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- 779. La plainte figure dans une communication de la Centrale syndicale des travailleurs de l'Etat paraguayen (CESITEP) en date du 16 juin 1999. La CESITEP a fait parvenir des informations complémentaires par une communication du 12 juillet 1999. L'Internationale des services publics s'est jointe à cette plainte par une communication du 21 juin 1999. Le gouvernement a transmis ses observations dans des communications des 16 juin et 13 octobre 2000.
- 780. Le Paraguay a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (nº 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des plaignants
A. Allégations des plaignants- 781. Dans sa communication du 16 juin 1999, la Centrale syndicale des travailleurs de l'Etat paraguayen (CESITEP) affirme que le ministère de la Santé publique et du Bien-être social n'a pas respecté la convention collective du travail qu'il avait signée le 23 avril 1998 avec le syndicat des travailleurs de ce ministère et qui avait été ratifiée par un acte de compromis et homologuée par le ministère de la Justice et du Travail. Le ministre de la Santé n'a jamais répondu aux demandes formulées par les travailleurs en vue de l'exécution de cette convention et il a même enfreint le décret réglementaire no 6109 du Code de la santé qui définit la carrière administrative à l'intérieur du ministère de la Santé; il ne respecte pas non plus le tableau d'avancement puisqu'il ne reclasse que les fonctionnaires d'une spécialité donnée, et non les autres, et ne permet pas au syndicat, malgré les dispositions de la convention collective, de participer à l'établissement des listes de classification des traitements. Les actes graves de discrimination antisyndicale qui existent au sein de ce ministère ont pu récemment être constatés lorsqu'il a refusé que l'organisation syndicale prélève les cotisations d'assurance médicale alors qu'il a accepté de le faire pour des caisses privées d'assurance médicale.
- 782. L'organisation plaignante affirme également que le compromis signé le 5 mai 1999 par le gouvernement, représenté par le ministre de la Justice et du Travail, et la Centrale syndicale des travailleurs n'a pas été respecté. Ce texte reconnaît notamment la dette du gouvernement à l'égard de l'Institut d'assurance médico-sociale pour les travailleurs de l'Etat (ISMSTE) et définit les modalités de son remboursement. L'ISMSTE est une organisation de travailleurs qui fournit une assistance médico-sociale aux membres de la CESITEP.
- 783. La CESITEP affirme également que ses dirigeants font l'objet d'actes de persécution antisyndicale de la part du gouvernement. Plus précisément, elle indique que le gouvernement brandit des menaces de représailles, par exemple menace de dissoudre l'organisation en "révisant" la décision no 145/99 par laquelle le syndicat a été enregistré et de licencier son président, M. Barreto Medina (de fait, il ne perçoit plus son salaire depuis décembre 1998).
- 784. Dans sa communication du 12 juillet 1999, la CESITEP affirme que le ministère de la Santé publique et du Bien-être social s'est rendu coupable d'autres actes de discrimination antisyndicale, notamment:
- - la mutation de Mme Magdalena Duarte et de M. William José Ledesma Acuña, dirigeants syndicaux membres du comité directeur du Syndicat de l'Hôpital des urgences médicales;
- - le refus de la direction générale de l'administration de recevoir les listes relatives au précompte de la cotisation syndicale du Syndicat des travailleurs du ministère de la Santé publique et du Bien-être social (SITRAMIS);
- - le licenciement de trois dirigeants syndicaux, à savoir Mme Blanca Alvarez et MM. Darío Matiauda et Rigoberto Gómez.
B. Réponses du gouvernement
B. Réponses du gouvernement- 785. Dans une première communication du 16 juin 2000, le gouvernement nie que le ministère de la Santé publique et du Bien-être social enfreint la convention collective du travail (il indique que le reclassement des fonctionnaires a commencé de manière progressive et que les sommes correspondant à l'assurance médicale ont été versées). Il nie aussi avoir enfreint le texte de compromis du 5 mai 1999.
- 786. Le gouvernement ajoute aussi que rien n'indique que le président de la CESITEP soit menacé de licenciement ni que ses traitements aient cessé de lui être versés. M. Barreto Medina n'est pas venu percevoir son traitement des mois de mars, septembre, octobre et décembre 1998, pas plus que ses étrennes. En revanche, il a perçu son traitement des mois de janvier et février 1999. Il n'est pas venu percevoir son traitement des mois de mars, avril et mai 1999.
