 14 février et 17 mai 1996, le gouvernement déclare que, d'après les réponses reçues des trois gouvernements provinciaux concernés, il semblerait que dans tous les cas les faits allégués soient liés à des délits de droit commun qui sont en cours d'instruction devant les juridictions compétentes. Le gouvernement déclare disposer actuellement d'éléments suffisants pour réaffirmer sa position selon laquelle il ne s'agit nullement d'une situation attentatoire à la convention no 87 sur la liberté syndicale ni d'une bavure policière qui aurait dégénéré en une répression indiscriminée mais seulement d'événements ponctuels regrettables survenus dans des circonstances très spéciales et qui font l'objet d'investigations judiciaires.
  2. 48. En ce qui concerne la mort de M. Víctor Choque, le gouvernement indique que le juge d'instruction de la province de la Terre de Feu a entamé des poursuites contre l'officier de police principal auteur présumé du délit d'homicide c'est-à-dire auteur présumé du coup de feu qui a tué M. Choque. Il ressort des informations transmises par le gouverneur de la province que l'acte incriminé s'inscrit dans un ensemble de faits qualifiés de délits (usurpation, dommages, outrage, coups et blessures, etc.) qui relèvent du droit pénal commun, et qu'il ne s'agit en aucun cas d'une violation de la convention no 87 de l'OIT. D'après les éléments du dossier, la mort de Víctor Choque est survenue le 12 avril 1995 lorsqu'un groupe a commencé à tirer des pierres -- on a dit une pluie de pierres -- contre le commissariat où était détenu sur mandat judiciaire et non policier un groupe de personnes depuis le 11 avril 1995. Le gouvernement manifeste sa surprise face aux inexactitudes et aux omissions faites par les plaignants dans leur présentation. De manière générale, ils ont omis de présenter le contexte dans lequel les faits se sont déroulés. Le gouvernement exprime sa profonde préoccupation de voir que des thèmes d'une telle délicatesse aient été abordés avec autant d'inexactitudes et de partialité.
  3. 49. Quant aux événements de la province de Corrientes, le gouverneur a signalé que la justice de la province, la juridiction d'instruction no 2 de la première circonscription, instruit deux plaintes: l'une déposée par Juan Alfredo González, pour privation illégitime de liberté, abus d'autorité et dommages, le procès est en cours d'instruction, et l'autre par la police provinciale contre Juan Alfredo González et autres, pour coups et blessures, résistance et atteinte à l'autorité. La police a indiqué que, le 27 avril 1995, un cordon de sécurité a été mis en place à l'Institut de prévoyance sociale afin d'éviter que la présence de haut-parleurs et de manifestations empêche le déroulement des activités. Il s'en est suivi que M. Vera (chef des opérations), qui se trouvait sur place, a demandé à M. González et à M. Gustidiano, de cesser de faire usage de haut-parleurs, et qu'il a été l'objet en réponse d'une attitude d'hostilité et de coups de la part des intéressés. Il ressort de l'enquête que dans leurs déclarations MM. González et Gustidiano nient les faits et affirment qu'ils ont été agressés. Le gouvernement joint le rapport médico légal d'où il appert que M. Gustidiano se réfère seulement à une douleur, mais qu'il n'y a pas de signe extérieur d'agression alors que M. González a refusé d'être examiné. En somme, les versions sont contradictoires dans un contexte qui ne semble pas s'être déroulé dans une ambiance hostile de persécution, sauf si on veut considérer ainsi la demande policière de faire cesser l'usage d'un haut-parleur. Les deux affaires sont en cours d'examen et, comme pour le cas précédent, il semblerait aussi qu'il s'agit de délits de droit commun qui n'ont rien à voir avec la liberté syndicale.
  4. 50. En ce qui concerne la séquestration présumée de M. Camus, le gouverneur de la province de San Juan indique que, dès réception de la plainte par la police provinciale, une enquête a été ouverte. Toutefois, le juge chargé de l'affaire ne dispose que des déclarations de M. Camus et, qui plus est, il est difficile de déterminer si ce sont des problèmes personnels de M. Camus ou des dissensions syndicales internes qui en sont à l'origine. L'affaire fait l'objet d'une procédure secrète. A en juger par les informations relatives à ce troisième cas, il n'existe -- pour le moment -- aucun élément indiquant que les faits faisant l'objet de l'enquête ont à voir avec une violation de la liberté syndicale.
  5. 51. Enfin, le gouvernement indique que l'Argentine est régie par des institutions pleinement démocratiques, que les trois pouvoirs de l'Etat républicain s'y exercent librement et que, en conséquence, le mouvement syndical y jouit des droits qui lui sont normalement et habituellement reconnus, y compris le droit de grève. Par conséquent, les faits incriminés doivent être considérés comme des faits isolés relevant du droit pénal et non du droit international du travail, ni d'une violation à la liberté syndicale.
