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- 466. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa session de juin 2004. [Voir 334e rapport, paragr. 581 à 599.] L’organisation plaignante, l’UNSITRAGUA, avait transmis de nouvelles allégations par des communications des 15 et 26 avril 2004. Elle a fait parvenir des commentaires et informations sur les observations du gouvernement par une communication du 26 juillet 2004, et de nouvelles allégations par des communications datées du 28 juillet 2004 et du 24 janvier 2005. Le gouvernement a transmis ses observations dans des communications en date du 4 novembre 2004 et du 19 janvier 2005.
- 467. Le Guatemala a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas - 468. A sa session de juin 2004, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 334e rapport, paragr. 599]:
- a) Concernant l’allégation de licenciement sans cause de 47 employés de l’entreprise Carrocerías Rosmo SA, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation.
- b) Concernant l’allégation relative à l’Unité d’action syndicale et populaire (UASP), le comité demande au gouvernement d’adopter, dans le cadre de la révision des dispositions réglementaires sur la constitution des organes tripartites, et particulièrement de la Commission tripartite des affaires internationales du travail, et après consultation approfondie de la totalité des organisations syndicales, les mesures nécessaires pour garantir la désignation adéquate des organisations les plus représentatives, à partir de critères objectifs, et pour éviter que soit reconnue toute représentativité syndicale à des organisations qui ne le sont pas, et de le tenir informé à cet égard.
- c) Le comité demande au gouvernement d’envoyer sans délai ses commentaires sur les allégations concernant la Compañía Agrícola Industrial Ingenio Palo Gordo SA (licenciement de 50 travailleurs) et l’entreprise portuaire Quetzal (licenciement de quatre travailleurs).
- d) Le comité demande au gouvernement de lui envoyer ses observations sur les nouvelles allégations soumises par l’organisation plaignante dans ses dernières communications des 15 et 26 avril 2004.
- e) Le comité demande notamment au gouvernement de solliciter des informations auprès des organisations d’employeurs concernées, afin de pouvoir disposer de leurs vues et de celles de l’entreprise en cause sur les questions en instance.
B. Nouvelles allégations de l’organisation plaignante
B. Nouvelles allégations de l’organisation plaignante - 469. Dans sa communication du 15 avril 2004, l’organisation plaignante réaffirme l’illégitimité de la composition de la Commission tripartite des affaires internationales du travail, dont fait partie, entre autres représentants des travailleurs, l’UASP (Unité d’action syndicale et populaire), association civile sans but lucratif créée en février 2002. L’UNSITRAGUA a été exclue de cette commission car, si elle satisfait aux critères de légitimité (légitimité que lui confèrent ses organisations membres et 19 années de lutte incessante) et de représentativité, elle ne satisfait pas au critère de légalité, du fait qu’elle n’est pas enregistrée comme organisation syndicale. Comme elle a déjà eu l’occasion de le signaler au BIT, elle n’a pas pu être enregistrée parce que la législation du pays impose une structure verticale qui ne correspond ni qualitativement ni quantitativement à la structure horizontale dans le cadre de laquelle elle exerce ses activités. L’article 3 du décret gouvernemental no 27-2004, publié au Journal officiel du 13 janvier 2004, substitue aux principes de légitimité et de représentativité celui de légalité, ce qui exclut les organisations qui sont légitimes et représentatives mais ne satisfont pas au critère restrictif de légalité, restriction à laquelle, historiquement, n’était pas soumise la liberté syndicale. Le décret est encore plus restrictif puisqu’il limite la possibilité pour de telles organisations de se porter candidates aux fédérations syndicales légalement enregistrées et actives. En adoptant cette disposition contraire à la convention no 144 sur les consultations tripartites et à la convention no 87, le gouvernement a fait fi des protestations qui ont été émises ainsi que de la proposition qui a été présentée par l’UNSITRAGUA au ministère du Travail et de la Prévoyance sociale. Cette proposition visant à modifier le libellé du décret a été rejetée par le gouvernement.