- 787. Dans une communication ultérieure du 13 octobre 2000, le gouvernement explique, à propos du précompte de la cotisation au SITRAMIS, que la direction administrative du ministère de la Santé publique et du Bien-être social a procédé à ce précompte et que les représentants du SITRAMIS ont perçu les sommes correspondantes. Ce précompte n'a jamais été suspendu.
- 788. En ce qui concerne la mutation de deux dirigeants syndicaux, Mme Magdalena Duarte et M. William José Ledesma, de l'Hôpital des urgences médicales, le gouvernement explique qu'après l'ouverture le 24 juin 1999 du Centre des urgences médicales Prof. Dr. Luis María Argaña, à Asunción, l'ancien Hôpital des premiers secours a dû déménager. Ce changement a obligatoirement entraîné la redistribution des ressources humaines en vue de leur utilisation optimale, conformément aux besoins des différents services. Pour cette raison, le directeur général du Centre des urgences médicales a mis à la disposition de la Direction générale des ressources humaines, le 8 juillet 1999, William Ledesma et Magdalena Duarte. Ensuite, par décision du 2 août 1999, M. William José Ledesma Acuña a été transféré de la Direction générale des ressources humaines à l'hôpital du district de Lambaré, conformément à la demande formulée par la direction de cette institution, dans lequel il devait s'occuper de la perception des recettes puisqu'il était impossible de recruter du personnel supplémentaire ayant l'expérience de ces fonctions et que M. William Ledesma les exerçait précédemment aux urgences médicales. Le transfert de M. Ledesma a un caractère temporaire.
- 789. S'agissant de la mutation de Mme Magdalena Salvadora Duarte, le gouvernement indique que, vu le manque de ressources humaines dans le domaine des soins infirmiers et l'insuffisance des ressources budgétaires nécessaires pour recruter, la Direction générale des ressources humaines a décidé, le 9 août 1999, de muter cette personne à l'hôpital de santé materno-infantile de la Santísima Trinidad, hôpital qui se trouve à proximité de son domicile. Cette mutation n'a rien d'antisyndical et s'explique par des raisons de service.
- 790. Sur un plan plus général, le gouvernement affirme, à propos de ces mutations, que, en 1999, le budget général des dépenses de la nation a accordé au ministère de la Santé des ressources très modestes pour les recrutements; il a donc fallu redéployer les ressources humaines étant donné que, dans diverses institutions, le manque de personnel entraînait de graves problèmes. Les mutations ou détachements en question n'ont pas été les seuls et, dans aucun de ces cas, il n'a été imposé aux personnes transférées d'exercer des fonctions hiérarchiquement inférieures ni de changer d'environnement. Elles n'ont donc pas subi de préjudice puisqu'il ne leur a pas été interdit d'exercer leur activité syndicale.
- 791. En ce qui concerne Mme Blanca Alvarez, fonctionnaire du ministère des Relations extérieures, le gouvernement explique que cette personne a été démise de ses fonctions, par décision no 12550/96, à la suite d'une enquête administrative (cette enquête avait conclu à des fautes graves - usage non autorisé de locaux et biens du ministère, manque d'assiduité, manque de respect et insulte à des supérieurs hiérarchiques). L'autorité judiciaire a modifié la décision no 12550 en ordonnant la suspension sans traitement de cette fonctionnaire pendant 90 jours. Actuellement, le dossier se trouve entre les mains du Procureur général de la République.
- 792. En ce qui concerne M. Darío Matiauda, fonctionnaire du ministère de la Santé publique et du Bien-être social, le gouvernement explique que cette personne a été démise de ses fonctions à la suite d'une enquête, puis réintégrée par décision no 4007 du 7 juillet 1999. Ultérieurement, M. Matiauda a demandé deux congés de trois mois sans traitement. Ces congés lui ont été accordés par la décision no 2414 du 27 octobre 1999 et par la décision no 1460 du 5 juin 2000.
- 793. En ce qui concerne M. Rigoberto Gómez Rivas, le gouvernement explique qu'il a été démis de ses fonctions à la suite d'une enquête par la décision no 1586 du 6 janvier 1999 pour s'être rendu coupable de la faute prévue à l'article 52, paragraphe 10, de la loi no 200/70 (non-exécution de ses obligations).