  6. 52. Le gouvernement déclare qu'il continuera à tenir le comité informé de l'évolution des procédures judiciaires.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 53. Le comité observe que, dans le présent cas, les organisations plaignantes font état de la répression violente par les autorités de manifestations ou de grèves, d'agressions perpétrées contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes dans l'entreprise Continental Fueguina (province de la Terre de Feu), où est mort l'ouvrier Víctor Choque, et à l'Institut de prévoyance sociale (province de Corrientes); elles font état aussi des agressions perpétrées, dans la province de San Juan, contre M. Eloy Camus, secrétaire général de l'Association des travailleurs de l'Etat, qui a été séquestré et torturé pendant quatre heures par quatre inconnus à l'occasion d'une grève de la faim, et, dans la province de Corrientes, contre M. Juan González, secrétaire de l'Association des travailleurs de l'Etat, qui a été détenu pendant cinq heures.
  2. 54. Le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles: 1) dans tous les cas, les faits incriminés sont liés à des délits de droit commun qui font l'objet d'une enquête par les autorités judiciaires et qu'il ne s'agit pas de situations attentatoires à la convention no 87; 2) des poursuites ont été engagées contre l'auteur présumé du coup de feu qui a causé la mort de l'ouvrier Víctor Choque; 3) cet acte s'inscrit dans un ensemble de faits qualifiés de délits, et la mort en question s'est produite alors qu'un groupe de personnes jetait des pierres contre le commissariat, où se trouvaient détenues d'autres personnes sur mandat judiciaire (coups et blessures, dommages, outrage, etc.); 4) la police de la province de Corrientes a porté plainte contre le syndicaliste Juan Alfredo González pour coups et blessures, résistance et atteinte à l'autorité; ce syndicaliste et d'autres ont présenté à leur tour une plainte qui est en cours d'instruction; 5) en ce qui concerne le syndicaliste Eloy Camus, on ne sait si sa séquestration a été motivée par des problèmes d'ordre personnel ou par des problèmes syndicaux internes; le procès fait l'objet d'une procédure secrète.
  3. 55. Le comité déplore profondément le décès de l'ouvrier Víctor Choque et les actes de violence qui ont été perpétrés pendant les manifestations et les grèves organisées dans les provinces de la Terre de Feu et de Corrientes; et il tient à faire remarquer que le gouvernement, même s'il affirme qu'au cours de ces actions syndicales des faits qualifiés de délits ont été retenus contre des syndicalistes (des poursuites ont été engagées contre Juan Alberto González), ne nie pas les allégations selon lesquelles la police a tiré de façon indiscriminée contre les travailleurs dans la province de la Terre de Feu et qu'il existe des versions contradictoires sur les allégations relatives aux agressions qui auraient été perpétrées contre des manifestants dans la province de Corrientes. Dans ces conditions, le comité signale à l'attention du gouvernement que "les autorités ne devraient avoir recours à la force publique que dans des situations où l'ordre public serait sérieusement menacé. L'intervention de la force publique devrait rester proportionnée à la menace pour l'ordre public qu'il convient de contrôler, et les gouvernements devraient prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées en vue d'éliminer le danger qu'impliquent les excès de violence lorsqu'il s'agit de contrôler des manifestations qui pourraient troubler l'ordre public." (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 137.) Le comité demande au gouvernement de donner des instructions aux forces de police pour qu'à l'avenir des manifestations syndicales puissent se dérouler sans donner lieu à des mesures disproportionnées ni à des excès de violence. Le comité demande aussi au gouvernement de le tenir informé de l'évolution des poursuites engagées devant les tribunaux à la suite des violences qui se sont produites au cours des manifestations et des grèves organisées dans les provinces de la Terre de Feu, de Corrientes et de San Juan, particulièrement en ce qui concerne le décès de l'ouvrier Víctor Choque, les blessures infligées aux syndicalistes Juan Roberto Vera et Alejandro Vasques, les agressions et la privation de liberté dont ont été victimes les dirigeants syndicaux Eloy Camus et Juan González. Tout en notant les explications du gouvernement, le comité ne peut qu'exprimer sa préoccupation qu'au moins trois syndicalistes ont été victimes d'actes de violence. Il souligne que la protection des droits syndicaux exige que des enquêtes déterminent les responsabilités et conduisent à sanctionner les coupables. Il demande au gouvernement de le tenir informé des suites données à la plainte déposée devant les autorités judiciaires par la police contre ce dernier dirigeant.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 56 Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Déplorant profondément la mort de l'ouvrier Víctor Choque et les actes de violence qui ont été perpétrés pendant les manifestations et les grèves organisées dans les provinces de la Terre de Feu et de Corrientes, le comité demande au gouvernement de donner des instructions aux forces de police pour qu'à l'avenir des manifestations syndicales puissent se dérouler sans donner lieu à des mesures disproportionnées ni à des excès de violence.
    • b) Le comité demande aussi au gouvernement de le tenir informé de l'issue des poursuites engagées devant les tribunaux à la suite des violences qui se sont produites pendant les manifestations et les grèves dans les provinces de la Terre de Feu, de Corrientes et de San Juan, en ce qui concerne notamment le décès de l'ouvrier Víctor Choque, les blessures infligées aux syndicalistes Juan Roberto Vera et Alejandro Vasques, les agressions et la privation de liberté dont ont été victimes les dirigeants syndicaux Eloy Camus et Juan González. Le comité souligne que la protection des droits syndicaux exige que des enquêtes déterminent les responsabilités et conduisent à sanctionner les coupables.
    • c) Enfin, le comité demande également au gouvernement de le tenir informé des suites données à la plainte déposée par la police devant les autorités judiciaires contre le dirigeant syndical Juan González.
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