- 470. Dans sa communication du 26 avril 2004, l’organisation plaignante affirme que les décisions judiciaires ordonnant la réintégration de 29 travailleurs syndiqués de l’entreprise Golan SA n’ont pas été exécutées. La société Golan est une entreprise privée de sécurité établie conformément à la législation guatémaltèque. Le licenciement des 29 travailleurs qui étaient en train de mettre sur pied un syndicat (dont les membres du comité exécutif et du conseil consultatif provisoires) est intervenu juste après que l’entreprise eut été informée de la création de ce syndicat. Les travailleurs ont saisi la justice afin d’obtenir leur réintégration et les jugements qui ont été rendus leur ont été favorables, aussi bien en première instance que lors des recours successifs introduits par l’employeur (appel auprès de la deuxième chambre de la Cour d’appel du travail et de la prévoyance sociale; recours en amparo auprès de la Cour suprême de justice; recours auprès de la Cour constitutionnelle qui a confirmé le jugement rejetant le recours en amparo). Les 14 janvier et 12 février 2004 (respectivement 27 et 28 mois après les licenciements), les travailleurs, accompagnés de fonctionnaires du tribunal, se sont présentés dans les locaux de l’entreprise en vue de leur réintégration. L’employeur a refusé d’exécuter les décisions de justice. Cela tient principalement au fait que la législation ne prévoit pas de sanction appropriée en pareil cas, l’employeur n’étant passible que d’une modeste amende. Pour finir, l’organisation signale que, à la date du dépôt de la plainte, plus de 40 mois s’étaient déjà écoulés sans que les travailleurs aient été réintégrés à leurs postes de travail malgré l’existence d’une décision de justice en ce sens; elle rappelle, comme le Comité de la liberté syndicale l’a signalé à de nombreuses reprises, qu’un retard excessif dans l’administration de la justice aboutit à un déni de justice.
- 471. Dans sa communication du 28 juillet 2004, l’organisation plaignante indique que l’existence du Syndicat des travailleurs et travailleuses de l’enseignement du Guatemala (SITRAMAGUA), en cours de création, a été remise en question par le décret gouvernemental no 121-2004 qui modifie le type de contrat de 13 000 enseignants du niveau préprimaire et primaire qui, au lieu d’être intégrés dans le «personnel permanent» (ligne budgétaire 011), ont été recrutés en qualité de «personnel surnuméraire», avec des contrats renouvelables annuellement. Le syndicat en cours de création avait réuni plus de 3 000 adhésions mais sa création s’est interrompue parce que les travailleurs craignaient d’être licenciés ou de ne pas obtenir le renouvellement de leurs contrats; dans ces conditions, il n’a même pas été possible d’élire un comité exécutif définitif.
C. Nouvelle réponse du gouvernement
C. Nouvelle réponse du gouvernement - 472. Dans sa communication du 4 novembre 2004, le gouvernement indique que la nouvelle Commission tripartite des affaires internationales du travail a été créée par le décret gouvernemental no 285-2004 du 16 septembre 2004, approuvé par consensus tripartite. Toutes les centrales syndicales (25) ont été invitées à proposer des candidats pour la désignation des représentants des travailleurs dans cette commission. La désignation a été opérée conformément à la convention no 144 sur les consultations tripartites, et le degré de représentativité, mesuré sur la base des registres de la Direction générale du travail, a été pris en compte. La composition de la commission pour la période allant d’octobre 2004 à octobre 2006 a été arrêtée le 18 octobre 2004. Pour les travailleurs, elle est la suivante: 1) titulaires: Rigoberto Dueñas Morales (Centrale générale des travailleurs du Guatemala – CGTG), Reynaldo Federico Gonzáles (Fédération syndicale des employés de banques et assurances – FESEBS), Néstor Estuardo de Léon Mazariegos (Fédération nationale des syndicats de travailleurs de l’Etat du Guatemala – FENASTEG), Angélico Sofoifa Barrios (UASP); 2) suppléants: Everildo Revolorio Torres (Confédération d’union syndicale du Guatemala (CUSG), Manuel Mejía Juárez (Fédération syndicale des travailleurs de l’alimentation et des activités apparentées – FESTRAS) et Carlos Enrique Díaz López (UNSITRAGUA).
- 473. Dans sa communication du 15 janvier 2005, le gouvernement a communiqué des informations émanant de l’entreprise Carrocerías Rosmo SA qui indiquent que c’est en raison de la situation économique critique de l’entreprise et afin d’éviter la fermeture d’activités qu’il a été décidé de réduire le nombre d’employés. Un accord a pu être trouvé avec les travailleurs qui prévoit le paiement fractionné des indemnisations qui leur sont dues, tel que cela figure au procès-verbal. L’appartenance ou non à un syndicat n’a pas été prise en considération. S’agissant des allégations relatives à la Compañía Agricola Industrial Ingenio Palo Gordo SA, l’entreprise indique qu’il a été décidé de ne plus embaucher de travailleurs temporaires, dans la mesure où elle n’avait pas besoin de leurs services. Cela se produit au début de chaque récolte. Hormis les cadres (très peu nombreux), tous les travailleurs sont syndiqués.