- 794. Le gouvernement déclare que rien n'indique que l'organisation syndicale CESITEP ait été menacée de dissolution par révision de la décision no 145/99. En ce qui concerne l'allégation de non-paiement de l'assurance médicale, le gouvernement précise que l'avocat du Trésor public a émis l'avis no 665 du 1er juin 1999 à l'encontre de la CESITEP; le juge, saisi de cette affaire par la CESITEP, a prononcé l'arrêt définitif no 362 le 15 juin 1999. Cet avis et cet arrêt expliquent le paiement de l'assurance médicale directement aux travailleurs de l'Etat.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 795. Le comité note que, dans le cas présent, l'organisation plaignante présente les allégations suivantes: i) le non-respect par le ministère de la Santé publique et du Bien-être social des obligations énoncées dans une convention collective et dans un acte de compromis; ii) le refus de ce ministère de permettre à l'organisation syndicale le précompte des cotisations d'assurance médicale; iii) les menaces de dissolution de l'organisation syndicale CESITEP et de licenciement de M. Barreto Medina, président de ce syndicat (auquel son traitement n'aurait pas été payé depuis décembre 1998); iv) la mutation de deux dirigeants syndicaux, Mme Magdalena Duarte et M. William José Ledesma Acuña, membres du comité directeur du syndicat de l'Hôpital des urgences médicales, et le licenciement de trois autres dirigeants syndicaux, Mme Blanca Alvarez et MM. Darío Matiauda et Rigoberto Gómez; v) le refus de la direction administrative générale d'accepter les demandes de précompte syndical du Syndicat des travailleurs du ministère de la Santé publique et du Bien-être social (SITRAMIS).
- 796. En ce qui concerne la mutation de Mme Magdalena Duarte et de M. William José Ledesma Acuña, dirigeants syndicaux membres du comité directeur du syndicat de l'Hôpital des urgences médicales, le comité note que le gouvernement fournit les indications suivantes: 1) en 1999, le ministère de la Santé avait un budget très restreint pour les recrutements, ce qui l'a obligé à redéployer les ressources humaines, et les mutations indiquées n'ont pas été les seules; 2) du fait de l'ouverture du Centre des urgences médicales Prof. Dr. Luis María Argaña, l'ancien Hôpital des premiers secours a dû déménager, et ce changement a entraîné une redistribution des ressources humaines en vue de leur utilisation optimale; 3) M. William José Ledesma Acuña a été transféré seulement temporairement à l'hôpital du district de Lambaré afin de s'y occuper de la perception des dettes (fonctions qu'il exerçait déjà), car il était impossible de recruter du personnel; 4) Mme Magdalena Duarte a été transférée à l'hôpital de santé materno-infantile car cette institution manquait de ressources humaines pour les soins infirmiers; cette mutation tenait compte du fait que l'hôpital en question se situe à proximité du domicile de Mme Duarte. Tout en prenant note des problèmes budgétaires qui ont pu obliger le ministère de la Santé à effectuer des mutations afin de pourvoir des postes vacants, le comité ne peut manquer d'observer que les travailleurs en question exerçaient des fonctions syndicales et que leur mutation a pu avoir un effet sur l'exercice de leurs activités syndicales. Dans ces conditions, il demande au gouvernement de garantir qu'à l'avenir, quand, pour des motifs budgétaires ou économiques, des mutations seront prévues dans le secteur public, soit prise en compte la situation des dirigeants syndicaux en évitant de porter préjudice à l'exercice de leurs activités syndicales, et que soient prévues des garanties pour éviter de possibles mesures de discrimination à leur encontre.
- 797. En ce qui concerne le licenciement de trois autres dirigeants syndicaux, Mme Blanca Alvarez et MM. Darío Matiauda et Rigoberto Gómez, le comité note que le gouvernement donne les indications suivantes: 1) M. Matiauda, fonctionnaire du ministère de la Santé publique et du Bien-être social, a été démis de ses fonctions à la suite d'une enquête, puis réintégré par une décision du 7 juillet 1999; 2) Mme Blanca Alvarez, fonctionnaire du ministère des Relations extérieures, a fait l'objet d'une enquête administrative qui a conclu qu'elle s'était rendue coupable de fautes graves - par exemple, usage non autorisé de locaux et biens du ministère, manque d'assiduité, manque de respect et insulte à des supérieurs hiérarchiques -, raison pour laquelle elle a été démise de ses fonctions par décision no 12550; l'autorité judiciaire a modifié cette décision en imposant à cette fonctionnaire une suspension de 90 jours et, actuellement, le dossier se trouve entre les mains du Procureur général de la République; 3) M. Rigoberto Gómez, fonctionnaire du ministère de la Santé publique et du Bien-être social, a fait l'objet d'une enquête administrative et a été démis de ses fonctions pour s'être rendu coupable de la faute prévue à l'article 52, paragraphe 10, de la loi 200/70 (non-respect des obligations). Le comité demande au gouvernement: 1) de le tenir informé du résultat du recours dont a été saisi le Procureur général de la République à propos de la mutation de Mme Blanca Alvarez; 2) de vérifier, dans les conclusions de l'enquête administrative indiquant que M. Rigoberto Gómez n'a pas respecté ses obligations, les faits qui sont reprochés à ce dernier et, au cas où ces faits seraient liés à l'exercice de ses activités syndicales, de prendre des mesures pour qu'il soit réintégré à son poste de travail.