D. Conclusions du comité
D. Conclusions du comité - 474. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle la composition de la Commission tripartite des affaires internationales du travail est illégitime parce qu’elle inclut, parmi les représentants des travailleurs, une association civile sans but lucratif dénommée Unité d’action syndicale et populaire (UASP) et exclut l’UNSITRAGUA au motif que, n’étant pas inscrite, elle ne satisfait pas au critère de légalité, le comité prend note de l’adoption, le 16 septembre 2004, du décret gouvernemental no 285-2004 qui déroge au décret gouvernemental no 27-2004 mis en cause par l’organisation plaignante et retient comme critère de sélection pour faire partie de la commission le degré de représentativité. Le comité note aussi que, selon le gouvernement, toutes les centrales syndicales (25) ont été invitées à proposer des candidats pour la nouvelle composition de la commission, et que la désignation s’est faite conformément à la convention no 144 sur les consultations tripartites, compte tenu du degré de représentativité mesuré sur la base des registres de la Direction générale du travail. Le gouvernement signale en outre que la composition de la commission pour la période allant d’octobre 2004 à octobre 2006 a été arrêtée le 18 octobre 2004 et que, parmi les représentants des travailleurs, figurent Angélico Sofoifa Barrios, de l’UASP, comme titulaire, et Carlos Enrique Díaz López, de l’UNSITRAGUA, comme suppléant. Le comité note avec intérêt que l’UNSITRAGUA a pu présenter des candidats à la Commission tripartite des affaires internationales du travail et qu’elle n’en a pas été exclue, et il demande au gouvernement de lui envoyer toute documentation permettant d’établir que l’UASP est bien une organisation syndicale (statuts, organisations affiliées, représentativité, activités, etc.).
- 475. En ce qui concerne l’allégation de licenciement injustifié de 47 travailleurs de l’entreprise Carrocerías Rosmo SA, le comité prend note de l’accord souscrit par les travailleurs en vertu duquel ils ont accepté leur licenciement et le paiement fractionné de leurs indemnités, à la suite des difficultés économiques de l’entreprise. Le comité note aussi que, selon l’entreprise, il n’a pas été tenu compte de l’appartenance ou non à un syndicat.
- 476. En ce qui concerne les allégations en suspens relatives à la Compañía Agricola Industrial Ingenio Palo Gordo SA (licenciement de 50 travailleurs), le comité note que, selon l’entreprise, 1) il a été décidé de ne plus embaucher de travailleurs temporaires, dans la mesure où elle n’avait pas besoin de leurs services – cela se produit au début de chaque récolte – et que 2) hormis les cadres (très peu nombreux), tous les travailleurs de l’entreprise sont syndiqués. Le comité prie le gouvernement de lui communiquer toute décision de justice concernant cette affaire. Le comité observe que le gouvernement n’a pas fait connaître ses observations sur les allégations concernant le licenciement de quatre travailleurs de l’entreprise portuaire Quetzal, l’inexécution de décisions de justice ordonnant la réintégration de 29 travailleurs syndiqués de l’entreprise Golan SA, et la constitution du Syndicat des travailleurs et travailleuses de l’enseignement du Guatemala (SITRAMAGUA). Il prie le gouvernement de lui faire parvenir ses commentaires sans délai.
- 477. En ce qui concerne la déclaration de l’organisation plaignante selon laquelle la non-exécution des décisions judiciaires tient au fait qu’en de tels cas l’employeur ne se voit imposer qu’une faible amende, le comité rappelle que l’existence de normes législatives interdisant les actes de discrimination antisyndicale est insuffisante si celles ci ne s’accompagnent pas de procédures efficaces qui assurent leur application dans la pratique. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 742.] Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de la législation et de la pratique à cet égard.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 478. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) En ce qui concerne l’illégitimité alléguée de la composition de la Commission tripartite des affaires internationales du travail, le comité demande au gouvernement de lui envoyer toute documentation permettant d’établir que l’UASP est bien une organisation syndicale (statuts, organisations affiliées, représentativité, activités, etc.).
- b) Le comité demande au gouvernement de lui communiquer sans tarder ses observations sur les allégations concernant l’entreprise portuaire Quetzal (licenciement de quatre travailleurs), l’inexécution de décisions de justice ordonnant la réintégration de 29 travailleurs syndiqués de l’entreprise Golan SA et le processus de formation du Syndicat des travailleurs et travailleuses de l’enseignement du Guatemala (SITRAMAGUA).
- c) Le comité demande au gouvernement de lui communiquer toute décision de justice concernant le licenciement de 50 travailleurs de la Compañía Agricola Industrial Ingenio Palo Gordo SA.
- d) Le comité demande au gouvernement de lui adresser ses observations concernant la communication de l’UNSITRAGUA en date du 24 janvier 2005.
- e) En ce qui concerne la déclaration de l’organisation plaignante selon laquelle la non-exécution des décisions judiciaires tient au fait qu’en de tels cas l’employeur ne se voit imposer qu’une faible amende, le comité souligne que l’existence de normes législatives interdisant les actes de discrimination antisyndicale est insuffisante si celles-ci ne s’accompagnent pas de procédures efficaces qui assurent leur application dans la pratique. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de la législation et de la pratique à cet égard.
- f) Le comité demande au gouvernement de solliciter des informations auprès des organisations d’employeurs concernées, afin de pouvoir disposer de leurs vues et de celles des entreprises n’ayant pas encore donné d’informations sur les questions en instance.