- 798. En ce qui concerne le refus du ministère de la Santé publique et du Bien-être social d'accepter la demande de l'organisation syndicale que soit précompté le paiement de l'assurance médicale, le comité note que le gouvernement indique que cette question a été soumise à l'autorité judiciaire, laquelle a statué que la cotisation d'assurance médicale pouvait être versée directement aux travailleurs de l'Etat.
- 799. En ce qui concerne la menace de dissoudre l'organisation syndicale CESITEP et de licencier son président, M. Barreto Medina (auquel son traitement n'aurait pas été payé depuis décembre 1998), le comité note que le gouvernement réfute catégoriquement toutes ces allégations et souligne que M. Barreto Medina n'est pas venu percevoir son traitement des mois de mars, septembre, octobre et décembre 1998 et des mois de mars, avril et mai 1999, mais qu'il a bien perçu en janvier et février 1999. Dans ces conditions, vu que les versions de l'organisation plaignante et du gouvernement sont contradictoires et que la plainte manque de précision, le comité demande au gouvernement et aux organisations plaignantes de communiquer un complément d'informations à ce sujet.
- 800. En ce qui concerne l'allégation relative au refus de la direction générale administrative d'accepter les demandes de précompte de la cotisation syndicale du Syndicat des travailleurs du ministère de la Santé publique et du Bien-être social (SITRAMIS), le comité note que le gouvernement nie ces allégations et affirme que le ministère de la Santé publique et du Bien-être social a procédé au précompte des cotisations syndicales des membres du SITRAMIS, que les représentants syndicaux ont perçu ces cotisations et que le précompte n'a jamais été suspendu.
- 801. En ce qui concerne l'allégation relative au non-respect par le ministère de la Santé publique et du Bien-être social de différentes obligations prévues dans une convention collective et dans un acte de compromis, le comité note que le gouvernement affirme que ces instruments ont été respectés (par exemple, il indique que le reclassement des fonctionnaires a commencé de manière progressive et que le montant de l'assurance médicale a été versé). A ce sujet, le comité souligne de manière générale l'importance qu'il attache au principe selon lequel "les accords doivent être obligatoires pour les parties" [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 818] et il demande au gouvernement de veiller au respect des obligations figurant dans les instruments en question.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 802. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande au gouvernement d'assurer qu'à l'avenir, quand, pour des motifs budgétaires ou économiques, il faudra procéder à des mutations de personnel dans le secteur public, on prenne en compte la situation des dirigeants syndicaux en évitant de porter préjudice à l'exercice de leurs activités syndicales, et que des garanties soient prévues pour éviter d'éventuelles mesures de discrimination à leur encontre.
- b) Le comité demande au gouvernement: 1) de le tenir informé du résultat du recours dont a été saisi le Procureur général de la République à propos de la mutation de Mme Blanca Alvarez; 2) de vérifier, dans les conclusions de l'enquête administrative indiquant que M. Rigoberto Gómez n'a pas respecté ses obligations, les faits qui sont reprochés à ce dernier et, au cas où ces faits seraient liés à l'exercice de ses activités syndicales, de prendre des mesures pour qu'il soit réintégré à son poste de travail. En outre, le comité invite le gouvernement et les organisations plaignantes à fournir un complément d'informations sur les allégations relatives aux menaces de dissolution du syndicat CESITEP et de licenciement de son président, M. Barreto Medina.
- c) S'agissant de l'allégation de non-respect par le ministère de la Santé publique et du Bien-être social de diverses obligations énoncées dans une convention collective et dans un texte de compromis, le comité souligne de manière générale l'importance qui s'attache au principe selon lequel les accords doivent être obligatoires pour les parties et il demande au gouvernement de veiller au respect des obligations énoncées dans les instruments en question.